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Intervention de François Fillon

Réunion du 21 juillet 2008 à 15h30
Projet de loi constitutionnelle de modernisation des institutions de la ve république

François Fillon, Premier ministre :

Ce sont 271 amendements qui ont été adoptés, près d'une cinquantaine émanant de l'opposition, dont celui sur le référendum d'initiative populaire, celui sur les commissions d'enquête et celui sur la saisine de la Cour de justice de l'Union européenne en cas de non-respect du principe de subsidiarité.

La cohérence voudrait que cet esprit constructif se manifeste jusqu'au bout, car on ne peut pas, d'une main, enrichir le contenu d'un texte et, de l'autre, voter contre sa mise en oeuvre.

Jusqu'à ces derniers jours, le Président de la République lui-même s'est montré à l'écoute des craintes éventuelles et ouvert à des évolutions. C'est notamment le cas sur le temps de parole du Président de la République.

Sur ce sujet, j'invite l'opposition à la réflexion. Le chef de l'État n'est pas un responsable politique tout à fait comme les autres. Au cours des septennats de François Mitterrand, nul d'entre nous n'a jamais dénoncé ce statut singulier qui s'attache à la fonction présidentielle. Le CSA, qui est saisi de cette question du temps de parole, formulera ses propositions. Et Nicolas Sarkozy a pris l'engagement que des garanties seraient apportées pour que l'opposition puisse répondre chaque fois qu'il s'exprimera sur des sujets qui relèvent de la politique française.

Le sens du compromis n'a cessé de guider notre démarche. Nous en avons collectivement fait preuve au cours de nos débats, ce dont je veux remercier la majorité, et vos deux rapporteurs, Jean-Luc Warsmann et Jean-Jacques Hyest.

Ce fut notamment le cas pour la rédaction de l'article 88-5 qui prévoyait un référendum automatique pour les nouvelles adhésions à l'Union européenne, au-delà d'un certain seuil de population. Pour les uns, cette clause était vexatoire vis-à-vis de certains grands États qui aspirent à rejoindre l'Union, la Turquie au premier chef. Pour d'autres, elle était une remise en cause du pouvoir d'appréciation du Président de la République, qui doit pouvoir choisir entre la voie du Congrès et celle du référendum. Pour d'autres encore, le référendum automatique n'était pas négociable.

Nous avons trouvé ensemble un accord qui respecte les convictions de chacun. Pour tout élargissement, la voie du référendum restera la règle, sauf exception dont vous serez les seuls initiateurs. L'Assemblée nationale et le Sénat pourront ainsi proposer au Président, chacune à la majorité des trois cinquièmes, de ratifier un traité d'élargissement par un vote au Congrès.

Sur d'autres sujets, le compromis était, à l'évidence, aujourd'hui impossible : c'est le cas sur les modes de scrutin ou sur le vote des étrangers.

Chercher et vouloir le compromis : la tâche, j'en conviens, n'est pas simple. Sur la question institutionnelle, chacun d'entre nous à ses opinions, ses préférences, ses priorités. Mais voilà, il n'y a qu'une Constitution et celle-ci ne peut être la somme de toutes nos exigences. Personne ne peut nous reprocher de ne pas avoir cherché à rassembler ! Et nul ne peut suspecter la réalité et la densité du compromis que nous avons bâti !

Et ce compromis, mesdames et messieurs, il repose sur un choix clair : celui de nous inscrire dans la Ve République.

Le Directoire, le Consulat, l'Empire, la Restauration... Depuis 1789, quinze régimes se sont succédé dans une démonstration presque permanente de fébrilité politique. La Ve République a rompu avec cette détestable tradition française. Elle a confirmé la prescience du général de Gaulle, qui faisait de notre stabilité politique le cadre du développement économique et social de notre pays. Il s'agit là d'un héritage inestimable. Dans ce XXIe siècle qui s'annonce difficile, traversé par des défis considérables, la France a besoin d'être dirigée et non ballottée au gré des humeurs du jour.

La logique de la stabilité et de l'efficacité est excellente. Elle est actuelle. Nous ne renonçons à aucun des principes qui la conditionnent.

Ce projet ne modifie pas les articles 5, 20 et 21 de notre Constitution. Il respecte la définition d'un domaine de la loi, la possibilité d'avoir recours au vote bloqué, la maîtrise de la procédure pour les lois de finances, l'encadrement strict de la mise en cause de la responsabilité du Gouvernement et, naturellement, le droit de dissolution en cas de grave blocage. Pour tout dire, le pouvoir exécutif conserve le pouvoir d'agir !

Nous restons dans la Ve République, mais nous la rénovons. Et cette rénovation renforce sa pérennité plus qu'elle ne la menace. Car la menace – si menace il devait y avoir –, elle est dans le déséquilibre actuel des pouvoirs et le déficit démocratique qu'il induit, elle n'est pas dans ce projet.

Mesdames et messieurs les parlementaires, nous sommes nombreux ici à afficher pour le général de Gaulle une admiration et une estime immenses.

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