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Intervention de Daniel Paul

Réunion du 2 juin 2008 à 21h30
Modernisation de l'économie — Question préalable

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaDaniel Paul :

Sa modestie va en souffrir. (Sourires.)

M. Balligand, allais-je dire, a mis en évidence la question difficile de la banalisation du livret A. Les sommes ne sont pas minces. On parle en centaines de milliards. Le livret A représente 140,5 milliards. Ce n'est pas rien ! Tandis que le livret de développement durable représente 60 milliards d'euros. Ce n'est pas rien non plus !

Ces sommes sont extrêmement importantes et M. Balligand a sans doute eu raison d'appeler à dépasser les clivages politiques, si j'en juge par un article paru dans un quotidien, qui n'est pas mon journal habituel : « Les associations d'élus locaux inquiètes pour le logement social », signé notamment par Marc Censi, président de l'Assemblée des communautés de France, Jacques Bigot, président de l'Association des communautés urbaines de France, Michel Destot, président de l'Association des maires et grandes villes de France, et André Laignel, secrétaire général de l'Association générale des maires de France. Cela montre bien l'inquiétude ! L'article évoque la mise en danger de deux services d'intérêt général reconnus par Bruxelles : l'accessibilité bancaire et le financement du logement social.

Dans le même journal, Les Échos, je trouve sous la signature d'un journaliste : « Au-delà des commissions qu'il génère, le livret A constitue un instrument commercial important. Produit d'appel très populaire, il offre des contacts avec des millions de clients, avec la perspective de leur offrir des services supplémentaires. Les banques visent en priorité les plus gros livrets, les quelque 9 % dont l'encours dépasse 2 500 euros et qui représentent 61 % des encours globaux, notamment ceux qui sont au plafond, pour lesquels, affirme un banquier, “une commission de 0,1 % suffirait”. » Cela montre tout l'intérêt que porte le monde bancaire à ce secteur.

C'est un vieux rêve des banques que de mettre la main sur ce pactole. Comme l'a rappelé M. Balligand tout à l'heure, la décision de ne pas attendre que Bruxelles ait terminé l'examen de ce dossier est lourde de conséquences. Pourquoi ? Il y a, en effet, un risque de siphonnage – c'est le mot qu'a utilisé notre collègue. Les banques ont envie de mettre la main sur ces dizaines de milliards.

Madame la ministre, je vous avais interrogée, il y a quelques jours, sur un article signé par un autre grand de ce secteur, M. Jean Peyrelevade, paru dans un quotidien dont je ne rappellerai pas le nom. Dans votre réponse, vous aviez laissé entendre que M. Jean Peyrelevade ne connaissait pas bien le dossier. Je laisserai mes collègues juges.

Il existe également un risque de fragilisation de la Banque Postale : la remise en cause de son statut ébranlerait, en effet, le réseau postal dans son ensemble.

Un certain nombre de secteurs d'intérêt général peuvent pâtir également de votre réforme. M. Balligand a parlé de la politique de la ville, des hôpitaux, des universités : dans tous ces secteurs, des investissements sont socialement utiles et économiquement nécessaires. J'ajouterai le secteur des infrastructures de transports, pour lequel nous aurons, dans les années qui viennent, des besoins importants d'investissements. Vous allez sans doute proposer, dans les prochains mois, de faire appel au partenariat public-privé, alors que l'on dispose, avec la Caisse des dépôts et ses encours, de possibilités de prêts à long terme, ce qui permet de couvrir, pour une période relativement longue, les besoins de notre pays dans ce domaine.

Nous sommes face à un risque d'accaparement de l'épargne populaire par les banques, comme il existe une volonté d'accaparement des fonds de protection sociale des retraites par d'autres intérêts financiers, quelquefois les mêmes.

La question préalable défendue par M. Balligand est donc pour nous éminemment pertinente. C'est la raison pour laquelle nous la voterons. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche.)

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