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Intervention de Noël Mamère

Réunion du 8 juillet 2008 à 15h00
Modernisation des institutions de la ve république — Motion de renvoi en commission

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaNoël Mamère :

Monsieur le président, madame la ministre, monsieur le secrétaire d'État, mes chers collègues, nous voici donc parvenus à la dernière phase de discussion parlementaire du projet de loi de modernisation des institutions voulu par le Président de la République. À l'instar de nos concitoyens, nous sommes nombreux sur les bancs de cet hémicycle à vouloir une véritable réforme de la Constitution et pas simplement des aménagements ou un toilettage. Nous sommes nombreux, dois-je vous le rappeler, à considérer que les mérites de la Constitution de la Ve République, dont la stabilité n'est pas le moindre, ne font pas disparaître pour autant l'absence de considération, voire une forme de mépris, du texte constitutionnel pour la vie parlementaire.

Sous la Ve République, le Parlement a bien souvent vu son rôle réduit à celui d'une chambre d'enregistrement – c'est malheureusement le cas actuellement. Il s'est trouvé soumis devant le bon vouloir de l'exécutif, impuissant devant les volontés présidentielles, écrasé pour tout dire par un texte constitutionnel, dont les rédacteurs conservaient de la vie parlementaire le souvenir traumatisant d'une IVe République malade de son instabilité chronique, de ses combinaisons partisanes, et désarmée face à la guerre d'Algérie. Mais nous savons que les régimes parlementaires ne ressemblent pas tous à la IVe République : majoritaires en Europe, ils sont stables, pluralistes, et bénéficient d'une large légitimité démocratique.

Réformer la Constitution est donc une urgence, reconnaître le Parlement est une nécessité. Mais une véritable réforme de la Constitution exige une rédaction à plusieurs, un effort d'intelligence et d'ouverture qui tienne compte à la fois de la majorité politique qui l'initie et de l'opposition, qui fasse que la loi commune ne soit pas le fruit d'un coup de force, et que la méthode et l'esprit qui président une telle démarche soient exemplaires.

Le Président de la République a choisi la voie parlementaire et non le référendum. Ce choix annonçait-il une valorisation du rôle du Parlement ? On pouvait croire que le temps du débat et de la prise en compte sérieuse des propositions des parlementaires serait au rendez-vous. Or il n'en est rien. D'abord, ce fut la mise en place d'un comité présidé par M. Balladur et composé d'experts, de hauts fonctionnaires et de quelques parlementaires. Des compétences reconnues, certes, mais le Parlement est riche également de talents et d'expériences, d'idées et de projets. Dès lors, il eût été si simple et si sage de mettre sur pied une commission parlementaire associant majorité et opposition pour conduire les travaux de réforme !

Peut-être s'agissait-il de s'affranchir des contraintes partisanes pour mener à bien une réflexion originale et élaborer des propositions courageuses ? Si les travaux du comité ont donné lieu à des auditions publiques de qualité, qui ont permis d'enrichir et d'approfondir la réflexion sur notre démocratie, il n'en demeure pas moins paradoxal, lorsque l'on dit vouloir rétablir le Parlement dans ses prérogatives, de commencer par se passer de ses services. Cette méthode qui consiste à déposséder les parlementaires de leur mission est une pratique chaque jour plus répandue pour des résultats sans surprises.

Si l'on n'attendait pas du comité qu'il fasse oeuvre révolutionnaire, on n'escomptait pas non plus une copie si conforme aux souhaits présidentiels. Les quelques audaces du comité, telles que l'introduction d'une dose de proportionnelle ou la limitation des mandats, ont disparu du projet gouvernemental comme s'il s'agissait d'une question secondaire.

En ce qui concerne le débat parlementaire lui-même, l'opposition a-t-elle été associée à la réflexion ? À aucun moment. A-t-elle pesé dans le texte qui nous parvient du Sénat ? Jamais. Votre méthode de gouvernement est, à cet égard, éclairante. Sans chercher à le dissimuler, elle contredit le discours de façade – assez hypocrite, d'ailleurs – de revalorisation du rôle du Parlement que vous tentez péniblement de promouvoir devant la représentation nationale et l'opinion publique. Cette petite musique qui annoncerait une autre ère pour notre assemblée est pure diversion.

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