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Intervention de Jacques Remiller

Réunion du 18 septembre 2007 à 16h00
Commission des affaires étrangères

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaJacques Remiller, rapporteur :

a précisé que le 1er août dernier, le Sénat avait adopté un projet de loi autorisant la ratification de l'acte constitutif de l'Organisation des Nations unies pour l'alimentation et l'agriculture (ONUAA). Plus connue sous son acronyme anglais « FAO » (Food and Agriculture Organisation), cette organisation a été créée en 1945, alors que la communauté internationale tentait de mettre en place un mécanisme de préservation de la paix et de la sécurité collective, en instituant le système des Nations unies. L'accord portant création de cette institution spécialisée des Nations unies a été signé par la France à Québec, le 16 octobre 1945. Mais, alors même que notre pays figure parmi les membres fondateurs de cette organisation, l'acte constitutif qui l'institue n'a jamais été soumis au Parlement. Le présent projet de loi vise à réparer cet oubli.

Le Rapporteur a considéré qu'à l'heure où une refonte de l'architecture globale des Nations unies était en cours et où le contexte des interventions de l'ONUAA avait radicalement changé, l'examen de ce projet de loi offrait l'occasion d'évoquer le rôle de cette organisation et, en particulier, ses perspectives d'évolution. L'ONUAA a été créée dans un contexte d'après guerre, marqué par une pénurie agricole généralisée. Le mandat confié à l'organisation est donc d'atteindre la sécurité alimentaire pour tous. Concrètement, l'ONUAA est chargée de lancer ou de soutenir toutes initiatives visant à améliorer les niveaux de nutrition, la productivité agricole ainsi que la qualité de vie des populations rurales. Malheureusement, ce mandat reste plus que jamais d'actualité puisqu'on estime aujourd'hui à 854 millions le nombre de personnes qui souffrent de sous-alimentation dans le monde. L'Acte constitutif de l'ONUAA précise les cinq fonctions principales qui incombent à l'organisation, à savoir : la collecte, l'analyse et la diffusion d'informations relatives à l'agriculture, l'alimentation et la nutrition dans le monde ; l'organisation de la concertation entre les membres et la négociation de conventions relatives à l'alimentation ; l'appui à la décision nationale ou multilatérale, en matière agricole ; l'assistance technique pour la mise en oeuvre de programmes de coopération visant à éradiquer durablement la faim ; et, enfin, l'encouragement à la recherche ainsi que l'amélioration de l'enseignement et la vulgarisation des connaissances en matière de nutrition, d'alimentation et d'agriculture.

M. Jacques Remiller a souligné que l'ONUAA avait notamment pour rôle d'aider les pays en développement et les pays en transition à moderniser et à améliorer leurs pratiques agricoles, forestières et halieutiques. Elle met au service de ses pays membres son expérience pour l'élaboration de politiques agricoles, le soutien à la planification, la mise au point de législations adaptées ainsi que la création de stratégies nationales de développement rural. Dans le cadre de son mandat, l'ONUAA a développé un certain nombre d'initiatives d'ordre normatif, mais également opérationnel, en mettant en oeuvre des actions de terrain en faveur du développement durable :

• L'activité normative de l'organisation est particulièrement importante, notamment par le biais des accords internationaux qui y sont négociés. Parmi les initiatives marquantes, figure la création du « Codex Alimentarius » qui, conjointement avec l'Organisation mondiale de la santé (OMS), définit des normes alimentaires internationales. Par ailleurs, l'organisation a accueilli, en 1996, 186 chefs d'Etat et de Gouvernement au Sommet mondial de l'alimentation, afin d'évoquer les moyens permettant d'éliminer la faim dans le monde. Au cours de cette rencontre, les participants se sont engagés à réduire de moitié le nombre de personnes sous-alimentées d'ici 2015, démarche qui participe aujourd'hui à la réalisation des Objectifs du Millénaire pour le Développement (ODM).

• L'ONUAA dispose, par ailleurs, d'un dispositif d'intervention de terrain, qui s'appuie sur des représentations locales et régionales, et met en oeuvre des projets de coopération technique. Dans le cadre de ces interventions, l'organisation a notamment lancé le Programme spécial pour la sécurité alimentaire, qui concerne les pays à faible revenu et à déficit vivrier.

Le rapporteur a, en outre, précisé que l'ONUAA employait près de 3.600 personnes, dont 2.200 au siège et 1.400 sur le terrain. Depuis 1990, la FAO a diminué son effectif total de plus de 40%. S'agissant du budget de l'organisation, il est fixé pour deux ans et alimenté par les contributions obligatoires des pays membres. Pour l'exercice 2006-2007, il s'élève à 765,7 millions de dollars (environ 560 millions d'euros) et couvre les principales opérations techniques, la coopération et les partenariats. Les activités de l'organisation sont également financées par des contributions volontaires des Etats membres, qui alimentent des fonds fiduciaires affectés à des programmes spécifiques. La France se situe au 5ème rang des contributions obligatoires de l'ONUAA. La contribution volontaire de notre pays au budget de l'organisation a, par ailleurs, fait l'objet d'un rattrapage important au cours de ces dernières années, pour atteindre 5,8 millions d'euros en 2006. Cet effort témoigne du soutien qu'apporte la France au fonctionnement de l'ONUAA, dont la contribution à l'éradication de la faim et au développement rural dans le monde est jugée essentielle.

Enfin, le rapporteur a mis l'accent sur la crise grave que traverse actuellement l'organisation. Une évaluation externe de l'ONUAA – dont les premiers résultats viennent d'être publiés pour consultation – souligne un certain nombre d'évolutions que l'organisation a tardé à prendre en compte et qui remettent actuellement en cause la pertinence de ses interventions. En premier lieu, le secteur privé s'est imposé comme un intervenant majeur sur la scène agricole mondiale. Or, les liens que l'ONUAA entretient avec ce secteur ne sont guère développés. En second lieu, l'organisation n'est désormais plus qu'« une organisation parmi les autres ». D'autres acteurs, comme les organisations non gouvernementales, se sont mobilisés pour garantir la sécurité alimentaire dans les situations d'urgence tandis que certains organismes, comme le Programme alimentaire mondial (PAM), sont de plus en plus sollicités dans des contextes de crise. Enfin, comme le soulignent les premières conclusions de l'évaluation externe indépendante : « la FAO a beaucoup de fonctionnaires compétents, profondément dévoués à l'organisation et à sa mission, mais ils sont gênés dans leur travail par sa structure fragmentée et ses systèmes des gestion centralisés et rigides ». En outre, l'ONUAA est confrontée, depuis le début des années 90, à une diminution régulière de ses ressources financières : « sur la base des prix de 1994, les ressources totales pour un exercice biennal ont chuté de 1,282 milliard de dollars en 1994-1995 à 841 millions de dollars en 2004-2005, soit une réduction de 34%. Le budget ordinaire de l'organisation a baissé de 22% ». Ces difficultés, auxquelles s'ajoute une réflexion plus globale sur la cohérence d'ensemble du système des Nations unies, rendent aujourd'hui nécessaire une réforme de l'ONUAA. Dès 1994, des efforts ont été engagés dans ce sens, qu'il importe aujourd'hui de poursuivre et d'approfondir. L'objectif est de recentrer l'organisation sur son mandat. Dans cette perspective, son rôle en tant que centre d'excellence scientifique et technique en matière d'information et d'expertise agricoles doit être valorisé et consolidé. Dans le même temps, l'organisation devrait transférer progressivement la mise en oeuvre de projets de développement à d'autres opérateurs publics ou privés, dont l'efficacité et la compétence sont avérées, et limiter son intervention aux secteurs où elle peut démontrer un avantage comparatif. La réforme du système des Nations unies offre un cadre favorable à cette évolution que la FAO a amorcée.

C'est au regard de ces efforts et du rôle essentiel de cette organisation que le Rapporteur a recommandé aux membres de la Commission l'adoption du présent projet de loi.

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