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Intervention de Michel Barnier

Réunion du 16 octobre 2007 à 16h00
Commission des affaires économiques

Michel Barnier, ministre de l'agriculture et de la pêche :

a remercié M. Antoine Herth pour ses propos et a reconnu que les marges de manoeuvre pour faire face à la gestion des crises étaient inexistantes. Il s'est cependant félicité dans ce contexte de l'existence des aides directes découplées et de l'assurance récolte, qui constituent tout de même des formes de garanties pour les agriculteurs. Tous les ministres, depuis trente ans, ont été sur la défensive en matière de gestion de crises, générant d'importants reports de charges qu'il faut aujourd'hui assumer.

La gestion des aléas économiques est donc un sujet fondamental, sur lequel il faut travailler car l'alimentation ne doit en aucun cas être soumise à la spéculation mondiale sur les prix des matières premières, phénomène auquel on assiste aujourd'hui avec la hausse des cours. Des outils de stabilisation sont nécessaires, peut-être à travers des stockages de précaution, même si la Commission européenne est difficile à convaincre sur le sujet.

L'augmentation moyenne du prix des matières premières - dont le bois - a été de 10 % sur l'année, ce qui sans doute peut justifier un effort d'amélioration de la gestion et de la mobilisation de la ressource. L'ONF a fait quant à lui un très gros effort de restructuration. L'Office est aujourd'hui sollicité pour des opérations internationales, comme en Grèce après les ravages des incendies de cet été (230 000 hectares brûlés). Le problème majeur demeure cependant celui de la mobilisation de la ressource dans les forêts privées, qui nécessiterait vraisemblablement de passer d'une fiscalité très patrimoniale à une fiscalité plus économique.

S'agissant de la biomasse, le petit crédit de 50 000 euros prévu en 2007 sera maintenu, même s'il n'apparaît pas tel quel dans le projet de budget.

Le fonds national de garantie des calamités agricoles, qui ne couvre que les risques climatiques, n'est pas doté puisqu'il n'est pas possible de prévoir exactement la nature et l'intensité des crises éventuelles, mais cette imprévision pose problème. On sait que le fonds dépense en moyenne 80 millions d'euros chaque année, mais il a été doté de 600 millions en 2003 pour faire face à la sécheresse et de 100 millions en 2006. Il serait donc bon de mettre en place un fonds de provision pour risques exceptionnels.

A ce jour, 75 départements - ainsi que les départements d'outre-mer - sont concernés par les ICHN qui bénéficient au total à 101 000 agriculteurs. Pour 2008, aux 232 millions d'euros inscrits dans le projet de budget, s'ajoutent 284 millions de crédits communautaires versés dans le cadre du Fonds européen agricole pour le développement rural (FEADER), qui vont principalement aux exploitations d'élevage dans les zones de montagne et les zones défavorisées.

S'agissant du financement de la PHAE évoqué par Antoine Herth, il a en effet été possible de mobiliser une réserve de crédits disponibles au niveau communautaire afin de poursuivre le cofinancement en 2008, selon le même principe que pour l'opération réalisée en faveur du système européen de navigation par satellite, Galileo, c'est-à-dire sur la base de crédits non consommés au titre de la PAC et qui, sans cela, n'auraient pas été utilisés au niveau communautaire.

Sur la pêche, le ministre a affirmé qu'il n'avait aucune opposition de principe à une évolution des méthodes de contrôle, sous réserve du respect des règles européennes et qu'en conséquence, il conviendrait de négocier avec le commissaire européen responsable de la pêche et des affaires maritimes, M. Joe Borg.

S'agissant des biocarburants, le financement des recherches sera poursuivi.

Par ailleurs, le Gouvernement est favorable au développement des récifs artificiels.

Les crédits affectés à la modernisation des navires s'élèvent à 1,3 million et des aides à la construction sont débloquées pour l'outre-mer.

La vente de l'immeuble de l'ONIC avenue Bosquet, évoquée par M. Jean Gaubert, constitue une opération exceptionnelle qui vise seulement à réduire la dépense publique. Par ailleurs, il convient de souligner que ce bâtiment n'a pas été acheté grâce au produit de la taxe parafiscale payée par les céréaliers, mais bien antérieurement à la mise en place de cette taxe.

Dans les postes d'inspection aux frontières, 66 000 lots de produits animaux sont contrôlés chaque année et 1 lot sur 200 est rejeté ; 30 000 contrôles sont effectués sur les végétaux chaque année. Au total, 145 agents des services vétérinaires sont mobilisés ainsi que 60 agents des services phytosanitaires. Le Président de la République a demandé que les contrôles soient renforcés, ce qui participe d'ailleurs à la préférence communautaire.

Pour ce qui est de la gestion des risques, l'expérimentation de l'assurance récolte était prévue initialement pour trois ans : elle continuera avec un budget en hausse de 5 millions d'euros et un bilan sera fait en vue d'une généralisation du dispositif. De nouveaux outils seront également proposés, soit sous la forme d'une couverture individuelle des risques, comme l'assurance récolte ou la dotation pour aléas, soit par le biais de dispositifs communautaires de régulation des marchés avec l'intervention ou la constitution de stocks de précaution, mais aussi grâce une meilleure organisation des interprofessions.

Répondant à M. André Chassaigne, le ministre de l'agriculture et de la pêche a indiqué que le budget public pour l'agriculture s'élevait à 5 milliards d'euros auxquels s'ajoutaient les 8 milliards d'euros d'aides européennes au titre du premier pilier et 1 milliard d'euros pour le second. La France est donc bénéficiaire net au titre de la PAC jusqu'en 2013.

Des propositions sur le plan de modernisation des bâtiments d'élevages ont été faites pour résorber les 9 000 dossiers encore en attente : les aides ont été ajustées, la priorité pour les jeunes réaffirmée ; l'État a rajouté un financement de 23 millions d'euros par le biais de décrets d'avance et de mesures de dégel, et 23 millions d'euros de crédits communautaires ont également été débloqués.

Les conditions d'attribution de la PHAE ont été harmonisées sur le plan national, alors qu'elles étaient déclinées régionalement jusqu'à présent.

La filière ovine a bénéficié de 12 millions d'euros et 6,8 millions d'euros ont été dégagés pour la filière veaux de boucherie.

S'agissant des quotas laitiers, des réflexions sont encore nécessaires avec l'ensemble de la filière. La production est inférieure de 600 000 tonnes au quota national, qui a été augmenté de 10 %. De même, sur le plan européen, les capacités de production devraient être augmentées entre 2 % et 5 % pour faire face à la demande. Toutefois, il convient d'être vigilant : un rapport d'évaluation a été demandé à la Commission européenne afin d'examiner les conditions du marché et ne pas subir un éventuel retournement de conjoncture. En outre, si la suppression des quotas semble faire consensus, il convient néanmoins de s'interroger sur les conséquences que cette mesure pourrait avoir, notamment en termes de dépaysement des unités de transformation, les quotas étant aujourd'hui gérés par département. Or il importe aussi de préserver une implantation territorialement équilibrée.

Quoi qu'il en soit, la période est plutôt favorable en raison de la conjoncture et de l'augmentation des prix des matières premières, du lait et du bois, même si elle est défavorable au secteur de l'élevage. Selon l'INRA, il faudra en outre doubler l'offre alimentaire d'ici quarante ans pour satisfaire la demande. Parallèlement, les problèmes climatiques diminuent, voire anéantissent, les capacités de production de certains pays, comme la sécheresse en Australie, le froid puis la sécheresse en Ukraine. Les prix devraient donc rester assez élevés et l'idée fondamentale selon laquelle il faut d'abord produire pour nourrir a de l'avenir. Toutefois, si produire pour nourrir aura toujours la priorité sur les autres finalités de production, produire plus doit désormais aller de paire avec produire mieux.

S'agissant de la fièvre catarrhale ovine, un protocole sanitaire a été obtenu il y a quinze jours à la majorité qualifiée du groupe technique à Bruxelles conduisant à une période de désinsectisation des exploitations, au-delà de laquelle un test virologique pourra être effectué afin de vérifier que l'animal est sain et peut être exporté. Seul problème : ce nouveau règlement communautaire n'est pas opérationnel faute d'être encore traduit dans toutes les langues officielles de l'Union. Une fois le règlement publié, les tests pourraient peut-être être réalisés de manière collective, par groupage, ce qui permettrait de gagner encore du temps.

Le président Patrick Ollier, compte tenu de l'emploi du temps du ministre et avec l'accord de l'ensemble des membres de la commission, a proposé que les parlementaires posent leur question à M. Michel Barnier et que celui-ci y réponde par écrit.

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