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Intervention de Michel Issindou

Réunion du 1er juillet 2009 à 18h00
Commission des affaires sociales

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaMichel Issindou :

Le ministre a eu raison de souligner le travail considérable accompli par le rapporteur. Sur le fond du texte, en revanche, nous ne faisons pas tout à fait la même analyse. Alors que le président Sarkozy avait fait de la formation professionnelle la grande affaire de son quinquennat, ce projet n'est pas à la hauteur. On peut également trouver regrettables les conditions de son examen. Certes, l'emploi est un sujet important, mais était-il nécessaire de l'examiner en juillet et de recourir à la procédure accélérée ?

Nous faisons le même constat que vous : le système de formation professionnelle est à bout de souffle, au point qu'il n'y a pas si longtemps, le sénateur Carle avait parlé à son sujet des « trois C » : complexité, cloisonnement, corporatisme. Pour autant, tout n'est pas à jeter. Des choses se sont améliorées.

En raison de la menace brandie par l'État de décider sans eux, les partenaires sociaux ont dû se mettre d'accord dans la précipitation. Pourtant, d'après les syndicats eux-mêmes, il y a une grande différence entre ce qu'ils ont signé et ce que contient le projet de loi.

La différence majeure a trait au retour de l'État dans le dispositif. Cette orientation, que le secrétaire d'État assume, n'était pas forcément justifiée ni demandée par les partenaires sociaux. Les régions avaient pourtant reçu en 2004 une compétence pleine et entière sur la formation professionnelle. Il en est de même en ce qui concerne le Fonds de sécurisation des parcours professionnels : l'État – qui semble juger que les partenaires traditionnels ne sont pas à la hauteur – interviendra d'autorité, si aucune convention cadre n'est signée.

Néanmoins, on peut enregistrer quelques avancées significatives, telles que la portabilité du droit individuel à la formation, le développement des contrats en alternance – même si, sur le terrain, on constate que le nombre de contrats tend à diminuer, sans doute en raison de la crise – ou la volonté de faire bénéficier de la formation professionnelle ceux qui en ont le plus besoin : demandeurs d'emploi, ouvriers, très petites, petites et moyennes entreprises. On ne peut qu'adhérer à de tels principes mais, reste à voir comment tout cela se traduira concrètement. La même observation vaut pour le bilan d'étape professionnel : faire le point tous les cinq ans sur sa situation professionnelle est une bonne chose, même si on peut exprimer certaines réserves.

Mais, nous avons également relevé de très grosses lacunes. L'oubli le plus important, à nos yeux, concerne la formation initiale différée, alors que notre système scolaire laisse sortir, chaque année, 150 000 jeunes sans le moindre diplôme. On aurait pu espérer que ce texte proposerait les moyens de les récupérer, grâce à une formation soutenue, mais nos propositions à ce sujet se sont heurtées à l'article 40.

Il en est de même pour le socle de compétences. Quels savoirs convient-il de maîtriser, aujourd'hui, pour trouver du travail ?

Par ailleurs, le rapporteur a évoqué l'importance de pouvoir gravir un échelon dans sa carrière professionnelle, d'autant que celle-ci dure de plus en plus longtemps.

Enfin, qu'en est-il du service public de l'orientation, élément important du rapport de Françoise Guégot ? Il ne suffit pas de labelliser quelques organismes. Pour les gens ayant des difficultés à s'insérer, ni les centres d'appel ni Internet ne pourront remplacer la présence physique de conseillers.

Le texte ne simplifie pas la gouvernance du système : il se contente d'ajouter l'État aux acteurs existants – régions, partenaires sociaux, organismes collecteurs. Or, nous savons ce que valent les systèmes de copilotage. Soit l'organisation sera encore plus opaque, soit, au final, l'État deviendra le patron de l'ensemble. En tout état de cause, il est regrettable que les régions soient mises au rang de partenaires ordinaires, alors que la loi de 2004 leur avait donné la responsabilité pleine et entière de la formation continue.

Le service public de la formation nous semble également menacé, comme nous l'ont confirmé les syndicats de l'AFPA. C'est le début de la fin pour l'association nationale, dont Pôle emploi va récupérer les conseillers d'orientation. Sa mission commence pourtant dès l'orientation, et non après.

Comme l'a honnêtement reconnu le secrétaire d'État, ce projet de loi n'a pas l'ambition d'être le « grand soir » de la formation professionnelle. Mais, ce n'est pas pour autant un bon texte, notamment parce qu'il permet à l'État de revenir en force au détriment des partenaires sociaux et des régions. Toutefois, nous ne doutons pas que son examen en commission puis en séance publique sera l'occasion de l'améliorer sensiblement.

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