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Intervention de Didier Quentin

Réunion du 11 février 2009 à 9h30
Déclaration du gouvernement sur le changement de statut de mayotte et débat sur cette déclaration

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaDidier Quentin :

L'établissement a réalisé environ 7 700 accouchements en 2008, chiffre stabilisé depuis 2004. L'instruction s'étend avec une efficacité croissante : grâce au doublement des moyens alloués par l'État depuis 2003, elle concerne désormais 73 000 élèves sur une population estimée à 186 000 habitants. Les revenus augmentent, comme en attestent la forte hausse du salaire minimum, la modernisation de certains bâtiments ou le développement de l'automobile depuis trois ans.

Surtout, la modernisation juridique entreprise en 2003 et en 2006, à l'initiative du député Mansour Kamardine, que je salue dans les tribunes, porte aujourd'hui ses fruits. Les femmes disposent des moyens de s'émanciper du droit coutumier qui ne concerne plus que 10 % des naissances et de se dégager du poids de traditions incompatibles avec les principes républicains. La polygamie a reculé. Le rôle juridictionnel des cadis, ces magistrats de droit musulman, s'est amoindri. L'égalité entre les hommes et les femmes est mieux assurée.

Enfin, grâce à la réforme de la législation des étrangers adoptée dans la loi du 24 juillet 2006 et au renforcement des moyens des forces de l'ordre, la lutte contre l'immigration irrégulière a gagné en efficacité. Sa stabilisation constitue déjà une performance remarquable : au cours des trois dernières années, près de 50 000 clandestins ont été éloignés et le nombre d'embarcations interceptées en mer, les tristement célèbres « kwasa-kwasa », a presque triplé.

Ces constats sont bien sûr encourageants, mais la départementalisation de Mayotte nous obligera à franchir de nouvelles étapes. Comme nous le leur avons dit au cours de notre récente mission, les cadis ne pourront plus rendre la justice, mais ils pourront jouer un rôle de médiation sociale, et les nouvelles unions polygames devront être proscrites pour tous et toutes.

Par ailleurs, je suis convaincu que la départementalisation ne pourra réussir que si une forte volonté politique et des moyens exceptionnels sont mis au service de trois priorités.

Premièrement, stabiliser la démographie insulaire, grâce à la planification des naissances et au renforcement de la lutte contre l'immigration clandestine, car la densité de population dépasse déjà 500 habitants au kilomètre carré et ne pourra s'élever indéfiniment.

Deuxièmement, construire les infrastructures nécessaires au développement de l'économie productive, en particulier dans les secteurs de l'aquaculture et du tourisme, car Mayotte peut s'appuyer sur un patrimoine naturel exceptionnel.

Troisièmement, mettre en place, comme nous l'avions déjà demandé en 2006, avec René Dosière et Jean-Christophe Lagarde, dans le cadre d'une mission d'information sur l'immigration clandestine à Mayotte, un état civil fiable. À cet égard, il est inadmissible que la commission de révision de l'état civil, la CREC, mise en place en 2001, ait été privée de présidence pendant six mois en 2006 et le soit à nouveau depuis le mois d'août 2008, ou encore qu'elle n'ait rendu l'an dernier que 746 décisions, alors que le « stock » s'élève à plus de 16 000 dossiers ! (Applaudissements sur les bancs des groupes UMP et NC.)

Il nous faudra également faire preuve de souplesse et de discernement dans l'application du droit commun à Mayotte en 2011 : des adaptations législatives demeureront évidemment nécessaires en matière d'entrée et de séjour des étrangers, ainsi que de protection sociale mais vous nous avez apporté des assurances à ce sujet, madame la ministre.

L'élévation du niveau de vie qui résultera du processus de départementalisation et, je l'espère, de l'obtention du statut communautaire de région ultrapériphérique réduira le différentiel entre Mayotte et La Réunion où résident déjà 30 000 à 50 000 Mahorais, pas toujours bien acceptés.

À l'inverse, les différences de niveau de vie augmenteront encore entre Mayotte et les Comores, où le revenu par habitant est déjà dix fois moindre, ce qui pourrait accroître les flux migratoires vers ce petit Eldorado. Le développement de Mayotte implique donc d'offrir aux Comores, et en particulier à l'île autonome d'Anjouan, distante de 70 kilomètres seulement, une aide au développement nettement supérieure, notamment par le biais de la coopération décentralisée, mais ce n'est pas facile tellement les dirigeants de la fédération sont l'objet d'un zapping permanent.

Mes chers collègues, au vu de ce que nous avons observé ces derniers jours à Mayotte, on peut s'attendre à un oui franc et massif conçu comme une assurance tous risques pour rester des Français à part entière. Ce référendum suscite une immense espérance. Il faudra surtout ne pas la décevoir. II y aura certainement des tensions, des difficultés, notamment dans le domaine social où les retards sont les plus flagrants, avec des risques pour la sécurité publique et la sécurité sanitaire.

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