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Intervention de Francis Vercamer

Réunion du 14 mai 2008 à 15h00
Lutte contre les discriminations — Discussion générale

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaFrancis Vercamer :

Monsieur le président, madame la secrétaire d'État, mes chers collègues, le projet de loi que nous allons adopter cet après midi vise à compléter la transposition de diverses directives communautaires relatives à l'égalité de traitement et à la lutte contre les discriminations. L'Europe, dans ce domaine, a développé une législation novatrice, qui a donné l'impulsion aux législations nationales, en particulier la nôtre, afin de mieux assurer le respect de l'égalité des chances.

Le groupe Nouveau Centre accueille favorablement ces dispositions complémentaires, dès lors qu'il nous paraît essentiel de renforcer la lutte contre les discriminations. Le texte apporte des précisions importantes concernant la définition des discriminations directes ou indirectes, la protection des victimes de discriminations et des témoins, l'aménagement de la charge de la preuve, le champ d'application des interdictions de discrimination, et les distinctions opérées entre discriminations et traitement différencié pour des motifs justifiés liés à l'âge ou au sexe. Ce sont autant d'éléments qui, nous le souhaitons, viendront apporter un peu plus d'efficacité à notre dispositif juridique.

Nous avons accueilli avec satisfaction l'adoption par l'Assemblée de l'un de nos amendements, visant à harmoniser les termes de l'article 4 de ce texte avec notre législation. Certaines associations craignaient, en effet, que les termes employés dans la rédaction initiale de l'article ne rendent plus difficile l'exposé de faits discriminatoires par la personne qui en a été victime. Sur ce point, toute ambiguïté est à présent levée.

Nous avons également été attentifs aux réponses apportées sur les conséquences de la réduction des délais de prescription en matière civile quand ils s'appliquent aux actions engagées par les salariés devant les prud'hommes.

Nous avons examiné attentivement les déclarations et propositions d'amendement de notre collègue sénateur M. Hyest, qui est à l'origine de ce travail d'harmonisation des délais de prescription, réduits de trente à cinq ans.

Nous avons pris acte de sa volonté de ne pas créer d'effets indésirables qui porteraient préjudice aux personnes victimes de discriminations dans la sphère professionnelle.

Nous avons également suivi avec intérêt les débats, au sein de cet hémicycle, à l'occasion de l'examen de la proposition de loi portant réforme de la prescription en matière civile.

Nous avons entendu Mme la garde des sceaux, ministre de la justice, affirmer que les précisions apportées sur cette question des délais de prescription ne changeaient en rien le principe d'aménagement de la charge de la preuve en matière de discrimination.

Nous prenons acte de ces affirmations essentielles si l'on ne veut pas introduire davantage d'incertitudes juridiques là où nous avons surtout besoin de clarté.

Nous resterons évidemment très vigilants sur ces questions et souhaitons que les conditions d'application de la loi bénéficient d'un suivi rigoureux, de sorte que toute éventuelle tendance à restreindre, dans les faits, les possibilités de recours contre les pratiques discriminatoires soit rapidement corrigée.

C'est la volonté du Gouvernement de mettre à la disposition de tous les outils permettant de mieux assurer l'égalité des chances et des parcours professionnels, pour lutter contre les discriminations. Nous ne mettons pas en doute cette volonté.

Le groupe Nouveau Centre pense qu'il faut aller plus vite et plus loin, car lutter contre les discriminations, c'est agir sur les mentalités, mais il s'agit certainement de l'action qui demande le plus de temps pour porter ses fruits.

Le hasard veut d'ailleurs qu'un quotidien du soir bien connu consacre aujourd'hui un article très intéressant à la formation des cadres en ce domaine. L'article montre les initiatives qui se développent, le plus souvent dans les grandes entreprises, pour mieux appréhender le phénomène des discriminations, combattre les préjugés et promouvoir la diversité.

C'est le signe d'une évolution des mentalités, même progressive, même contrainte par les obligations légales, qu'il faut encourager. Les pouvoirs publics doivent s'engager face à ce phénomène dont l'ampleur est réelle.

Près de 43 % des réclamations adressées à la HALDE en 2006 touchaient au domaine de l'emploi, 35 % des réclamations concernaient des discriminations liées à l'origine, plus de 18 % étaient motivées par des raisons touchant à la santé et au handicap, et plus de 6 % étaient liées à l'âge.

Les petites et moyennes entreprises doivent ainsi être incitées à prendre des mesures pour lutter contre les discriminations. L'État et les collectivités locales doivent également montrer l'exemple.

À cet égard, nous avons entendu votre volonté, madame la secrétaire d'État, d'attendre les conclusions de l'expérimentation de l'anonymat des curriculum vitae prévue dans le cadre de l'accord national interprofessionnel pour la diversité dans les entreprises, afin de tenir compte dans les décrets d'application de l'article 24 de la loi sur l'égalité des chances. Notre groupe est satisfait d'entendre le Gouvernement s'engager, enfin, à rédiger les décrets d'application de cette loi. Reste maintenant à connaître le contenu de ces textes.

Si je conçois bien que l'expertise des partenaires sociaux dans ce domaine est indispensable, je crois aussi utile d'y associer le volontarisme des parlementaires qui défendent cette idée depuis plusieurs années. Nous souhaitons donc disposer d'éléments de calendrier concernant la rédaction de ces décrets, et proposons que partenaires sociaux et parlementaires y soient associés.

Toutefois, il ne sert à rien d'aligner les outils de lutte contre les discriminations, si on ne leur donne pas du sens et si on ne se fixe pas des objectifs.

Mobiliser les volontés dans le cadre d'un ensemble cohérent d'actions et de mesures, c'est aussi une façon de faire évoluer les mentalités. C'est la raison pour laquelle, par exemple, nous pensons nécessaire qu'un plan pour l'égalité des chances à l'embauche et dans l'emploi soit élaboré. Ce plan, associant les partenaires sociaux, l'État, les collectivités locales, et l'ensemble des acteurs de l'emploi, permettrait d'accélérer la prise de conscience, de mieux faire connaître la loi, d'identifier davantage les pratiques discriminatoires, et d'encourager la diffusion des bonnes pratiques.

La politique de lutte contre les discriminations, en particulier en ce qui concerne l'accès à l'emploi et l'évolution dans la carrière, a en effet besoin de visibilité et de lisibilité.

Il est urgent de briser ce plafond de verre qui prive, souvent durablement, un certain nombre de nos concitoyens de l'accès à l'emploi, en raison de critères qui n'ont rien à voir avec leur qualification, leurs compétences ou leur expérience. C'est la condition de la pérennité de notre pacte républicain, et le texte que nous examinons aujourd'hui est l'un des outils qui nous permettra de mieux assurer l'égalité des chances.

C'est la raison pour laquelle le groupe Nouveau Centre votera en faveur de ce projet de loi. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)

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