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Intervention de Martin Hirsch

Réunion du 17 septembre 2008 à 16h45
Commission des affaires culturelles, familiales et sociales

Martin Hirsch, haut-commissaire aux solidarités actives contre la pauvret :

Si je prends la parole le premier, à rebours de l'ordre protocolaire, en accord avec M. Éric Woerth, c'est pour que soient exposés d'abord les mécanismes du revenu de solidarité active (RSA).

Le projet de loi qui vous est soumis porte deux réformes importantes. D'abord, il substitue aux minima sociaux et aux mécanismes temporaires d'aide à l'emploi un dispositif nouveau, élaboré depuis plus de mille jours : le revenu de solidarité active. En second lieu, il met en place un contrat unique d'insertion, qui était demandé par de nombreux acteurs ces dernières années, et qui a fait l'objet, lors du Grenelle de l'insertion, de discussions avec les parties concernées, collectivités territoriales, État, partenaires sociaux ou acteurs de l'insertion par l'activité économique.

Ce projet de loi a deux objectifs pour nous indissociables : favoriser le retour à l'emploi en soutenant ceux qui travaillent, et lutter contre la pauvreté. Cette réforme est fondée sur un constat : la pauvreté a cessé de reculer, et il y a autant de travailleurs pauvres que de pauvres qui ne travaillent pas. Nous devons lutter résolument et le plus efficacement possible pour enrayer cette tendance et faire diminuer le nombre de travailleurs pauvres, notamment en garantissant que tout retour au travail paie, c'est-à-dire que l'inactivité rapporte moins qu'un quart de temps, un quart de temps moins qu'un mi-temps, un mi-temps moins qu'un trois quart de temps, qui doit lui-même moins rapporter qu'un plein temps. Grâce à ce texte, on ne verra plus de travailleurs se plaindre qu'une augmentation de dix euros du revenu de leur travail s'est traduite par une perte de quarante euros d'aides.

Si cette réforme est ambitieuse – certains me l'ont reproché –, c'est que nous voulions qu'elle apporte une garantie aux allocataires de minima sociaux sans pénaliser les travailleurs qui n'en bénéficient pas. Cette réforme bénéficiera autant à ceux qui retournent à l'emploi qu'à ceux qui travaillent déjà sans parvenir à sortir de la pauvreté.

On a beaucoup parlé chiffres ces derniers jours, oubliant toutefois de mentionner qu'une famille de deux enfants qui gagne le SMIC touchera 200 euros supplémentaires par mois, de même que le parent isolé d'un enfant travaillant à mi-temps. Les 25 % d'allocataires du RMI dont le travail ne se traduit pas actuellement par un revenu supplémentaire verront leurs revenus augmenter. Le gain moyen par ménage sera un peu supérieur à cent euros par mois.

Du point de vue de l'équité, la réforme est fondamentale puisqu'à revenu du travail égal et à situation familiale équivalente, les revenus des ménages seront les mêmes.

Le revenu de solidarité active est une simplification notable en ce qu'il se substitue à cinq prestations : le revenu minimum d'insertion, l'allocation de parent isolé (API), la prime forfaitaire de retour à l'emploi, la prime de retour à l'emploi et l'intéressement temporaire pour ceux qui travaillent moins de soixante-dix huit heures. Ce système complexe sera remplacé par une prestation obéissant à une règle unique : être calculée en fonction de la situation familiale et des revenus du travail. Un travailleur qui tirera cent euros supplémentaires de son travail aura la garantie que son pouvoir d'achat augmentera de 62 euros et que son revenu d'assistance ne baissera pas de plus de trente-huit euros.

Le financement du revenu de solidarité active sera assuré par la réaffectation des crédits consacrés jusqu'ici au RMI, à l'API et à l'intéressement, à quoi s'ajoutera 1,5 milliard d'euros de crédits supplémentaires.

Cette évolution du RMI vers le RSA recueille l'adhésion de Michel Rocard lui-même, promoteur du RMI il y a vingt ans. La raison en est simple : alors que la loi créant le RMI dispose que ce revenu est destiné aux personnes dans l'incapacité de travailler, le revenu de solidarité active garantit à toute personne, qu'elle soit ou non en capacité de travailler, de disposer d'un revenu minimum et de voir ses ressources augmenter quand les revenus qu'elle tire de son travail s'accroissent. C'est là une amélioration fondamentale du mécanisme actuel.

En fondant dans un dispositif unique des minima sociaux différents, nous vous proposons de mettre fin aux mécanismes infernaux des aides sous condition de statut et aux situations absurdes qu'ils génèrent. Ainsi, une femme bénéficiant de l'API se voit exclue du bénéfice de certaines prestations en raison de son statut. Le RSA n'est pas un statut : c'est une prestation sociale qui complète les revenus du travail ; elle est calculée en fonction des ressources, afin que le retour à l'emploi ne se traduise pas par une baisse du revenu. Ainsi le passage d'un mi-temps à un temps plein se traduira par un revenu supplémentaire de 394 euros par mois.

Si j'insiste sur ce point, c'est qu'aux yeux de certains ce dispositif aurait le tort de soutenir les salariés à temps partiel.

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