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Intervention de Christophe Sirugue

Réunion du 1er juillet 2008 à 15h30
Rénovation de la démocratie sociale et réforme du temps de travail — Question préalable

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaChristophe Sirugue :

Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, l'examen de ce projet de loi ne sera pas aisé et sa complexité technique n'est pas seule en cause. Ce qu'il induit comme modèle de société mérite que les Français en soient largement informés.

Au fil de l'examen du texte, plus son bien-fondé nous semblait contestable, plus la réalité de ce qui vous motive réellement, monsieur le ministre, apparaissait au grand jour. « Historique » : voici le terme que vous utilisiez il y a peu devant la commission des affaires sociales pour qualifier votre projet de loi. Au risque de vous surprendre, je partage ce sentiment, mais pour des raisons bien différentes : j'estime pour ma part qu'il restera dans les mémoires comme l'exemple d'un vrai-faux effort pour la démocratie sociale.

Officiellement, vous nous présentez ce texte comme l'emblème d'une démocratie sociale renouvelée. Depuis l'arrivée de M. Sarkozy à la Présidence de la République et votre nomination comme ministre du travail, les déclarations n'ont pas manqué pour tenter d'expliquer qu'une nouvelle ère des relations sociales s'ouvrait dans ce pays et que la concertation devenait pour vous un élément incontournable de la gouvernance. En 2007, vous alliez jusqu'à faire voter un texte imposant de soumettre systématiquement à la concertation des partenaires sociaux toute réforme touchant au code du travail. Fin 2007, vous demandiez vous-même aux partenaires sociaux de négocier sur les règles de la démocratie sociale, ce qu'ils firent pour aboutir à la signature de la position commune entre la CGT et la CFDT d'un côté, le MEDEF et la CGPME de l'autre, accord que le Président de la République s'était engagé à respecter et à transcrire dans la loi.

En réalité, vous avez joué de ruse pour arriver à vos fins. Tous les partenaires sociaux, MEDEF en tête, ont très clairement dit dès le début de leurs travaux qu'ils souhaitaient travailler à la redéfinition de la représentativité mais ne voulaient pas engager le débat sur la durée du temps de travail. Vos menaces de légiférer sur la durée du travail dans l'hypothèse où les partenaires sociaux n'aborderaient pas cette question les ont conduits à s'entendre sur les termes d'une expérimentation. Celle-ci, incluse dans l'article 17 de la position commune, ouvrait la porte à des conditions d'accomplissement des heures supplémentaires au-delà du contingent annuel, qui pourraient être négociées directement dans les entreprises à condition de relever d'un accord signé par des organisations syndicales représentant au moins 50 % des salariés de l'entreprise.

Ces deux critères – l'aspect expérimental et l'adhésion majoritaire – constituent deux garde-fous indispensables. Mais vous avez rejeté ces avancées réelles, optant pour une transcription définie selon votre goût de l'accord conclu le 9 avril 2008, au mépris des principes fondamentaux du respect des partenaires sociaux et du dialogue social.

Pourtant, la démocratie sociale et sa modernisation nécessitent qu'un climat de confiance puisse s'établir durablement entre les organisations syndicales et patronales et le Gouvernement, pour que cette transcription d'accords sociaux dans le cadre de la loi soit le plus souvent possible la règle. Vous avez choisi de transgresser ce principe, déclenchant le début d'une nouvelle ère certes, mais pas celle que vous annonciez : une ère où la parole de l'État n'a plus de sens.

Agir ainsi me semble inopportun et contraire à l'évolution de la démocratie sociale, nécessaire pour que le progrès soit bénéfique aux salariés comme aux entreprises, alors que nous traversons une période d'incertitude économique forte, que traduisent les chiffres de la croissance.

On entend également dire que ce texte serait historique quant à la question des 35 heures. Constitue-t-il effectivement une remise en cause des 35 heures, ce qu'affirment certains membres de l'UMP, mais que le ministre dément régulièrement ? Il va falloir vous mettre d'accord.

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