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Intervention de Serge Barcellini

Réunion du 14 octobre 2008 à 16h00
Mission d’information sur les questions mémorielles

Serge Barcellini :

Pour comprendre l'inflation des lois mémorielles, il faut s'interroger sur leur histoire. Celle-ci comporte trois phases.

Dans une première phase, le Parlement s'est intéressé au « mort au combat ». La première loi mémorielle n'est pas celle relative au 14 juillet, mais celle de 1873 : il s'agissait de savoir quel type de tombe donner au soldat mort au combat. Elle fut votée à l'unanimité, comme le seront d'ailleurs toutes les lois mémorielles. Toutes les lois mémorielles qui suivront, jusqu'en 1914 – y compris les lois commémoratives, relatives aux cérémonies – concernent les morts au combat.

En 1915, la création par le Parlement de la mention « mort pour la France » a ouvert une deuxième phase : de 1915 à 1985, toutes les lois mémorielles – sur le 11 novembre, la journée de la déportation, le 8 mai – et toutes les cérémonies commémoratives sont liées au « mort pour la France ».

Enfin, le Parlement a créé, par la loi Badinter, en 1985, la mention « mort en déportation » pour les déportés juifs de la Shoah. À partir de cette date, il a voté toute une série de lois qui relèvent de ce « mort à cause de » : la loi Taubira, la loi sur l'Arménie, la loi Gayssot. On n'est plus dans le « mort pour ».

Il y a autant inflation interne dans les lois relevant du « mort pour » – sur l'Indochine, sur la colonisation, – qu'inflation de lois relevant du « mort à cause de » – qui conduit certains à parler de « conflit des victimes ». Dans ces conditions, le Parlement peut-il apaiser les mémoires ? La concurrence entre les deux notions rend la chose beaucoup moins aisée. Cet apaisement peut-il passer par une notion européenne ? Ce ne serait pas simple : l'Europe est actuellement sur le « mort à cause de », bien plus que sur le « mort pour ». Or le « mort à cause de » a le défaut majeur de poser le problème de l'enseignement de l'histoire, davantage que le « mort pour » : en filigrane de toutes les lois mémorielles, il y a une vision historique, mais c'est particulièrement vrai aujourd'hui parce que nous sommes dans une concurrence mémorielle.

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