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Intervention de Patrick Balkany

Réunion du 10 avril 2008 à 15h00
Accord france gabon relatif aux flux migratoires — Discussion d'un projet de loi

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaPatrick Balkany, rapporteur de la commission des affaires étrangères :

Monsieur le président, madame la secrétaire d'État, mes chers collègues, le 5 juillet dernier, la France et le Gabon ont signé un accord relatif à la gestion concertée des flux migratoires et au codéveloppement. Il s'agit du premier accord conclu dans le cadre de la nouvelle politique de gestion concertée de l'immigration, mise en oeuvre sous l'impulsion du Président de la République.

Avant d'aborder le contenu de cet accord, j'évoquerai le contexte dans lequel il s'inscrit dans la mesure où, d'une part, une attention croissante est désormais portée au lien entre migrations et développement et où, d'autre part, cette problématique sera au coeur de la présidence française de l'Union européenne.

Si la question migratoire est inséparable de préoccupations de sécurité et de contrôle des frontières, elle est également liée à des questions de développement. Les actions des travailleurs migrants résidant dans les pays industrialisés en faveur de leur pays d'origine apparaissent, en effet, comme une contribution majeure au développement de ce dernier. À cet égard, je ne citerai qu'un chiffre : en 2005, la Banque mondiale a évalué le volume des transferts de fonds des migrants vers leur pays d'origine à 232 milliards de dollars, soit nettement plus de deux fois le montant de l'aide publique au développement. Ces volumes, ainsi que les compétences acquises par les migrants dans leur pays d'accueil, conduisent naturellement à prendre davantage en considération le rôle des diasporas en tant qu'acteurs du développement des pays dont elles sont originaires.

Cette dimension nouvelle a été pleinement intégrée au niveau européen lors de la conférence ministérielle qui s'est tenue à Rabat en juillet 2006. Cette rencontre a, en effet, institué un partenariat novateur entre l'Union européenne et l'Afrique sur deux aspects essentiels. D'une part, il s'agissait de la première démarche associant les pays d'origine, de transit et de destination des migrations autour des routes migratoires qui relient l'Afrique et l'Europe. D'autre part, les politiques de développement et de codéveloppement, l'organisation des migrations légales et la lutte contre l'immigration irrégulière étaient, pour la première fois, prises en compte simultanément.

Dans le prolongement de la conférence de Rabat, la France s'est engagée, sous 1'impulsion du Président de la République, dans une démarche innovante, envisageant la question migratoire sous deux angles : l'apport des migrants installés en France à l'économie de leur pays d'origine et la régulation des flux migratoires par des mécanismes de réadmission et d'aide au retour.

Les accords de gestion concertée des flux migratoires et de codéveloppement – dont nous examinons aujourd'hui le premier, négocié par notre pays avec le Gabon – constituent l'un des instruments de cette nouvelle politique. Ces accords intègrent, en effet, des préoccupations de contrôle des frontières et de maîtrise des flux migratoires à une stratégie plus générale de soutien à des actions conduites par les migrants dans les domaines de la santé, de la formation et du développement économique. Il s'agit de faciliter la circulation des personnes, d'encourager une migration temporaire et d'inciter à un retour des compétences dans les pays d'origine, de manière à favoriser leur développement, non seulement à travers des transferts de fonds, mais surtout grâce à la formation et à l'expérience acquise. En 2007, quatre accords de ce type ont été négociés dont le présent texte avec le Gabon que je vais maintenant aborder.

Conformément aux orientations que je viens d'évoquer, l'accord qui nous est soumis aujourd'hui poursuit trois objectifs : favoriser la mobilité des compétences ; renforcer la coopération en matière de lutte contre l'immigration irrégulière ; soutenir les actions de codéveloppement en faveur du Gabon.

En premier lieu, cet accord a pour objet de faciliter la circulation des personnes entre les deux pays pour des motifs économiques, professionnels, familiaux ou médicaux.

S'agissant de l'accès à l'emploi en France des ressortissants gabonais, il prévoit la délivrance d'autorisations temporaires permettant de travailler dans certaines professions, énumérées dans une annexe de l'accord, pour lesquelles la situation de l'emploi sur le territoire ne sera pas prise en compte. Ces autorisations temporaires peuvent également être délivrées pour un complément de formation en entreprise, sur la base d'un contrat de travail d'une durée inférieure à douze mois.

L'accord ouvre, en outre, la possibilité de délivrer la carte « Compétences et talents » aux ressortissants gabonais ayant un profil et un projet utiles à notre pays ainsi qu'au Gabon. Je vous rappelle qu'afin d'éviter tout phénomène de pillage des cerveaux, cette carte, instituée par la loi du 24 juillet 2006 sur l'immigration et l'intégration, ne peut être renouvelée qu'une fois ; après six ans, son titulaire doit retourner dans son pays d'origine, afin de le faire bénéficier de l'expérience acquise en France.

Enfin, cet accord précise les conditions dans lesquelles les étudiants gabonais pourront compléter leur formation par une première expérience professionnelle en France, en autorisant la délivrance d'une autorisation provisoire de séjour de neuf mois, renouvelable une fois, pour les étudiants ayant achevé avec succès leur cycle d'études. Au terme de cette période, l'étudiant pourvu d'un emploi ou d'une promesse d'embauche pourra séjourner dans notre pays sans qu'on puisse lui opposer la situation de l'emploi, à condition que son activité professionnelle soit en relation avec sa formation et sa rémunération au moins égale à une fois et demie le SMIC.

Venons-en maintenant aux dispositions destinées à améliorer l'efficacité de la lutte contre l'immigration irrégulière.

Le présent accord organise la réadmission, dans le respect de la dignité et des droits fondamentaux, des ressortissants français ou gabonais en situation irrégulière sur le territoire de l'autre partie, ainsi que celle des ressortissants d'États tiers ayant séjourné préalablement sur le territoire d'une des parties. Afin de compléter ces mécanismes, la France offre également une expertise policière, comprenant notamment la formation des personnels chargés du démantèlement des filières d'immigration clandestine. Au-delà, l'accord renforce la coopération entre les deux pays en matière d'état civil et de lutte contre la fraude documentaire ; il s'agit en particulier d'améliorer la fiabilité de l'état civil gabonais, en proposant l'expertise de la France dans le domaine de la sécurité des titres.

Enfin, cet accord comprend un volet relatif au codéveloppement, désormais indissociable de la régulation des flux migratoires. Il s'agit de soutenir les initiatives des Gabonais résidant en France en faveur du développement de leur pays d'origine, notamment sous la forme d'un cofinancement de projets de développement local initiés par des associations de migrants, d'un accompagnement des initiatives économiques des migrants, d'un appui aux diasporas qualifiées pour des interventions au Gabon ou encore d'un soutien aux initiatives de développement des jeunes Gabonais résidant en France.

Pour conclure, je souhaiterais insister sur le caractère innovant de cet accord,…

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