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Intervention de François Cornut-Gentille

Réunion du 22 septembre 2008 à 21h30
Revenus du travail — Discussion générale

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaFrançois Cornut-Gentille :

Monsieur le président, monsieur le ministre, messieurs les secrétaires d'État, mes chers collègues, permettez-moi tout d'abord de saluer la qualité du travail effectué par notre rapporteur, Gérard Cherpion. Avec les nombreuses auditions menées, nous disposons d'un rapport qui s'inscrit pleinement dans la revalorisation du rôle du Parlement telle que nous l'avons voulue lors de la réforme constitutionnelle de juillet dernier.

M. le ministre du travail, M. le secrétaire d'État chargé de l'emploi et M. le rapporteur ont excellemment présenté le texte et les apports de la commission : il est donc inutile d'y revenir. Je voudrais, pour ma part, insister sur les qualités propres du projet de loi qui méritent d'être mises en valeur.

En effet, placé entre le débat sur l'Afghanistan, qui constitue une première sur un sujet d'actualité majeur, et celui sur le RSA, qui a déjà fait couler beaucoup d'encre, ce texte d'apparence modeste et technique suscite bien moins l'attention des médias. Il aura pourtant un impact important sur la vie quotidienne de nombre de nos concitoyens.

Le projet de loi en faveur des revenus du travail tire en vérité sa force de sa concision, de sa simplicité, de sa cohérence et de son pragmatisme, qui doivent permettre à chacun, quelle que soit son origine idéologique, d'adhérer à une démarche efficace et de bon sens. Nous pensons que la qualité et l'importance d'un texte ne se mesurent ni à sa longueur, ni aux polémiques qu'il suscite, mais à sa capacité à produire des avancées concrètes.

Il ne nous est pas proposé de décréter un nouvel ordre des choses mais de contribuer à des améliorations tangibles en modernisant les relations sociales dans les entreprises par le dialogue et l'incitation.

Il est donc parfaitement logique de s'appuyer sur la philosophie de l'intéressement et de la participation, qui ont pour objectif de renforcer, par la discussion, la compréhension mutuelle du chef d'entreprise et des salariés en leur permettant de trouver le point d'équilibre entre les justes revendications sociales et la réalité économique. Plus que jamais ce débat reste d'actualité dans le désordre économique que nous connaissons.

C'est dans cet esprit que je soulignerai ce qui constitue à mes yeux le fil directeur du texte qui nous est soumis : une volonté de modernisation des relations sociales par la pédagogie. Les cinq articles que comporte le projet de loi s'inscrivent tous dans cette dimension.

L'article premier accorde aux entreprises des incitations fiscales pour développer l'intéressement. La cible visée est clairement les entreprises de moins de cinquante salariés. Dans ce contexte, privilégier l'intéressement, plus souple que la participation, est pleinement justifié. Il en est de même du choix de l'incitation plutôt que de l'obligation. Le dialogue en effet ne s'instaure pas de la même manière dans les grandes entreprises que dans les petites car les relations humaines et hiérarchiques y sont très dissemblables.

L'article 2 accorde un délai de réflexion au salarié sur le devenir de sa participation, non sur sa totalité mais simplement sur son versement annuel qui, je le rappelle, est variable dans son montant. Je vois dans cette mesure un outil de responsabilisation et de pédagogie qui répond au déficit d'information déjà constaté en 2005 et à la difficulté rencontrée pour moderniser les cas de déblocage anticipé.

Un seul exemple suffira : il est inadmissible qu'une personne endettée ne puisse avoir recours à la participation pour rembourser ses emprunts sans devoir passer par une procédure lourde et complexe qui n'a pour effet que de l'enfoncer encore un peu plus. Cette mise à disposition ne constitue pas pour autant un cadeau puisque des prélèvements la sanctionneront. C'est en cela qu'on peut parler de responsabilisation.

L'article 3 soumet la fixation du SMIC à une commission d'experts chargés notamment d'éclairer les décideurs et tous les Français sur l'environnement économique et social dans lequel cette fixation intervient.

Bien sûr, on veillera à ne pas multiplier les commissions et autres comités Théodule. Toutefois nul ne peut nier l'utilité d'informations objectives pour sortir enfin d'un débat convenu et de plus en plus déconnecté des réalités économiques.

La modification de la date de revalorisation du SMIC procède de la même volonté pédagogique : passer du 1er juillet au 1er janvier permet d'agir non plus à la sauvette mais dans la transparence et après débat contradictoire.

Les articles 4 et 5 organisent un système de pénalités à l'encontre des chefs d'entreprise qui n'ouvrent pas de négociations salariales et des branches professionnelles qui conservent un premier niveau de grille salariale inférieur au SMIC.

En effet, ces sanctions se veulent plus incitatives que contraignantes en laissant largement le temps de se mettre en conformité avec la loi. Je tiens d'ores et déjà à souligner la pertinence de l'amendement du rapporteur adopté par la commission des affaires sociales portant à 100 % la sanction à l'issue du délai de trois ans. Je ne pense pas en effet qu'on en arrive à cette extrémité sauf mauvaise volonté manifeste de l'entrepreneur.

L'ensemble de ces mesures crée ainsi les conditions d'un dialogue constructif dans les entreprises, dans les branches et au plan national autour de la question des revenus.

C'est le contre-pied parfait de la loi autoritaire des 35 heures et de ses effets pervers pour les salariés. Ici, on est loin de l'usine à gaz administrative et idéologique : on apporte du mieux-être aux salariés, mais sans leurre.

Aussi utile soit-il, ce cadre légal incitatif n'est cependant pas suffisant pour instaurer un véritable dialogue dans les entreprises. Son succès dépend pour beaucoup d'un suivi extra-législatif sur lequel je demande au Gouvernement de s'engager pleinement et qui passe notamment par une réforme du Conseil supérieur de la participation, très utile en son temps, mais qui se révèle inadapté aux défis d'aujourd'hui.

Le temps est venu, monsieur le ministre, d'instituer un nouvel organe, à l'image du Conseil d'orientation pour l'emploi, consacré à la participation, l'intéressement et l'épargne salariale. Sur ces sujets, le besoin d'expertise et de dialogue est grand pour moderniser la réglementation et renforcer leur diffusion auprès des PME.

Je pense également à plusieurs chantiers – le livret d'épargne salariale, le Centre national de la participation ou la modernisation des cas de déblocage anticipé –, proposés dans le rapport de 2005 qui avait pour objectif de mettre en place la participation pour tous.

L'administration doit également changer de culture pour devenir un véritable promoteur de l'épargne salariale, non un contrôleur tatillon qui pèse trop souvent négativement sur son développement.

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