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Intervention de Serge Letchimy

Réunion du 10 juillet 2007 à 21h30
Travail emploi et pouvoir d'achat — Discussion générale

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaSerge Letchimy :

La question du logement appellera aussi de ma part quelques réserves. La France s'est récemment honorée en faisant voter un droit au logement opposable. Votre projet nous propose aujourd'hui de faire de la France une terre de propriétaires. Dans des proportions différentes, la France et l'outre-mer sont des territoires où se développent et s'installent les mêmes misères. Ils ne peuvent donc ignorer les réalités accablantes que sont le nombre d'allocataires de minima sociaux, le nombre de mal-logés – deux à trois millions en France et outremer – les contingents de sans domicile fixe. Nos dépliants touristiques ne peuvent faire oublier qu'outre-mer, notre problème de logement ne se limite pas à la seule possibilité d'accéder aux crédits pour acquérir son logement.

Vous voulez faire de la France, une terre de propriétaires. Dans nos régions, nous faisons face, quant à nous, à d'incontournables et multiples exigences qui marquent de leurs sceaux la question de l'habitat. Nous devons loger des milliers de personnes qui attendent depuis trop d'années un logement décent. En 2006, les fonds de la ligne budgétaire unique ont été payés par les crédits de 2007. Je vous suggère de permettre à la défiscalisation de financer le logement social pour rattraper le retard. Nous devons surtout relever ce défi car l'habitat est le second facteur de dignité, voire de fierté. Sans travail et sans logement, l'homme n'est pas homme. Sans travail pour les parents et sans logement familial décent, l'enfant restera toujours sur le bord de la route, et l'école ne sera jamais pour lui le chemin de la réussite.

C'est pour toutes ces raisons que j'ai déposé, avec deux de mes collègues de l'outre-mer, un amendement visant à adapter à la situation de nos régions les mesures relatives au crédit d'impôt contenues dans l'article 3 du projet de loi. En l'état actuel, votre texte aurait, outre-mer, une application injuste sur le plan social puisqu'il ne bénéficierait qu'à ceux qui sont déjà en mesure de devenir propriétaires. On est là en pleine contradiction en termes de priorité budgétaire compte tenu de l'ampleur et des urgences en matière de financement du logement social tant au plan national qu'outre-mer.

Madame la ministre, l'imagination débordante de votre majorité contraste dangereusement avec l'absence de projets propres à l'outre-mer. Le côté marginal, voire anecdotique, de quelques textes tropicalisés au gré du bon vouloir ou de la compassion est à plus d'un titre inféodant au moment où le Président de la République plaide pour la diversité, pour l'intelligence et pour les initiatives régionales et locales.

Les faits sont têtus et on ne peut rien faire quand on s'affranchit des réalités du terrain. Votre majorité a procédé en mars 2003 à une révision constitutionnelle dont le but est de permettre une meilleure adaptation de la loi aux caractéristiques et contraintes particulières de chaque département et région d'outre-mer. C'est en se conformant à cette logique, qui constitue selon moi une nouvelle exigence, que nous travaillerons mieux et que nous ferons plus pour l'outre-mer, à condition d'être à même de répondre à un nouveau droit, sortant du standard et du dogme national : le droit au développement capable d'inventions et d'impulsions, car porté par des initiatives des territoires et la responsabilité locale.

À ces conditions, nous pourrons alors définir une véritable politique de l'emploi, de l'aménagement et du développement pour répondre sans exclusion, à une dynamique de progrès qui n'ignore ni la dignité humaine ni les réalités territoriales. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste, radical et citoyen et du groupe de la Gauche démocrate et républicaine.)

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