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Intervention de Bernard Bajolet

Réunion du 31 mars 2009 à 16h30
Commission des affaires étrangères

Bernard Bajolet, coordonnateur du renseignement à la présidence de la République :

Monsieur le président, mesdames et messieurs les députés, je vous remercie de m'accueillir devant votre commission. Je présenterai brièvement mes fonctions et la façon dont la cellule que je dirige a commencé à fonctionner depuis le mois de juillet dernier, puis je répondrai vos questions.

Comme vous le savez, le poste de coordonnateur du renseignement a été défini à la suite du Livre blanc par une lettre de mission que le Président de la République m'a adressée le 23 juillet 2008. Celle-ci préfigure un décret, nécessairement plus concis, qui fera suite au vote de la loi de programmation militaire, laquelle comporte un alinéa créant le Conseil de défense et de sécurité nationale et le Conseil national du renseignement, qui en est une des formations spécialisées. C'est cette disposition qui assurera un pont entre la loi et les recommandations du Livre blanc.

Mon équipe, légère – une quinzaine de personnes, dont quatre cadres – a commencé à fonctionner dès l'été dernier. Il s'agit d'un petit état-major, car il n'est pas question pour nous de faire les choses à la place des services, mais de les faire faire, de donner les impulsions et de mettre en oeuvre les orientations décidées par le Conseil national du renseignement.

Notre fonctionnement s'appuie sur le Secrétariat général de la défense nationale – le SGDN –, futur Secrétariat général de la défense et de la sécurité nationale, qui assurera le secrétariat du Conseil national du renseignement et, d'ores et déjà, assure celui des réunions que je tiens et héberge des groupes thématiques ou géographiques du renseignement, que j'évoquerai rapidement tout à l'heure.

Cette organisation reflète bien l'articulation des pouvoirs publics en France, car ce petit état-major, d'une dimension comparable à celle de l'état-major particulier du Président de la République et légèrement moins importante que celle de la cellule diplomatique de la Présidence de la République, fonctionne en étroite collaboration avec le SGDN, qui relève des services du Premier ministre avec une compétence interministérielle.

Dans la pratique, mes fonctions comportent aussi celle d'animer les services, que je réunis périodiquement pour des réunions plus restreintes que par le passé. Sont ainsi organisées, au moins une fois par mois, des réunions auxquelles participent, en présence du Secrétaire général de la défense nationale, les directeurs des six services qui relèvent des ministres chargés de la sécurité, de la défense, de l'économie, du budget : la Direction générale de la sécurité extérieure (DGSE), la Direction de la protection et de la sécurité de la défense (DPSD) et la Direction du renseignement militaire (DRM) pour la défense, la Direction centrale du renseignement intérieur (DCRI), pour le ministère de l'intérieur, la DNRED, Direction nationale du renseignement et des enquêtes douanières (DNRED), qui dépend de la Direction générale des douanes, et la cellule de traitement du renseignement et action contre les circuits financiers clandestins (Tracfin), qui relève du ministre du budget. Diverses réunions à géométrie variable, ainsi que de nombreuses réunions bilatérales, sont également organisées.

Ces services relevant de tutelles définies différemment par la loi, la pratique a instauré des différences dans la façon dont s'exercent ces tutelles. Ainsi, la DRM relève directement du chef d'état-major des armées et la DPSD, ancienne sécurité militaire, du ministre de la défense, la DCRI, qui résulte de la fusion intervenue le 1er juillet 2008 entre les Renseignements généraux et la Direction de la surveillance du territoire (DST), fait partie de la Direction générale de la police nationale et la DNRED est un service de la Direction générale des douanes et droits indirects. Il faut donc aussi travailler avec les tutelles de ces services, c'est-à-dire avec les directeurs concernés – le directeur général de la police nationale, le directeur général des douanes, le chef d'état-major des armées – et les cabinets dont relèvent ces services, pour « huiler » tous ces mécanismes.

Depuis la mise en place de la cellule, nous avons en quelque sorte fait table rase du passé et recréé des groupes géographiques ou thématiques qui succèdent aux groupes thématiques qui existaient dans le cadre de l'ancien Comité interministériel du renseignement, appelé à disparaître après la mise en place officielle du Conseil national du renseignement, et du SGDN. Ces groupes sont mis en place en fonction des besoins qui apparaissent et sont chargés de fournir des synthèses tant au Président de la République qu'au Premier ministre, ainsi qu'aux administrations utilisatrices. Ils ne regroupent d'ailleurs pas que des services, mais également, en fonction des besoins, les ministères intéressés, comme celui des affaires étrangères ou ceux de Bercy.

Nous avons en outre créé dans ce cadre du SGDN et sous le pilotage du CNR des chargés de missions temporaires, dont les missions portent sur les ressources humaines des services, le cadre budgétaire et la formation – c'est-à-dire le projet d'académie du renseignement –, aspects évoqués par le Livre blanc.

La cellule suit l'évolution du cadre législatif. Nous sommes ainsi concernés par les dispositions du projet de loi de programmation militaire relatives à la protection du secret de la défense nationale, actuellement soumises à votre examen. Elle est également chargée de préparer les orientations nationales du renseignement. Pour la première fois, en effet, les services devront exercer leur mission dans le cadre d'orientations approuvées par le Conseil national du renseignement, lequel est présidé par le Président de la République et comprend le Premier ministre, ainsi que les ministres de la défense, de l'intérieur, des affaires étrangères, de l'économie et du budget.

Les priorités absolues de nos services restent la lutte contre le terrorisme et la prolifération des armes de destruction massive, ainsi que le renseignement d'intérêt militaire là où nos troupes sont engagées.

En matière de lutte contre le terrorisme, l'un de nos axes de travail a consisté à favoriser le rapprochement entre la DGSE et la DCRI sur ce thème, pour lequel il n'est pas toujours facile de tracer une frontière entre renseignement intérieur et extérieur. Parmi nos autres priorités, je citerai les questions économiques, en particulier la protection de notre patrimoine économique contre des tentatives d'ingérence ou de prise de contrôle de la part d'États ou de groupes étrangers.

Il s'agit, je le répète, non de faire, mais de faire faire, d'assurer la bonne circulation du renseignement au sein de l'État et de développer la mutualisation entre les services. Il s'agit aussi de veiller au contrôle de l'autorité politique sur les services.

Au-delà, il s'agit également de travailler à une meilleure image des services de renseignement. Le but, qui peut paraître ambitieux, est en quelque sorte de réconcilier le renseignement avec la Nation en le mettant au service de celle-ci.

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