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Intervention de Françoise Olivier-Coupeau

Réunion du 1er juillet 2009 à 11h00
Commission des finances, de l’économie générale et du contrôle budgétaire

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaFrançoise Olivier-Coupeau, rapporteure :

Il n'y a aucune raison pour que coût du sauvetage d'un navire – pas celui d'un otage – ne soit pas facturé au propriétaire ou à l'assureur du bâtiment en question. Outre le dédommagement que le ministère de la Défense recevrait, on peut penser que la menace de cette sanction financière aurait une vertu pédagogique et pourrait conduire armateurs et plaisanciers à mieux respecter les mises en garde des autorités françaises.

Nous recommandons donc que toute intervention militaire aboutissant à la récupération d'un navire mis en difficulté par un acte de piraterie fasse l'objet d'une facturation au propriétaire ou à son assureur.

Le budget contraint de la mission Défense ne permet pas toujours aux forces de disposer de tout le matériel dont elles peuvent avoir besoin. Or, les opérations permettent parfois de réaliser des prises qui pourraient être réutilisées par les armées. C'est le cas des embarcations rapides utilisées par les narcotrafiquants aux Antilles et en Méditerranée – ces embarcations, appelées go fast, sont équipées de quatre à cinq moteurs de 1 000 chevaux chacun.

Nous proposons donc que la législation – code des douanes ou code des domaines – soit modifiée pour permettre aux armées de réutiliser pour leur propre compte le matériel pris lors d'opération, en particulier les embarcations rapides saisies lors d'arrestations de narcotrafiquants, ou pour l'accomplissement de leur mission ou au moins comme réserve de pièces de rechange. À l'heure actuelle, le matériel saisi pourrit dans des hangars.

Nous considérons enfin que le Parlement doit s'intéresser à l'externalisation. La volonté de recentrer les forces sur leur coeur de métier a conduit l'état-major des armées à développer un vaste projet d'externalisation. Cette externalisation n'est réalisable que sur des théâtres d'opération stabilisés. En effet, dans une situation potentiellement dangereuse, confier des tâches à des sociétés privées reviendrait à exposer des civils aux dangers de la guerre et constituerait un poids pour les militaires qui devraient, en plus de leur mission, assurer la protection de ces civils. Le recours à des entreprises privées est très utile dans des domaines qui ne relèvent pas du coeur de métier des armées comme la construction ou l'agrandissement de bases, la fourniture d'eau, de groupes électrogènes ou de produits alimentaires.

Toutefois, la répartition des marchés accordés aux entreprises peut créer un risque politique. Ainsi, selon les statistiques du ministère de la Défense, 96 % des entreprises travaillant pour l'Eufor au Tchad sont des multinationales, souvent européennes ; seuls 4 % des marchés sont donc récupérés par les entreprises tchadiennes. Il n'est pas rare de voir les autorités locales manifester leur insatisfaction devant la faible place faite aux entreprises de leur pays. C'est une des raisons pour lesquelles les militaires français tentent, au Tchad comme en Afghanistan, de favoriser les entreprises locales.

D'autre part, compte tenu des rémunérations versées par les forces françaises, il est fréquent qu'un interprète ou un personnel de restauration soit mieux rémunéré qu'un policier ou un professeur. Le risque existe donc de voir des professionnels particulièrement qualifiés – des universitaires ou des chirurgiens, par exemple – abandonner leur métier et priver leur pays de leurs compétences parce que l'interprétation est plus rémunératrice.

Autre inconvénient : l'externalisation de services se traduit par la passation de contrats qui ne sont pas toujours d'une grande souplesse. Ainsi, l'une des raisons du coût élevé des opérations menées au Tchad tient à ce que les contrats passés avec le secteur privé pour la construction et le fonctionnement du « camp des étoiles », à Abéché, l'ont été pour 2 000 soldats. Or, au cours de l'année 2008, ce camp a plutôt hébergé 1 000 à 1 500 personnes en moyenne, mais les prestataires ont argué de leurs investissements pour facturer un montant de prestations correspondant à 2 000 occupants. Si ce camp avait été géré avec des moyens uniquement militaires, l'adaptation aurait été certainement plus facile.

Enfin, il arrive que dans certaines régions déshéritées, l'économat des armées ne trouve pas de prestataire de services où qu'il en trouve un seul. Dans ce cas, le bénéfice financier de l'externalisation est loin d'être évident.

Pour toutes ces raisons, nous appelons l'attention de la commission des Finances sur l'utilité de s'intéresser de plus près à l'externalisation, menée à grands pas par le ministère de la Défense, en créant éventuellement une mission d'évaluation et de contrôle sur le coût et les bénéfices attendus de l'externalisation au sein de ce ministère.

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