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Intervention de Philippe Séguin

Réunion du 3 juin 2009 à 9h30
Commission des finances, de l’économie générale et du contrôle budgétaire

Philippe Séguin, Premier président de la Cour des comptes :

S'agissant de l'importante question des délais, il arrivera un moment où l'accompagnement de la Cour risque de susciter des questions de la part de ce qu'il est convenu d'appeler la communauté financière. Ma réponse est : aucun délai pour ce qui peut être réglé immédiatement et ce pour quoi nous avons une argumentation solide. Il n'est pas possible de surseoir pendant encore deux ou trois ans. Sinon, nous ferons comme pour la sécurité sociale : nous refuserons de certifier. Il y va de l'intérêt même de la crédibilité de l'acte de certification. Nous avons d'ailleurs rappelé notre position en exergue du rapport sur la certification.

En ce qui concerne la CADES, nous considérons qu'il s'agit de corriger une erreur. En 2006, à la demande du directeur du budget, la CADES a été classée en participation non contrôlée, afin de distinguer la dette sociale de celle de l'État et d'inciter ainsi au redressement des comptes du régime général. Dans son sillage, plusieurs entités de sécurité sociale ont fait l'objet du même classement. À nos yeux, une telle position n'est pas défendable parce qu'on voit mal vers qui d'autre que l'État ces organismes pourraient se tourner. La crise a conduit la Cour à se montrer particulièrement exigeante, mais la CADES n'est pas la seule en cause. Le transfert de 26,9 milliards d'euros de dette en 2008 a conduit à mettre en oeuvre le mécanisme de protection de ressources fiscales affectées défini par l'ordonnance de 1996 et la perspective d'un allongement de la durée d'amortissement lié à la baisse de la CSG et de la CRDS qui la financent conduira l'État à intervenir de nouveau à l'avenir. C'était pour nous une raison majeure de nous y intéresser.

En ce qui concerne l'impact budgétaire des réserves, il est très variable. Certaines, comme celle sur le système d'information comptable, n'ont pas d'incidence. Celle sur les opérateurs n'est pas chiffrable. Les réserves relatives à la CADES et aux concessions de service public sont potentiellement les plus lourdes, entre 100 et 200 milliards d'euros. La seconde doit être abordée au comité de normalisation de 2009 car l'administration est désormais d'avis de comptabiliser les concessions à l'actif du bilan. Sept réserves – les n°s 4, 5, 6, 7, 8 et 11 – représentent un total de 10 milliards d'euros.

La question la plus délicate que vous m'avez posée concerne les effets de la poursuite des allégements de recettes. En jargon financier, je dirai qu'ils sont « difficilement soutenables ». On pourra certes, une fois qu'on aura fait la part entre la dépense fiscale qui relève de l'exonération et celle qui aurait pu prendre la forme de subvention, discuter de la maîtrise de la dépense, mais il n'en reste pas moins que, même s'ils sont atteints, les objectifs fixés ne sont pas à la hauteur de l'enjeu.

La période complémentaire répondait jusqu'ici à un double besoin : d'une part, procéder à des écritures de régularisation comptables – mais cela ne justifierait pas une période aussi longue, de près de trois semaines –; d'autre part, et c'est la seule raison qui tienne, permettre au Gouvernement de dépenser des crédits ouverts dans la loi de finances rectificative de fin d'année. La Cour, avant d'arriver à cette conclusion, a beaucoup réfléchi à la question.

En premier lieu, renvoyer l'ouverture de crédits supplémentaires à une loi de finances votée dans les tout derniers mois de l'année ne nous paraît pas une pratique inéluctable. En effet, les ouvertures de crédit en loi de finances rectificative correspondent le plus souvent à des besoins connus très tôt dans l'année et, dans de nombreux cas, elles sont dues à une sous-évaluation tout à fait consciente des dotations dans la loi de finances initiale. De surcroît, l'analyse des dernières exécutions budgétaires montre que toutes les ouvertures tardives de crédit contribuent à augmenter les reports de charges sur l'exercice suivant.

En second lieu, un aménagement des calendriers respectifs de discussion et de vote de la LFR de fin d'année et de la loi de finances initiale clarifierait la répartition aujourd'hui aléatoire des ouvertures de crédit dans l'un ou l'autre des deux textes. La LFR pourrait très bien être déposée plus tôt.

En troisième lieu, si la suppression de la période complémentaire suppose la mise en place d'un système d'information budgétaire et comptable performant, à l'inverse, son maintien sera difficilement compatible avec le système d'information Chorus qui est en cours d'expérimentation. Une réflexion sur ce point gagnerait donc à être conduite.

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