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Commission des affaires culturelles, familiales et sociales

Séance du 6 mai 2009 à 10h00

Résumé de la séance

Les mots clés de cette séance

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La séance

Source

COMMISSION DES AFFAIRES CULTURELLES, FAMILIALES ET SOCIALES

Mercredi 6 mai 2009

La séance est ouverte à dix heures.

(Présidence de M. Pierre Méhaignerie, président de la Commission)

La Commission procède à l'audition, ouverte à presse, de M. Christian Charpy, directeur général de Pôle emploi.

La séance est ouverte à dix heures.

PermalienPhoto de Pierre Méhaignerie

Nous accueillons aujourd'hui M. Christian Charpy, directeur général de Pôle emploi.

Je vais d'abord donner la parole à M. Dominique Tian, dont je rappelle qu'il avait été rapporteur du projet de loi dont est issue la loi du 13 février 2008 relative à la réforme de l'organisation du service public de l'emploi, pour qu'il nous présente un bilan de la mise en application de cette loi.

PermalienPhoto de Dominique Tian

La loi du 13 février 2008 visait à renforcer l'efficacité du service public de l'emploi en le recentrant sur ses usagers. Un opérateur unique, nommé Pôle emploi, a été créé à cet effet. Ce nouvel organisme reprend les missions et les moyens de l'Agence nationale pour l'emploi, l'ANPE, et du réseau opérationnel de l'assurance chômage, les Assédic, sans remettre en cause l'existence du régime paritaire d'assurance chômage.

Quinze mois après l'adoption de ce texte, il nous a semblé utile de procéder à un premier état des lieux. Je remercie M. Christian Charpy d'avoir accepté de venir répondre à nos questions.

J'observe tout d'abord qu'à ce jour la plupart des mesures d'application de la loi ont été adoptées, et cela dans des délais tout à fait satisfaisants. Pôle emploi a ainsi été mis en place le 19 décembre 2008. Cette création effective a cependant coïncidé avec la crise économique ; on compte ainsi 430 000 demandeurs d'emploi supplémentaires depuis août 2008, dont 243 000 depuis janvier dernier, ce qui complique singulièrement la situation.

Pôle emploi a fait l'objet de critiques dont la presse s'est largement fait l'écho. Certains se sont étonnés qu'une direction du marketing soit créée ; on s'est interrogé sur le prix exact du nouveau logo de l'institution ; le coût d'accès au nouveau numéro unique, le 3949, a fait l'objet d'un débat ; enfin, la question de la rémunération du directeur général a été soulevée. J'espère, monsieur Charpy, que vous voudrez bien nous apporter quelques éléments de réponse sur ces différents sujets.

Dans le contexte actuel de crise, on peut en outre s'interroger sur la faisabilité des objectifs quantitatifs qui ont été fixés dans la convention tripartite signée le 2 avril 2009 entre l'État, l'Unédic et Pôle emploi au sujet du suivi des demandeurs d'emploi. Faudra-t-il les adapter ?

Par ailleurs, pourriez-vous dresser un premier bilan des opérations de fusion sur le terrain ? Nous avons entendu dire qu'une centaine de rapprochements auraient été réalisés, alors que 956 sites mixtes doivent en principe voir le jour d'ici au mois de septembre. Pourrez-vous tenir cet objectif ?

Que dire par ailleurs de l'instauration d'un entretien unique d'inscription et des difficultés pratiques évoquées par certains, liées aux outils informatiques, à des résistances culturelles et à la mise en place du numéro unique ?

Pour faire face à l'augmentation du nombre de demandeurs d'emploi, le président de la République a annoncé le recrutement de 1 840 agents supplémentaires et la convention tripartite prévoit le redéploiement de certains conseillers. Ces mesures vous semblent-elles satisfaisantes, ou bien faudra-t-il de nouveaux renforts, comme le gouvernement l'a envisagé ?

L'ambiance sociale au sein de Pôle emploi constitue un autre sujet de préoccupation. Où en est la négociation sur la future convention collective, ouverte en janvier dernier ? C'est un sujet dont nous avons longuement débattu lors de l'examen du texte.

Que pensez-vous de l'article 19 du projet de loi relatif à l'orientation et à la formation professionnelle tout au long de la vie, qui prévoit le transfert de personnels travaillant pour l'Association nationale pour la formation professionnelle des adultes, l'AFPA, vers Pôle emploi ?

Pour l'année 2009, Pôle emploi bénéficiera d'une dotation budgétaire de l'État de 1,36 milliard d'euros et d'une contribution de l'Unédic de 2,9 milliards d'euros. Cela vous paraît-il suffisant ? Pensez-vous avoir les moyens budgétaires, immobiliers et mobiliers nécessaires au bon fonctionnement de votre institution ?

Pouvez-vous nous apporter quelques précisions sur le chiffrage des moyens alloués à la réorganisation administrative, sur le recours à des opérateurs de placement externes ainsi que sur les effets à plus long terme que pourrait avoir l'entrée en application de la future convention collective ? S'agissant toujours des moyens disponibles, notamment dans le domaine de l'immobilier, où en est le règlement financier global envisagé entre l'Unedic, Pôle emploi et l'État ?

Enfin, avez-vous constaté des progrès dans la coordination entre Pôle emploi et les autres acteurs du service public de l'emploi, en particulier les maisons de l'emploi ?

PermalienChristian Charpy, directeur général de Pôle emploi

Pôle emploi a été créé le 19 décembre 2008, c'est-à-dire avant la date prévue, qui était le 1er janvier 2009.

L'exercice n'était pas facile car il fallait solliciter les comités d'entreprise de l'ANPE, de l'Unédic et des 31 structures différentes dont les Assédic étaient constituées. Ma crainte était que le processus prenne un retard considérable, comme ce fut le cas lors de la fusion entre Gaz de France et Suez. Nous avons donc mené la concertation de telle façon que les comités d'entreprise soient en mesure de se prononcer avant le 19 décembre, et la saisine du Conseil d'État et du tribunal de grande instance de Paris par voie de référé a conduit à l'établissement du constat selon lequel la concertation avait été menée jusqu'à son terme.

Le nouvel organisme a ainsi pu voir le jour dans les délais prévus. Il compte aujourd'hui quelque 45 000 collaborateurs, dont 30 000 sont issus de l'ANPE et 15 000 des Assédic et de l'Unédic. Son conseil d'administration, composé de cinq représentants de l'État, cinq représentants des employeurs, cinq représentants des salariés, un représentant des collectivités territoriales et deux personnalités qualifiées, a commencé ses travaux. Là aussi, il a fallu s'adapter pour passer d'une organisation paritaire au sein de l'Unédic à une structure plus complexe. Plusieurs mesures indispensables au bon fonctionnement de Pôle emploi ont déjà été adoptées : nous avons défini une offre de services, identifié les conventions qu'il faudra passer avec l'Unédic, notamment en matière immobilière, et approuvé un règlement des marchés ainsi qu'une procédure comptable.

En revanche, le contexte a quelque peu évolué depuis le moment où la fusion a été décidée. De l'été 2005 jusqu'à mi-2008, le chômage avait en effet connu une régression forte et constante, le nombre de demandeurs d'emploi en fin de mois de catégorie 1, indicateur de référence de l'ANPE, passant de 2 495 000 à un peu moins de 1 900 000. À partir de fin 2007, il a cessé de régresser ; et depuis août 2008, le nombre de demandeurs d'emploi explose, ce qui entraîne une surcharge considérable pour Pôle emploi, avec 430 000 demandeurs supplémentaires en catégorie A, soit une hausse de près de 25 % en six mois, et il y a chaque semaine 25 à 30 % d'inscriptions de plus par rapport à la semaine correspondante de l'année précédente. Cette progression du chômage a été inégalement répartie sur le territoire : elle a été comprise entre 35 et 38 % en un an en Franche-Comté, et forte également en Rhône-Alpes, en Alsace, en Bourgogne, en Basse-Normandie et dans les Pays de la Loire.

À ces difficultés conjoncturelles s'ajoute un contexte social interne qui n'est pas simple. Pôle emploi rassemble en effet des personnels dont l'histoire, la culture et les pratiques professionnelles sont très différentes.

Pour ce qui est de la gouvernance, on ne saurait imaginer qu'une direction générale de cinq personnes suffise à animer un organisme de 45 000 personnes, qui doit s'occuper de 2,5 millions de personnes chaque mois et qui gère une masse financière de 35 milliards d'euros. Nous devons nous donner les moyens administratifs de gérer cette grande « entreprise » dont le rôle est de rendre des services. À cet égard, je me considère comme un chef d'entreprise. L'ANPE disposait déjà d'une direction du marketing. Si nous en avons maintenu une à Pôle emploi, c'est qu'il nous faut définir les services à rendre tant aux demandeurs d'emploi qu'aux entreprises.

S'agissant des aspects financiers de la fusion, il faut également tordre le cou à certaines rumeurs. Notre logo et notre charte graphique, qui ont fait l'objet d'un marché public passé par le ministère de l'emploi, ont coûté 150 000 euros, ce qui est bien loin des chiffres très fantaisistes qui circulent, et ce qui me semble raisonnable pour un logo qui va s'afficher sur 2 000 sites et figurer sur deux millions de lettres chaque mois. En ce qui me concerne, ma rémunération n'a pas évolué depuis mon recrutement le 8 avril 2005 comme directeur général de l'ANPE.

Quant au numéro téléphonique 3949, c'est un service qui existait déjà depuis environ un an du côté des Assédic. Il n'était guère envisageable, une fois la fusion réalisée, qu'il y ait un numéro de téléphone unique en matière d'indemnisation et qu'en matière de placement, il faille rechercher le numéro de l'agence de Pôle emploi. Nous avons donc décidé d'élargir le 3949 à l'ensemble des services de Pôle emploi destinés aux demandeurs d'emploi. Ce numéro unique de Pôle emploi a été mis en service dès le 5 janvier mais, je le reconnais, des difficultés sont apparues au tout début. Le premier jour, nous avons enregistré un million d'appels, ce qui dépasse largement les capacités de toutes les plateformes existantes. Grâce aux moyens supplémentaires que nous avons déployés, la situation est aujourd'hui stabilisée, à l'exception toutefois de quelques cas particuliers, notamment dans les départements d'outre-mer ; le taux d'aboutement, c'est-à-dire la possibilité d'obtenir un conseiller en ligne en direct, est en général supérieur à 80 %, ce qui correspond au service rendu par la plupart des plateformes téléphoniques.

D'autre part, il y a eu en effet un problème de coût d'accès. Nous avons, à l'origine, repris le contrat mis en place par l'Unédic, qui prévoyait une sur-taxation en cas d'appel depuis un téléphone mobile ou d'une ligne fixe gérée par un autre opérateur que France Télécom. Depuis la fin du mois d'avril, les opérateurs ont renoncé à toute surfacturation ; le coût de l'appel est désormais inclus dans le forfait d'abonnement. Je vais en outre proposer au conseil d'administration de fournir aux demandeurs d'emploi en grande difficulté financière des cartes prépayées pour appeler le 3949. Toutes les difficultés semblent donc réglées. Nous veillerons à ce que la qualité du service ne se dégrade pas au mois de septembre, le nombre d'inscriptions étant toujours élevé à cette période.

En ce qui concerne l'amélioration du service rendu aux demandeurs d'emploi, nous travaillons sur trois thèmes principaux.

Tout d'abord, nous voulons simplifier l'accès à nos services. Cela passe par le 3949, mais aussi par le site internet pole-emploi.fr, fusion entre anpe.fr et assedic.fr. En place depuis le 2 janvier dernier, ce site, que nous allons continuer à améliorer, permet d'accéder à l'ensemble de nos services d'indemnisation et de placement. On peut ainsi déposer un CV ou une offre d'emploi en ligne, consulter les offres, actualiser son dossier d'indemnisation. Le troisième élément de simplification est la mise en place des sites uniques, par fusion des 830 agences ANPE et des 630 agences Assédic pour constituer 950 sites mixtes d'ici à la fin de l'été. Nous avons donc organisé la concertation avec les organisations syndicales et les comités d'entreprise. Nous avons rencontré des difficultés dans certaines régions, mais la phase de consultation est achevée dans cinq cas sur six. Une centaine de sites mixtes ont déjà vu le jour, nous devrions en être à peu près à la moitié en juillet et avoir quasiment terminé d'ici à la fin du mois de septembre.

Ensuite, nous voulons personnaliser la relation avec les demandeurs d'emploi, chacun ayant un conseiller personnel en mesure de lui répondre aussi bien en matière d'indemnisation que de placement. Pour cela, nous avons 30 000 agents à former, les uns aux techniques d'indemnisation, les autres aux techniques de placement. L'objectif est d'achever cette formation avant la fin de l'année 2009. Jusqu'à présent, 4 500 à 5 000 personnes ont été formées et ont pu ensuite prendre leur poste dans un guichet unique. C'est naturellement un programme lourd, qui nécessite de remplacer temporairement les personnels en formation.

Nous avons également veillé à simplifier les parcours de retour à l'emploi en distinguant un parcours de base et un parcours renforcé pour les personnes éprouvant des difficultés particulières. S'il existe toujours des parcours différents, notre objectif est de personnaliser le service rendu. D'autre part, il n'y a plus de variation des aides selon que le demandeur d'emploi est, ou non, indemnisé. Depuis le 1er janvier 2009, elles sont en effet accordées en fonction des besoins réels, notamment en matière de formation et de mobilité.

Enfin, l'objectif fixé par la loi et par la convention tripartite était de réduire le nombre de demandeurs d'emploi suivis par chaque conseiller. La dégradation de la situation économique ne favorise pas une telle évolution : on compte désormais 90 demandeurs d'emploi par conseiller, contre 75 au début du mois d'août 2008. Dans certaines agences, cela peut aller jusqu'à 120, 140, voire 180. C'est pourquoi les renforts annoncés par le gouvernement sont essentiels. Peut-être faudra-t-il encore des moyens complémentaires, mais nous n'avons pas vocation à tout faire seuls : nous avons des structures cotraitantes, comme les missions locales, l'Apec, Cap emploi, les maisons de l'emploi ; et il existe aussi des opérateurs privés de placement, que nous comptons solliciter dans les semaines à venir. Nous avons lancé un appel d'offres pour la prise en charge d'une centaine de milliers de demandeurs d'emploi par an.

J'en viens à la question des personnels de l'AFPA. L'article 19 du projet de loi relatif à l'orientation et à la formation professionnelle tout au long de la vie prévoit effectivement un transfert des agents chargés de missions d'orientation professionnelle vers Pôle emploi avant le mois d'avril 2010. Dans un rapport remis à M. Laurent Wauquiez, secrétaire d'État chargé de l'emploi, le directeur général de l'AFPA et moi-même avons proposé que les 950 agents concernés soient transférés dans des services spécifiques. En effet, il n'est pas question de les disperser dans nos agences ; nous comptons plutôt les faire intervenir dans le cadre de plateformes régionales ou départementales spécifiquement consacrées à l'orientation.

Concernant le budget pour 2009, nous disposons de 4,5 milliards d'euros de crédits, dont 1,3 milliard en provenance de l'État et 3 milliards de l'Unédic, auxquels s'ajoutent des moyens complémentaires relevant du Fonds social européen et de différents partenariats avec les collectivités locales et divers organismes. Pour le moment, ces moyens me semblent suffisants. Ce qui compte en effet, ce ne sont pas tant les moyens financiers que leur mobilisation. La difficulté actuelle est de recruter et de déployer rapidement les effectifs dont nous avons besoin.

Il reste que la conjoncture économique nous contraint à décaler dans le temps certaines évolutions. La généralisation des plateformes de prospection d'emplois se fera ainsi un peu moins vite que prévu, non seulement parce que nous avons besoin de mobiliser plus de conseillers pour suivre les demandeurs d'emplois, mais aussi parce que le gisement des offres d'emploi est moins abondant. Nous avions également prévu de faire bénéficier les jeunes d'un suivi mensuel dès le premier mois, mais la tâche se complique singulièrement du fait de la très forte augmentation du nombre de jeunes inscrits – 37 % de plus en moyenne, et même 50 % pour les jeunes hommes en un an. Il faudra donc travailler avec les missions locales et avec d'autres partenaires extérieurs pour accélérer ce dispositif.

Toute personne s'inscrivant à Pôle emploi pourra néanmoins bénéficier d'un entretien dès le premier jour ; elle aura ensuite accès à un atelier de recherche d'emploi dans les trois premiers mois de son inscription ; puis elle pourra faire l'objet d'un suivi mensuel. Dans un délai de quinze jours suivant son inscription, elle connaîtra également le nom de son conseiller personnel.

Pour ce qui est des relations avec l'Unédic, il nous reste à élaborer un règlement financier global. Un accord prévoit déjà que l'ensemble du patrimoine immobilier et mobilier de l'Unédic est mis à la disposition de Pôle emploi pour un montant annuel de 50 millions d'euros. D'autres points demeurent toutefois en suspens car nous avons hérité de l'Unédic des créances, mais aussi des dettes. Nous devrons ainsi financer les droits aux congés payés et les indemnités de départ en retraite des personnels qui nous été transférés, ce qui représente plusieurs centaines de millions d'euros. Nos relations avec l'ANPE sont en revanche plus simples, l'ensemble des actifs et des passifs ayant été transféré en même temps.

Concernant nos liens avec les organismes co-traitants et sous-traitants, ainsi qu'avec les collectivités locales, je répète que notre objectif n'est pas de tout faire tout seuls. Nous n'en aurions pas les moyens, et ce serait également contraire à notre objectif de territorialisation des politiques de l'emploi. Pour l'année 2009, nous avons décidé de prolonger toutes nos conventions avec les missions locales, l'Apec, Cap emploi et les maisons de l'emploi. Nous succéderons d'ailleurs aux Assédic et à l'ANPE au sein des conseils d'administration, et nous comptons travailler avec nos partenaires dans un esprit de complémentarité.

Une fusion d'une telle ampleur ne peut pas se faire du jour au lendemain. Mais cela ne nous empêche pas de réaliser très vite des progrès dont nous mesurons déjà les effets. Chacun se souvient, par exemple, que la rapide augmentation du chômage en 1992 et 1993 s'était traduite par des files d'attente devant les Assédic et les antennes de l'ANPE. Aujourd'hui, il y a certes du monde dans les agences, mais nous pouvons recevoir 92 % des personnes dans les cinq jours suivant leur inscription par téléphone ou par Internet, et 94 % des dossiers sont définitivement traités en moins de quinze jours.

Il est vrai qu'il y a encore des problèmes, parfois plus médiatisés que les succès que nous remportons. Toutefois, si certains d'entre eux correspondent à des dysfonctionnements imputables à Pôle emploi, d'autres relèvent plutôt d'une insatisfaction à laquelle nous ne pouvons pas grand-chose. C'est ce que j'ai pu constater en lisant certains des courriers que j'ai reçus après avoir donné mon adresse mail lors d'une émission télévisée, dans lesquels des personnes se plaignaient par exemple de ne pas être indemnisés, alors qu'elles ne réunissaient pas les conditions requises. S'il reste bien des progrès à faire, il faut admettre que nous ne pouvons pas réaliser en trois mois une fusion qui nécessiterait trois ans de travail dans la plupart des entreprises et des administrations.

PermalienPhoto de Pierre Méhaignerie

J'ai compté 76 députés présents ce matin pour vous écouter, monsieur Charpy. Cela témoigne d'une réelle inquiétude sur le terrain, mais aussi d'une très forte attente.

Personne ne rejette la fusion, mais les demandeurs d'emploi ont besoin d'espoir, de même que vos personnels. Pour cela, ne faut-il pas essayer d'éclaircir l'horizon en mettant en avant ce qui marche et en s'inspirant des bonnes solutions ? Il me semble qu'il faut faire du benchmarking.

Je redoute surtout que les acteurs de terrain ne soient écrasés par les structures nationales ou régionales. Nous avons trop tendance, dans notre pays, à constituer des doublons au niveau central et à monter des usines à gaz sans lien avec les réalités locales.

Je donne la parole à M. Yves Albarello, qui était rapporteur pour avis au nom de la commission des affaires économiques de la loi du 13 février 2008 relative à la réforme de l'organisation du service public de l'emploi.

PermalienPhoto de Yves Albarello

Il faut du temps pour fusionner deux entreprises comptant au total 45 000 personnes et aux cultures différentes. C'est encore plus compliqué dans un contexte de crise économique mondiale. Il reste que c'est un beau pari.

Compte tenu des difficultés actuelles, pensez-vous que le déploiement de 1 800 agents supplémentaires suffira ? Nous sommes loin de l'objectif d'un conseiller pour 60 demandeurs d'emploi. Dans combien de temps pensez-vous que Pôle emploi pourra atteindre sa vitesse de croisière ?

PermalienPhoto de Bernard Perrut

L'un des objectifs du nouvel opérateur est de mettre en synergie les offres de service et de tisser des liens avec les réseaux spécialisés d'accueil et d'accompagnement. Or les missions locales ont pratiquement rempli leurs objectifs annuels d'accueil de jeunes demandeurs d'emploi dès la fin du premier trimestre. Quelle réponse comptez-vous apporter, à court terme, au dépassement des objectifs d'accueil en co-traitance ?

À moyen terme, quelle est votre position à l'égard des 30 propositions adoptées par le Conseil national des missions locales, le 29 avril dernier, en vue de rendre plus complémentaires les offres de services du réseau des missions locales et celles de Pôle emploi ? À long terme, allez-vous développer des outils spécialisés pour le public jeune, comme l'a fait par exemple Emploi Québec ?

On peut également s'interroger sur les différences de situation entre les territoires en matière d'emploi. Dans quelle mesure votre organisation territoriale prendra-t-elle en compte ces disparités ? Comment ferez-vous pour assurer une véritable égalité de traitement ? Enfin, comment les politiques menées par les services publics régionaux vont-elles s'articuler avec les priorités définies au niveau national ?

PermalienPhoto de Marcel Rogemont

En présentant cette nouvelle structure, Mme Christine Lagarde avait évoqué la suppression des maisons de l'emploi. Nous avons compris que ce ne serait finalement pas le cas, ce qui est heureux. Toutefois, il serait sans doute bon d'améliorer la lisibilité du dispositif. Sur un même territoire, on peut en effet compter jusqu'à trois intervenants potentiels.

D'autre part, j'aimerais savoir il a été proposé à certains conseils généraux, notamment celui d'Ille-et-Vilaine, de créer des postes spécifiques pour les allocataires du RMI, et bientôt du RSA. Vos conseillers n'ont-ils pas vocation à s'occuper de tous les publics, qu'ils soient ou non éloignés de l'emploi ?

Enfin, chacun sait que de nombreuses personnes attendent beaucoup trop longtemps – parfois cinq mois – avant d'obtenir des rendez-vous jugés satisfaisants avec les services de l'emploi, notamment en matière de formation. Que comptez-vous faire pour remédier à cette situation ?

PermalienPhoto de Roland Muzeau

Tout d'abord, j'aurais préféré que vous vous présentiez à nous comme le dirigeant d'un grand service public, et non comme un chef d'entreprise. C'est sans doute l'effet d'une certaine mode…

Le Gouvernement a justifié la fusion des services de l'emploi au nom de la simplification et de l'efficacité. Or, nous sommes loin du compte. Si la situation est difficile dans ce pays, ce n'est pas seulement à cause de la détérioration des conditions économiques, c'est aussi à cause de certains dysfonctionnements du service public.

À Gennevilliers et à La Garenne, par exemple, qui sont des bassins d'emploi en grande difficulté, vos agents s'occupent chacun de 150, voire de 180 dossiers car il manque une dizaine de postes. On est donc très loin de l'objectif de 70 demandeurs d'emploi suivis par chaque agent. On constate également un turnover très important des effectifs, qui s'explique notamment par les difficultés rencontrées par le public concerné, souvent issu de l'immigration. Face à la charge de travail, certains agents ne souhaitent pas rester en poste. Pôle emploi ne devrait-il pas répartir ses moyens en faisant en sorte de les renforcer là où il y a le plus de difficultés ?

D'autre part, que pensez-vous de l'objectif prêté au Gouvernement de doubler le nombre de personnes suivies par des sociétés privées ?

Enfin, quel dispositif comptez-vous mettre en place en faveur des bénéficiaires du RSA ?

PermalienPhoto de Francis Vercamer

Sans remettre en cause le principe de la fusion des services, on peut tout de même se poser quelques questions.

Tout d'abord, la mise en relation par téléphone améliore-t-elle la qualité du service et humanise-t-elle vraiment le système ?

Je m'interroge également sur le rythme de formation des agents, étant donné les chiffres que vous avez annoncés. Comment comptez-vous faire pour achever cette formation avant la fin de l'année ? Allez-vous réduire la durée des formations, comme le disent les délégués du personnel ?

Quels sont vos objectifs en ce qui concerne le nombre de demandeurs d'emploi dont s'occupe chaque agent – critère important pour la qualité du service ?

À la suite d'un amendement que j'avais déposé, les compétences de Pôle emploi ont été élargies aux parcours d'insertion sociale et professionnelle. Aurez-vous les moyens de remplir cette mission, ou bien allez-vous la sous-traiter ?

Enfin, quel type de partenariat entendez-vous développer avec les maisons de l'emploi ?

PermalienChristian Charpy, directeur général de Pôle emploi

Je crois effectivement que nous devons nous inspirer de ce qui se fait dans d'autres pays, notamment le Danemark, les Pays-Bas, l'Allemagne et la Grande-Bretagne, où je me rends très régulièrement. Je me suis ainsi aperçu que nous rencontrions les mêmes difficultés et que nous avions souvent recours aux mêmes solutions que nos voisins, notamment le renforcement des effectifs, ou encore le développement de plateformes centralisées.

J'ajoute que le benchmarking vaut également au plan interne : il y a, par exemple, des régions où la coopération avec les maisons de l'emploi produit des résultats très intéressants.

Pour ce qui est des structures, je fais avec ce que j'ai : nous avons commencé par regrouper les services, puis nous verrons quelles évolutions nous pouvons favoriser, sachant que l'on ne peut pas brutalement demander à un agent en poste dans une direction générale de rejoindre des services implantés au niveau local. En revanche, nous avons calculé que l'on pourrait redéployer, dans un délai de trois ans, près de 4 500 personnes, soit 10 % de nos effectifs, vers les services opérationnels grâce à l'amélioration du service rendu, à la suppression de certains doublons et à l'allégement des fonctions de soutien. Les départs à la retraite favoriseront également ce processus.

D'autre part, nous allons répartir les 1 840 postes supplémentaires qui nous ont été attribués en fonction des taux de chômage constatés au niveau local et de leur évolution, ainsi qu'en fonction des dotations actuelles. Il ne faut pas non plus oublier que nous allons pouvoir redéployer 1 300 personnes actuellement en poste au service du recouvrement des cotisations d'assurance chômage car leurs fonctions seront assurées par les Urssaf à partir de 2011.

Afin d'améliorer le service rendu, nous souhaitons effectivement réduire le nombre de demandeurs d'emploi suivis par chaque conseiller, mais cela ne signifie pas qu'il faut nécessairement augmenter de façon exponentielle nos effectifs. Actuellement, la formation prend du temps, et l'on peut également espérer que la situation de l'emploi va s'améliorer à terme.

Nous allons aussi faire appel à d'autres partenaires. Le nombre de demandeurs d'emploi pris en charge par nos sous-traitants devrait ainsi passer, à terme, de 40 000 à 100 000, voire 120 000. Les opérateurs du secteur privé utilisent en effet des techniques et des méthodes intéressantes que nous ne devons pas négliger. Par ailleurs, il serait dommage de ne pas exploiter les capacités techniques des entreprises de travail temporaire, lesquelles sont peu sollicitées dans la conjoncture actuelle.

PermalienPhoto de Pierre Méhaignerie

Pouvez-vous nous dire où en sont les appels d'offres ?

PermalienChristian Charpy, directeur général de Pôle emploi

Les offres doivent être remises à la mi-mai, de sorte que nous devrions être en mesure d'attribuer les marchés à la fin du mois de juin ou au début du mois de juillet. Nous disposerons donc de capacités supplémentaires au mois de septembre, au moment où les inscriptions au chômage risquent d'augmenter du fait des mouvements de sortie hors du système scolaire et universitaire.

Nous proposerons également aux missions locales d'augmenter le nombre des personnes qu'elles suivent et nous relèverons en proportion les montants que nous leur versons. D'autre part, nous comptons appliquer l'ensemble des conclusions retenues par le Conseil national des missions locales. Nous considérons en effet ces structures comme des partenaires essentiels. Les missions locales accueillent des jeunes qui ne viennent pas s'inscrire à Pôle emploi ; en commençant par les accompagner dans leur projet de vie, elles parviennent par la suite à les accompagner dans la vie professionnelle.

En ce qui concerne les maisons de l'emploi, il me semble que nous avons besoin de plus de lisibilité. Elles gagneraient à se placer davantage dans une démarche de coordination des intervenants. Afin de favoriser la territorialisation des politiques, j'ai donné pour instruction à tous nos responsables de travailler en partenariat étroit avec elles.

J'en viens à la question du nombre de personnes suivies par chaque conseiller. Il y a effectivement des sites où il est très élevé, ce qui peut s'expliquer par un taux de chômage plus important au niveau local, mais aussi par un turnover plus élevé des équipes. Afin d'éviter que les départs n'occasionnent une surcharge de travail trop importante, il faut simplifier et fluidifier notre politique de recrutement. C'est pour cette raison que nous n'organisons plus de concours à échéances périodiques, comme le faisait l'ANPE.

Pour ce qui est du 3949, il me paraît indéniable que l'instauration d'un numéro unique présente bien des avantages pratiques et permet de rapprocher les demandeurs d'emploi de nos services. Toutefois, je suis bien conscient que ce n'est pas l'alpha et l'oméga, et j'ai par exemple donné la consigne de recevoir les personnes qui se présentent dans les agences, au lieu de les renvoyer vers une plateforme téléphonique pour prendre un rendez-vous.

Tous les bénéficiaires du RSA auront accès aux services de Pôle emploi. Nous allons proposer aux conseils généraux, dans le cadre de conventions d'objectifs et de moyens, d'offrir un service renforcé à ceux qui rencontreraient des difficultés particulières, à l'instar de ce qui se fait dans le cadre du RMI.

Un mot enfin sur notre convention collective, qui est en cours de négociation : les dispositions du code du travail n'étant pas directement applicables, il faut que nous nous mettions d'accord sur un calendrier, puis que nous fassions des efforts mutuels. Nous devons en effet préserver les intérêts légitimes des salariés sans augmenter les frais de personnel dans des proportions démesurées. Même si la tâche est ardue, je pense que nous y arriverons car nous sommes déjà parvenus à signer un certain nombre d'accords depuis la création de Pôle emploi.

PermalienPhoto de Marisol Touraine

En matière de benchmarking, quels dispositifs souhaiteriez-vous emprunter à nos voisins étrangers, notamment les pays nordiques ? À l'inverse, quels sont les aspects du système français que vous trouvez performants ?

Dans mon département, je constate que le taux de retour à l'emploi des personnes prises en charge par Pôle emploi est inférieur à celui des demandeurs dont s'occupent certaines structures d'insertion, alors qu'il n'y a pas de différence dans le ratio de suivi. Comment expliquer cet écart, nul ne remettant en cause la compétence des personnels de Pôle emploi ?

D'autre part, pourquoi faudrait-il que les conseils généraux s'adressent à Pôle emploi pour les bénéficiaires du RSA au lieu de se tourner vers les partenaires avec lesquels ils ont l'habitude de travailler, notamment certaines associations ? Vous avez d'ailleurs indiqué que ce type d'accompagnement n'entrait pas dans vos missions de base, et que vous comptiez facturer un service renforcé. Faut-il en conclure que vous n'avez pas vocation à prendre en charge les bénéficiaires du RSA ?

PermalienPhoto de Michel Herbillon

À Maisons-Alfort, dont je suis le député-maire, les locaux prévus pour Pôle emploi sont disponibles, mais ils demeurent vides. Quand passerons-nous enfin du virtuel au réel ? Pour reprendre l'expression utilisée par le président Méhaignerie, j'aimerais avoir de l'espoir, moi aussi.

En outre, je serais heureux de savoir qui fait quoi en matière d'emploi : ma circonscription dispose d'une mission locale depuis le début des années 1990, et elle bénéficie également d'une maison de l'emploi ; à cela devrait s'ajouter demain un site de Pôle emploi. Or, ces trois structures ont le même objectif : venir en aide aux personnes privées d'emploi. Il faudrait maintenant définir avec plus de précision les responsabilités de chacun dans le parcours de recherche d'emploi. Evitons les doublons !

PermalienPhoto de Dominique Dord

Il y a les questions de logistique et de mécanique, fort complexes au demeurant, mais ce qui nous intéresse le plus, ce sont les résultats. Pouvez-vous nous donner une bonne raison d'espérer que la fusion des structures contribuera à améliorer la situation ?

J'aimerais également savoir quelle autonomie vous comptez accorder aux responsables locaux de Pôle emploi. Il faudrait leur donner la possibilité de monter des opérations avec les entreprises et les collectivités locales.

PermalienPhoto de Jean-Patrick Gille

Etes-vous sûr, monsieur Charpy, que vous avez les moyens nécessaires pour réduire le nombre de personnes suivies par chaque conseiller et pour assurer le suivi des bénéficiaires du RSA, alors même que les trois quarts de vos ressources proviennent de l'Unédic, dont chacun connaît les difficultés dans la conjoncture actuelle ? Je ne comprends pas que vous fassiez preuve d'une telle assurance. Lorsque vous nous avez présenté le projet de fusion, l'an dernier, vous nous avez expliqué que vous ne vouliez pas d'un mammouth, mais plutôt d'une gazelle : il me semble que la gazelle a les jambes bien lourdes...

Je ne reviens pas sur la question des missions locales, déjà évoquée par Bernard Perrut, mais il me semble qu'il faudrait effectivement être en mesure de débloquer plus facilement les fonds.

Pour ce qui est de la gouvernance, j'avoue un certain étonnement : vous vous adressez tantôt à nous comme un chef d'entreprise, tantôt comme le dirigeant d'une ANPE « plus », nous exposant ce qu'il faut faire. Mais j'aimerais surtout savoir comment vous envisagez l'intervention de Pôle emploi dans le domaine de la formation et de l'orientation, quel rôle vous comptez jouer concernant le RSA, et avec quels interlocuteurs vous allez traiter dans les bassins d'emploi. Accepterez-vous qu'un dialogue s'engage avec les élus pour renforcer l'efficacité du système ?

PermalienPhoto de Yves Bur

Pouvez-vous nous expliquer les avantages de la fusion des structures face à la crise ?

Comment envisagez-vous d'appliquer l'obligation faite aux demandeurs d'emploi d'accepter une offre après deux refus ?

Enfin, ne pensez-vous pas que les personnes qui sont aujourd'hui parquées dans les missions locales pourraient, elles aussi, profiter de l'efficacité de Pôle emploi ? Pourquoi a-t-on laissé ce dispositif en dehors de la fusion ?

PermalienPhoto de Pierre Morange

Confirmez-vous l'existence de problèmes de compatibilité entre les systèmes d'information et de communication de l'ANPE et ceux des Assédic ? Avez-vous programmé des investissements pour améliorer les échanges de données ? Le cas échéant, quel calendrier avez-vous retenu ?

Je m'interroge par ailleurs sur la philosophie de Pôle emploi. De quelle façon peut-on éviter de sombrer dans l'approche aristocratique qui prévaut trop souvent ? Il me semble que l'éthique républicaine impose que Pôle emploi soit ouvert à tous les types de publics, cadres et non cadres.

Étant un acteur pivot du système, Pôle emploi aura également pour vocation d'impulser les mouvements d'ensemble, notamment afin de promouvoir une flexisécurité à la française. Comment comptez-vous remplir cet objectif ?

PermalienChristian Charpy, directeur général de Pôle emploi

Les évolutions actuelles des services publics de l'emploi en Europe sont assez convergentes. D'abord, partout on s'oriente vers une plus grande proximité entre l'indemnisation et le placement ; cela s'est fait il y a des années en Allemagne, plus récemment en Grande-Bretagne. Ensuite, une relation plus forte s'établit entre le placement et l'insertion, c'est-à-dire entre le service public de l'emploi et les collectivités territoriales en charge de l'insertion ; nous pourrions nous inspirer dans ce domaine des exemples allemand et danois. Mais nous avons, plus que les services étrangers, une bonne expérience dans l'articulation entre ce qui se fait en interne et ce qui est fait par les partenaires extérieurs. On dit souvent que les Britanniques font beaucoup appel aux opérateurs privés de placement ; en réalité ils le font moins que nous, et les Allemands ne le font pas du tout.

En ce qui concerne le RSA, nous souhaitons que Pôle emploi soit dans la même situation que l'ANPE depuis 2005 vis-à-vis des départements : depuis la décentralisation du RMI et de l'accompagnement, l'ANPE a passé des conventions avec 75 départements, qui ont accepté d'assumer la charge financière de personnels. Le conseil général du Rhône, par exemple, prend en charge 50 personnes au sein de Pôle emploi. S'agissant d'un public pour lequel la problématique de retour à l'emploi est plus difficile, et sachant qu'on devrait passer de 350 000 demandeurs d'emploi Rmistes à un nombre de bénéficiaires du « RSA socle » compris entre 600 000 et 800 000, il paraît envisageable de mobiliser des moyens complémentaires de ceux de Pôle emploi. On le fait bien pour les personnes licenciées pour cause économique, avec les conventions de reclassement personnalisées – CRP – et les contrats de transition professionnelle – CTP. Cela étant, je comprends bien que les départements puissent connaître eux aussi des difficultés financières.

Le financement en provenance de l'Unédic a été fixé à 10 % des cotisations. Ma crainte était que leur niveau baisse, ce qui aurait eu des répercussions sur Pôle emploi deux ans plus tard, soit en 2011, mais ce n'est pas le cas. À niveau de cotisations inchangé, la masse salariale continuant, bon an mal an, à augmenter, nous n'avons pas de difficultés à court terme. Pour la CRP et le CTP, l'Unédic va nous apporter un financement en plus.

Si pour 2009 nous n'avons pas de difficultés financières, pour 2010 et 2011 la situation dépendra de l'évolution du chômage.

Quant aux espoirs, on peut en avoir quelques-uns. Alors qu'il y a 25 % de chômeurs en plus, nous avons depuis février-mars rétabli la situation du service. En novembre, avant la fusion, il y avait 100 000 dossiers non traités dans les Assédic ; actuellement, il y en a 50 000 – ce qui correspond à deux jours de traitement. Par ailleurs, alors qu'il y avait auparavant deux entretiens, depuis février il n'y en a qu'un pour les demandeurs d'emploi non indemnisés et à partir de septembre, ce sera le cas pour tous. La formation des personnels, qui concerne ceux qui sont en contact avec les demandeurs d'emploi, soit 22 000 conseillers ex-ANPE et 9000 conseillers ex-Assédic, est en cours et se poursuivra en 2010.

En ce qui concerne l'informatique, les systèmes sont partiellement compatibles – et donc partiellement incompatibles. Le déploiement du poste unique de travail qui permettra d'accéder à l'ensemble des applications se fera à partir de septembre. D'ores et déjà, un conseiller ex-Assédic peut accéder aux principales opérations de placement qui résultent des systèmes ANPE et un conseiller ex-ANPE peut accéder au système d'indemnisation des Assédic.

Concernant les ORE – offres raisonnables d'emploi –, le système défini par la loi est mis en application. Les sanctions sont exceptionnelles ; l'objectif est d'amener les personnes à la reprise d'un emploi durable, non de les forcer à prendre un emploi dont elles ne veulent pas. Au-delà de la polémique, je puis vous assurer que le dispositif fonctionne sans difficultés.

Pour répondre à M. Herbillon, je voudrais revenir sur le climat social. Nous avons eu de grosses difficultés pour consulter les comités d'entreprise sur la fusion. Nous en avons maintenant pour les consulter sur les organigrammes et sur les sites mixtes. En Ile-de-France, nous avons organisé huit réunions du comité d'entreprise transitoire mais elles n'ont abouti à rien, en raison d'un refus de siéger ou d'évoquer les sujets. Je déplore ce blocage. Le « juge de paix » sera soit le tribunal de grande instance de Bobigny, qui doit se prononcer dans les jours prochains, soit les élections professionnelles.

PermalienPhoto de Jean Ueberschlag

Je me réjouis que le recouvrement des cotisations d'assurance chômage soit désormais assuré par les Urssaf ; j'espère qu'il en sera de même un jour pour les cotisations de formation professionnelle. En ce qui concerne le transfert à Pôle emploi du « personnel d'orientation » de l'AFPA, c'est-à-dire de 920 psychologues, je m'interroge sur l'efficacité de psychologues pour orienter des demandeurs d'emploi. Ne faudrait-il pas que les services d'orientation comptent davantage de personnes connaissant les métiers ? Par ailleurs, le fait que ce personnel continue à être rémunéré par l'AFPA me semble un peu difficile à accepter mais ne m'étonne pas, les rémunérations versées par l'AFPA étant bien supérieures à celles que versent les GRETA ou l'ANPE. Ne faudrait-il pas songer à harmoniser ces rémunérations ?

Enfin, qu'en est-il des tentatives de rapprochement contractuel dont M. Michel Bernard, pour l'ANPE, et M. Gilbert Hyvernat, pour l'AFPA, avaient pris l'initiative ? Il y a eu beaucoup de contrats de collaboration mais nous n'en avons pas eu de bilan.

PermalienPhoto de Monique Iborra

Les exigences posées par la loi du 13 février 2008 nous faisaient prévoir que sa mise en application serait longue et difficile. Pour notre part, nous avons voté contre ce texte, qui procédait d'une démarche technocratique et centralisatrice. Nous savions bien que les ambitions affichées ne correspondaient pas à la réalité du terrain.

Pôle emploi a désormais en charge l'ensemble des formations, non pas seulement pour les personnes prises en charge par les Assédic, mais pour tous les demandeurs d'emploi. En dépit des compétences des régions en matière de formation professionnelle, aucune concertation n'a eu lieu avec elles en amont. Il en résulte aujourd'hui une grande confusion. Certaines régions veulent passer des conventions avec vos agents, afin de savoir qui fait quoi – sauf à admettre le gaspillage d'argent public. Or ces agents sont dans l'incapacité de nous dire quelles formations ils vont prendre en charge. Par ailleurs, ils nous indiquent que l'enveloppe affectée aux formations par Pôle emploi est identique à celle qui était auparavant utilisée pour les personnes relevant des Assédic ; il y a donc un problème de financement.

Concernant les effectifs, le Président de la République a annoncé des recrutements. Où en est-on ?

PermalienPhoto de Jean-Frédéric Poisson

Au cours du débat sur la création de Pôle emploi, Dominique Tian et moi-même avions appelé l'attention de Mme Lagarde sur la différence de culture des deux institutions dont on organisait le rapprochement. J'avais donc émis le souhait que soit menée une action déterminée pour accompagner le changement. Qu'en est-il ?

PermalienPhoto de Régis Juanico

J'aimerais avoir quelques indications chiffrées. Combien de demandeurs d'emploi Pôle emploi reçoit-il en un mois ? Quel est le nombre de conseillers qui sont en position de réception de ces demandeurs ? De combien de demi-journées de réception ces conseillers disposent-ils par semaine, eu égard à leurs autres activités – plateforme téléphonique notamment ? Il semble qu'ils ne peuvent consacrer que deux demi-journées à la réception des demandeurs, alors qu'il en faudrait cinq ou six pour qu'ils puissent les recevoir correctement.

Par ailleurs, comment concevez-vous l'avenir des instances paritaires régionales ? Quel rôle comptez-vous donner aux partenaires sociaux, notamment dans le suivi de l'application de la convention d'assurance chômage ? Comptez-vous préserver les commissions paritaires locales, chargées d'examiner les recours des demandeurs d'emploi ?

PermalienPhoto de Jacques Domergue

Je commencerai par des félicitations car je viens de tester le 3949 avec mon téléphone : au bout de trois minutes, j'avais un conseiller au bout du fil.

En revanche, j'émets des doutes sur l'objectif que vous avez fixé qu'un conseiller prenne en charge 60 demandeurs d'emploi. En effet, avec 45000 salariés et 2 500 000 chômeurs, on arrive au ratio de un salarié pour 55 ; passer au ratio de un pour 60 ne laisse qu'une faible marge pour le personnel administratif, dont je doute qu'il soit aussi peu nombreux. Enfin, je voudrais faire une suggestion : ne faudrait-il pas, en s'inspirant de ce qui se fait pour le personnel commercial dans les entreprises, rémunérer les conseillers de Pôle emploi sur une base salariale fixe, à laquelle s'ajouterait une partie variable, fonction non pas du nombre de dossiers ouverts, mais du nombre de solutions trouvées ?

PermalienPhoto de Pierre Méhaignerie

Je rappelle que Marie-Christine Dalloz, à qui je passe maintenant la parole, est l'auteur du rapport sur les maisons de l'emploi.

PermalienPhoto de Marie-Christine Dalloz

Je voudrais tout d'abord féliciter Dominique Tian pour son travail. Son document pose les bonnes questions.

Madame Iborra, ce n'est pas parce que c'est difficile qu'il faut renoncer. Je suis très fière d'avoir voté cette fusion, mais il faut nécessairement du temps pour que le nouveau dispositif soit pleinement efficace. On constate d'ores et déjà plutôt une amélioration qu'une dégradation du service.

Monsieur le directeur général, vous avez parlé de co-traitance avec les missions locales. Je souhaite beaucoup que cela puisse se faire également avec les maisons de l'emploi. Cela suppose, et c'est une clarification qui sera nécessaire, que celles-ci ne s'occupent pas d'accueil public des demandeurs et d'accompagnement, mais d'ingénierie, de conseil, de stratégies à mettre en oeuvre en partenariat avec Pôle emploi, en utilisant leur connaissance des spécificités de chaque territoire.

S'agissant du nombre de demandeurs d'emploi par conseiller, il me semble qu'il faudrait une approche spécifique pour ceux des bassins d'emploi appelés à une reconversion, qui nécessiteraient un accompagnement plus individualisé, et donc un ratio amélioré.

PermalienPhoto de Gérard Cherpion

Le Président de la République a annoncé récemment l'élargissement des contrats de transition professionnelle à de nouveaux bassins. Il en existe deux types, les anciens, expérimentaux, pilotés par Transition CTP, filiale de l'AFPA, et les nouveaux, qui relèvent totalement de votre responsabilité. Concernant les premiers, il existe encore des problèmes de « bascule » des dossiers, qui conduisent à quelques retards. Par ailleurs, se pose le problème de la rémunération des bénéficiaires du dispositif. Tant que nous étions en phase expérimentale, la rémunération se faisait manuellement ; maintenant que le dispositif prend de l'ampleur, la charge du personnel s'accroît et les bénéficiaires constatent des retards. Où en est-on dans ce domaine ?

PermalienChristian Charpy, directeur général de Pôle emploi

S'agissant du recouvrement, la difficulté était de convaincre les partenaires sociaux de l'Unédic de faire le transfert le plus tôt possible. Nous nous sommes mis d'accord sur le 1er janvier 2011.

En ce qui concerne les personnels de l'AFPA, il s'agit de psychologues du travail, qui ont donc compétence pour vérifier l'adéquation entre les capacités du demandeur d'emploi, les formations et les emplois. La collaboration de l'ANPE avec l'AFPA s'était notablement améliorée ces dernières années, notamment sur le « service intégré » – consistant à envoyer des demandeurs d'emploi à l'AFPA pour qu'ils soient orientés. L'AFPA est un organisme de formation comme un autre, que nous pouvions mettre en concurrence, et un organisme d'évaluation des compétences professionnelles. Une partie de ses activités sera donc désormais intégrée dans Pôle emploi, et pour le reste elle demeurera prestataire de services, avec mise en concurrence.

Madame Iborra, j'ai donné instruction aux directeurs régionaux de prolonger l'ensemble des conventions passées avec les conseils régionaux en matière de formation. Il reste trois problèmes à régler. Tout d'abord, il me paraît impératif qu'au niveau régional s'organise une conférence des financeurs, afin d'effectuer le partage des responsabilités et d'éviter, en effet, toute superposition. Ensuite, Pôle emploi doit définir sa politique de formation à moyen terme car, contrairement aux Assédic, il ne se limite pas à la formation dans les métiers en tension ; un conseil d'administration va être consacré à ce sujet début juin. Enfin, nous devons passer les marchés de formation indispensables avec des prestataires ; un accord cadre sera prochainement publié.

PermalienChristian Charpy, directeur général de Pôle emploi

Nous dépenserons environ 300 millions chaque année.

En ce qui concerne les recrutements, il faut ajouter aux 1840 emplois nouveaux prévus les emplois vacants à pourvoir. Nous ne pouvions pas recruter tant que nous n'avions pas établi le mode de passage de la grille Assédic à la grille Pôle emploi. Nous faisons des recrutements au fil de l'eau, en mettant en place un portail de recrutement, avec la particularité que tous nos recrutements se feront sur CV anonyme. Près de 2500 personnes vont être recrutées en mai et juin.

Monsieur Poisson, vous avez raison, les cultures d'origine sont différentes. J'ai tenu essentiellement à ce que l'on ne donne pas le sentiment qu'une maison mangeait l'autre, à plus forte raison parce que j'avais été directeur général de l'ANPE. J'ai donc veillé à assurer la parité dans les nominations aux postes de responsabilité. Il reste, c'est certain, des problèmes culturels à régler. Par exemple, la notion d'autonomie du conseiller ou du directeur d'agence faisait davantage partie de la culture de l'ANPE que de celle des Assédic, qui avaient à mettre en oeuvre une convention d'assurance chômage qui ne permettait pas des ajustements locaux. En revanche, les notions de qualité et de maîtrise des risques étaient peut-être plus développées du côté des Assédic. Nous mettons donc en place à la fois les outils de management d'un établissement multiculturel et, au niveau local, des groupes de travail pour que les uns et les autres puissent acquérir le meilleur de la culture de l'autre. Les choses avancent, donc, et désormais les gens travaillent ensemble sans se poser la question de l'établissement d'origine de chacun.

La mise en place des instances paritaires régionales – IPR – relève surtout des partenaires sociaux. Syndicats d'un côté, organismes patronaux de l'autre doivent se mettre d'accord au plus vite sur les nominations. Les IPR reprendront l'ensemble des compétences des commissions paritaires. Sans doute faudra-t-il, dans les grandes régions, créer des subdivisions car il y avait chaque année 130 000 saisines des anciennes commissions paritaires des Assédic.

Monsieur Domergue, je suis heureux que le 3949 fonctionne ! Quant au ratio de un pour 60, la convention tripartite signée par l'État, l'Unédic et Pôle emploi prévoit de l'atteindre dans un premier temps pour les publics des parcours d'accompagnement lourd.

Madame Dalloz, dans les bassins d'emploi en reconversion, la CRP – convention de reclassement personnalisée – et le CTP – contrat de transition professionnelle – permettent de ramener de 1 pour 90 ou 100 à 1 pour 50 pour la CRP et 1 pour 30 pour le CTP le niveau d'accompagnement. Nous avons les moyens financiers de le faire, à la fois par les budgets complémentaires qui ont été donnés à Pôle emploi, mais aussi par la contribution apportée par l'Unédic.

S'agissant des chiffres, environ 20 000 conseillers reçoivent des demandeurs d'emploi, et ils en reçoivent environ deux millions chaque mois. Cela veut dire que, pendant chaque heure d'ouverture des locaux de Pôle emploi, sur l'ensemble du territoire, 10 000 personnes sont reçues. La règle que nous avions fixée à l'ANPE était que les conseillers qui recevaient des demandeurs d'emploi devaient y consacrer trois à quatre demi-journées, de façon à avoir du temps pour traiter les offres et aller en entreprise. Au cours des dernières semaines, il est possible qu'à Pôle emploi on soit passé de trois à quatre demi-journées en moyenne. Il n'y a pas de problème pour les plateformes téléphoniques, 80 % des appels concernant l'indemnisation.

Concernant la stratégie des maisons de l'emploi, l'objectif doit être la complémentarité. Comme vous, madame la députée, je ne pense pas que les maisons de l'emploi doivent se lancer systématiquement dans l'accompagnement des demandeurs d'emploi car c'est plutôt le rôle de Pôle emploi, avec les partenaires que sont pour lui les missions locales, les plans locaux pour l'insertion et l'emploi (PLIE), l'Apec et Cap emploi. En revanche, elles doivent jouer un rôle de coordination des interventions, d'analyse en matière de gestion prévisionnelle des emplois et des compétences et de relation avec les entreprises. La situation est différente lorsque la maison de l'emploi a incorporé en son sein le PLIE ou la mission locale ; dans les autres cas, il n'y a pas lieu de doublonner les effectifs.

Concernant la rémunération CTP, nous allons automatiser le dispositif dans les prochaines semaines.

PermalienPhoto de Jean-Marie Rolland

Dans mon département, on observe un certain retard dans l'ouverture des droits à l'indemnisation du chômage, ce qui entraîne notamment une augmentation des demandes de secours financier auprès des services sociaux. Il conviendrait, monsieur le directeur général, de remédier à cette situation.

Par ailleurs, puisque le RSA va entrer en vigueur le 1er juin, j'aimerais vous entendre sur votre politique en matière d'insertion par l'activité économique ainsi que sur l'accompagnement, spécifique ou non, des personnes concernées. Quelles propositions allez-vous faire aux départements ? Quel sera votre calendrier ?

PermalienPhoto de Françoise de Panafieu

Les emplois étant créés par les entreprises, comment envisagez-vous les relations de Pôle emploi avec elles, en matière de formation, dans le traitement du chômage partiel et pour préparer la sortie de crise ?

PermalienPhoto de Valérie Rosso-Debord

Ma question concerne également le RSA. Certaines personnes qui pourraient y prétendre ne sont pas aujourd'hui bénéficiaires du RMI mais relèvent de vos services, en ayant une activité à temps partiel. Envisagez-vous, dans le cadre de la future convention, de prévoir l'instruction du dossier de ces demandeurs dans vos locaux ?

PermalienPhoto de Michel Issindou

À situation économique exceptionnelle, moyens exceptionnels : il serait, me semble-t-il, de votre devoir de demander à votre ministre de tutelle de renforcer les moyens de Pôle emploi. Ne pourrait-on, pendant un temps, sortir du dogme de la suppression d'un poste de fonctionnaire sur deux et procéder à un redéploiement vers la structure que vous dirigez ?

PermalienPhoto de Pierre Méhaignerie

Je prolonge la question : certaines agences d'intérim qui faisaient un excellent travail sont aujourd'hui sous-utilisées. N'y a-t-il pas des liens à créer pour employer le potentiel d'hommes et de femmes qui risquent d'être conduits au licenciement ?

PermalienPhoto de Alain Marc

Dans les départements à faible densité, des publics particulièrement fragiles sont éloignés des bureaux de Pôle emploi. Allez-vous donner des consignes à vos directeurs régionaux pour qu'ils laissent suffisamment d'autonomie aux pôles locaux, afin que des conseillers puissent aller vers ces demandeurs ?

PermalienPhoto de Patrice Verchère

Afin de veiller à la réalisation des objectifs fixés, je crois savoir qu'un tableau de bord comportant une vingtaine d'indicateurs devait être mis en place. Concernant le baromètre de satisfaction des demandeurs d'emploi et des entreprises, disposez-vous de résultats ?

PermalienPhoto de Christophe Sirugue

En ce qui concerne le RSA, que prévoyez-vous pour répondre à l'afflux attendu des demandes ? Alors que le RMI concernait 300 000 personnes, le RSA en concernera 800 000 ; comment les conseils généraux pourront-ils faire ? Pourquoi assumeraient-ils la charge financière de ceux qui, dans le cadre de la loi RSA, ont été ciblés pour être pris en charge par Pôle emploi, alors que Pôle emploi va financer le privé pour prendre en charge les demandeurs d'emploi ?

PermalienPhoto de Vincent Descoeur

Les bénéficiaires potentiels du RSA vont devoir être identifiés par un référent de Pôle emploi, qui devra les accompagner. Au-delà du problème des moyens dont vous disposerez pour faire face à l'affluence et à la fragilité des bénéficiaires, pourriez-vous apporter des précisions sur la nature de la relation qui s'instaurera avec le conseil général et sur la manière dont vous envisagez la participation de Pôle emploi aux équipes pluridisciplinaires que nous sommes en train de mettre en place ?

M. Guy Malherbe. Ma commune fait partie, avec dix autres communes, d'une communauté d'agglomération mais ses habitants doivent néanmoins se rendre au pôle emploi situé dans l'intercommunalité voisine. Peut-on envisager un redécoupage afin d'harmoniser les circonscriptions de Pôle emploi avec les intercommunalités ?

PermalienChristian Charpy, directeur général de Pôle emploi

De fait, la mise en place du RSA aurait été plus facile à gérer pour nous il y a un an mais bien sûr, nous ferons le nécessaire. En ce qui concerne l'instruction, il serait logique que nous nous chargions de l'ouverture du dossier d'une personne arrivant en fin d'indemnisation par l'ARE – allocation de recherche d'emploi. Je préfère que Pôle emploi fasse des ouvertures en second niveau plutôt qu'en premier niveau, même si à ce stade il donne tous les renseignements.

J'ai indiqué très clairement dans le projet d'accord avec l'Association des départements de France que nous serions présents dans tous les dispositifs d'orientation, bien sûr à titre gratuit, et que si les conseils généraux mettaient en place des plateformes, nous y participerions. J'espère que nous pourrons prochainement finaliser cet accord, ayant pu constater que celui qui avait été signé il y a quelques années à propos du RMI avait permis de débloquer nombre de situations.

Il reste que, même s'il faut s'attendre à un afflux considérable de demandeurs, je ne dispose pas de moyens complémentaires. Nous devrons faire face avec les effectifs globaux de Pôle emploi. J'ai indiqué par ailleurs que nous étions en mesure de redéployer environ 10 % des effectifs vers les services directs aux demandeurs d'emploi.

En ce qui concerne les relations avec les entreprises, bien évidemment essentielles, nous mettons en place, au-delà des visites d'entreprise classiques telles que les pratiquait l'ANPE, des plateformes de prospection, en nous appuyant sur l'enquête des besoins en main-d'oeuvre que faisait auparavant l'Unédic, sur les déclarations uniques d'embauche et sur les nouveaux dispositifs d'exonération de charges. Les grandes entreprises sont concernées aussi bien que les PME ; j'ai signé il y a quelques jours un accord avec le groupe Carrefour, qui nous confie chaque année 22 000 recrutements.

Nous ne sommes pas directement en charge du chômage partiel. En revanche, je suis très attentif aux situations de pérennisation du chômage partiel, qui peut aboutir au chômage total. Il faut donc que nous puissions avoir des relations étroites avec les DDTEFP – directions départementales du travail, de l'emploi et de la formation professionnelle –, qui gèrent le chômage partiel, pour pouvoir anticiper les besoins.

La suppression d'un poste de fonctionnaire sur deux ne s'applique pas à Pôle emploi, dont le Gouvernement s'était engagé à maintenir tous les emplois ; c'est inscrit dans la convention tripartite. Par ailleurs, un renforcement à hauteur de 400 ETP a été prévu dans le budget 2009 pour remplacer les personnels qui partent en formation. Nous avons également anticipé, à hauteur de 300 à 400 ETP, les remplacements des personnes partant à la retraite. Si la situation est trop difficile, nous nous tournerons vers le Gouvernement, mais avec la sous-traitance, la co-traitance et les renforts d'effectifs, auxquels il faut ajouter les redéploiements que nous devons opérer au sein de Pôle emploi, nous devrions parvenir à faire face.

Les agences d'intérim seront en effet des acteurs essentiels sur le marché d'accompagnement que nous allons ouvrir.

Il est encore un peu tôt pour disposer de résultats du tableau de bord. En revanche, nous avons testé la satisfaction des demandeurs d'emploi : ils sont beaucoup plus satisfaits lorsqu'il y a un site mixte que lorsqu'ils doivent se rendre dans deux sites séparés.

Je souhaite mettre en place des agences spécialisées pour certains publics, notamment les cadres. Elles devront compléter les agences tous publics de Pôle emploi. Ces agences doivent également s'articuler avec les PLIE, les missions locales. Dans ces conditions, un redécoupage des territoires est difficile. En Ile-de-France, nous avons eu beaucoup de mal à le faire à partir des fichiers de l'ex-Assédic et l'ex-ANPE. Je compte envoyer à l'ensemble des maires et des présidents de conseil général un document précisant quels sont leurs interlocuteurs, et je demanderai à chaque directeur régional d'aller expliquer le fonctionnement de Pôle emploi et la recomposition du réseau.

PermalienPhoto de Dominique Tian

Je souhaite remercier tout particulièrement M. Christian Charpy et le féliciter à titre personnel. Cette audition a duré plus de deux heures, ce qui atteste l'intérêt qu'elle a suscité, et le débat a été d'une très grande qualité, s'agissant tant des questions posées que des réponses.

PermalienPhoto de Pierre Méhaignerie

Il y a un immense besoin d'information, notamment dans les bassins industriels où l'on constate certaines confusions. On ne peut pas aimer ce que l'on ne comprend pas. Les autorités régionales ou départementales ont-elles la capacité de mettre des agents opérationnels à la disposition des maisons de l'emploi ?

PermalienChristian Charpy, directeur général de Pôle emploi

Cela se fera d'autant mieux que nous aurons mis en place les conventions de partenariat.

PermalienPhoto de Yves Albarello

A Toul, où l'usine de Kleber a fermé l'année dernière, laissant 826 salariés sans emploi, un dispositif remarquable et très efficace a été mis en place sur le site lui-même. Cette immersion du personnel de Pôle emploi dans les lieux sinistrés est un exemple à suivre.

PermalienPhoto de Pierre Méhaignerie

En ce qui concerne le chômage partiel, le Gouvernement a fait en matière de financement un effort non négligeable dans les derniers mois.

Monsieur le directeur général, merci beaucoup.

Puis la Commission des affaires culturelles, familiales et sociales procède à l'examen du rapport d'information de M. Dominique Tian sur la mise en application de la loi n° 2008-126 du 13 février 2008 relative à la réforme de l'organisation du service public de l'emploi.

La Commission autorise le dépôt du rapport d'information en vue de sa publication.

La Commission des affaires culturelles, familiales et sociales examine, sur le rapport Mme Valérie Rosso-Debord, la proposition de résolution sur les services sociaux d'intérêt général (n° 1574).

PermalienPhoto de Régis Juanico

Avant d'entamer le débat, j'aimerais savoir s'il est envisagé d'inscrire la résolution sur les services sociaux d'intérêt général à l'ordre du jour de la séance publique.

PermalienPhoto de Marc Dolez

Nous ne pouvons nous contenter d'examiner un tel sujet en catimini. Mener à la hâte une discussion en commission n'est pas à la hauteur de l'enjeu. C'est pourquoi le groupe GDR demandera l'inscription de la proposition de résolution à l'ordre du jour de la séance publique, en application de l'article 151-3 du Règlement de l'Assemblée nationale.

PermalienPhoto de Valérie Rosso-Debord

Je partage l'avis de mes collègues de l'opposition sur l'importance de ce sujet. La reconnaissance de la spécificité des services sociaux d'intérêt général par le droit européen est impérative si nous voulons préserver la spécificité du modèle social français. Je pense particulièrement aux associations subventionnées par les communes et les conseils généraux, qui risquent de voir leur mode de financement bouleversé par un cadre juridique inapproprié. La question mérite à ce titre un examen approfondi. C'est pourquoi je vous propose, si le président y consent, de reporter ce débat à la semaine prochaine, où nous aurons d'avantage de temps à y consacrer. Le rapport de la Commission chargée des affaires européennes a été pour ainsi dire voté à quatre mains, dans une démarche consensuelle entre majorité et opposition, et je suis convaincue que les trois autres cosignataires du rapport n'y verront aucune difficulté.

PermalienPhoto de Marc Dolez

Pour nous il n'y a aucun consensus sur la question des services sociaux d'intérêt général !

PermalienPhoto de Pierre Méhaignerie

Chacun sait que l'ordre du jour de notre commission est particulièrement chargé. C'est pourquoi, à titre personnel, j'estime qu'il serait préférable d'examiner maintenant, comme prévu, le rapport de Mme Valérie Rosso-Debord. Cependant, constatant que la majorité d'entre vous y est favorable, je vous propose de reporter ce débat à la semaine prochaine. Nous inscrirons l'examen du rapport soit en premier point de l'ordre du jour de la prochaine réunion de la Commission, le mercredi 13 mai, soit l'après-midi du même jour, après la discussion portant sur la proposition de loi pour faciliter le maintien et la création d'emplois présentée par M. Jean-Frédéric Poisson.

La séance est levée à douze heures trente.