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Intervention de Jean-Pierre Brard

Réunion du 18 octobre 2007 à 9h30
Projet de loi de finances pour 2008 — Article 2

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaJean-Pierre Brard :

Malheureusement, monsieur le président, ces amendements ne sont pas tout à fait de même nature... Vous me demandez là un exercice tout à fait impossible.

Mais avant de défendre l'amendement n° 173 , je voudrais réagir à ce que vient de dire M. le ministre. Pour résumer, « c'est un vrai sujet », comme on dit à Bercy. Autrement dit, il est urgent de causer… Quant au calendrier, c'est pour la saint Glinglin ! On sait comment vous procédez : lorsque vous avez repéré quelque chose qui fait problème, vous essayez de ne pas l'évacuer, parce que vous savez qu'il est légitime de poser le problème, mais vous ne voulez surtout pas le régler. Bref, on va en causer à l'heure du thé…

J'en viens à l'amendement n° 173 .

Tous les rapports d'exécution budgétaire de la Cour des comptes établissent depuis des années que les principaux bénéficiaires des allégements successifs de l'impôt sur le revenu dont vous avez été les instigateurs ont bénéficié en premier lieu, et massivement, aux contribuables imposés aux plus hautes tranches de l'impôt sur le revenu. Vous ne pouvez le contester, puisque c'est Philippe Séguin qui l'affirme.

Vous continuez pourtant de prétendre agir pour le plus bénéfice du plus grand nombre. Il serait, nous semble-t-il, plus honnête de dire aux Français quel est le fond de votre pensée et à quels préjugés vous avez fait le choix d'obéir.

Ces préjugés, vous les puisez au fondement du discours libéral, pour lequel tout repose, sans nuance aucune, sur l'idée que les impôts et les cotisations sociales ponctionnent une trop large part de la richesse nationale, découragent l'offre, brident l'activité, empêchent les entreprises de se créer, de prospérer, d'investir, de créer des emplois et réduisent le pouvoir d'achat de nos concitoyens.

Pour tenir ce discours, vous êtes bien évidemment dans l'obligation de faire abstraction, en bons serviteurs de la doctrine libérale, du rôle économique de l'État, que vous réduisez à une somme de coûts insupportables qui ne se justifient, en dernier ressort, que par l'exercice indispensable de quelques missions régaliennes.

Il est logique, dans ce contexte, que vous considériez que tout ce qui porte le nom de redistribution et de justice sociale s'inscrit dans l'horizon de valeurs humanistes décidément passées de mode. De quelle utilité peut bien être la justice quand seule compte la compétition ? Pourquoi s'embarrasser de principes tels que la progressivité, quand seule importe la concurrence fiscale ?

Nous qui sommes encore attachés au respect de textes aussi archaïques – et je le revendique, monsieur le ministre – à vos yeux sans doute que la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen, en particulier son article XIII, nous n'envisageons pas les choses sous le même angle.

À l'instar de notre collègue François de Rugy, nous sommes en l'occurrence attachés à la lettre de l'article XIII de la courte déclaration qui figure au préambule de notre texte fondamental, à savoir que la contribution commune « doit être également répartie entre tous les citoyens, en raison de leurs facultés ».

Vous devez admettre que rien ne s'oppose davantage au respect de ce principe que les politiques fiscales que vous conduisez. Quand les plus riches de nos concitoyens se voient exemptés d'impôts par le seul moyen d'un bouclier fiscal, cela ne peut être qu'en violation manifeste du pacte républicain, ce que vient de reconnaître, mezzo voce, notre collègue Michel Bouvard.

Cela, nous ne saurions en aucun nous y résoudre. Nous pensons au contraire utile, aujourd'hui, de rétablir la progressivité de l'impôt sur le revenu, seule garantie de la justice fiscale, d'en augmenter le nombre de tranches afin de mieux « répartir » l'impôt en fonction des facultés effectives de chacun.

Prévoir que les personnes déclarant 25 000 euros de revenus seront soumises au même taux d'imposition que celles qui en déclarent 67 000, ainsi que vous le proposez, ne nous paraît pas une mesure de justice.

Je me demande ce que M. Chartier, après avoir écouté les conseils de M. Lefebvre, va trouver à répondre à cela. Car tout ce que je viens de dire se voit comme le nez au milieu de la figure ; et le nier, c'est piétiner les intérêts de nos concitoyens.

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