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Commission d'enquête sur la manière dont a été programmée, expliquée et gérée la campagne de vaccination contre la grippe a

Séance du 2 juin 2010 à 16h00

Résumé de la séance

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La séance

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COMMISSION D'ENQUÊTE SUR LA MANIÈRE DONT A ÉTÉ PROGRAMMÉE, EXPLIQUÉE ET GÉRÉE LA CAMPAGNE DE VACCINATION CONTRE LA GRIPPE A(H1N1)

Mercredi 2 juin 2010

(Présidence de M. Jean-Christophe Lagarde, président de la commission d'enquête)

La Commission d'enquête sur la manière dont a été programmée, expliquée et gérée la campagne de vaccination contre la grippe A(H1N1) entend le docteur Jacques Fontan, responsable du centre de vaccination de Capbreton.

La séance est ouverte à seize heures vingt.

PermalienPhoto de Jean-Christophe Lagarde

Nous accueillons, sur la suggestion de M. Jean-Pierre Dufau, membre de la commission, le docteur Jacques Fontan, responsable du centre de vaccination de la ville de Capbreton, dont notre collègue est le maire.

Le docteur Jacques Fontan prête serment.

PermalienJacques Fontan, responsable du centre de vaccination de Capbreton

Médecin retraité, spécialiste de santé publique et de médecine tropicale, j'ai commencé ma carrière dans le service de santé de la marine. En tant que directeur du centre d'incorporation nationale de la Marine de Hourtin, j'y ai acquis une expérience de vaccination massive, puisque nous pratiquions 3 000 vaccinations par mois. J'ai ensuite rejoint l'équipe de l'Institut de médecine tropicale de Bordeaux 2 où j'ai piloté le diplôme de gestion de soins en milieu tropical.

En juin 2009, quand la direction départementale des affaires sanitaires et sociales des Landes a fait appel à des médecins retraités volontaires pour participer à la campagne de vaccination, je me suis inscrit et j'ai été désigné comme responsable du centre de vaccination de Capbreton. N'ayant aucune compétence technique ou scientifique particulière, c'est un témoignage de terrain que je vous livrerai.

Dans la nomenclature officielle du ministère, le centre de Capbreton apparaissait comme un centre standard à fonctionnement renforcé : ouvert au public sur trois périodes de quatre heures, il fonctionnait sans interruption de huit heures à vingt heures.

Le centre desservait 24 communes pour un bassin de population d'à peu près 60 000 habitants, parmi lesquels on compte 85 médecins généralistes. Le nombre de personnes vaccinées pendant cette période a été de 9 260, ce qui correspond à environ 15 % de la population desservie.

Le local sélectionné par la préfecture se révélant trop petit, nous avons dû déménager en cours de campagne vaccinale dans un nouveau local beaucoup plus grand trouvé par la mairie. Ce déménagement nous a un peu gênés.

Pour chaque vacation, le médecin responsable du centre et l'infirmière coordonnatrice étaient présents en permanence. Deux médecins, cinq infirmières et quatre personnes faisaient partie de l'administration.

Les médecins étaient au nombre de quinze, dont treize retraités, et les infirmiers, au nombre de trente et un, dont cinq retraités, trois infirmiers en disponibilité et vingt-trois infirmiers actifs.

Le personnel administratif comptait douze personnes, dont quatre demandeurs d'emploi.

Je tiens d'emblée à souligner le rôle fondamental joué par la mairie de Capbreton. Elle nous a apporté un appui logistique de tout instant. Sans elle, nous n'aurions pas pu mener à bien notre mission car nous étions très éloignés du chef-lieu du département, Mont-de-Marsan.

Les difficultés que nous avons rencontrées ont été de deux ordres : les unes étaient liées au comportement des patients, les autres aux tâches administratives du centre.

Les premières étaient dues à trois sentiments éprouvés par la population : la suspicion, le désarroi et l'incompréhension.

La lenteur du démarrage de la campagne est à mettre au compte de la suspicion : pendant les trois premiers jours, seules quatre-vingts personnes sont venues se faire vacciner, contre cinq cent vingt la deuxième semaine. La suspicion éprouvée par la population me paraît due à deux facteurs : d'une part, le faible engagement des médecins généralistes locaux au début de la campagne – quand ceux-ci sont venus se faire vacciner, la deuxième semaine, la campagne a vraiment démarré, puisque la courbe de fréquentation est passée de 1 400 à 2 000 personnes par semaine – ; d'autre part, le matraquage médiatique qui véhiculait des messages contradictoires ou paradoxaux : chaque jour, le nombre de morts dus à la grippe A(H1N1) était répété du matin au soir alors qu'il était inférieur à celui de la grippe saisonnière et on n'arrêtait pas d'insister sur le fait que les sujets jeunes couraient plus de risques que les sujets âgés.

Le second sentiment éprouvé par la population était le désarroi. Les débats télévisés où s'affrontaient les experts, aux avis contradictoires, et les informations diffusées sur internet sur la dangerosité des adjuvants – squalène, thiomersal – y ont fortement contribué mais la communication du ministère, annonçant la distribution de deux types de vaccins, un sans adjuvant réservé aux populations fragiles, et l'autre avec adjuvant pour le reste de la population, est venue encore renforcer les craintes. La majorité des patients nous réclamaient un vaccin non adjuvé, si bien que les médecins du centre ont dû passer beaucoup de temps et faire preuve de beaucoup de pédagogie pour les convaincre de se laisser vacciner selon le protocole prescrit. Ce travail d'explication long et fastidieux a souvent eu des conséquences négatives sur le fonctionnement de la chaîne vaccinale.

Le troisième sentiment éprouvé par la population était l'incompréhension face à certaines incohérences. La réception des bons émis par la Caisse nationale d'assurance maladie des travailleurs salariés (CNAMTS) en fonction des catégories prioritaires a semblé souvent aléatoire : des malades chroniques les avaient reçus tandis que d'autres non ; dans une même famille, certains membres les avaient reçus, mais d'autres les attendaient encore.

Les changements successifs de protocole vaccinal ont également été difficiles à expliquer aux familles. Au début de la campagne, nous avons vacciné les enfants avec deux doses de Pandemrix. Dix ou quinze jours après, nous avons reçu le Panenza et l'avons donc utilisé pour vacciner les enfants. Mais, comme on ne pouvait pas croiser les vaccins, les premiers enfants qui avaient reçu le Pandemrix ont dû recevoir une deuxième injection de ce vaccin, si bien que, dans une même famille, des enfants ont été vaccinés avec du Panenza et d'autres avec du Pandemrix. À partir du 14 décembre, de nouvelles dispositions vaccinales préconisaient l'injection de deux doses de Panenza jusqu'à huit ans et d'une seule dose de Pandemrix à partir de neuf ans. Tout cela était difficile à comprendre par les familles.

Autre difficulté rencontrée, le poids des tâches administratives, à commencer par l'édition des indispensables bons de vaccination. Le déficit de fréquentation du centre dans les premiers jours de la campagne nous a conduits à proposer une vaccination pour tous, avec ou sans bon. Cette option, posée dès le début, a été appliquée pendant toute la campagne bien qu'elle ne correspondît pas aux annonces des spots télévisés et aux instructions ministérielles qui recommandaient l'ajournement de la vaccination des personnes non prioritaires. Notre choix a rapidement produit ses effets mais nous a contraints à un travail long et pénible : la saisie informatique des bons sur le site ameli.fr (assurance maladie en ligne) de la CNAMTS était complexe. L'édition de ces bons de vaccination a demandé un travail de vérification très rigoureux de la part du secrétariat, et a été une source d'engorgement dans le centre.

Une autre tâche qui nous a incombé, alors qu'elle n'était pas prévue au départ, a été la délivrance de vaccins à des structures extérieures. Nous avons fourni des vaccins aux équipes de l'Éducation nationale et aux établissements d'hébergement de personnes âgées dépendantes. Comme nous nous sommes rapidement rendu compte que ces dernières structures étaient inaptes à assurer des vaccinations fiables, nous avons envoyé des équipes pour procéder à celles-ci. Ces vaccinations nous ont également demandé un gros travail sur le plan administratif puisqu'il fallait vérifier la comptabilité des vaccins et assurer la traçabilité.

Les formalités administratives demandées par l'échelon départemental étaient également contraignantes : compte rendu journalier d'activité, compte rendu de gestion des flacons, statistiques de fréquentation, planning prévisionnel hebdomadaire, fiche de présence quotidienne.

La quantité de documents à fournir pour la rémunération du personnel a été particulièrement lourde. Or, malgré nos efforts pour les envoyer régulièrement, les délais de paiement ont été longs. Le personnel n'a été payé que quatre mois, en moyenne, après le début de la campagne, ce qui a conduit à certaines situations critiques, notamment pour les demandeurs d'emploi.

Je vous ferai part en conclusion du sentiment général de l'équipe vaccinale, que j'ai réunie avant de venir devant vous. Malgré les difficultés dont je viens de parler, malgré le regret de ne pas avoir été associés à la phase de préparation de la vaccination et malgré la déception qu'il n'y ait pas eu de réunion de synthèse, cette expérience a été jugée très positive par l'ensemble de l'équipe : elle a montré qu'un groupe de professionnels inconnus les uns des autres mais motivés pouvait rapidement se structurer et assurer, dans un contexte de crise sanitaire, la mise en place d'une action préventive d'envergure.

PermalienPhoto de Jean-Pierre Door

Je vous remercie de cette synthèse remarquable, alliant clarté et précision. Pour avoir, moi aussi, participé à un centre de vaccination, je m'y suis tout à fait retrouvé.

Vous avez un résultat impressionnant. Tous les centres aimeraient pouvoir se targuer d'un taux de vaccination de 15 % de la population qu'ils desservaient.

Voici quelques questions. Quels ont été les locaux prêtés par la mairie ? Comment avez-vous procédé pour l'élimination de vos déchets ? Comment a été vécue par le personnel la fin brutale de la campagne de vaccination ? Qu'avez-vous fait des stocks de vaccins et de matériel qu'il vous restait ? Avez-vous pu établir un tableau comptabilisant le nombre d'enfants, de femmes enceintes et de personnes souffrant d'une affection de longue durée, que vous avez vaccinés ?

PermalienJacques Fontan, responsable du centre de vaccination de Capbreton

La question du local est un bon exemple de ce qui aurait pu être réglé si nous avions été associés à la phase de préparation. Je me suis porté volontaire au mois de juin mais n'ai été convoqué à la préfecture des Landes que le 8 novembre, alors que la campagne commençait le 12. Le 8 novembre, je ne connaissais rien. J'ai pris contact avec la mairie de Capbreton, et le directeur général des services municipaux m'a montré le local retenu par le personnel de la préfecture. Ayant un peu l'habitude des vaccinations de masse, j'ai tout de suite vu qu'il ne convenait pas. Comprenant trois petites pièces desservies par un couloir, il était même dangereux en cas d'afflux de personnes. J'ai immédiatement demandé au maire de pouvoir changer de local. Je voulais le faire avant le début de la campagne. Le préfet s'y est opposé. Comme les convocations avaient été envoyées, il m'a demandé de démarrer la vaccination dans le local prévu à cet effet et de changer en cours de campagne si j'avais des difficultés. J'avoue que le déménagement nous a passablement perturbés.

PermalienJacques Fontan, responsable du centre de vaccination de Capbreton

Nous étions au début dans un centre de camping. Deux pièces, chauffées, servaient de salles d'attente : dans la première, les gens patientaient, dans la seconde, ils remplissaient les documents administratifs. Nous avons eu ensuite une salle immense, que la mairie de Capbreton a structurée de manière remarquable en une journée à l'aide de cloisons en bois. Tout le monde a été agréablement surpris du résultat : une grande salle d'attente avait été aménagée au centre de l'immense salle, autour de laquelle se répartissaient deux bureaux de médecin, un bureau pour le responsable du centre, la salle de vaccination et une salle de repos en cas de besoin. C'était parfaitement fonctionnel.

Notre bon résultat vient de ce que nous n'avons jamais tenu compte des bons de vaccination. Comme je l'ai indiqué, nous les éditions, ce qui nous a demandé un travail énorme. Cela s'est su très vite, si bien que, dès la troisième semaine, nous avons vu arriver des gens du Pays basque. Le centre de vaccination de Bayonne ne proposait que trois après-midi de vaccination par semaine, ce qui créait un engorgement monstre. Capbreton n'est qu'à vingt kilomètres de Bayonne mais la ville est située dans le département des Landes tandis que Bayonne est dans le département des Pyrénées-Atlantiques, ce qui posait des problèmes d'approvisionnement en vaccins.

Lorsque la campagne a pris fin, notre centre recevait toujours beaucoup de monde. L'annonce a été brutale puisque nous avons appris le lundi que le centre devait fermer à la fin de la semaine. Et j'ai personnellement reçu mon bon de vaccination le mardi suivant – et de nombreuses personnes ont été dans le même cas –, c'est-à-dire après la fermeture du centre de vaccination.

En fin de campagne, il nous avait encore été demandé une tâche supplémentaire : distribuer du Focetria aux médecins généralistes. Sur les quatre-vingt-cinq médecins généralistes exerçant dans le bassin de population que nous desservions, quatre se sont déplacés pour venir chercher les vaccins. J'en ai profité pour leur demander leur avis sur la vaccination : ils n'étaient pas ravis car les tâches administratives qui accompagnaient celle-ci représentaient pour eux une charge supplémentaire qu'ils ne se sentaient pas capables d'assumer dans une telle période.

La fin soudaine de la campagne a surpris tout le monde. Au cours de la dernière semaine, il y avait eu quatre vacations au cours desquelles deux cents personnes étaient venues se faire vacciner.

La récupération des vaccins n'a pas posé de problème. Des équipes de la direction départementale des affaires sanitaires et sociales étaient chargées de cette mission. En revanche, il y a eu un gaspillage énorme de matériel médical. Comme cela coûtait trop cher de le reprendre, il nous a été demandé de le distribuer. Nous avons donc pris contact avec des maisons de retraite des environs pour écouler nos stocks de seringues, d'alcool et de coton. Il nous restait énormément de seringues. En cours de campagne, nous avions reçu, sans rien demander, plusieurs cartons de seringues supplémentaires : il nous en restait six, soit 24 000 seringues.

PermalienPhoto de Jean-Christophe Lagarde

Le matériel n'était pas fourni proportionnellement au nombre de vaccins ?

PermalienJacques Fontan, responsable du centre de vaccination de Capbreton

Pas du tout. Les vaccins étaient livrés séparément. Je suppose qu'un prestataire était spécialement chargé de cette livraison pour veiller à la continuité de la chaîne du froid.

Le matériel, quant à lui, arrivait de Mont-de-Marsan, vraisemblablement de l'Établissement de préparation et de réponse aux urgences sanitaires. Nous avons connu avec ce dernier des problèmes d'approvisionnement au début de la campagne. Alors qu'il nous était livré des seringues en quantité, nous manquions d'alcool et de pansements adhésifs, si bien que nous avons été obligés, la troisième semaine, d'acheter des pansements dans une pharmacie de Capbreton. Quant aux seringues, il n'y a pas que leur nombre qui nous posait des problèmes. D'une part, il s'agissait de seringues serties dont les infirmières n'aimaient pas se servir – elles disaient même que leur utilisation était contraire à leur déontologie –, d'autre part, elles présentaient un défaut : le bout de l'aiguille s'émoussait quand on l'enfonçait dans la capsule en caoutchouc du flacon de vaccin, ce qui pouvait rendre la vaccination douloureuse chez les enfants.

PermalienPhoto de Jean-Christophe Lagarde

Comment la population a-t-elle été informée de l'existence et de l'emplacement de votre centre ?

PermalienJacques Fontan, responsable du centre de vaccination de Capbreton

Grâce à des panneaux d'information lumineux implantés par la mairie sur la ville de Capbreton.

PermalienPhoto de Jean-Pierre Dufau

Et sur l'ensemble de la communauté de communes.

Vous comprenez, chers collègues, pourquoi j'ai souhaité que la commission entende le témoignage du docteur Jacques Fontan. Son expérience de terrain permet de tirer des enseignements utiles en matière d'organisation et de couverture du territoire.

Son témoignage montre – et je souhaite que cela figure dans le rapport – l'importance du rôle joué par les collectivités territoriales de base que sont les communes et les communautés de communes dans la mise en place d'un plan de vaccination de grande ampleur. On aura beau faire tous les plans qu'on voudra, si les communes et les communautés ne sont pas considérées comme des partenaires à part entière et associées dès le début à la mise en oeuvre du plan, on connaîtra beaucoup d'échecs. En revanche, si l'on se sert de cette formidable masse de compétences qu'elles représentent, il sera possible de mener une action efficace.

Voilà une démonstration supplémentaire de l'importance qu'il y a à maintenir des services publics sur l'ensemble du territoire, y compris en milieu rural. Les marées noires et autres catastrophes le montrent aussi.

La réactivité et la capacité d'adaptation des communes et des communautés de communes sont un gage de réussite. Quand, après s'être rendu compte, au début de la campagne, que tout avait été prévu sauf le sparadrap que l'on met après la piqûre, le docteur Jacques Fontan est venu nous en faire part, nous nous sommes tout de suite mobilisés pour acheter le sparadrap manquant.

L'autre point important à souligner est la nécessité, pour les collectivités territoriales, d'avoir des consignes claires, et de les avoir suffisamment tôt. Les indications données pour la recherche d'un local pouvant servir de centre de vaccination faisaient référence, au début, à des bureaux : la place disponible devait correspondre à la surface occupée par trois bureaux. Le flou le plus total régnait. Personnellement, j'ai refusé de réquisitionner des gymnases car je n'admettais pas qu'on prive des enfants de gymnastique et de sport à cause d'une pandémie.

Quand les demandes sont formulées correctement et suffisamment tôt, les collectivités territoriales sont capables de trouver des réponses. Mais l'absence de concertation avant la mise en place de la campagne comme celle de réunion de bilan à la fin de celle-ci ont été mal vécues par les collectivités territoriales et par les personnes qui ont travaillé dans les centres de vaccination.

Enfin, le fait que les demandeurs d'emploi réquisitionnés n'aient pas été indemnisés en temps voulu confine au mépris. La moindre des choses aurait été de leur donner une provision au moment de leur réquisition et de régulariser les comptes en fin de parcours. Les laisser quatre mois sans argent était inadmissible.

PermalienPhoto de Jean-Pierre Door

La commune a-t-elle été indemnisée pour la mise à disposition de locaux municipaux ?

PermalienPhoto de Jean-Pierre Dufau

J'ai envoyé une note de frais mais je ne pense pas qu'elle ait été déjà honorée.

PermalienPhoto de Jean-Christophe Lagarde

Soyez assuré, monsieur Jean-Pierre Dufau, que votre témoignage figurera dans le rapport. Il prouve au passage la vertu du cumul des mandats…

J'ai une autre suggestion à faire en matière de rémunération. L'État, que l'on sait incapable de payer dans des délais raisonnables, pourrait demander aux communes de rémunérer à sa place les personnels vacataires et rembourser ensuite celles-ci, comme il le fait déjà dans d'autres cas afin de ne pas laisser des demandeurs d'emploi dans des situations difficiles.

Docteur Jacques Fontan, les horaires d'ouverture de votre centre ont-ils été modifiés au cours de la campagne ? Dans ma commune, j'ai constaté des variations ubuesques à la suite d'instructions de la préfecture.

Par ailleurs, la nourriture des personnels présents dans le centre a-t-elle été prévue ou a-t-elle été oubliée comme le sparadrap ?

PermalienJacques Fontan, responsable du centre de vaccination de Capbreton

Avant de répondre à vos questions, je souhaite donner un exemple supplémentaire de la réactivité dont a fait preuve la mairie de Capbreton et de l'aide qu'elle nous a apportée.

Lors de la réunion préparatoire à laquelle j'ai participé à la préfecture, on m'a remis la circulaire ministérielle accompagnée de trois pavés détaillant le volet technique, le volet administratif et le volet opérationnel de la campagne, dans lesquels devaient se trouver des documents à remettre aux gens : le bon de vaccination, le certificat de vaccination et la fiche de consultation médicale. Or, je n'ai reçu aucun document officiel. Quand je m'en suis étonné auprès de la préfecture, il m'a été répondu de faire des photocopies. Pendant toute la campagne, la mairie de Capbreton a assuré 1 000 photocopies par jour, que nous allions chercher au fur et à mesure : cela a été un travail considérable.

Nous avons rapidement modifié les horaires du centre car nous nous sommes rendus compte qu'il n'y avait personne de 8 à 9 heures et de 19 heures à 20 heures. À partir de la troisième semaine, le centre a été ouvert de 9 heures à 19 heures, soit dix heures au lieu de douze, et ce pendant toute la durée de la campagne.

PermalienJacques Fontan, responsable du centre de vaccination de Capbreton

Non, le centre n'était pas ouvert le dimanche et, le samedi, nous arrêtions de vacciner à partir de 16 heures.

Aucune nourriture n'a été prévue. Comme il y avait trois vacations réparties de 9 heures à midi, de midi à 16 heures et de 16 heures à 19 heures, les gens mangeaient soit avant, soit après.

PermalienJacques Fontan, responsable du centre de vaccination de Capbreton

Oui. Mais chacun apportait de quoi manger et des infirmières préparaient des gâteaux. Il y avait une très bonne ambiance et, dans la salle de repos, il y avait une cafetière.

PermalienJacques Fontan, responsable du centre de vaccination de Capbreton

Cela a été un gros problème. Au début, on nous a affecté des volontaires de la protection civile, des secouristes, qui nous ont plus encombrés qu'autre chose. Ils étaient incapables de faire le travail de secrétariat dont nous avions besoin : saisies informatiques, éditions de bons ameli, vérification de la traçabilité.

Nous avons donc formé du personnel : parmi les demandeurs d'emploi, il y avait deux secrétaires qui ont alterné les vacations.

PermalienPhoto de Marie-Louise Fort

Notre mission ayant pour but de faire le point sur le déroulement de la campagne pour en tirer des résolutions en cas de nouvelle épidémie, j'aimerais avoir votre avis sur le rôle que pourraient jouer les réseaux de santé qui ont été écartés de la vaccination, à savoir les médecins et les pharmacies.

PermalienJacques Fontan, responsable du centre de vaccination de Capbreton

Il m'est difficile de répondre à votre question parce que je ne suis pas un spécialiste. Je ne peux que me faire l'écho de ce que nous disaient les médecins de Hossegor et de Capbreton avec lesquels nous avons rapidement tissé des liens.

Les médecins avaient énormément de consultations et ils se disaient contents qu'une structure soit capable de les soulager de la vaccination. Ce n'était pas tant cette dernière qui était en cause que les démarches administratives qui l'accompagnaient.

S'il y avait eu une information plus raisonnée et mieux contrôlée, il y aurait eu moins de problèmes et les gens seraient venus se faire vacciner sans se poser de question. Les médecins auraient pu y contribuer s'ils avaient été associés à la phase préparatoire de la campagne qui a eu lieu entre mai et septembre et à laquelle n'ont participé que les préfets et les services départementaux.

Cela étant, je reste persuadé qu'en cas d'épidémie grave, une structure du type de celle dont j'ai été responsable a toute sa place. Elle fait du préventif pendant que les médecins font du curatif. Les deux actions sont complémentaires.

PermalienPhoto de Gérard Bapt

J'ai, moi aussi, reçu mon bon de vaccination le jour de la fermeture du centre de ma circonscription.

Vous avez dit qu'après la fermeture de votre centre, des gens continuaient à venir. Je ne comprends pas bien.

PermalienJacques Fontan, responsable du centre de vaccination de Capbreton

Lorsque je suis passé au centre, deux ou trois jours après sa fermeture, pour prendre le matériel à distribuer dans les maisons de retraite, une personne du camping m'a dit qu'il y avait encore des gens qui venaient, malgré l'annonce faite par voie de presse de la fin de la campagne.

PermalienPhoto de Gérard Bapt

Dans ma circonscription, le centre de vaccination ne recevait presque plus personne à la fin de la campagne tandis que le vôtre continuait à vacciner. Ces disparités entre un centre et un autre sont assez curieuses.

PermalienPhoto de Jean-Louis Touraine

Combien votre centre recevait-il de personnes par jour ?

PermalienJacques Fontan, responsable du centre de vaccination de Capbreton

Au maximum de la campagne, il en recevait entre 700 et 800. Lors des trois dernières vacations, la dernière semaine, 200 personnes sont venues se faire vacciner.

Je m'étais amusé à faire une courbe de la fréquentation du centre tout au long de la campagne. Elle montre clairement un déclin de la vaccination pendant la période de Noël. D'ailleurs, la fin de la pandémie a été annoncée au début de janvier.

PermalienPhoto de Gérard Bapt

Le matraquage médiatique n'était pas à sens unique. D'un côté, on diffusait des prévisions catastrophistes tandis que, de l'autre, on parlait de grippette. Comment l'analysez-vous ?

PermalienJacques Fontan, responsable du centre de vaccination de Capbreton

Du point de vue de la population. J'analyse les effets du matraquage médiatique sur les gens et sur leur comportement. Les querelles d'experts et les interventions de la ministre de la santé les ont complètement désarçonnés. Ils ne comprenaient plus rien.

PermalienPhoto de Jean-Christophe Lagarde

Combien d'habitants la ville de Capbreton compte-t-elle ?

PermalienPhoto de Jean-Pierre Dufau

Elle en compte 9 000 permanents et 50 000 en été. Le bassin de population desservi par le centre de vaccination compte 60 000 personnes.

PermalienPhoto de Jean-Pierre Door

Y a-t-il un référent sanitaire au sein de la municipalité ?

PermalienPhoto de Jean-Pierre Door

Est-il allé chercher des informations auprès de la préfecture et de la direction départementale des affaires sanitaires et sociales et les a-t-il relayées ?

PermalienPhoto de Jean-Pierre Dufau

L'information – et c'est ce que nous déplorons – était verticale et maîtrisée. Il n'était fait aucune place au partenariat. Si nous avions été associés à la préparation de la campagne, son organisation aurait été plus simple, plus efficace et il y aurait eu moins de stress. Nous aurions même pu nous charger de l'information.

PermalienPhoto de Jean-Christophe Lagarde

Le centre de vaccination de ma ville a reçu des instructions différentes de la préfecture au cours de la campagne. Il lui a été demandé d'être ouvert jusqu'à 22 heures à peu près tous les jours, y compris le dimanche et les 24 et 31 décembre, alors qu'à partir de la mi-décembre, il n'y avait plus qu'une cinquantaine de personnes à venir se faire vacciner. Par ailleurs, après avoir eu l'aval de la préfecture pour vacciner toutes les personnes qui se présentaient, il lui a été officiellement enjoint de ne vacciner que les porteurs de bons… Avez-vous également reçu des instructions différentes de la préfecture ?

PermalienJacques Fontan, responsable du centre de vaccination de Capbreton

Tout à fait. L'impression que j'ai eue est que deux acteurs dirigeaient la campagne de vaccination : d'une part, le ministère de l'intérieur et les préfectures, d'autre part, le ministère de la santé par le biais des directions départementales des affaires sanitaires et sociales (DDASS).

J'avais un excellent contact avec le médecin de la DDASS de Mont-de-Marsan, qui était, elle aussi, partisane de vacciner le maximum de monde. Quand je lui ai dit que je ne tenais pas compte des bons, elle m'a approuvé mais m'a conseillé de ne pas m'en vanter auprès de la préfecture. Cette dernière recevait les instructions officielles et avait sans doute peur d'une rupture de stock si l'on vaccinait sur une trop grande échelle.

PermalienPhoto de Jean-Christophe Lagarde

Le fait que vous vacciniez même sans bon a-t-il été indiqué dans la presse locale ou sur les panneaux d'information lumineux ?

PermalienJacques Fontan, responsable du centre de vaccination de Capbreton

J'ai été interviewé, à la demande de la mairie, par un journaliste de Sud-Ouest qui a mentionné dans son article que nous vaccinions sans bon. Je l'ai regretté car c'est à la suite de cet article que nous avons vu arriver des habitants de Bayonne.

PermalienPhoto de Jean-Pierre Dufau

Nous estimions qu'une interview du docteur Jacques Fontan dans la presse constituerait un relais de communication important auprès de la population.

Sur le terrain, il était très difficile de demander aux personnes qui n'avaient pas de bons de retourner chez elles alors que les médias annonçaient que 90 millions de vaccins étaient disponibles, soit bien plus que la population française.

PermalienPhoto de Jean-Christophe Lagarde

Nous vous remercions, docteur Fontan, pour votre témoignage et vos réponses à nos questions.

La séance est levée à dix-sept heures dix.