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Intervention de Jean-Sébastien Vialatte

Réunion du 7 novembre 2007 à 21h30
Projet de loi de finances pour 2008 — Ouverture de la discussion

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaJean-Sébastien Vialatte, rapporteur pour avis de la commission des affaires économiques, de l'environnement et du territoire, pour la sécurité et la qualité sanitaires de l'alimentation :

Madame la présidente, madame la ministre, monsieur le ministre, chers collègues, la sécurité et la qualité sanitaires de l'alimentation constituent un domaine de l'action publique qui doit être considéré comme prioritaire par le Gouvernement.

Garantir un niveau élevé de sécurité, tant pour les produits végétaux, animaux et les denrées que nous produisons, que pour ceux que nous importons est évidemment une exigence pour les consommateurs et les citoyens français. C'est également un impératif économique qui doit permettre à nos filières agricoles et agroalimentaires de rester compétitives à l'échelle internationale. Ce n'est donc pas un hasard, évidemment, si le Président de la République, lors de son discours au salon international de l'élevage de Rennes, a fait des contrôles aux frontières une priorité.

Enfin, imposer le respect des règles de sécurité alimentaire, c'est également répondre à nos engagements européens : comme vous le savez, la sécurité sanitaire de l'alimentation est un secteur harmonisé et donc encadré par de nombreux règlements communautaires, au premier rang desquels ceux qui constituent le paquet « hygiène ». L'adoption de ces règlements, qui mettent en oeuvre le principe du respect de la sécurité alimentaire à toutes les étapes de la chaîne alimentaire, « de la fourche à la fourchette », a profondément changé la donne en réformant nos manières de procéder, en particulier nos méthodes de contrôle, en raison du rôle désormais dévolu aux exploitants, qui fait d'eux les premiers responsables de la qualité de leurs productions.

Face aux moyens croissants susceptibles d'être exigés du contribuable pour remplir nos obligations dans le secteur de la sécurité alimentaire, un effort supplémentaire doit aujourd'hui être demandé aux producteurs en termes de participation aux mesures de prévention et au partage des coûts de gestion des crises. Un effort supplémentaire doit également être demandé à l'État en termes d'affectation optimale des ressources et de gestion parcimonieuse des crédits. Enfin, un effort supplémentaire doit être demandé à l'administration dans son action d'encadrement et de contrôle, pour plus d'efficacité et de réactivité.

En quoi le projet de loi de finances pour 2008 répond-t-il à ces exigences, qu'il s'agisse de la collaboration des acteurs concernés, de la rationalisation des dépenses ou de l'efficience de l'action publique ?

Tout d'abord, ce budget témoigne de la prise en compte par le ministère de l'agriculture et de la pêche d'un certain nombre d'évolutions nécessaires, et attendues, et d'une volonté de répartir les crédits disponibles le plus efficacement entre les différents postes de dépenses, le tout à l'intérieur d'une enveloppe qui, pour la première fois depuis que le projet de loi de finances est présenté en mode LOLF, est en baisse. En effet, le programme « Sécurité et qualité sanitaires de l'alimentation », bien que relativement épargné par les diminutions de crédits affectant le budget du ministère de l'agriculture, diminue de 1,3 % en crédits de paiement, et s'établit à 546 millions d'euros pour 2008.

Cette baisse ne doit toutefois pas être interprétée comme un signal négatif. En effet, elle indique avant tout la diminution de certains postes de dépenses qui ont pu, par le passé, coûter très cher au contribuable. Je pense évidemment au problème du stockage et de l'élimination des farines animales, qui touche désormais à sa fin. Ainsi, l'action 05 du programme, qui regroupe à la fois le service public de l'équarrissage et les farines animales, connaîtra en 2008 une diminution des moyens qui lui sont affectés de l'ordre de 13 %.

Hors action 05, le budget sécurité alimentaire pour 2008 est en hausse d'un peu plus de 1 %.

Toujours sur l'action 05, je ne me joindrai pas au concert de critiques qui se font entendre, ici et là, sur le service public de l'équarrissage : il est vrai que la situation est loin d'être réglée, mais on peut au moins féliciter le ministère de l'agriculture d'avoir obtenu que les éleveurs de ruminants participent à son financement, ce qui est une réelle avancée. Bien sûr, il reste la question des reports de charges, qui devraient atteindre près de 50 millions d'euros à la fin de l'année 2007, mais il convient surtout d'entamer dès aujourd'hui la réflexion sur les prochaines réformes à engager dans le secteur, une fois que le marché public passé en 2006 aura expiré.

A contrario, deux postes de dépenses connaissent de fortes hausses dans le projet de budget pour 2008 : il s'agit des actions 01 « Prévention et gestion des risques inhérents à la production végétale » et 04 « Acquisition et mobilisation des moyens scientifiques et techniques pour maîtriser les risques sanitaires ». Ces deux actions bénéficient en effet d'une revalorisation de leurs moyens, de près de 20 % en crédits de paiement pour la première et de 7,5 % pour la seconde.

L'action 01 représente à peine 3,5 % des moyens du programme en crédits de paiement, mais recouvre des enjeux importants, en termes de suivi des risques sanitaires et phytosanitaires et de contrôle des conditions de production des végétaux. Je pense notamment au contrôle de l'utilisation des intrants, secteur dont les crédits ne progressent pas, en dépit de la hausse globale des crédits de l'action, alors même qu'il est au coeur des débats environnementaux actuels et que de nombreux efforts doivent encore être fournis pour parvenir à des résultats satisfaisants. Ainsi, s'agissant de l'indicateur 1.1 concernant les non-conformités au regard des bonnes pratiques d'utilisation des produits phytosanitaires, atteindre un taux de 18,5 % en 2008 et de 15 % en 2010 paraît un objectif peu ambitieux.

S'agissant de l'action 04, je parlerai surtout de l'Agence française de sécurité sanitaire des aliments pour me réjouir tout d'abord que l'agence dispose enfin d'un contrat d'objectifs et de moyens, et ensuite que le projet de loi de finances pour 2008 respecte bien les termes de ce contrat. En effet, la subvention pour charges de service public versée par le ministère de l'agriculture à l'AFSSA augmente cette année de plus de 6 % et atteint 52,3 millions d'euros.

Les 3,5 millions d'euros supplémentaires prévus cette année serviront, d'une part, à financer l'augmentation inéluctable des charges de l'agence et, d'autre part, à contribuer au financement des équipements à hauteur de 1 million d'euros. L'État s'est en effet engagé dans le contrat d'objectifs et de moyens à examiner le plan d'investissements de l'AFSSA afin de proposer, le cas échéant, un nouveau calibrage de la part investissement des subventions pour charges de service public, de manière à lui permettre de reconstituer une capacité de financement de ses investissements. On sait que cette question était une source d'inquiétude récurrente pour la directrice générale ces dernières années ; or, si elle n'est pas encore totalement réglée, elle est aujourd'hui moins prégnante, grâce à la signature du contrat d'objectifs et de moyens. Lors son audition, Mme Pascale Briand s'est ainsi montrée très satisfaite de cette avancée et a indiqué qu'elle travaillait dans un climat de confiance avec ses tutelles.

Enfin, si l'agence, dans son contrat d'objectifs et de moyens, s'est engagée à effectuer les redéploiements nécessaires à l'évolution de ses activités et notamment à mobiliser ses ressources en interne afin de faire face, avec la réactivité nécessaire, aux besoins exceptionnels générés par les crises sanitaires, l'État de son côté s'est engagé à assurer le financement de l'évolution mécanique de la masse salariale et à examiner sans délai les besoins de ressources complémentaires indispensables lorsque l'agence est en situation de dépassement de ses capacités de redéploiement.

Je souhaiterais évoquer maintenant la question de la surveillance des denrées alimentaires et de la lutte contre les maladies animales, deux actions dont les crédits sont en baisse cette année, de 1,9 % en crédits de paiement pour l'action 02 et de 12,7 % pour l'action 03. Il faut tout d'abord rappeler que ces deux actions recouvrent des secteurs fortement encadrés par le droit communautaire et comprennent un volant de dépenses incompressibles.

Ainsi, dans l'action 03, la lutte contre les salmonelles en élevage étant une priorité au niveau communautaire, elle continue d'absorber une part toujours plus importante des crédits, notamment pour l'indemnisation des éleveurs, qui atteint cette année 10,6 millions d'euros. Toutefois, afin de faire face à l'augmentation des dépenses à ce titre, l'État ne verse plus d'indemnités de dépistage.

Par ailleurs, au sein de cette même action, les crédits affectés au financement de l'inspection sanitaire dans les abattoirs et les criées diminuent fortement, suite au passage d'un rythme annuel à un rythme bisannuel des visites sanitaires en élevage porcin. Ce choix, dicté par la volonté de mieux organiser l'action publique et de la recentrer sur ce qui est vraiment utile, sans être totalement exempt de considérations budgétaires, devra faire l'objet d'une évaluation. En effet, alors que depuis l'adoption du paquet « hygiène », de nouvelles exigences sont apparues, deux rapports récents de l'Office alimentaire et vétérinaire européen soulignent les carences qui demeurent, non seulement dans la mise en oeuvre des contrôles destinés à vérifier la bonne application de la réglementation. La mission d'audit de modernisation sur l'inspection sanitaire en abattoirs ayant formulé un certain nombre de recommandations à cet égard, on espère que celles-ci seront rapidement mises en oeuvre.

Pour finir, j'aborderai le sujet crucial de la santé animale : la Commission européenne vient de proposer une nouvelle stratégie dans ce domaine pour les années 2007-2013, axée sur la prévention, et il suffit de lire la liste des maladies animales qui ont frappé l'Europe en 2007 – grippe aviaire, peste porcine, fièvre catarrhale ovine, fièvre aphteuse – pour être convaincu de la nécessité d'une vigilance absolue dans ce domaine. À cet égard, la baisse des crédits affectés à l'action 02 reste contenue en dessous de 2 % et fait suite à une hausse de près de 10 % l'année dernière. Elle témoigne en outre de l'amélioration globale de la situation sanitaire de notre cheptel en ce qui concerne deux postes de dépenses particulièrement sensibles auparavant : l'ESB, encéphalite spongiforme bovine, et l'influenza aviaire. En revanche, on peut s'interroger sur la faible hausse des crédits consacrés à la lutte contre la fièvre catarrhale ovine – de l'ordre de 200 000 euros –, alors que l'on est passé de six cas recensés en 2006 à plus de 7 000 cas aujourd'hui.

L'analyse de risque qui fonde la construction du budget est toutefois dépendante de facteurs conjoncturels, l'essentiel étant d'être sûr que les redéploiements nécessaires seront opérés en cours d'année si des besoins apparaissaient subitement. Grâce au principe de fongibilité instauré par la LOLF et à la vigilance de notre ministre de l'agriculture, il est certain qu'il en sera ainsi, comme cela a toujours été le cas, notamment dans les contextes de crise sanitaire.

En guise de conclusion, je ne peux m'empêcher, monsieur le ministre, de citer la lettre de mission que vous a remis le Président de la République et qui rappelle qu'« un bon ministre ne se reconnaît pas à la progression de ses crédits, mais à ses résultats ». Je sais que vous avez engagé un important chantier de modernisation de votre ministère et que vous souhaitez porter, tant au niveau national qu'au niveau européen et international, un grand projet alimentaire, agricole et rural pour la France. Ce projet ambitieux mérite amplement notre soutien. C'est pourquoi la commission des affaires économiques a donné un avis favorable à l'adoption des crédits du programme « Sécurité et qualité sanitaires de l'alimentation » au sein de la mission « Sécurité sanitaire ». (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)

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