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Intervention de Frédérique Massat

Réunion du 9 octobre 2008 à 9h30
Grenelle de l'environnement — Discussion générale

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaFrédérique Massat :

Eh bien, permettez moi de citer ces déclarations sur le Grenelle, qui datent de quelques semaines : « En France comme ailleurs, il manque cette remise en cause du modèle de développement dans lequel nous sommes. Le travail de fond n'est pas fait. » Ou encore : « Nous sommes condamnés à ce que les États interviennent. C'en est fini du libéralisme. » Ces propos ne sont pas ceux d'affreux parlementaires gauchistes ! Non, ils sont de Nicolas Hulot, le fondateur du pacte écologiste, souvent pris pour référence sur ces bancs.

Il est vrai qu'aujourd'hui nous regrettons que la phase législative du Grenelle n'ait pas eu pour objet de revisiter l'ensemble du fonctionnement de notre société et de l'État, afin de dégager les voies de leur survie. Cela n'a pas été le cas pour une raison simple : la problématique du Grenelle recouvre en réalité des choix politiques – sur la régulation du marché, sur la place de l'État, sur la fiscalité, sur la redistribution – et il faut les mettre au centre des débats. On a pourtant tenté de faire croire que le Grenelle relevait de données apolitiques, reposant sur des responsabilités diffuses et non hiérarchisées.

Ainsi, le résultat du Grenelle peut se résumer à l'administration de soins palliatifs à notre société. Je ne le remets pas en cause, mais on ne peut que regretter qu'il n'ait pas été la base pour élaborer le protocole de guérison de la maladie dont souffre notre société et dont elle risque de mourir.

Le Grenelle, présenté comme une révolution culturelle, aurait dû dire haut et fort qu'il est impératif de changer nos modes de production et de consommation, et de définir un nouveau modèle de société. Au lieu de cela on a, en priorité, choisi de culpabiliser le citoyen dans son mode de vie, de transport, d'habitat, de consommation. Et on lui a donné les moyens de se racheter par une série de mesures comportementales individuelles qu'il n'a plus qu'à mettre en oeuvre, selon ses moyens.

Ainsi, à l'égard de l'automobiliste, vous maniez la carotte et le bâton ; la mesure phare qu'est le bonus-malus écologique, décidée par décret en début d'année, est une mesure soi-disant écologique, mais libérale. Elle ne prend pas en compte la justice sociale : cette éco-taxe touche de manière égale tous les consommateurs, quels que soient leurs revenus. Mais on ne réglera pas les problèmes écologiques majeurs en taxant les citoyens !

Outre le fait qu'il aurait été préférable d'avoir une politique ferme en direction des constructeurs et surtout des Français, cette mesure hâtivement mise en place aurait pu faire l'objet de débats qui auraient sans doute permis de l'orienter différemment pour en éviter les effets pervers. En effet, ce dispositif incite surtout à l'achat de véhicules diesel, dont on sait qu'ils émettent des oxydes d'azote et des particules polluantes, tous rejets dévastateurs pour la qualité de l'air et donc pour la santé publique.

Cet exemple du bonus-malus écologique est révélateur du manque d'approche systémique de l'écologie. Il faut sortir des approches linéaires ou sectorielles, et dépasser une vision trop étroite et conservatrice de l'environnement, pour ne plus aboutir à des positions exclusives et rigides de protection, au mépris de toute autre considération.

J'aurais aimé évoquer l'un des aspects du Grenelle oubliés par ce texte : l'Internet, mais je suis pressée par le temps.

Le défi environnemental auquel nous sommes confrontés nécessite le développement de la coopération, celui de l'intelligence collective et l'invention de nouveaux outils. Nous ne pourrons concilier l'urgence écologique avec un nouveau mode de développement sans nous attaquer à une refonte radicale de nos indicateurs nationaux et de nos procédures budgétaires, ainsi qu'à la mise en place d'une comptabilité environnementale. Dans cette phase législative, dans cette loi-cadre, il est regrettable que de nouvelles orientations en la matière soient totalement absentes car, s'il est vrai que changer de thermomètre ne fera pas tomber la fièvre de notre planète malade, persister à employer un thermomètre défectueux ne nous permettra jamais de la guérir ! (Applaudissements sur les bancs des groupes SRC et GDR.)

(M. Marc Laffineur succède à M. Marc Le Fur au fauteuil de la présidence.)

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