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Intervention de François Fillon

Réunion du 22 septembre 2008 à 15h00
Débat et vote sur l'autorisation de la prolongation de l'intervention des forces armées en afghanistan

François Fillon, Premier ministre :

Cette maîtrise des opérations exige aussi une complémentarité entre les forces de la FIAS et celles de l'opération Liberté immuable. La première, vous le savez, est une force internationale de sécurisation disposant d'un mandat annuel du Conseil de sécurité de l'ONU. La seconde intervient dans le cadre de l'article 51 de la Charte de l'ONU. C'est une force essentiellement américaine, dont la mission est consacrée au combat contre les réseaux terroristes. Ces deux forces distinctes sont légitimes car elles ne font pas le même travail mais nous devons nous assurer que l'action des uns ne contredit pas celle des autres.

Le commandement actuel de la FIAS, assuré par le général David McKiernam, vient de se voir également confier le commandement des troupes américaines de l'opération Liberté immuable. Il faut que cette double casquette soit mise à profit pour renforcer la complémentarité des objectifs et des missions des deux forces.

Cette maîtrise des opérations suppose enfin une vision géopolitique. Nous ne pourrons pas stabiliser la situation si nous ne sommes pas capables d'agir en lien avec les pays voisins, en particulier avec le Pakistan. Le Pakistan frappé samedi de plein fouet par le terrorisme. Le Pakistan tiraillé par ses exigences internationales et ses tensions internes.

Il est évident que les talibans profitent de la porosité de la frontière entre les deux pays. Il est hors de question de les laisser se réorganiser au Pakistan sans réagir. Il faut agir, mais il faut le faire avec les Pakistanais, avec leur autorisation. Nous incitons Islamabad à faire davantage pour contrôler les zones tribales frontalières. Nous allons amplifier notre relation politique et sécuritaire avec ce pays. Nous entendons le convaincre de ne pas relâcher ses efforts. C'est dans cet esprit que Bernard Kouchner s'est rendu à plusieurs reprises au Pakistan et c'est dans cet esprit que Nicolas Sarkozy s'entretiendra demain avec le président Zardari.

Mesdames et messieurs les députés, dans quelques instants vous allez être amenés à vous prononcer sur la poursuite ou non de notre engagement militaire en Afghanistan. Certains doutent de son bien-fondé. Pour ceux-là, le sort de cette terre étrangère ne mérite pas nos efforts et moins encore de la souffrance.

Ceux qui suggèrent que nous nous retirions d'Afghanistan sont souvent les mêmes, qui, il y a dix ans, s'indignaient de la passivité de la communauté internationale face à la barbarie des talibans (Applaudissements sur les bancs des groupes UMP et NC), face à la destruction folle des statues de Bamiyan, face au sort effrayant réservé aux femmes. Il faut être cohérent : si l'on croit à des valeurs universelles, alors il faut prendre le risque de lutter pour elles. (Applaudissements sur les bancs des groupes UMP et NC.)

Sur le terrain, nos soldats en font bien plus pour ces valeurs que tous les donneurs de leçons ! (Applaudissements sur les bancs des groupes UMP et NC. – Exclamations sur les bancs du groupe GDR.) Pour d'autres en revanche, et j'appartiens à ceux-là, la cause afghane est une priorité, une exigence morale et une opportunité.

C'est une priorité parce que la France ne peut pas tourner égoïstement le dos à un conflit dont les enjeux nous concernent tous. Nul ne doit s'y tromper : nous ne sommes pas à l'abri du terrorisme qui a frappé à New York, à Djerba, Bali, Casablanca, Madrid, Londres, Amman, Alger et Islamabad. C'est une exigence morale parce que nous ne pouvons nous replier sur nous-mêmes au moment où se décide, dans ces contrées lointaines, le sort d'une nation qui nous fait confiance, là où se joue l'avenir d'une certaine conception de l'homme en laquelle nous croyons.

C'est enfin une opportunité parce qu'une victoire de la paix et de la démocratie en Afghanistan constituerait un coup porté à l'intégrisme qui est un dévoiement de la religion musulmane et une détestable mise en scène du conflit de civilisation. (Applaudissements sur les bancs des groupes UMP et NC.) Cette victoire de la paix et de la démocratie, je la crois possible. Le Gouvernement ne méconnaît ni les difficultés, ni les obstacles, ni les tragédies possibles qui parsèment le chemin de la concorde.

J'ai pris connaissance de la lettre du 13 septembre que le parti socialiste a adressée au Président de la République. Je me réjouis de voir que l'engagement de la France en Afghanistan n'est pas remis en cause par l'opposition. Je souhaite cependant vous répondre sur certains points.

Vous parlez « d'enlisement ». C'est un risque qui doit être constamment pesé mais les faits vous répondent : les talibans ont été chassés du pouvoir et l'obscurantisme avec eux ; l'Afghanistan n'est plus une plate-forme du terrorisme ; la démocratie a été instaurée ; les enfants vont à l'école, les femmes ne sont plus humiliées et les hôpitaux sont ouverts. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.)

Vous suggérez la création d'un directoire de la coalition. C'est une suggestion qui fait l'impasse sur les structures internationales compétentes et qui laisse entendre que, parmi les quarante nations engagées, il conviendrait de faire un tri.

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