Découvrez vos députés de la 14ème législature !

Intervention de Alain Vidalies

Réunion du 1er juillet 2008 à 15h30
Rénovation de la démocratie sociale et réforme du temps de travail — Exception d'irrecevabilité

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaAlain Vidalies :

Or c'est justement le moment que vous choisissez pour affirmer la prééminence de l'accord d'entreprise qui, faute d'application générale, ne permettra plus aux salariés français de disposer d'aucune protection contre le dumping sur les conditions de travail éventuellement pratiqué par les entreprises étrangères.

Vous porterez l'entière responsabilité de ces errements. Il est vrai que vous les assumez, dès lors que, dans le même temps, vous avez accepté la nouvelle directive européenne sur le temps de travail, laquelle légalise notamment l'opt out qui, dans certains pays, permet, par une convention de gré à gré, de faire travailler les salariés jusqu'à 60 heures par semaine. Il s'agit néanmoins d'une véritable volte-face du gouvernement français. Il semble en effet déjà loin le temps où Gérard Larcher, alors ministre du travail, affirmait, en 2006, devant notre assemblée : « La France refuse cette dérive. Il y va de la crédibilité du modèle social européen et de la protection de la santé des travailleurs. »

Déréglementation en Europe et acceptation en France, avec ce projet de loi, des conséquences prévisibles de la jurisprudence de la Cour de justice européenne : votre oeuvre est complète. Vous préparez aux salariés français un avenir placé sous la contrainte de la concurrence et de l'alignement permanent par le bas de nos règles sociales.

Par ailleurs, votre projet de loi porte atteinte à la Constitution, puisque vous abandonnez à la négociation d'entreprise la définition du repos compensateur, rebaptisé pour les besoins de la cause « contrepartie obligatoire en repos ». Dans sa décision du 29 avril 2004 sur la loi relative à la formation professionnelle tout au long de la vie et au dialogue social, le Conseil constitutionnel a en effet indiqué : « Considérant qu'aux termes du onzième alinéa du préambule de la Constitution, la Nation garantit à tous la protection de la santé, qu'il est loisible au législateur statuant dans le domaine qui lui est réservé par l'article 34 de la Constitution d'adopter des modalités nouvelles dont il lui appartenait d'apprécier l'opportunité, que cependant l'exercice de ce pouvoir ne saurait aboutir à priver de garanties légales des exigences de caractère constitutionnel… »

J'ajoute que, à l'époque, dans sa réponse au Conseil constitutionnel, le Gouvernement lui-même observait que « la loi déférée n'a nullement pour objet de permettre aux accords collectifs de déroger aux dispositions impératives résultant de la loi ou du règlement, notamment en matière de santé et de sécurité au travail ».

Or, aujourd'hui, vous faites disparaître le repos compensateur du code du travail pour confier, sans prescription particulière, aux accords d'entreprise le soin d'édicter des règles qui relèvent par nature de la responsabilité du législateur, au sens de l'article 34 de la Constitution. Il s'agit donc d'un cas manifeste d'incompétence négative, qui viole délibérément les dispositions du onzième alinéa du préambule de la Constitution.

Le Gouvernement et l'UMP ont affirmé vouloir sortir, avec ce projet de loi, du « carcan des 35 heures ».

Aucun commentaire n'a encore été formulé sur cette intervention.

Inscription
ou
Connexion