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Intervention de Christian Descheemaeker

Réunion du 14 mai 2008 à 16h30
Commission des finances, de l’économie générale et du contrôle budgétaire

Christian Descheemaeker :

Le temps où la Cour des comptes s'interdisait l'emploi de tout adjectif est révolu !

Notre rapport public thématique d'avril cherche à faire le point sur les relations institutionnelles entre la SNCF et RFF, dix ans après la réforme de 1997 et à l'approche de l'échéance de l'ouverture à la concurrence du transport de voyageurs, fixée à 2010.

En 1997, l'État a voulu, d'une part, appliquer la directive européenne de 1991 en séparant le réseau ferroviaire de l'entreprise gestionnaire, d'autre part, se qualifier pour l'euro en créant une structure de défaisance pour lui transférer une partie de la dette ferroviaire. Il n'est d'ailleurs pas certain que le premier motif ait été le plus déterminant. Cela dit, pour parler brutalement, RFF n'a pas été pourvu des moyens lui permettant à la fois de rembourser la dette et de gérer le réseau. La loi de 1997 lui a donc imposé de déléguer la gestion du réseau à la SNCF.

Le montage retenu en 1997 était original pour la France. Il a sa logique mais place la SNCF et RFF dans une relation de client à fournisseur, avec des intérêts divergents, le « ménage » étant voué à s'élargir après l'ouverture à la concurrence. L'État, tuteur des deux organismes, s'est révélé incapable de résoudre les nombreux conflits qui ont opposé la SNCF à RFF depuis 1997. Il les a même accentués en imposant à RFF de viser l'équilibre comptable, inaccessible compte tenu de l'héritage d'une bonne partie de la dette ferroviaire, impossible à rembourser. Les relations entre RFF et la SNCF sont essentiellement fondées sur les péages. Ceux-ci doivent être suffisamment élevés pour que la moitié des ressources de RFF soient commerciales – condition fixée par Bruxelles pour le considérer comme une structure de défaisance – mais ne pas excéder la capacité contributive de la SNCF. Se référer à la capacité contributive de l'exploitant ferroviaire peut constituer un avantage ou un inconvénient pour ce dernier, selon qu'il gagne de l'argent ou qu'il en perd. Toujours est-il que le système n'est pas fondé sur des critères économiques, alors que la directive européenne évoquait le « coût marginal social ». Le problème est complexe mais on ne s'est pas donné les moyens de le résoudre. La période a même été caractérisée par des investissements importants, pas toujours économiquement rentables, contrairement à la règle fixée en 1997. La Cour des comptes souligne souvent ce paradoxe : financer un investissement non rentable semble moins grave pour un organisme déjà accablé de dettes et incapable de les rembourser.

Cependant, la SNCF s'est réorganisée. Elle a progressivement amélioré la productivité de sa branche infrastructures, mais à un rythme surtout dicté par des considérations sociales, correspondant au départ à la retraite des cheminots affectés à cette branche.

La Cour des comptes a émis des recommandations visant à améliorer les performances du système ferroviaire dans le cadre du système institutionnel actuel. La réforme de 1997 a eu des vertus mais il convient de ne pas rester au milieu du gué.

L'État doit avoir le courage de reprendre formellement à son compte la partie non remboursable – qualifiée de « non amortissable » – de la dette de RFF, qui peut être estimée à 12 ou 13 milliards d'euros. Cela n'aiderait certes en rien à son remboursement mais les documents comptables décriraient mieux la réalité car cette dette incombe en fait à l'État.

Je rappelle que 46 % des 30 000 kilomètres du réseau supportent 6 % du trafic seulement et que ces lignes, si elles sont maintenues, doivent être entretenues, parfois régénérées. Sur certaines d'entre elles, on en vient à ralentir la vitesse des trains pour éviter les accidents. La Cour des comptes recommande donc l'acceptation du débat sur l'avenir des lignes les moins fréquentées. Cette idée, qui figure aussi dans le rapport de M. Mariton, est toujours exprimée avec prudence par crainte de soulever des polémiques considérables.

Une recommandation pratiquement acquise tend à constituer une autorité de régulation du transport ferroviaire.

Sur le plan institutionnel, nous proposons deux solutions. La première consisterait à maintenir la distinction entre les deux entreprises mais à débarrasser RFF de sa dette non remboursable et à lui transférer les 55 000 agents de la SNCF travaillant dans le domaine des infrastructures : RFF deviendrait alors une structure de défaisance capable de rembourser et un organisme gestionnaire capable de gérer. La seconde solution consisterait à revenir sur le partage initial : RFF serait filialisé, sur le modèle allemand, ce qui permettrait de résoudre certains problèmes sociaux, mais il ne serait pas mis sous la coupe de la SNCF, compte tenu de la création d'une structure de régulation. La Cour des comptes n'a pas exprimé de préférence entre ces deux alternatives.

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