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Commission des affaires sociales

Séance du 15 février 2012 à 10h00

La séance

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COMMISSION DES AFFAIRES SOCIALES

Mercredi 15 février 2012

La séance est ouverte à dix heures dix.

(Présidence de M. Pierre Méhaignerie, président de la Commission)

La Commission des affaires sociales entend M. Dominique Maraninchi, directeur général de l'Agence française de sécurité sanitaire des produits de santé (AFSSAPS), dont la nomination comme directeur général de l'Agence nationale de sécurité du médicament et des produits de santé (ANSM) est envisagée par le Président de la République (application de l'article L. 1451-1 du code de la santé publique).

PermalienPhoto de Pierre Méhaignerie

Nous accueillons aujourd'hui M. Dominique Maraninchi, directeur général de l'Agence française de sécurité sanitaire des produits de santé (AFSSAPS), depuis février 2011.

Nous l'entendons en application de l'article L. 1451-1 du code de la santé publique, issu de l'article 1er de la loi du 29 décembre 2011 relative au renforcement de la sécurité sanitaire du médicament et des produits de santé. En effet, M. Maraninchi est pressenti par le Président de la République pour continuer sa mission à la direction générale de la nouvelle Agence nationale de sécurité du médicament et des produits de santé, qui va remplacer l'AFSSAPS.

La direction générale de la nouvelle agence – comme l'AFSSAPS d'ailleurs – ne figure pas dans la liste des fonctions pour lesquelles l'avis de notre commission est requis en application de l'article 13 de la Constitution. C'est pourquoi cette audition ne sera pas suivie d'un vote.

Monsieur Maraninchi, la commission vous avait auditionné, il y a presque un an jour pour jour (le 16 février 2011), avant votre nomination à la tête de l'AFSSAPS. Depuis cette date, beaucoup de choses ont changé en matière de sécurité sanitaire du médicament.

Vous nous préciserez les mesures que vous avez prises pour réorganiser cette agence ébranlée par l'affaire du Médiator. Vous nous direz également comment va s'opérer la transition entre l'AFSSAPS et la nouvelle agence.

Enfin, je ne doute pas que vous aurez des éléments à nous donner sur un autre sujet d'actualité, celui des prothèses PIP. En effet, vous venez de remettre, avec le directeur général de la santé, un rapport à M. Xavier Bertrand faisant le point sur les contrôles opérés sur la société PIP. Ce rapport propose le renforcement de l'incitation à la déclaration aux autorités sanitaires des effets indésirables des dispositifs médicaux et l'amélioration de l'encadrement de ceux qui sont considérés à risque. Le ministre vous a d'ailleurs demandé d'établir, d'ici le début du mois prochain, la liste de ces dispositifs à risque.

Avant de vous donner la parole, j'indique que vous avez fait parvenir au secrétariat de la commission votre curriculum vitae ainsi que votre déclaration personnelle d'intérêts. Ces documents sont en distribution dans la salle.

Encore un mot, avant de vous donner la parole : en tant qu'ancien ingénieur agronome, j'appelle l'attention de la Commission sur le fait qu'il n'existe pas de société sans risques et qu'il est impossible de les supprimer sans compromettre toute créativité et tout esprit d'initiative.

PermalienDominique Maraninchi, directeur général de l'AFSSAPS

Ma culture et ma pratique de médecin m'ont habitué à effectuer des arbitrages entre bénéfices et risques. Même si l'agence est d'abord motivée par la sécurité, elle doit ménager l'intérêt des patients, tout en minimisant les risques et en maximisant les bénéfices. J'espère en faire l'agence du bénéfice en santé. Sans méconnaître la limite des actions que nous avons entreprises, je considère que le changement souhaité par le législateur est possible, et j'ai l'honneur de me porter candidat pour le mettre en oeuvre.

J'ai été nommé à la tête de l'AFSSAPS – sans votre vote mais avec votre approbation – pendant l'affaire du Mediator. Cette crise sanitaire a profondément remis en cause la sécurité du médicament et des produits de santé, tout comme la confiance dans l'État et dans l'expertise du corps médical. Au cours des Assises du médicament, les parties en présence ont pu s'exprimer, ce qui nous a permis de dresser un état des lieux et de formuler des propositions. Puis il a fallu décider de l'avenir de l'agence et, plus largement, du dispositif de sécurité des produits de santé. Enfin, vous avez voté, fin décembre, la loi relative au renforcement de la sécurité sanitaire du médicament et des produits de santé. Pendant cette année, ma responsabilité a été de enclencher des actions pour rétablir la confiance en interne et de prendre des décisions légitimes afin de répondre aux attentes de la société.

La loi nous impose d'installer la transparence. L'AFSSAPS a été la première agence en Europe à diffuser l'enregistrement intégral et le compte rendu des débats des commissions d'autorisation de mise sur le marché (AMM). Dès lors, toute la société a su qui y participait et comment ils se déroulaient. Si les industriels qui fabriquent les produits examinés en étaient exclus, les experts ont exprimé, au vu de tous, leurs avis et leurs réserves, ce qui a favorisé le retour de la confiance, tout en accélérant le processus de décision. Nous avons appliqué votre décision de supprimer tout conflit d'intérêts entre ceux qui fabriquent et ceux qui jugent les produits. Cette situation a déclenché une crise, puisque certains experts ont préféré démissionner, parfois de façon retentissante, mais, dès lors qu'ils ont choisi leur camp, la situation est devenue plus saine.

Après l'affaire du Mediator, nous nous sommes demandé si parmi les 5 000 médicaments commercialisés en France, quelques-uns n'étaient pas susceptibles de présenter des risques aussi graves. En matière de vigilance, il faut adopter une démarche proactive si l'on veut régler les problèmes en amont. Nous avons présenté à notre conseil d'administration et à la presse un programme transparent tendant à réviser l'équilibre entre les bénéfices et les risques des principales substances commercialisées en France. Un algorithme permet désormais de vérifier que les produits commercialisés depuis longtemps apportent toujours un bénéfice aux patients, et qu'ils ne comportent pas de risques qui n'avaient pas été détectés lors de leur mise sur le marché.

L'agence doit aussi corriger le texte régissant la bonne pratique du médicament, dont elle a la charge au niveau européen. La mission était difficile, puisque, renonçant à sa mission traditionnelle, qui était d'arbitrer une concurrence entre industriels, il lui a fallu réévaluer le rapport bénéficesrisques pour de très nombreux médicaments. Cette démarche originale l'a conduite à retirer cinq médicaments du marché en 2011, alors que, depuis sa création, en 1995, elle n'en avait retiré que quinze. En matière d'analyse des substances présentes dans les médicaments, elle a accompli en 2011 près du tiers du travail effectué depuis 1995. Pour mener à bien cette tâche considérable, l'agence, qui emploie un millier de personnes, a pu compter sur la mobilisation de chacun.

La démarche concerne également les médicaments récents. Après quelques années d'observation, une expertise publique menée en interne, avec la collaboration de la Caisse nationale d'assurance maladie et des médecins traitants, nous a permis de retirer du marché sans solliciter l'avis des industriels, des médicaments potentiellement innovants, dont les risques étaient supérieurs aux bénéfices. Dans un souci de transparence, nous avons invité des représentants de l'Association française des diabétiques à s'exprimer devant les experts, retransmis des enregistrements vidéo et présenté en séance une étude de notoriété internationale. Rendue de manière simple et transparente, notre décision a rencontré l'assentiment des professionnels de santé, sans que les malades ne se sentent pénalisés.

Il est légitime d'informer non seulement les patients, mais aussi ceux qui prescrivent et ceux qui distribuent les biens de santé. Avec les médecins, nous recourons à la technique du warning, utilisée aux États-Unis par la Food and Drug Administration (FDA). Nous vérifions aussi que, sitôt prévenus, ils changent de comportement. Ainsi, avant même que nous ne prononcions la suspension de l'Actos, nous avions adressé une lettre argumentée à tous les médecins, ce qui avait fait chuter sa consommation de 60 %.

Durant cette année houleuse, nous avons modifié la gestion de l'agence, car toute gestion est au service d'un projet, or le nôtre avait changé avant même le vote de la nouvelle loi. Dès lors que la feuille de route que j'avais reçue du Gouvernement m'imposait de garantir la sécurité des patients de manière transparente, il fallait mettre fin au cloisonnement de l'agence, dont les directions, indépendantes, ne collaboraient pas en vue de prendre des décisions de sécurité sanitaire. Je l'ai restructurée en fusionnant et en croisant les directions de métiers et de produits, afin d'assurer un continuum de vision et de décision sur tous les produits de santé. Commencé en juin 2011, ce travail, qui a bénéficié, lui aussi, d'une forte participation interne, aboutira courant 2012. Il faut nécessairement du temps pour restructurer le travail de quelque 1 000 personnes et susciter leur adhésion à de nouvelles méthodes et à un nouvel objectif.

L'agence pouvait craindre que certaines de ses décisions ne soient remises en cause par les tribunaux administratifs, mais elle a gagné de nombreux référés, qui ont validé ses choix, lui permettant de modifier en profondeur la distribution et le contrôle des produits de santé. Cette manière d'ajuster les bénéfices des produits à la sécurité du malade était nouvelle, du moins en France. Grâce à la loi que vous avez votée, notre pays est désormais à l'avant-garde de l'Union européenne, car on ne peut être transparent dans un État membre sans l'être aussi dans tous les autres. L'Agence européenne des médicaments (European Medicines Agency, EMA), qui est en train de se restructurer, réfléchit au moyen d'utiliser les déclarations d'intérêts établies à notre initiative. Au centre des débats et des arbitrages, nous avons placé la sécurité des patients telle qu'elle se mesure dans la vie réelle, et non par des études, qui, bien que scientifiques, ne portent que sur un nombre limité de personnes, et demeurent peu représentatives en termes de risques et de bénéfices.

L'AFSSAPS, qui a été exposée durant cette année, le restera sans doute, car une agence de sécurité doit vivre dans l'insécurité, en conservant un état d'esprit de veille, d'attention et de réactivité pour répondre aux requêtes.

L'affaire du Mediator est à présent dans les mains de la justice. Celle-ci a mené des investigations approfondies, notamment en ordonnant une perquisition dans nos locaux. Elle pourra donc déterminer les responsabilités de chacun.

Les deux grandes crises sanitaires que nous avons vécues se sont soldées de la même manière, puisque, grâce à l'AFSSAPS, qui est au service des patients, le Mediator et les prothèses PIP ont été retirés du marché – celles-ci ne l'ont pas été dans tous les pays. Mais son travail ne s'arrête pas là. L'agence assurera le suivi de ses décisions auprès des victimes, qu'elle accompagnera, dans les limites de ses capacités. L'affaire des prothèses PIP a ouvert une crise profonde. Il a fallu restructurer non seulement la direction de l'évaluation des médicaments et des produits biologiques, mais toute notre organisation.

Nous ne pouvons être efficaces qu'en équilibrant l'enregistrement des produits et leur surveillance, et en articulant nos capacités et nos moyens d'inspection et de contrôle. Seule une synergie interne et pilotée, relayée par des responsables au niveau de la direction générale comme de chaque direction, permet une prise en compte globale. Dans le cas des prothèses PIP, il fallait d'abord repérer le danger, et nous avons peut-être été trop lents à le faire. Il fallait ensuite trouver les informations et, celles-ci obtenues, continuer les recherches. Quand un rapport d'inspection a été déposé, il faut examiner ses suites et vérifier que les anomalies observées ont été corrigées. Chaque fois que nos laboratoires pointent une distorsion, il faut enquêter pour aller plus loin. Enfin, on doit examiner la qualité de toutes les autres prothèses. En ce sens, la crise sanitaire aura modifié notre organisation et notre stratégie.

Dans le droit-fil de la loi, mon ambition est d'arbitrer le changement de manière effective, réaliste et dynamique. Loin de moi l'idée d'adopter je ne sais quelle intransigeance terroriste à l'égard du risque. Il faut seulement procéder à l'arbitrage entre bénéfices et risques en rendant à chaque acteur sa responsabilité et en assumant la nôtre. Une firme qui a reçu une autorisation de mise sur le marché et distribue un produit doit assumer toute sa responsabilité en matière de sécurité. Notre travail est non d'écouter son point de vue mais de l'interroger et d'obtenir des réponses. La loi nous permet de le faire, dans l'intérêt des patients. Il faut à présent appliquer la même démarche à tous les produits de santé.

Loin d'être isolée, notre pays doit jouer un rôle moteur en Europe. À partir d'un détail dont les conséquences sanitaires pouvaient être dramatiques, l'AFSSAPS a alerté, en France comme à l'étranger, les patientes et les professionnels qui, s'ils n'avaient pas attendu la décision de police sanitaire pour déclarer des effets indésirables, nous auraient fait gagner deux ans. Dans l'affaire des prothèses PIP, il y avait tromperie et dissimulation, preuve qu'il faut adopter une démarche d'investigation. En cas de doute sur une société qui délivre des produits de santé, on ne peut pas s'en tenir à ses déclarations lorsqu'elle assure avoir corrigé un problème. Il faut les vérifier. À présent, notre interpellation est devenue mondiale. Nous sommes fiers que la Commission européenne ait pris la mesure de sa responsabilité et de celle de chaque pays, pour garantir la sécurité des produits sanitaires. C'est sur cette base que je soumets ma candidature pour mettre en oeuvre le projet de loi que vous avez voté.

PermalienPhoto de Paul Jeanneteau

Depuis la crise du Mediator, la sécurité des médicaments et des produits de santé fait débat. Une de vos tâches est de restaurer la confiance de nos concitoyens. Or, plus la recherche avance, conduisant à mettre au point toujours plus de médicaments toujours plus efficaces, plus ceux-ci risquent d'induire des effets secondaires, la limite entre dose thérapeutique et dose toxique devenant de plus en plus ténue. Dans l'affaire PIP, dont nous tenons des seuls médias le peu que nous savons, il semble que la société d'audit chargée des contrôles les ait planifiés, laissant au chef d'entreprise tout loisir de dissimuler ce qu'il souhaitait. Pourquoi les contrôles ne seraient-ils pas aléatoires, à l'image de ceux que pratiquent les pharmaciens inspecteurs de santé publique dans les officines ? Ne faut-il pas les confier non à des cabinets d'audit, mais aux experts scientifiques de l'agence ? Comment améliorer le contrôle des laboratoires fabriquant des produits médicaux, lesquels doivent présenter le même degré de sécurité que les médicaments ?

PermalienPhoto de Catherine Lemorton

Monsieur le directeur général, votre responsabilité est importante, et il est bon que, pour l'assumer, vous n'ayez pas hésité à mécontenter les experts. La loi relative au renforcement de la sécurité sanitaire du médicament et des produits de santé a certes permis à la France d'être à l'avant-garde en matière de sécurité sanitaire, mais, après l'affaire du Mediator, nous n'avions guère le choix. Reste à mener un travail d'harmonisation à l'échelon européen.

Actuellement, la déclaration d'intérêts est publique, mais doit-on laisser sa réactualisation à l'initiative de l'intéressé ? S'il se montre négligent, qui vérifiera qu'elle est toujours d'actualité ? Je salue la création d'une charte de l'expertise sanitaire, mais je crains que, comme celles de la visite médicale ou des industries agro-alimentaires, elle ne soit pas opposable et ait donc peu d'effets. En outre, n'est-il pas inquiétant que ce texte, dont les contours seront définis par un décret en Conseil d'État, ait à prévoir « les modalités de gestion d'éventuels conflits et les cas exceptionnels dans lesquels il peut être tenu compte des travaux réalisés par des experts présentant un conflit d'intérêts » ?

L'article 5 de la loi précise que, pour obtenir l'autorisation de mise sur le marché, il faut effectuer des essais contre les stratégies thérapeutiques existantes « sous forme d'essais contre comparateurs actifs et contre placebo. » Mais cette disposition est suivie d'une phrase qui semble l'annuler : « Si la personne produisant ou exploitant un médicament s'oppose aux essais contre comparateurs actifs, elle doit le justifier. » Je compte sur votre vigilance pour contrôler cette justification.

L'article 7 indique, qu'en raison du « caractère de confidentialité industrielle ou commerciale ou relevant du secret médical », on peut refuser de rendre public le compte rendu des débats des commissions, comités ou instances collégiales d'expertise. N'est-ce pas une entrave à la transparence ? Imposé par les laboratoires, l'accord de protection des données entre l'Union européenne et l'Inde crée un précédent fâcheux.

Parmi les raisons de retirer un médicament, l'article 11 mentionne le fait qu'il soit « nocif » – dans ce cas, pourquoi est-il en vente ? – ou qu'il ne permette pas « d'obtenir de résultats thérapeutiques » – ne pouvait-on l'évaluer avant sa mise sur le marché ? La traduction littérale des textes européens est parfois bien ridicule.

Vous devez faire oeuvre de pédagogie envers nos concitoyens, qui ont cru pendant des années au risque zéro. On sait pourtant qu'un médicament actif a nécessairement des effets négatifs. Il était d'autant plus maladroit de la part du Gouvernement de jeter en pâture à l'opinion une liste de 77 médicaments placés sous surveillance. Nous l'avons souligné, Gérard Bapt et moi-même : pour des médicaments récemment mis sur le marché, c'est l'absence de surveillance qui serait dangereuse.

Estimez-vous que les financements dont vous disposez vous permettront de mener des missions d'études cliniques sur les effets d'un médicament, si un industriel refuse de se soumettre à certaines obligations ?

PermalienPhoto de Yves Bur

Quand, en pleine crise sanitaire, il faut remettre en cause l'organisation du travail de 1 000 personnes, peut-on changer leur manière de penser et de travailler sans les démotiver ? Après plusieurs démissions, comment remobiliser ceux qui restent ? Pour garantir la transparence, avez-vous mis en oeuvre un mécanisme de contrôle ou un comité d'éthique ?

Après les études cliniques sur un médicament, menées sur de petits échantillons, viennent les études post-autorisation de mise sur le marché (post-AMM) qui visent, elles, à observer comment il agit sur des milliers, voire des millions de patients. Pensez-vous comme M. Gilles Johanet que les études post-AMM devraient être « industrialisées », de façon à être plus nombreuses et plus rapides ? L'agence envisage-t-elle de collaborer avec le Comité économique des produits de santé (CEPS) et la Haute Autorité de santé (HAS) ?

Comment supprimer la suspicion qu'on rencontre en France non seulement chez les patients mais dans une grande partie du corps médical à l'égard des génériques ? Entendez-vous vous impliquer dans ce dossier ? Pensez-vous accélérer les procédures d'autorisation de mise sur le marché pour ces produits ? À cet égard, la situation évolue-t-elle au sein de l'agence ? Ses nouveaux paramètres, en matière de fonctionnement et de transparence, peuvent-ils se diffuser au niveau européen ?

Comment rendre plus transparente la gestion des conflits d'intérêts ? Je me souviens avoir appris dans l'Eurostar, en rentrant d'un déplacement organisé dans le cadre de notre mission d'information sur les agences sanitaires, que le Parlement européen avait suspendu le budget de l'agence européenne en raison d'un conflit d'intérêts, quand, le matin même, son board m'avait assuré qu'il n'en rencontrait aucun. Les procédures seront-elles plus transparentes à présent que l'agence française collabore avec l'agence européenne ?

PermalienPhoto de Bernard Perrut

Bien que n'étant pas professionnel de la santé, je ne peux que m'intéresser aux travaux de l'AFSSAPS, à l'origine d'un nombre impressionnant de recommandations et de publications. Le 1er février 2012, vous avez remis au ministre du travail, de l'emploi et de la santé un rapport consacré aux contrôles effectués par les autorités sanitaires sur la société PIP, et, plus largement à l'utilisation des prothèses mammaires en silicone. Où en sont vos « propositions de refonte du système des vigilances, permettant une déclaration simple, accessible et rapide, pour une efficacité maximale » ?

Pour traiter l'anxiété et les troubles du sommeil, un Français sur cinq recourt à des benzodiazépines, qui agissent non sans danger sur le système nerveux central. Il s'en vend chaque année 134 millions de boîtes sur notre territoire. Quelles mesures proposez-vous pour en renforcer le bon usage et limiter les risques liés à leur consommation ?

En matière de publicité pour les médicaments, la décision revient au directeur général de l'agence, après avis d'une commission chargée du contrôle de la publicité et de la diffusion des recommandations sur le bon usage des médicaments. Quel contrôle entoure ce dispositif ? Sur quelles bases, sur quels arguments scientifiques, se fonde votre décision ? Comment vérifiez-vous que le message est conforme à la réalité ?

Comment l'agence, qui communique avec les professionnels de santé grâce aux recommandations de bonnes pratiques (RBP) ou aux mises au point (MAP), s'adresse-t-elle à la société civile ? Comment invite-t-elle à respecter certains critères, notamment la transparence, que réclament tous les patients ?

PermalienPhoto de Dominique Dord

Pour quelles raisons, monsieur le directeur général, avez-vous cessé depuis 2002 toute collaboration avec l'industrie pharmaceutique, notamment toute activité d'expertise, comme vous l'indiquez dans votre déclaration d'intérêts ?

PermalienPhoto de Pierre Méhaignerie

N'est-il pas inquiétant que de nombreux spécialistes préfèrent renoncer à toute collaboration de ce type, tant les règles deviennent complexes ?

PermalienPhoto de Simon Renucci

Je me réjouis que Catherine Lemorton vous ait interrogé sur le lien entre les scientifiques et les industriels, car le sujet est essentiel. Quels rapports l'agence entretient-elle ses homologues européens ? Nos partenaires adhèrent-ils à ses recommandations ? Quelles évaluations, notamment des interactions avec d'autres médicaments, suivent la mise sur le marché ? Comment l'éducation thérapeutique – qui semblait si chère à la majorité lors de l'examen du projet de loi de financement de la sécurité sociale –, et ne se pratique guère aujourd'hui qu'à l'hôpital, peut-elle être organisée auprès des pharmaciens ? Quel est votre rôle dans la formation initiale, comme dans la formation continue des médecins ?

En matière de transparence, votre démarche est passionnante, notamment au niveau européen. Elle traduit une intelligence collective. Dès lors que la confiance se construit tous les jours, comment définir un équilibre crédible entre bénéfices, coûts et suivi ?

PermalienPhoto de Jean-Pierre Door

Le Conseil stratégique des industries de santé, qui s'est réuni pour la cinquième fois fin janvier, propose, entre autres mesures, de mieux prévenir et lutter contre la contrefaçon et la falsification des médicaments et produits de santé. Quelle part prendra l'agence dans cette lutte ?

La loi relative au renforcement de la sécurité sanitaire du médicament et des produits de santé a instauré un contrôle a priori de la publicité auprès des professionnels de santé, alors que celle-ci n'était auparavant soumise qu'à une obligation de dépôt a posteriori. Comment pensez-vous pouvoir mettre en oeuvre la nouvelle procédure, qui semble avoir posé quelques problèmes récemment ?

Quelles relations doivent, selon vous, entretenir la Haute Autorité de santé et la nouvelle Agence nationale de sécurité du médicament ?

PermalienPhoto de Martine Carrillon-Couvreur

Vous avez déploré, professeur, une sous-notification par les médecins des incidents constatés avec les prothèses PIP. De nouvelles modalités de remontée des informations ont-elles été instaurées ?

Alors que l'opinion semblait avoir été, dans un premier temps, très favorable aux génériques, on observe aujourd'hui un mouvement inverse. Comment analysez-vous ce phénomène et que faudrait-il faire pour supprimer la suspicion actuelle ?

De plus en plus de nos concitoyens se soignent désormais par eux-mêmes. N'y est sans doute pas étranger le fait qu'on ait laissé entendre que toute une série de symptômes n'exigeaient pas de consulter et pouvaient être facilement traités. Mais de nombreux médecins nous alertent aujourd'hui parce qu'ils reçoivent des patients présentant des complications, que la prescription à temps d'un traitement approprié aurait permis d'éviter. Comment endiguer cette progression de l'automédication ? Comment sensibiliser l'opinion à ses limites ?

PermalienPhoto de Fernand Siré

On a révolutionné le système de sécurité sanitaire du médicament après l'affaire du Mediator. Sans doute le fallait-il, mais cette révolution a conduit à un excès de précaution qui peut aussi nuire aux malades. Ainsi est-il aujourd'hui extrêmement difficile de soigner les enfants ou les femmes enceintes, pourtant souvent malades, mais chez lesquels presque tous les médicaments sont contre-indiqués, faute d'études apportant la preuve de leur innocuité chez ces deux catégories de la population. Les jugeant insuffisamment rentables ou ne souhaitant pas endosser une responsabilité trop importante, les laboratoires ne les mènent pas. On est donc quasiment obligé de prescrire en dehors de l'autorisation de mise sur le marché en pédiatrie et chez la femme enceinte.

Une autre évolution est préoccupante : du fait sans doute que les médecins prescrivent moins, beaucoup de médicaments, qui n'étaient auparavant disponibles que sur ordonnance, se trouvent maintenant en accès libre et peuvent même faire l'objet de publicité directe auprès du public. C'est le cas de certains anti-inflammatoires utilisés comme antalgiques, dont le principe actif est pourtant dangereux à forte dose, ou bien encore des inhibiteurs de la pompe à protons, potentiellement néfastes chez les personnes atteintes d'un cancer de l'estomac. Toute une pharmacopée est ainsi mise à disposition d'apprentis docteurs. De même, certains patients se soignent d'eux-mêmes par homéopathie, sans jamais avoir consulté quiconque, ce qui peut aboutir à des retards de diagnostic préjudiciables.

Comment faire pour parvenir à soigner correctement tous les malades avec la pharmacopée existante ? Si les laboratoires sont réticents, il faudra bien que les hôpitaux ou des personnes habilitées procèdent aux expérimentations nécessaires. C'est déjà le cas : ainsi a-t-on pendant des années à l'hôpital administré des anti-inflammatoires par voie intraveineuse pour soigner les coliques néphrétiques, alors que cela était interdit en médecine de ville. Un fossé se creuse entre la médecine hospitalière où il est possible de prescrire en dehors de l'autorisation, l'établissement assumant la responsabilité en cas de problème, et la médecine de ville où le praticien, dans la solitude de son cabinet, prend une énorme responsabilité s'il fait de même. Nul n'ignorait que le Primpéran, utilisé comme anti-émétique, ou le Théralène étaient des neuroleptiques qui, à dose trop élevée, pouvaient provoquer des myoclonies. Pourquoi avoir soudain contre-indiqué le Primpéran chez les moins de 18 ans ?

Permaliendirecteur général de l'AFSSAPS

S'agissant des prothèses PIP, le directeur général de la santé et moi-même avons remis le 1er février au ministre chargé de la santé un rapport comportant une analyse chronologique des faits de 1996 à 2012. Nous avons souhaité faire preuve d'une transparence totale sur des faits objectifs. Cette nouvelle règle de travail marque un changement majeur. Pour des fabricants ayant des comportements de gredins, et qui savent comment dissimuler leurs fraudes, on ne peut se contenter de certifications accordées par des sociétés d'audit extérieures. Il faut faire preuve en ce domaine de la même vigilance et de la même rigueur que pour les médicaments eux-mêmes, et prévoir aussi des sanctions en cas de manquements, car il en est toujours qui essaient de profiter des failles du système. Bien que cela n'ait pas été le cas pour PIP, beaucoup de ces sociétés, créées ici un jour, disparaissent soudain avant de renaître ailleurs – 800 médicaments distribués en France seraient concernés. Nous devons inspecter ces sociétés, les contrôler et les faire fermer sans délai si nécessaire.

L'Agence nationale de la sécurité du médicament contribue bien entendu à la lutte contre les médicaments contrefaits ou frelatés, distribués hors des circuits traditionnels, notamment sur internet. Nous travaillons en ce domaine en collaboration avec l'Office central de lutte contre les atteintes à l'environnement et à la santé publique (OCLAESP). Des contrôles effectués dans nos laboratoires sur des lots saisis à partir de commandes passées sur la Toile ont révélé que certains de ces médicaments contenaient des substances extrêmement dangereuses. Notre action en ce domaine, menée conjointement avec les services spécialisés de la police, doit se renforcer. Contrôler de façon planifiée des fabricants malhonnêtes ou solliciter d'eux la transmission de données d'assurance qualité ne sert à rien, car tricher est leur art. Il faut travailler en synergie avec tous les acteurs et ne se priver d'aucun moyen, comme cela a été le cas pour PIP, où c'est sur dénonciation que l'un de nos inspecteurs a pu découvrir une fraude d'une ampleur considérable.

Notre vigilance ne doit jamais se relâcher. Nous contrôlons aujourd'hui tous les fabricants de prothèses, de façon inopinée et en prélevant nous-mêmes les échantillons de matériau qui seront analysés. Qu'un premier contrôle n'ait révélé aucune anomalie ne suffit pas. Il faut en refaire régulièrement, d'autant qu'à l'heure de la mondialisation, les sociétés sont très mouvantes. Il n'est pas impossible que des prothèses commercialisées aux États-Unis, ayant reçu l'aval de l'agence américaine et présentant toutes les garanties nécessaires, le soient ultérieurement sur le marché européen sous la même marque, sans être du tout composées du même matériau, ayant été fabriquées à l'Île Maurice par exemple avant d'être importées en Europe. La mondialisation exigerait que toutes les agences de sécurité sanitaire du monde coordonnent leur action. Il faut à tout le moins coopérer au niveau européen. La libre circulation des marchandises impose que tous les États membres effectuent des contrôles et en assument la responsabilité de façon coordonnée.

Un dispositif médical implantable n'est pas un produit banal. S'il est de mauvaise qualité, les conséquences peuvent en être dramatiques pour les patients. Il faut de plus en assurer le suivi tout au long de sa vie, car le dispositif lui aussi vieillit. Les incidents n'arrivent bien souvent qu'après des années, d'où la nécessité d'imposer aux firmes ce suivi, en sus de celui assuré par l'agence.

Une refonte de notre dispositif de vigilance sanitaire s'impose. Elle prendra du temps. Nous y travaillons. N'attendons pas une troisième catastrophe sanitaire, après celle du Mediator et des prothèses PIP, pour constater ses carences.

La procédure actuelle de notification des événements indésirables est trop compliquée. Les médecins ne savent pas bien ce qu'ils doivent déclarer et à qui. Ils ont du mal à distinguer ce qui relève de la matério-vigilance, de la pharmacovigilance, de la biovigilance, de l'hémovigilance… Les professionnels doivent pouvoir déclarer de manière simple un effet secondaire qu'ils ont observé, sans qu'il leur appartienne de l'imputer à telle ou telle cause ni de l'inscrire à telle ou telle case d'un formulaire. Peut-on reprocher aux chirurgiens d'avoir sous-notifié les ruptures de prothèses PIP quand il n'est obligatoire de déclarer que les effets indésirables létaux – il n'y en a pas eu, fort heureusement – et les « événements graves inattendus » ? Il n'est pas « inattendu » qu'une prothèse rompe. La complexité des formulaires est dissuasive. Dans le même temps, nous ne regardons que ce qui y a été noté. Nous surveillons en quelque sorte le marché : c'est si nous constatons plus d'ennuis avec une marque de prothèse donnée que nous organisons un contrôle plus approfondi. Que quinze chirurgiens déclarent un souci qu'ils ont pu rencontrer ne modifie pas les statistiques à l'échelle de cent mille, mais cela doit suffire à lancer des investigations complémentaires. D'où l'intérêt que tous les événements indésirables soient déclarés.

Il faut créer un portail où quiconque ayant constaté un événement indésirable pourra le déclarer de manière simple, étant entendu qu'il appartient ensuite à des spécialistes de le caractériser et de le traiter. Il n'est pas toujours facile de déterminer si tel événement survenu chez un porteur de pacemaker qui prend également des anti-arythmiques est imputable au premier ou aux seconds et relève de la matériovigilance ou de la pharmacovigilance. Le directeur général de la santé et moi-même allons faire des propositions afin que soit créé un portail, accessible à tous et aisément compréhensible.

Dans la nouvelle Agence nationale de sécurité du médicament, la principale direction sera celle de la surveillance – laquelle ne se réduit pas aux différents types de vigilance. Elle mènera des investigations sur la base d'un faisceau d'indices concordants. La méthode doit être la même qu'il s'agisse d'un médicament, d'un dispositif médical ou d'un cosmétique.

S'il faut repenser l'organisation de notre dispositif, un changement de culture s'impose également. La vigilance doit s'exercer de manière proactive. Chacun sait qu'on consomme en France des quantités considérables de psychotropes, médicaments qui, s'ils sont indispensables à certains malades, présentent des dangers lorsqu'ils sont pris à long terme de manière pas toujours justifiée. Sans attendre qu'une nouvelle catastrophe soit avérée, nous avons élaboré un rapport sur le sujet qui dresse un état des lieux précis et ouvre des pistes de réflexion. Nous continuerons à être ainsi proactifs.

Il est important d'informer le corps médical des détournements d'usage dont certains produits font l'objet, ce qui peut nous amener à les retirer de la vente. Le bon usage du médicament passe par le respect de l'autorisation de mise sur le marché. Un anti-épileptique soigne l'épilepsie, il n'est pas destiné à faire maigrir, même si une prise au long cours peut diminuer l'appétit et, partant, faire perdre du poids. S'il est détourné de son indication, il y a un risque pour l'usager, sans aucun bénéfice en contrepartie. En outre, certains médicaments de cette classe sont si puissants que certains en usent pour se droguer, au risque d'une addiction, et d'autres même à des fins criminelles, par exemple pour commettre un viol. Lorsque des médicaments peuvent être aussi gravement détournés et qu'il existe une alternative thérapeutique, il est de notre devoir de les retirer du marché.

Les dispositifs médicaux, non plus que les médicaments, ne sont pas des gadgets inoffensifs : tous présentent des risques. L'agence doit faire oeuvre de pédagogie sur le sujet. Limiter les possibilités de détournement d'usage l'y aidera. Une autorisation de mise sur le marché doit être scrupuleusement respectée : elle a d'autant plus de chances de l'être qu'elle est claire, précise et actualisée. Si un médicament est contre-indiqué pendant l'allaitement, il est important que les femmes qui allaitent ne s'en voient pas prescrire, mais s'il se révèle au final qu'il ne présente pas de danger pour le bébé, il nous appartient de supprimer la contre-indication. Au service et à l'écoute des professionnels aussi, l'agence doit leur faciliter la tâche. Certes, un médecin peut prescrire en dehors de l'autorisation à bon escient pour un malade précis dans un cas précis. Mais lorsqu'une autorisation devient systématiquement détournée, c'est soit qu'elle n'a pas été adaptée comme il l'aurait fallu… soit que les médecins ne recherchent pas s'il existe un traitement alternatif.

Il importe de contrôler la publicité, parce que celle-ci vise à développer le marché d'un produit, pas à en garantir le bon usage. Aucune publicité pour un médicament ne devrait en occulter les risques. Nous n'avons pas rencontré de problèmes particuliers dans le contrôle a priori. La vraie difficulté, c'est de faire évoluer les mentalités et de convaincre les firmes que la loyauté exige qu'elles citent les risques au même titre que les bénéfices et qu'elles fassent état des seules indications de l'autorisation de mise sur le marché – ni plus ni moins. Il nous faut imposer ce code de bonne conduite. Les firmes qui, dans leur très grande majorité, travaillent aussi à l'échelle internationale, sont responsables et respectent les règles lorsqu'elles sont claires. Aux États-Unis par exemple, il n'existe pas de contrôle de la publicité, mais les sanctions sont si dissuasives que les laboratoires auto-régulent leurs pratiques. Nous n'avons donc pas d'inquiétudes en matière de contrôle de la publicité.

L'agence est chargée de veiller d'abord à la sécurité – safety first, dirais-je. Un médicament, même bon marché, peut être dangereux. Elle évalue les médicaments sous l'angle de leur sécurité et de leur rapport bénéficesrisques avant de leur accorder une autorisation de mise sur le marché. La Haute Autorité de santé évalue, elle, le service médical rendu (SMR) ainsi que l'amélioration de ce service (AMSR), desquels dépendra le taux de remboursement du médicament. C'est le Comité économique des produits de santé (CEPS) qui, sur la base de ces travaux, en détermine le prix. Si le rapport bénéficesrisques est régulièrement réévalué, la tâche de la Haute Autorité et du comité en sera facilitée puisqu'ils pourront travailler sur la base de données objectives et actualisées.

J'en viens aux génériques. L'une de leurs raisons d'être est qu'ils sont moins chers que les princeps. Les génériqueurs déposent parfois leurs demandes d'autorisation de mise sur le marché des mois avant l'expiration du brevet du produit princeps et souhaiteraient que nous examinions leur dossier, voire contrôlions leur publicité, avant même qu'ils n'aient débuté leur production. Il faut être raisonnable et ne pas brûler les étapes. Pour le reste, nous veillons à l'équité dans la délivrance de ces autorisations, de façon à éviter toute distorsion de concurrence entre marques.

Le véritable problème avec les génériques est la perte de confiance dont ils font aujourd'hui l'objet. Le seul moyen d'endiguer le phénomène est de garantir que leur sécurité est identique à celle des princeps. Elle est même supérieure dans certains cas, un nouveau produit étant souvent mieux étudié et fabriqué dans de meilleures conditions. Lorsqu'il existe des doutes, il faut s'attacher à les lever. Nous nous y efforçons à l'échelle européenne. Certains génériques injectables, qu'on n'évalue pas au motif qu'il n'y a pas d'autre différence avec le princeps que la forme d'administration, alors qu'ils sont fabriqués avec des techniques de fermentation de levures les rapprochant de produits de biotechnologies, sont davantage des produits biosimilaires que des génériques stricto sensu. Nous essayons de faire évoluer la réglementation européenne à ce niveau, notamment pour les antibiotiques, médicaments particulièrement précieux.

Pour le reste, il est vrai qu'il peut être déroutant pour les médecins, les pharmaciens et les patients, là où n'existait auparavant qu'un ou deux produits, d'en avoir du jour au lendemain à disposition des dizaines, d'autant que chaque fabricant tente parfois de manière agressive d'imposer le sien – ils se livrent une concurrence féroce. Une certaine pédagogie est nécessaire de façon que prescripteurs et distributeurs ne soient pas noyés.

S'il faut se féliciter que le prix des médicaments puisse diminuer, il n'en faut pas moins prendre garde. Quand le prix de certains d'entre eux devient dérisoire, les laboratoires en abandonnent la fabrication et des sous-traitants, parfois peu scrupuleux, s'en arrogent alors le monopole et les font fabriquer dans des conditions qui ne sont pas satisfaisantes. Pourquoi s'il est meilleur que le princeps, un générique injectable ne pourrait-il pas coûter aussi cher, voire plus cher ? Il faut des mécanismes incitatifs pour que continuent d'être produits selon de bonnes pratiques certains médicaments indispensables, bien que peu rentables. Cette préoccupation est mondiale. Est-il acceptable que le prix de certains traitements des leucémies de l'enfant soit tombé si bas que plus aucun laboratoire ne veut les fabriquer ? Le prix d'un médicament doit être fixé aussi en fonction de son intérêt pour la santé publique.

La médecine évolue vers des traitements personnalisés. Pour développer un médicament utilisable sans danger chez le petit enfant ou la femme enceinte pour une affection courante, un laboratoire doit consentir des investissements considérables, tant en recherche que sur le plan industriel. On ne peut pas exiger de lui ensuite qu'il le vende beaucoup moins cher qu'un autre qu'il aurait développé en-dehors de ces indications. Les situations orphelines, si je puis les qualifier ainsi, appellent la même attention et les mêmes exigences que les maladies orphelines. Or, loin d'être incitatifs, les mécanismes actuels auraient même l'effet inverse.

S'il existe un soupçon de toxicité d'un produit pour les femmes enceintes, nous devons le faire savoir, de façon à empêcher qu'elles puissent y être exposées. Toute situation n'exige pas de recourir à un médicament. Une révolution culturelle est nécessaire, chez les patients d'abord, avides de médicaments, mais aussi chez les médecins, rarement réticents à en prescrire. Il faut valoriser d'autres stratégies thérapeutiques que médicamenteuses car les risques ne pourront jamais être tous écartés.

Les médicaments ne sont pas une marchandise comme une autre. Certaines classes sont même très dangereuses. Les prescripteurs doivent aider les patients à prendre conscience qu'un médicament n'est jamais prescrit à bon escient que pour une personne donnée à un moment donné et pour une durée limitée ! La durée des traitements est une préoccupation majeure. Par souci de simplification ou pour éviter des consultations répétées, l'assurance maladie a fait la promotion des conditionnements pour trois mois. C'est beaucoup pour certains médicaments ! L'agence souhaite inciter à une nouvelle approche, plus frugale.

Elle ne recommandera jamais l'usage d'un médicament hors autorisation, sauf dans le cadre d'une autorisation temporaire d'utilisation (ATU), que la récente loi a d'ailleurs mieux encadrée. Si le bénéfice est avéré, il n'y a aucune raison que l'autorisation ne soit pas étendue. Dans le cas contraire, il faut savoir s'arrêter. Il appartient à l'agence d'adapter ainsi ses décisions en fonction des observations au fil du temps, ce n'est pas le plus facile.

Comment remobiliser les personnels de l'agence après la réorganisation ? Des changements étaient indispensables. Il y a des responsables, j'espère qu'ils ne sont pas coupables, la justice se prononcera. Nous avons supprimé les anciennes directions. Ceux qui étaient à leur tête sont partis, non qu'ils aient failli, mais parce que cette organisation en directions, indépendantes les unes des autres et qui ne collaboraient pas, était dangereuse.

Je tiens à féliciter et à remercier l'ensemble des personnels qui, en dépit d'une certaine perte de repères, inévitable entre une ancienne structure en train de disparaître et une nouvelle n'étant pas encore en place, se sont pleinement mobilisés au service du changement et sont restés tout à leur tâche. Davantage d'analyses de rapport bénéficesrisques ont été effectuées en 2011 que pendant les cinq dernières années : c'est dire le travail accompli ! Au moment où on exige d'eux qu'ils modifient leurs méthodes de travail, il importe qu'ils se sentent soutenus par le nouvel encadrement.

Nous avions fait appel à des candidatures internes pour participer à des groupes de travail sur le changement. C'était une erreur – que j'assume – car se sont alors révélées des ambitions qui n'allaient pas de pair avec les compétences nécessaires et soulevaient des problèmes déontologiques. Cela a suscité un émoi que je comprends. Des règles ont été fixées. La première est déontologique. Si on fait appel à une personne ayant travaillé dans l'industrie, il faut s'assurer qu'elle a rompu tout lien. Il n'est pas faux, vous l'aviez fait remarquer, que beaucoup de personnes employées à l'agence ont un conjoint qui occupe de hautes responsabilités dans l'industrie pharmaceutique. Il faut à cet égard lever toute ambiguïté et j'assume pleinement mes responsabilités sur ce point. La deuxième règle est de s'assurer des compétences scientifiques des personnes dans le champ concerné. La troisième est de vérifier leur aptitude au management. L'ancien directeur du médicament avait sous sa responsabilité 480 personnes, alors qu'il était aussi deux semaines par mois à Londres…

Nous avons mis en place plusieurs équipes d'une cinquantaine de personnes, chargées de suivre un produit tout au long de sa vie, de l'octroi de son autorisation de mise sur le marché au contrôle de sa publicité. La tâche doit s'en trouver facilitée. Des gains de productivité sont possibles par ces simples changements, mais il faut aller plus loin en faisant travailler ensemble toutes les équipes à l'analyse aussi bien des bénéfices que des risques, car il faut veiller à une comparaison équilibrée entre les deux. Les équipes « produit » devront présenter à nos commissions des dossiers bien instruits et transparents sur le rapport bénéficesrisques. J'espère que la sortie des décrets d'application, qui permettront la mise en place effective de la nouvelle agence, sera l'occasion pour les personnels de se mobiliser encore davantage autour de ces nouvelles valeurs. Je n'ai aucun doute sur ce point, le travail ayant toujours été fait, même au pic de la crise. Toute réorganisation, par les changements qu'elle implique, mineurs ou plus importants, suscite des inquiétudes. Mais, cette réorganisation était indispensable. Comme vous l'aviez fait remarquer, la longévité à certains postes avait pu conduire à une moindre vigilance. C'est tout l'intérêt de changer de poste au sein de l'institution ou de s'ouvrir aux pratiques d'autres agences. Cette gestion des ressources humaines n'est pas la part la plus simple de la tâche du directeur général de l'agence, je l'avoue, mais elle en fait partie.

PermalienPhoto de Pierre Méhaignerie

Merci beaucoup, professeur, pour ces réponses. Nous avons pu mesurer la passion qui vous anime et retenons votre message : l'équilibre entre les bénéfices et les risques d'un médicament ou d'un produit de santé est toujours délicat et ce rapport demande à être apprécié selon les circonstances. Il nous appartient à tous, à nous comme à vous, d'en faire prendre conscience à nos concitoyens. Nous vous souhaitons bon courage à la tête de la nouvelle agence.

La Commission des affaires sociales examine, sur le rapport de M. Yves Bur, la proposition de loi relative la gouvernance de la sécurité sociale et à la mutualité (n° 3977).

PermalienPhoto de Pierre Méhaignerie

La proposition de loi d'Yves Bur qui nous est soumise aujourd'hui sera examinée en séance publique le lundi 27 février à vingt et une heures trente.

PermalienPhoto de Yves Bur

Monsieur le président, mes chers collègues, cette proposition de loi, que j'ai rédigée avec Denis Jacquat, envisageait d'abord de créer une caisse d'assurance retraite et de la santé au travail (CARSAT) en Alsace-Moselle. Deux sujets s'y sont greffés par la suite : la date d'élection et la composition du conseil d'administration de la Caisse nationale du régime social des indépendants (RSI) et la gestion du Conseil supérieur de la mutualité. Ce dernier point avait fait l'objet d'une proposition de loi rédigée avec Jean-Pierre Door. Ces trois articles ont été adoptés par les deux assemblées lors de la la discussion de la loi dite « Fourcade ». Le Conseil constitutionnel a censuré ces dispositions, au motif qu'il s'agissait de « cavaliers législatifs ». Nous avons donc déposé une nouvelle proposition de loi.

L'article 1er vise à doter l'Alsace-Moselle d'une caisse régionale d'assurance retraite et de la santé au travail, comme dans le reste du territoire. La création de cette instance, qui est l'aboutissement du rapprochement des deux caisses régionales d'assurance maladie et d'assurance vieillesse mené depuis 2008, s'accompagne de certains ajustements afin de préserver la spécificité du régime local. Par ailleurs, les règles géographiques d'affiliation au régime sont simplifiées. Comme je l'ai déjà indiqué, cet article a été censuré comme « cavalier législatif » par le Conseil constitutionnel. Ce contretemps suppose donc quelques ajustements formels. Je vous proposerai donc des amendements de cohérence, notamment pour prévoir la fusion des caisses au 1er avril 2012, et non au 1er janvier 2012, ou encore la suppression de la prorogation du mandat des administrateurs, devenue inutile. Cette mesure est attendue, le personnel des caisses a beaucoup travaillé pour être prêt au printemps prochain.

L'article 2 réforme le mode de désignation du conseil d'administration de la Caisse nationale du régime social des indépendants et proroge le mandat de ses administrateurs. La proposition de loi propose que le conseil d'administration soit composé des « présidents des caisses de base et des personnes qualifiées désignées par l'autorité compétente de l'État ». Cependant, cette recomposition du conseil d'administration pourrait menacer l'équilibre interprofessionnel ayant jusqu'ici prévalu, et les professions libérales risqueraient d'être lésées par la réforme. Je vous proposerai donc de surseoir à cette modification et de supprimer cette disposition. Par ailleurs, les élections au conseil d'administration auraient dû intervenir en avril, c'est-à-dire pendant la campagne présidentielle. Mener les deux campagnes de front n'aurait pas été judicieux ; aussi proposons-nous de reporter le renouvellement du conseil d'administration à l'automne.

L'article 3 tend à moderniser le Conseil supérieur de la mutualité, afin qu'il tienne véritablement son rôle d'instance de dialogue, rôle qu'il a abandonné depuis quelques années en raison de son caractère pléthorique. Le conseil serait désormais constitué en majorité de représentants des mutuelles désignés par les fédérations les plus représentatives du secteur. La complexité rare qui présidait à sa désignation a eu pour conséquence qu'il n'a pas été réuni depuis des années. Je vous soumettrai un amendement tendant à proroger les mandats des membres actuels du conseil pour faciliter la transition avec le nouveau mode de nomination.

Renforcer l'efficacité de la gestion du régime et le service rendu aux assurés d'Alsace-Moselle, améliorer la gouvernance du régime social des indépendants et moderniser le dialogue entre les pouvoirs publics et les mutuelles, tels sont les objectifs poursuivis par la proposition de loi que je vous propose aujourd'hui d'adopter, après le vote de plusieurs amendements d'ajustement que je viens d'évoquer.

PermalienPhoto de Pierre Méhaignerie

Ces mesures ont recueilli l'accord de la droite comme de la gauche, au Sénat comme à l'Assemblée.

PermalienPhoto de Dominique Tian

Je voterai avec plaisir cette proposition de loi en soulignant que le régime d'Alsace-Moselle a la particularité de présenter des comptes équilibrés. Intriguée, la commission des affaires sociales du Sénat a demandé à la Cour des comptes une étude sur le régime d'assurance maladie complémentaire d'Alsace-Moselle. Rendue le 14 décembre 2011, elle signale des pistes dont les uns et les autres pourraient s'inspirer car cette année ce régime complémentaire obligatoire est non seulement équilibré, mais il va diminuer les cotisations, dont le taux va passer de 1,6 % à 1,5 % en 2012. De telles performances laissent rêveur, d'autant que le niveau de prestations versées est supérieur à celui du régime général de la sécurité sociale.

La gestion est sûrement plus efficace qu'ailleurs car elle est très largement décentralisée, et même régionalisée. La Cour des comptes souligne également que les frais de gestion sont faibles, autour de 1 %, contre 4 % pour le régime général. De là à penser qu'un tel régime pourrait être transposé au plan national… Au moins la question mérite-t-elle d'être posée, en dépit des spécificités d'un régime bismarckien qui ne fait cotiser que les actifs, sans mettre les employeurs à contribution, lesquels, logiquement, ne se mêlent pas de sa gestion.

PermalienPhoto de Michel Liebgott

Si ce régime était étendu, il ne serait plus un modèle auquel nous tenons car il reflète les liens que nous avons su tisser entre nous. Pour ce qui est des employeurs, rien ne dit qu'ils ne seront pas un jour sollicités, puisque nous sommes en France. C'est d'ailleurs la raison pour laquelle nous en débattons ici aujourd'hui. Il aurait été dommage de remettre en cause une spécificité qui remonte à 1884 et qui fait consensus. Ce faisant, je m'exprime également au nom d'Armand Jung qui n'a pu être présent aujourd'hui et au nom de tous les autres députés socialistes mosellans et alsaciens. Nous donnons notre accord à ce texte d'autant qu'il reprend un amendement d'un sénateur socialiste qui avait été adopté lors de la discussion du projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2012, mais que le Conseil constitutionnel a considéré comme un cavalier social. Nous avons donc l'intention de graver dans le marbre l'existence d'un bel outil – 1 100 salariés, 650 000 retraités et 2,8 millions d'assurés sociaux. Nous regrettons seulement le retard qui a été pris à cause des mécanismes institutionnels et déplorons que le délai du 1er janvier 2012 n'ait pas pu être respecté.

Il reste à trancher un problème de gouvernance. Il y avait dans les instances des anciens organismes des employeurs, des assurés sociaux, des personnalités qualifiées, et, à titre consultatif, des représentants des associations familiales et du personnel des caisses, ce qui traduit une volonté commune de rassemblement, qui est aussi un gage d'efficacité.

J'exprime donc un avis favorable à l'adoption de cette proposition de loi.

PermalienPhoto de Jean-Pierre Door

Je remercie notre rapporteur d'avoir ajouté à sa proposition les dispositions censurées par le Conseil constitutionnel, à savoir la réforme du conseil d'administration de la Caisse nationale du régime social des indépendants et de celui du Conseil supérieur de la mutualité, que réclamaient avec insistance les représentants de la mutualité française, mais à qui nous n'avions pu donner satisfaction jusque-là.

PermalienPhoto de Yves Bur

Je vous remercie de votre soutien.

Une précision, monsieur Tian. Il ne faut pas faire la confusion entre le régime complémentaire d'Alsace-Moselle et le régime général en Alsace-Lorraine qui, comme partout en France, rembourse 70 % des dépenses de santé et qui est aussi déficitaire qu'ailleurs. Le fait d'avoir un régime complémentaire généreux qui rembourse jusqu'à 90 % a même tendance à encourager les dépenses de santé. Dans un autre domaine, celui des arrêts maladie, le fait qu'en vertu du droit local, toutes les entreprises prennent en charge les trois jours de carence en cas de maladie du salarié a un effet déresponsabilisant pour les salariés. En revanche, le régime complémentaire, avec ses 461 millions de budget, couvre 2,6 millions d'assurés et il est équilibré parce qu'il est tenu de l'être. Les gestionnaires peuvent moduler les cotisations et les prestations en fonction de la situation financière du régime. En 2011, les excédents sur les revenus de placement ont permis de baisser les cotisations. Ce régime local est une complémentaire santé obligatoire et solidaire. Et c'est sa force.

Aujourd'hui, nous nous interrogeons tous sur la façon de financer notre protection sociale. Le débat a été engagé à propos de la TVA sociale et de la baisse des cotisations patronales. Jusqu'à présent, nous avons eu recours, pour l'assurance maladie, surtout à des artifices financiers complexes pour maintenir le déficit dans des limites supportables : soit 6 milliards d'euros pour 2012, au prix de contributions importantes puisque nous avons rétabli la taxe de 7 % sur les conventions d'assurance.

Après tout, pourquoi ne pas généraliser un régime qui marche, et qui rembourse l'ensemble des frais de santé à 90 %, y compris les médicaments remboursés à 30 %, la totalité du forfait hospitalier ? Et, parallèlement, développer un financement plus solidaire de l'assurance maladie ? Hier, dans un débat avec la mutualité, j'ai évoqué cette éventualité. Les Français consacrent 31 milliards d'euros environ à leurs complémentaires santé. Les 20-22 % de frais de gestion correspondants, environ 7 milliards d'euros, sont presque équivalents au coût des aides fiscales et sociales au financement de la couverture maladie complémentaire, rangé par la Cour des comptes parmi les niches fiscales. Si cette niche était supprimée, il resterait un financement de l'ordre de 17 milliards d'euros à trouver, soit 1,5 point de CSG. Et le tour est joué. Cela suppose tout de même en amont une assurance maladie beaucoup plus régulée, pour éviter les travers d'un système trop généreux.

Il subsisterait cependant quelques points à régler, comme les dépassements qui ne sont pas du tout pris en charge par le régime local d'Alsace-Moselle, de même que les frais d'optique complémentaire et les frais de prothèse dentaire. Enfin, que faire du reste à charge de 10 % ? Autorise-t-on la couverture du risque par une complémentaire ? Supprime-t-on le ticket modérateur pour les personnes atteintes d'une affection chronique de longue durée et les bénéficiaires de la CMU ? Ce sont autant de questions qui pourraient être à l'ordre du jour des travaux d'un futur Haut conseil pour le financement de la protection sociale. Évidemment, quand j'ai évoqué l'éventualité que je viens de décrire devant les organismes de la mutualité, j'ai jeté un froid… En Alsace, le taux d'adhésion à une assurance complémentaire est d'ailleurs beaucoup plus faible qu'ailleurs.

Il faut mener ce débat du financement de la protection sociale au-delà des frontières de l'Alsace-Moselle. Est-il judicieux d'entretenir un système auquel il faudra tôt ou tard affecter un complément de CSG et de maintenir un système d'assurance complémentaire qui devient de plus en plus onéreux ? J'ai examiné la situation dans ma commune : un fonctionnaire titulaire qui souscrit une complémentaire pour se couvrir lui, son conjoint et deux enfants, doit débourser 148 euros par mois sur un salaire de 1 600 euros bruts. C'est loin d'être négligeable alors qu'un contractuel relevant du régime local ne paiera que 70 euros par mois environ. Le budget de beaucoup de familles est grevé par la complémentaire santé. Encore deux tiers des complémentaires ne prennent-elles en charge à 100 % que les tarifs de la sécurité sociale, si bien que le problème des dépassements reste entier.

La Commission en vient à l'examen des articles.

Article 1er : Fusion de la caisse régionale d'assurance maladie et de la caisse régionale d'assurance vieillesse d'Alsace-Moselle

La Commission adopte successivement les amendements rédactionnels AS 1 à AS 7 du rapporteur.

Elle adopte ensuite l'amendement AS 8 du rapporteur, qui repousse la date de création de la Caisse d'assurance maladie et de la santé au travail d'Alsace-Moselle au 1er avril 2012, au lieu du 1er janvier 2012.

Elle examine ensuite l'amendement AS 9 du rapporteur.

PermalienPhoto de Yves Bur

L'amendement supprime une disposition devenue inutile ; en effet les membres du conseil d'administrations des caisses régionales ont été renouvelés en novembre 2011. Leur fonction arrivera à échéance au moment de la fusion effective de ces deux caisses.

La Commission adopte l'amendement AS 9.

Elle en vient à l'amendement AS 10 du rapporteur.

PermalienPhoto de Yves Bur

Il s'agit d'un amendement de cohérence avec le report de la date de création de la nouvelle caisse régionale unique.

La Commission adopte successivement l'amendement AS 10 et l'amendement AS 11 rédactionnel du même auteur.

Puis elle adopte l'article 1er modifié.

Article 2 : Composition du conseil d'administration de la Caisse nationale du régime social des indépendants

La Commission examine l'amendement AS 12 du rapporteur.

PermalienPhoto de Yves Bur

Il s'agit, par prudence, de supprimer la réforme du conseil d'administration du régime social des indépendants que contestent les représentants des professions libérales. Ils estiment qu'elle se ferait au détriment de leur représentation. Nous verrons si, d'ici au 27 février, nous pouvons arriver à un consensus.

La Commission adopte l'amendement AS 12.

Puis elle adopte l'article 2 modifié.

Article 3 : Composition et mode de désignation du Conseil supérieur de la mutualité et suppression des comités régionaux de coordination de la mutualité

La Commission adopte successivement l'amendement rédactionnel AS 13, l'amendement de précision AS 14 et l'amendement rédactionnel AS 15 du rapporteur.

Elle adopte l'amendement AS 16 du rapporteur, qui prolonge le mandat des membres du Conseil supérieur de la mutualité jusqu'à la mise en oeuvre de la réforme.

Puis elle adopte l'article 3 modifié.

La Commission adopte l'ensemble de la proposition de loi modifiée.

La séance est levée à midi.