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Commission d'enquête relative aux modalités, au financement et à l'impact sur l'environnement du projet de rénovation du réseau express régional d'Île-de-france

Séance du 18 janvier 2012 à 18h45

Résumé de la séance

Les mots clés de cette séance

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La séance

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Commission d'enquête relative aux modalités, au financement et à l'impact sur l'environnement du projet de rénovation du réseau express régional d'Île-de-France

La séance est ouverte à dix-huit heures cinquante.

PermalienPhoto de Daniel Goldberg

Nous recevons aujourd'hui M. Guillaume Pepy, président de la SNCF, une entreprise publique qui est l'un des deux opérateurs du RER.

En effet, l'exploitation des lignes A et B est partagée avec la RATP, alors que la SNCF est l'opérateur unique des trois autres lignes C, D et E. Mais le RER est un ensemble complexe qui s'inscrit, pour une partie importante, au sein du réseau ferré national (RFN), sur lequel la SNCF exploite d'autres lignes en Île-de-France. Ces activités urbaines et périurbaines de la SNCF sont toutes désormais regroupées sous le label ou la marque Transilien.

Le RER appartient ainsi à la catégorie des « trains du quotidien », pour reprendre une expression qui vous est chère, monsieur le président.

À tort ou à raison, la SNCF a pourtant pu être présentée comme la championne du « Tout TGV », alors que la ligne SNCF la plus fréquentée de France appartient précisément au réseau RER ! Il s'agit de la ligne D, la plus longue des cinq lignes du RER : avec 197 kilomètres, elle transporte plus de 550 000 voyageurs par jour.

L'intérêt porté au RER par la SNCF s'est traduit par divers plans d'action récents, ce qui pourrait conduire à démentir certaines affirmations rapides. Il en a été ainsi, en janvier 2011, lorsque vous avez identifié douze lignes absolument prioritaires, sur lesquelles devaient être engagés des travaux urgents afin de contrer un phénomène de dégradation de la régularité des trains. Deux lignes RER ont été retenues sur les douze lignes concernées : la ligne D et une partie de la ligne A, en liaison avec la RATP.

Vous comprendrez que je vous interroge sur les mesures concrètes mises en oeuvre depuis un an, dans ce cadre, et les premiers résultats mesurables.

Votre audition intervient après deux Tables rondes que nous avons organisées, ici même, la semaine passée, avec les associations d'usagers et les organisations syndicales. Nous avons écouté très attentivement ce qu'elles nous ont dit. Nombre de leurs observations et témoignages nourrissent notre réflexion. Certaines de leurs remarques ont confirmé ce que beaucoup de nos concitoyens expriment dans nos circonscriptions et ce que nous constatons nous-mêmes, car nous sommes nombreux à emprunter régulièrement le RER. Dans ces conditions, il est probable que les questions que vont poser le rapporteur, puis nos autres collègues, reprennent fréquemment des thèmes abordés par nos interlocuteurs

Les interrogations voire les griefs qui ont été formulés portent non seulement sur la qualité et la régularité du service mais aussi sur l'organisation générale du fonctionnement des lignes : je pense plus particulièrement au commandement opérationnel de la circulation, donc à l'imbrication des relations entre la SNCF et la RATP, mais aussi avec Réseau ferré de France (RFF).

Nous avons toutefois bien conscience de la fragilité du réseau du RER. Depuis sa conception initiale, il y a un peu plus de quarante ans, ce réseau a subi les effets d'évolutions urbaines et démographiques alors non prévisibles. Les investissements consentis au cours de son développement puis pour son adaptation n'ont pas été en rapport avec les besoins de mobilité – et donc les attentes – des usagers.

La SNCF, pas plus que la RATP, n'est seule responsable de cette situation. Nous aimerions néanmoins mieux comprendre comment fonctionne au sein de votre entreprise la programmation des investissements consacrés au RER. Quels travaux sont d'ores et déjà programmés pour les deux à trois années à venir ? Comment établissez-vous un tel programme en liaison avec le Syndicat des transports d'Île-de-France (STIF) ? En d'autres termes, comment et par qui sont décidés les investissements prioritaires ?

Conformément à l'article 6 de l'ordonnance du 17 novembre 1958, M. Guillaume Pepy prête serment.

PermalienGuillaume Pepy, président de la SNCF

Je vais illustrer mon exposé, si vous le voulez bien, à l'appui du document de référence qui vous a été distribué.

Comme président de la SNCF, je me sens extrêmement impliqué dans les questions touchant aux RER. Ceux-ci concernent 3,6 millions d'usagers quotidiens sur les 8 millions de voyageurs que la SNCF transporte en France et dans le monde. Ils constituent donc une part très importante de notre activité et l'essentiel de notre image. Les RER représentent en effet la première activité de service public de la SNCF, c'est-à-dire celle qui concerne le plus grand nombre de clients.

C'est la raison pour laquelle, dans la lettre de mission que j'ai reçue du Chef de l'État, pour la première fois était indiqué l'objectif d'améliorer, dès 2008, la fiabilité, la qualité et l'attractivité des RER de la région capitale.

La carte des RER montre qu'ils sont un réseau unificateur de l'Île-de-France. Ses concepteurs, dans les années 1970 et 1980, ont eu l'idée extrêmement innovante de faire passer des trains rapides sous Paris permettant d'atteindre la petite et la grande Couronne. Ce réseau est d'ailleurs assez complet, au point que d'autres grandes villes d'Europe et du monde s'intéressent au système RER. On parle à Genève d'un RER genevois, qui est en cours de création, et, à Londres, les projets Crossrail y sont décrits par les responsables politiques comme des projets de RER. Comme le réseau, le mot même de « RER » est donc porteur !

Le fonctionnement de ces trains fait l'objet d'une grande concentration : la moitié des 3,6 millions d'usagers quotidiens est transportée par la SNCF, l'autre moitié par la RATP. Cette concentration se fait sur 3 % du réseau ferroviaire français. Par comparaison, le nombre de clients du TGV n'est que de 300 000 : il y a donc six fois plus de clients quotidiens du RER en Île-de-France.

Sur la ligne C, 531 trains circulent chaque jour, ce qui en fait à cet égard la plus importante ligne de France. La ligne D en enregistre 450 par jour. Sur la ligne C, il passe un train toutes les deux minutes trente à la gare de Saint-Michel – arrêt, montée et descente des voyageurs compris. Sur la ligne D, nous avons un tunnel à deux voies commun avec la ligne B, qui est l'un des trois tunnels les plus fréquentés au monde, puisqu'il y passe un train toutes les 112 secondes.

Nous avons donc un système industriel d'une grande force, mais aussi d'une grande fragilité, qui pose aujourd'hui un certain nombre de problèmes.

Les deux principales difficultés du RER sont la saturation, qui est incontestable, et le vieillissement des lignes, lesquelles n'ont pas bénéficié des crédits de modernisation qui auraient du leur être consacrés.

Les cheminots comme les personnels de la RATP ne sont pas en cause.

Leur travail est d'une extraordinaire complexité : il exige un savoir-faire, une compétence et une expertise considérables, que nous partageons d'ailleurs avec nos collègues de Madrid ou de Barcelone avec qui nous échangeons régulièrement sur les meilleures pratiques.

Il existe une corrélation entre la fréquentation et la régularité. En une dizaine d'années, les trafics ont augmenté chaque année de 3 à 5 % tandis que la régularité s'est lentement détériorée parallèlement à la « sur fréquentation » du RER. Il y a donc une dégradation du service. Chacune des lignes fait état de la même corrélation.

PermalienPhoto de Daniel Goldberg

Sur les RER A et B, l'indice de régularité couvre-t-il- seulement votre tronçon ou l'ensemble des lignes ?

PermalienGuillaume Pepy, président de la SNCF

Il couvre notre tronçon. Mais cet indicateur est le plus sévère qui soit puisqu'il ne concerne que les trains aux heures de pointe dans le sens de la pointe, et non des trains circulant en période normale, qui pourraient fausser la mesure.

S'agissant de la ligne E, la plus récente, que Michel Rocard a décidé de lancer il y a une quinzaine d'années, on observe une stabilité de fonctionnement depuis sa création dans la mesure où elle est « neuve ». La progression de la clientèle y est certaine.

PermalienPhoto de Pierre Morange

Il semblerait que dans vos statistiques les retards soient intégrés sans tenir compte de leur durée : le confirmez-vous ? La suppression de rames est-elle également prise en considération dans l'indice de régularité ?

PermalienGuillaume Pepy, président de la SNCF

Oui, sur ces deux points. Les annulations de train sont considérées comme des retards. La mesure est réalisée « train par train » et nous souhaitons, dès cette année, passer à une formule d'évaluation tenant compte du nombre de clients pour qu'un train très plein ne soit pas appréhendé de la même manière qu'un train à moitié plein.

Le diagnostic est bien connu : nous nous trouvons confronté à une incontestable crise de croissance d'un système industriel et à une organisation de plus en plus complexe.

La saturation nous empêche souvent de rétablir la situation en cas d'incident : en 2005, un incident sur l'infrastructure affectait en moyenne 7 trains et 3 300 voyageurs, contre 9 trains et 4 700 voyageurs en 2010 ! Si les usagers disaient il y a une dizaine d'années que lorsqu'il y avait des désordres le matin, ce n'était pas forcément le cas le soir, cela n'est plus vrai aujourd'hui.

La satisfaction des clients des RER est basse : elle atteint 44 % pour la ligne A, 37 % pour la ligne B, 65 % pour la ligne C, 47 % pour la ligne D et 78 % pour la ligne E. Si ces chiffres ne sont pas acceptables, deux choses peuvent nous rassurer : d'une part, pour la ligne E, huit voyageurs sur dix sont satisfaits et, d'autre part, ce sont les lignes qui sont en travaux – c'est notamment le cas de la ligne B, qui connaît des travaux gigantesques de reconstruction de la partie nord – où la satisfaction est la plus faible, les clients étant condamnés à une sorte de double peine, entre le mauvais fonctionnement et les désagréments causés par les travaux – présence de palissades, escaliers fermés, retards de trains ou incidents d'alimentation.

La collectivité nationale a pris de bonnes décisions pour l'avenir des RER, qu'il s'agisse du président de la République, du Gouvernement ou de la région – sans parler du Grand Paris, qui est une orientation stratégique pour la région capitale. D'abord, la SNCF a décidé d'affecter 100 % de ses amortissements à l'Île-de-France concernant les investissements consacrés à cette région ; RFF, dans un débat tranché par le président de la République lui-même, a décidé de faire de même. l'État et la région ont signé, le 26 septembre dernier, une convention particulière accroissant d'1 milliard d'euros les crédits de modernisation destinés au RER : ils concernent principalement les lignes C, D et E. Par ailleurs, le président de la République a annoncé à La Défense, il y a un peu plus d'un mois, l'unification du commandement de l'exploitation des RER A et B. Enfin, l'acquisition de rames à étages pour le RER A – dont la première vient d'être livrée – a été une excellente mesure.

Mais ces décisions prennent du temps à être mises en oeuvre. Sur les cinq lignes de RER, en moyenne, la période au cours de laquelle il est possible d'effectuer des travaux de nuit est inférieure à quatre heures ; le dernier train passant aux alentours d'une heure du matin et le premier vers cinq heures : les travaux demandent donc beaucoup plus de temps que ceux généralement effectués sur d'autres lignes dans les régions.

Le document qui vous a été distribué montre également que chacune des lignes fait l'objet de programmes d'investissements en cours, en particulier le projet « Nord + » pour la ligne B, les travaux décidés dans le cadre du schéma directeur pour la ligne D, ceux qui viennent d'être décidés pour 280 millions d'euros sur la ligne C et le prolongement de la ligne E de Saint-Lazare vers La Défense et Mantes pour doubler la ligne Est-Ouest constituée par la ligne A, conformément à une décision prise par le Premier ministre, il y a deux ans, – mesure essentielle qui devrait être mise en oeuvre d'ici la fin de cette décennie.

Les investissements consacrés par la SNCF à l'Île-de-France, sous forme de ressources propres (RP) de la SNCF, passeront de 833 millions d'euros en 2008-2011 à 1,144 milliard d'euros en 2012-2016, soit un accroissement d'environ 30 % – ces chiffres étant toutefois en cours de finalisation avec le STIF – tandis que la totalité des investissements augmente d'environ 50 % – sachant que la première période porte sur quatre ans et la seconde sur cinq. Je n'ai pas compté ceux relatifs à la gare Saint-Lazare, qui représentent 280 millions d'euros, la nouvelle gare qui va ouvrir le 19 mars prochain. La Gare Saint-Lazare était en effet dans l'état dans lequel le général de Gaulle l'avait laissée au moment de l'électrification, alors qu'elle est aujourd'hui la deuxième d'Europe après la Gare du Nord !

Le programme d'investissement sur le matériel roulant fait partie des sages décisions prises : l'ensemble de ce matériel aura été changé ou rénové d'ici 2016, conformément à l'engagement que nous avons pris avec notre autorité organisatrice.

Le document distribué fait également état des travaux réalisés dans les gares, qu'il s'agisse des travaux de rénovation, d'accès pour les personnes à mobilité réduite ou de création de pôles d'échange.

Les programmes de modernisation représentent un coût très important : le pôle d'échange multimodal d'Ermont-Eaubonne a ainsi coûté 196 millions d'euros, celui de Juvisy, 110 millions d'euros, celui de Pompadour, qui est une nouvelle gare, 40 millions d'euros, et celui de Versailles-Chantiers, dont la rénovation est évoquée depuis environ trente ans, 62 millions d'euros. Ces programmes sont extrêmement lourds pour les collectivités territoriales comme pour les acteurs du secteur ferroviaire.

Sur le long terme, il convient de poursuivre deux directions. D'abord, la désaturation : le dédoublement du tunnel ChâteletGare du Nord est un axe fondamental pour la stratégie de transport en Île-de-France, de même que le sextuplement des voies de la ligne C, qui concerne la traversée du département du Val-de-Marne et une partie du département de l'Essonne, ou le nouveau programme de signalisation de nouvelle génération NExT permettant de faire passer plus de trains.

Deuxièmement, proposer aux élus une petite révolution, dont ils auront à débattre : aujourd'hui, nos RER sont exploités dans le cadre d'un système « métro », avec un arrêt dans les stations, mais non suivant un système de desserte de grande et de petite couronne ; le projet consisterait à ce que, en grande couronne, les trains s'arrêtent dans toutes les stations et que, arrivés en petite couronne, ils deviennent directs. Les voyageurs qui viennent de loin verraient ainsi leur trajet raccourci et ceux qui sont plus près, dans la petite couronne, ne subiraient plus d'éventuels retards de trains venant de loin : les trains de petite couronne démarreraient de celle-ci et seraient omnibus. Quelqu'un qui va de Malesherbes à Paris n'a peut-être pas besoin de s'arrêter dans les gares de petite couronne, tandis que les voyageurs de petite couronne ont besoin de systèmes de navettes à haute fréquence s'arrêtant à toutes les stations. On aurait donc un système de grand parcours et de plus petit parcours : ce dispositif, utilisé dans plusieurs capitales devrait permettre d'améliorer sensiblement le service. La décision sur ce point doit être prise dans l'année ou l'année et demie à venir.

À court terme, il y a lieu, de façon urgente, d'améliorer l'efficacité de l'exploitation. Quatre actions sont engagées à cet effet : le « plan d'urgence matériel », le programme d'optimisation de la qualité de service sur les « lignes sensibles », le programme d'optimisation des investissements pour faire davantage de travaux groupés – afin qu'ils soient réalisés plus rapidement – et l'accélération de l'unification du commandement et du pilotage des lignes de RER A et B, demandée par le président de la République dans son intervention à La Défense.

À la suite de cette nouvelle impulsion, nous avons, avec le président de la RATP, pris plusieurs décisions. Le 9 février, nous allons lancer officiellement la réalisation de ce programme, qui comporte plusieurs composantes : la suppression de la relève des conducteurs, qui est déjà faite sur la ligne B et mérite aussi d'être examinée pour la ligne A ; trouver des solutions d'exploitation communes entre RFF, la RATP et la SNCF ; déléguer le pilotage des aiguillages, aujourd'hui assuré par RFF, à la SNCF, pour simplifier les circuits ; avoir des centres de pilotage communs sur les lignes A et B afin d'avoir notamment un pilotage homogène.

Je suis engagé totalement dans cette unification. Je suis régulièrement interrogé par des personnalités sur l'éventualité d'une fusion complète au profit de la RATP ou de la SNCF. Certes, il est toujours compliqué de coordonner ces deux acteurs, mais lorsqu'il y a parfois grève chez l'un, il est rarissime qu'il y ait grève chez l'autre ! L'existence de ces deux opérateurs rend donc hautement improbable que le réseau des transports publics francilien soit bloqué – depuis dix ans, cela s'est produit moins de trois fois – et permet une meilleure continuité de service. Par ailleurs, nos règles de rémunération et d'organisation du travail sont différentes : si l'on unifiait le système, cela signifierait qu'une négociation pourrait conduire à ce que les salariés réclament le maintien de leurs avantages dans l'entreprise X tout en bénéficiant de ceux de l'entreprise Y. Je crains dès lors que l'on se retrouve avec un système plus coûteux pour les Franciliens.

Il vaut mieux, comme le président de la République nous y a incités, unifier tout de suite le dispositif, c'est-à-dire assurer, en dépit de l'existence de deux opérateurs, une fluidité du système, plutôt que de s'engager dans une fusion longue, coûteuse et risquée sur le plan social de deux entreprises publiques ayant leur histoire, leurs traditions et leurs caractéristiques sociales propres.

Pour garantir un meilleur service à nos clients, nous voulons avoir des indicateurs centrés sur le nombre de clients, que la ponctualité soit davantage prise en compte dans les systèmes de bonusmalus, que les salariés voient leurs efforts récompensés, notamment sous la forme d'une amélioration de la qualité de vie au travail, et que chacune des lignes ait des projets de service.

Cela se traduit par une petite révolution managériale intitulée ZIP « Zone dense Information des clients Prise en charge », que Mme Bénédicte Tilloy, directrice générale SNCF Transilien, doit conduire avec les 21 000 cheminots travaillant aujourd'hui sur ces lignes. Elle consiste à accorder dans une zone dense la priorité à l'information des clients et, en cas de problème, à leur prise en charge.

Dans la réalisation de cette feuille de route, nous devons veiller à plusieurs choses. D'abord, nous sommes sur le point de signer un nouveau contrat avec notre autorité organisatrice. Deuxièmement, sur la ligne A, il faut mettre en oeuvre le schéma directeur en cours de réalisation – il s'agit d'une urgence absolue. Sur la ligne C, qui transporte 550 000 personnes par jour, les futurs schémas de desserte ne font pas l'objet d'un consensus entre les élus de l'Essonne et ceux du Val-de-Marne : cette question devra être tranchée le plus rapidement possible. Enfin, au-delà de l'intégration opérationnelle entre la SNCF et RFF, il convient d'encourager les équipes : le travail des salariés de la SNCF sur les RER en Île-de-France est difficile, nécessitant une motivation de chaque jour, car chaque jour le système peut connaître des aléas, des tracas, des incidents, ce qui exige d'être vigilant et au contact des clients.

À ce sujet, je vous indique, monsieur le rapporteur, en réponse à une question que vous avez soulevée dans un courrier, que les journées de grève sur les réseaux RER d'Île-de-France ont été au plus bas niveau depuis dix ans, puisque nous avons perdu de ce fait 1 321 journéesagent, lesquelles ont donné lieu à des retenues immédiates sur salaire.

PermalienPhoto de Pierre Morange

Je vous remercie pour la qualité et la clarté de votre présentation.

Toutefois, compte tenu de la difficulté pour vous de répondre dans le temps qui nous est imparti à toutes les questions des membres de notre commission, nous vous transmettrons un questionnaire, auquel vous pourrez nous apporter des réponses écrites plus précises.

Nous souhaitons connaître votre position sur les réflexions en termes d'organisation, que chacun des deux grands transporteurs appelle de ses voeux, mais qui doivent être précisées en termes de délai et de mise en oeuvre opérationnelle – la notion d'interopérabilité sur la ligne B reste à affiner –, les conventions à établir avec RFF pour l'affectation des sillons, la priorité accordée aux voyageurs franciliens, ou les autres trains pouvant emprunter le réseau, comme ceux du fret ou les TGV.

La proposition que vous avez évoquée qui concerne le système de desserte en grande et en petite couronne, est-elle évaluée en termes d'amélioration prévue du service ? En quoi un tel projet dégagera-t-il des marges de manoeuvre permettant d'absorber un surcroît de trafic ?

Que pensez-vous des préconisations de la Cour des comptes concernant les référentiels de qualité – dont nombre d'associations d'usagers ont contesté la pertinence –, un système de bonusmalus jugé insuffisamment pédagogique du fait de son faible volume financier, ou l'information donnée à l'usager, mais aussi à la population en général, au travers de baromètres mensuels et d'enquêtes réalisées auprès des voyageurs ?

Qu'en est-il de ses interrogations concernant les comptes spécifiques des transports du réseau Transilien, notamment sur la nécessité que ceux-ci soient certifiés afin d'améliorer la transparence et de faciliter la comparaison avec la RATP ? Cela est important dans le cadre de la détermination des grands investissements ; la modernisation du réseau permettra d'apporter une réponse plus légitime compte tenu des importants délais de mise en oeuvre. De même, il peut sembler nécessaire de recourir à des expertises plus indépendantes afin que la maîtrise d'ouvrage ne soit pas confondue et que les choix stratégiques, financiers et de recherche d'un meilleur coût-efficacité soient réalisés de manière plus efficiente, dans l'intérêt de nos concitoyens.

PermalienPhoto de Didier Gonzales

Quel regard portez-vous sur la co-gestion des lignes A et B par la SNCF et la RATP, qui est mal comprise par les usagers ? Dans la perspective de la création du réseau fréquent régional et du réseau rapide régional, peut-on envisager une gouvernance partagée, à savoir confier la gestion du réseau rapide à la SNCF et la gestion du réseau fréquent à la RATP ?

Dans la contribution de la SNCF à la révision du schéma directeur, vous notez qu'entre 1999 et 2010 la fréquentation du réseau ferroviaire d'Île-de-France a augmenté de 26 % et que la régularité des trains a elle chuté de 6 %. Comment la SNCF compte-t-elle s'adapter pour répondre aux enjeux que sont l'augmentation de la demande et l'amélioration de la qualité de service, notamment de la régularité ?

Enfin, à long terme, la SNCF prévoit la création d'une troisième paire de voies entre Paris et Juvisy. Le projet POCL reliant Paris Austerlitz, Orléans, Clermont et Lyon prévoit de son côté une ligne dédiée aux TGV. Ne peut-on pas envisager la mutualisation de ces deux projets en réservant les quatre voies actuelles au RER C et en construisant une autre paire de voies pour les TGV évitant les territoires urbanisés et empruntant un tracé en direction du plateau d'Orly – sachant que la grande difficulté est d'entrer dans la « pulpe dentaire » de l'urbanisation ?

PermalienPhoto de Yanick Paternotte

Le système de RER, qui a montré sa pertinence – l'augmentation du trafic en est une preuve – n'est-il pas condamné à terme dans la mesure où il est à bout de souffle en termes d'exploitation ? Ce qui a fait le succès de l'interconnexion ne risque-t-il pas de faire défaut demain ? N'est-il pas intéressant de coupler la vision stratégique du Grand Paris Express à l'horizon de 2020-2025, avec une rocade qui, on peux l'espérer, interconnectera les cinq lignes RER existantes ? Ne sera-t-il pas temps, au lieu d'avoir par exemple une ligne D de 197 kilomètres – sachant qu'1 % seulement des voyageurs effectue le parcours complet de la ligne, selon ce que vous m'avez dit un jour –, de revenir à un système fiable permettant d'aller simplement à Paris et d'assurer les transports de banlieue à banlieue grâce au Grand Paris Express ?

Si cette vision stratégique permet dans douze ans d'éviter Paris, faut-il vraiment dédoubler le tunnel ChâteletGare du Nord ? Avons-nous la capacité financière et technique à cet effet ? Combien de temps faut-il, si l'on tient compte des procédures administratives, pour voir la mise en service ce dédoublement ? D'ici là, le Grand Paris Express n'aura-t-il pas, en quelque sorte, contourné le problème ?

S'agissant de l'unification du pilotage, je ne suis pas convaincu par votre présentation. Je pense que le Grand Paris Express va peut-être redistribuer la donne des exploitants et que l'interconnexion des TGV offrira de nouvelles possibilités. Ne serait-il pas raisonnable que chaque ligne soit confiée à un opérateur spécifique ? Quand vous dites que la fusion pourrait engendrer d'importants surcoûts et que le maintien de deux exploitants est préférable, pourquoi alors ne pas en ajouter un troisième ! Cela ne me paraît pas être la bonne solution.

J'en viens à la ligne D, dont le trafic a le plus augmenté, puisqu'il a doublé en douze ou quinze ans. Vos graphiques l'attestent, et je voudrais vous féliciter pour la qualité de votre document de synthèse qui nous permet de connaître plus précisément le paysage actuel.

La ligne D est une vraie « galère » pour les usagers : la circulation a été réduite à huit trains par heure dans la partie Nord. J'ai bien noté que vous proposiez des express et des directs pour les usagers les plus éloignés du centre, solution que je préconise depuis un certain temps. Cela étant, vous n'avez pas affecté sur cette ligne des matériels climatisés et disposant de la vidéo, alors que ce sont des éléments importants et très attendus pour l'amélioration de la sécurité et du confort. Ce serait même une compensation très appréciée sur une ligne qui souffre le plus. N'y a-t-il pas une double peine pour ceux qui subissent le plus de suppressions de trains et une surcharge importante ?

Vous avez indiqué que chaque euro dépensé serait affecté à l'Île-de-France. Or les sillons sont aussi empruntés par les TER de Normandie et de Picardie. Je ne suis donc pas certain qu'il y aura une restitution de chaque euro consommé. Par ailleurs, peut-on envisager que des TER venant de Picardie s'arrêtent dans les zones déshéritées du Nord de la ligne D ? Les habitants de Picardie pourraient alors venir à Roissy pour travailler et les Roisséens bénéficieraient de trains directs en direction de Paris.

PermalienPhoto de François Pupponi

Je tiens également à vous féliciter pour le document synthétique et particulièrement intéressant, que vous nous avez remis.

Je suis très impressionné par l'augmentation du nombre de passagers sur toutes les lignes RER au cours des dix dernières années. Avez-vous analysé les causes de ce phénomène ? Pensez-vous que cette augmentation va se poursuivre ? On peut craindre que cela s'accompagne d'une dégradation croissante de la régularité.

Vous avez indiqué que les décisions adoptées au plan politique et au plan financier pour les grands travaux à réaliser en dehors du Grand Paris vous rendaient optimiste, mais vous avez aussi reconnu qu'il faudrait du temps. A quelle échéance peut-on envisager une amélioration significative de la situation ?

S'agissant du doublement du tunnel, j'observe que la réponse donnée par M. Mongin, tout à l'heure, au nom de la RATP, rejoint la vôtre. On sait depuis longtemps qu'une évolution est indispensable, mais on en est encore au stade des études préalables. Dans combien de temps avancera-t-on vraiment, et surtout où prélèvera-t-on les deux milliards d'euros nécessaires ? On ne pourra faire appel ni aux contrats déjà signés ni aux financements pour le Grand Paris.

PermalienPhoto de Patrice Calméjane

J'apprécie, moi aussi, votre document.

J'aimerais connaître votre sentiment sur l'augmentation du trafic qui pourrait avoir lieu et sur la modification des tarifs envisagée par le STIF, qu'on pourrait appeler le Pass Navigo à tarif unique. Quelle serait l'incidence sur vos lignes ?

Pour ce qui est du RER E, je rappelle qu'il manque une interconnexion entre la Gare de l'Est et la station Magenta. Est-il toujours envisagé de la créer ?

Vous avez indiqué que les travaux de modernisation et d'entretien des voies avaient lieu entre 1 heure et 4 heures du matin, ce qui ne laisse que trois heures de travail. Quelles seraient les répercussions pour les usagers si vous commenciez à minuit pour terminer à cinq heures ? Cela permettrait d'augmenter le temps disponible de 66 % et sans doute d'accélérer les travaux qui ne peuvent être réalisés que la nuit. Avez-vous engagé une réflexion sur ce sujet ?

En ce qui concerne les fausses alarmes, le président de la RATP, M. Mongin, a rappelé que les rames les plus modernes sont désormais équipées de caméras de vidéosurveillance. Hier soir, un signal d'alarme a été actionné à Saint-Lazare, dans le train où je me trouvais. C'était sans doute un acte de malveillance, car nous étions déjà à l'arrêt. Nous sommes finalement partis avec six ou sept minutes de retard, après une succession d'annonces erratiques : nous n'avons été informés du déclenchement de l'alarme et du retard consécutif qu'au moment où les portes se fermaient. Je sais que la situation n'est pas simple et que vos personnels sont très actifs, mais j'aimerais savoir quelles améliorations on pourrait espérer au plan technique et en matière de sanctions, s'agissant notamment de ces incivilités flagrantes

Une évolution dans ce domaine ne suffirait certainement pas pour financer les travaux sur le tronçon central, mais ne peut-on pas lutter davantage contre la fraude ? Il y a là une perte de recettes pour votre entreprise et un potentiel de ressources supplémentaires si les pénalités sont augmentées.

PermalienPhoto de Guy Malherbe

Je m'associe aux remarques concernant la qualité du document qui nous a été remis. Il nous permet de mieux comprendre certains problèmes auxquels vous vous heurtez.

S'agissant de la ligne C, un cadencement très serré dans Paris, avec un train toutes les deux minutes, est une première solution. Ne pourrait-on pas aussi envisager des ruptures de charge à l'entrée de Paris, par exemple à la station Bibliothèque François Mitterrand (BFM) ou Porte Maillot : 1 % des voyageurs seulement traverse tout Paris. On pourrait imaginer qu'ils empruntent un service de navettes, afin d'améliorer la desserte de la banlieue. Cela ne choque visiblement pas les associations d'usagers et les organisations syndicales que nous avons précédemment auditionnées.

Comme vous l'avez indiqué, le schéma directeur de la ligne C a été gelé par le président de la région, M. Jean-Paul Huchon, en raison du débat qui oppose le Val-de-Marne et l'Essonne. Nous ne sommes pas opposés, bien sûr, à ce que la desserte du Val-de-Marne soit améliorée, mais nous considérons que cela ne doit pas se faire au détriment des habitants de la grande couronne dont le trajet ne doit pas être rallongé de plusieurs minutes.

Vous avez rappelé qu'un montant d'1,3 milliard d'euros était prévu, notamment pour la ligne C, par la convention signée avec la ministre de l'environnement, et que des travaux importants devraient débuter au début du mois de février. Pouvez-vous revenir sur les opérations programmées ? Quelle est leur nature et comment seront-elles réalisées ?

Au mois de décembre dernier, le STIF a décidé d'engager des études sur le sextuplement des voies, sur l'électrification, sur la construction d'un quai supplémentaire à la gare d'Austerlitz et surtout sur le noeud ferroviaire de Brétigny, source de difficultés très importantes : outre le problème posé par la coexistence entre les TER, les TGV, les trains directs en provenance d'Etampes et de Dourdan, et les trains BALI qui font demi-tour, il y a la présence de quatre aiguillages datant des années 1930, qui ne sont ni coordonnés ni électrifiés ! Il faudra donc réaliser des travaux considérables. Pouvez-vous nous dire quel est le calendrier retenu ?

PermalienPhoto de Henri Plagnol

Merci beaucoup pour votre exposé, très clair et surtout d'une grande transparence.

Maire d'une ville qui compte quatre gares du RER A, je suis frappé de constater que c'est pour cette ligne que le taux de satisfaction des clients s'est dégradé le plus rapidement : il est passé de 61 à 44 % en trois ans.

Nous savons que vos marges de manoeuvre sont faibles. Le tronçon central étant totalement asphyxié : les rames nouvelles offrent la seule possibilité d'amélioration notable. Est-il possible d'accélérer leur renouvellement ? Cela suffira-t-il pour tenir jusqu'au moment où le réseau du Grand Paris permettra de soulager le tronçon central du RER A, dans dix ou quinze ans ?

J'en viens au double pilotage sur la ligne A – la SCNF de Nanterre à Cergy, puis la RATP. Comme vous, je ne suis pas partisan de la fusion. Je n'y crois pas. L'instauration d'un opérateur unique serait un risque considérable. Je pense, en revanche, qu'il faut créer très rapidement un véritable centre commun d'exploitation.

En dernier lieu, vous avez appelé notre attention sur la signature d'un accord de principe du schéma directeur, c'est-à-dire « le schéma du schéma », dont la date limite est fixée à 2012. Etes-vous confiant ? Pouvez-vous nous apporter quelques précisions sur le contenu de ce schéma de principe ?

PermalienPhoto de Daniel Goldberg

Vous avez évoqué l'hypothèse d'une variation de la desserte entre la première couronne, sous la forme d'omnibus, et la seconde couronne, avec des liaisons directes. Quelle serait l'articulation entre cette évolution et les schémas directeurs du STIF ? Souhaitez-vous notre appui sur cette question, ou bien cela fait-il partie de discussions déjà engagées ?

Nous avons compris que vous misiez sur le système d'exploitation NExT pour améliorer la régularité. Avez-vous des précisions à nous apporter en matière de coût et de faisabilité à court terme ?

J'aimerais également vous interroger sur la suppression de certaines missions, notamment sur le RER B Nord, que je connais bien. Bien souvent, les voyageurs ne sont pas informés, d'où leurs interrogations et leur mécontentement.

En ce qui concerne la rénovation des rames MI79 et le problème de l'amiante, j'ai l'impression que, là encore, l'information délivrée aux voyageurs n'est pas suffisante et qu'il y a même une incompréhension sur votre gestion prévisionnelle.

Notre collègue François Asensi, député de Seine-Saint-Denis, qui n'a pas pu être parmi nous et vous prie de l'en excuser, m'a demandé de vous interroger sur la possibilité d'instaurer un système global d'indemnisation des usagers quand les missions prévues n'ont pas lieu.

J'aimerais aussi revenir sur vos relations avec RFF, qui conserve une stricte neutralité à votre égard, notamment dans le cadre de l'ouverture à la concurrence, ce qui peut susciter un certain nombre de difficultés. Pouvez-vous nous dire où en sont les « Assises du ferroviaire » dans ce domaine ?

Il a fréquemment été question du lien entre le réseau existant et le futur Grand Paris Express. Outre les problèmes budgétaires, il y a aussi la question de la faisabilité : les différents partenaires – les exploitants, les gestionnaires d'infrastructures, la Société du Grand Paris, les collectivités territoriales et l'État, pour ce qui le concerne –, arriveront-ils, au plan technique, à réaliser tous les travaux, notamment le doublement du tunnel et ce qui est prévu dans le cadre du Grand Paris Express ?

Le 16 février dernier, vous avez déclaré au journal Le Monde que vous ne souhaitiez plus l'installation d'entreprises le long des lignes du RER, en raison de la congestion du réseau En considérant notamment le problème évoqué par Henri Plagnol au cours de la précédente audition – les emplois sont à l'Ouest et nos concitoyens à l'Est –, comment assurer une bonne gestion prévisionnelle du trafic et des infrastructures ? Je pense, par exemple, à l'installation de services d'une grande entreprise telle que BNP Paribas aux Grands moulins de Pantin.

PermalienPhoto de Gérard Gaudron

Pour ce qui est du RER B, l'indice de satisfaction n'est que de 37 %, ce qui est très peu. Pensez-vous que les travaux en cours dans le cadre du « RER B Nord + » sont susceptibles d'améliorer significativement la satisfaction des usagers ? Permettront-ils de faire face à l'augmentation de la fréquentation ?

J'aimerais également savoir ce que vous comptez faire pour améliorer la sécurité des usagers dans les rames et pour remédier aux fraudes, vraisemblablement nombreuses sur le RER B.

PermalienPhoto de François Pupponi

Sur ce point, connaissez-vous le montant des procès verbaux établis pour fraude et celui des sommes effectivement encaissées à ce titre au cours d'une année ?

PermalienGuillaume Pepy, président de la SNCF

Toutes ces questions, très pertinentes, sont des sujets de travail pour nous. Nous n'avons donc pas de réponses toutes faites : nous ne pouvons que contribuer à votre réflexion et j'apprécie la possibilité que vous nous offrez de répondre par écrit, afin d'apporter des éléments plus nourris.

S'agissant de la stratégie de développement du transport collectif en Île-de-France au cours des dix ou quinze prochaines années, je rappelle que le Grand Paris fait non seulement l'objet d'un consensus, mais qu'il commence déjà à prendre forme. Mais quid du reste du réseau ? Dans le discours qu'il a prononcé à la Cité de l'architecture, le Président de la République a fait état d'un chiffre réellement fascinant : d'ici à 2030, 70 % des voyages supplémentaires en Île-de-France se feront sur des lignes existantes. D'où l'équilibre qui a été finalement retenu entre les investissements consacrés aux nouvelles infrastructures et ceux des schémas directeurs des lignes de RER, à quoi s'ajoute le travail réalisé pour les gares et les trains.

La réflexion n'est pas encore achevée, notamment en ce qui concerne le doublement éventuel du tunnel. Nous en sommes au stade des études. Il faudra ensuite un véritable débat sur l'affectation des deux milliards d'euros concernés. C'est une question légitime. De même, il faudra débattre avec les élus et avec toutes les autres parties prenantes sur le nouveau mode d'exploitation que nous suggérons : il arrangera certains acteurs, mais il en dérangera d'autres. Nous aurons besoin d'un choix collectif éclairé, et non de décisions techniques ou technocratiques. Les meilleures intentions du monde, par exemple alléger une desserte pour améliorer sa qualité, peuvent être très mal perçues par les populations, lesquelles ne comprennent pas toujours certaines évolutions. Il conviendra donc de renforcer la place du débat public sur les choix en matière de transports.

Vous nous avez demandé si nous pouvions rapidement effacer la différence entre la RATP, la SNCF et RFF. Le Président de la République a demandé que l'on donne une nouvelle impulsion dans ce domaine, et nous sommes engagés, Pierre Mongin, Hubert du Mesnil et moi-même, sur cette question à 100 %. Nous allons tout faire, dans les six mois ou les deux années qui viennent, pour effacer les différences, du point de vue du client, en matière d'information, de fréquences et de missions : nous devons faire comme s'il n'y avait qu'une seule entreprise dans le cadre institutionnel existant, c'est-à-dire sans nouvelle loi. Je m'y engage devant vous.

J'ai également trouvé très intéressantes vos questions sur l'aménagement du territoire en Île-de-France. Vous avez notamment demandé comment gérer la saturation. On ne peut pas augmenter de 30 ou 50 % les capacités d'un claquement de doigts. C'est pourquoi beaucoup de pays ont décidé d'adresser des signaux aux entreprises. Lors de l'installation des sièges sociaux, il faudrait ainsi des discussions systématiques, sous l'autorité de l'État et du STIF, sur les offres existantes de transport. Beaucoup d'acteurs suggèrent aussi une réflexion sur les horaires de travail : il y a une saturation entre 7 heures 45 et 8 heures 45 dans le quartier de La Défense, mais nous avons des capacités excédentaires à partir de 9 heures 15 ou 9 heures 30. Sans que la décision soit forcément « prise d'en haut », ne pourrait-on pas décaler les horaires pour améliorer les conditions de transports et pour éviter d'augmenter toujours plus les capacités ? On pourrait réaliser des petites révolutions dans les habitudes au lieu de dépenser des centaines de millions d'euros supplémentaires. Nous devons donc réfléchir aux ajustements potentiels à court terme. Nous avons déjà quelques belles expériences de dialogue avec les entreprises. Une autre piste, plus audacieuse encore, consisterait à appliquer un rabais pour l'utilisation du service aux heures creuses – ce serait conforme à l'intérêt général. Il y a des réticences, bien sûr, car on n'est pas forcément maître de ses horaires de travail, mais il faut aller dans le sens de tout ce qui peut inciter à une meilleure utilisation des transports publics.

Pour ce qui est de l'unification opérationnelle, nous vous répondrons par écrit – je suggère même une réponse commune avec Pierre Mongin, pour nous engager sur les étapes à venir.

Je vous propose également une réponse écrite sur le rapport de la Cour des comptes. Nous vous dirons où nous en sommes et ce qui reste à faire point par point.

Entre la gare d'Austerlitz et celles de Juvisy sur Orge et de Brétigny, il y a deux projets qui consistent à augmenter le nombre de voies et à construire une ligne de TGV. L'articulation entre ces deux projets fait l'objet d'un débat public, en cours, sur la ligne Paris Orléans Clermont-Ferrand Lyon (POCL) : peut-on assurer une double utilisation des voies supplémentaires ? Faudra-t-il des travaux souterrains ? RFF conduit le débat et je me suis rendu à Ivry avant-hier pour me rendre compte sur place de la situation. C'est une question majeure pour la vie urbaine dans le département du Val-de-Marne, mais je n'ai pas de réponse toute faite à vous apporter.

M. Paternotte m'a demandé, en somme, si l'on réinventerait aujourd'hui les grandes traversantes, ou plus exactement si l'on rabouterait de nouveau les lignes de Vincennes et de Saint-Germain, ou celles de Melun et d'Orry-la-Ville, comme on l'a fait dans les années 1970 et 1980, s'il fallait reconstruire le RER. La réponse n'est pas simple La génération précédente a pensé qu'il fallait unifier l'Île-de-France avec des liaisons entre banlieues et une traversée souterraine de Paris. Cette idée a permis d'avancer dans de nombreux domaines, mais vous avez raison de dire que des lignes de quelque 195 kilomètres ne sont pas correctement exploitables du fait de la complexité des schémas de desserte, des missions et des types de trains utilisée. Si l'on aborde cette question, il faudra le faire avec pédagogie et « à livre ouvert » : on ne pourra pas prendre des décisions technocratiques sur de tels sujets. Il faudra présenter différents scénarios aux populations.

Pour répondre à la question de M. Gaudron, je précise que nous allons exploiter tout le Nord du RER B comme un métro, avec des omnibus. Nous devrons donc faire face au mécontentement des usagers qui bénéficient aujourd'hui de trains directs ou semi directs, par exemple depuis Aulnay. Dans leur cas, le nouveau système d'exploitation conduit incontestablement à une augmentation du temps de transport de plusieurs minutes, le matin et le soir, tous les jours de la semaine. L'intérêt général exige de faire circuler des omnibus, pour que les trains soient plus nombreux et plus à l'heure, mais nous devrons également assumer nos choix face aux interrogations de certains voyageurs.

Nous faisons effectivement de la prospective, monsieur Pupponi. Nous tablons ainsi sur une augmentation de 60 % d'ici à 2030 : l'augmentation du trafic va continuer – il devrait notamment doubler pour les TER. Nous devrons faire face à ce défi, qui est en réalité, une véritable course de vitesse. Le RER E est une belle victoire, et la décision de le prolonger à l'Ouest est une bonne décision, mais il nous arrive de perdre certains combats, notamment sur le RER A : nous ne parvenons pas à assurer toutes les missions prévues, car le tunnel est saturé.

Quant aux incivilités, je suis intéressé par ce que font beaucoup de pays asiatiques : il y a du personnel à tous les tourniquets pour des lignes semblables au RER. Si nous ne trouvons pas des parades, la fraude appauvrira les transports publics année après année. Comme nous ne pouvons pas l'accepter, je suis favorable à une réflexion de société sur le fonctionnement des services de transport.

Si vous le voulez bien, je répondrai par écrit à la plupart des questions que vous avez posées, monsieur le président, et je demanderai à Mme Tilloy de vous répondre sur l'amiante.

Le système NexT est un investissement considérable, d'environ 300 millions d'euros, sur lequel le STIF est très engagé, avec RFF et la SNCF. Environ 100 millions d'euros sont consacrés au développement et 200 millions aux travaux d'installation sur une ligne. Il y a là un grand espoir : si l'on améliore la signalisation, on pourra faire circuler plus de trains dans le même tunnel, ce qui signifie moins d'investissements en matière de désaturation.

S'agissant des relations avec RFF, j'ai une bonne nouvelle à vous annoncer. Les travaux que nous conduisons depuis dix-huit mois ont conduit le président de RFF à accepter de nous déléguer sa compétence sur la commande des aiguillages : on ne peut pas raisonner en Île-de-France comme dans le reste du territoire, car les décisions doivent être prises en une dizaine de secondes, et non en cinq minutes. S'il y a d'un côté l'aiguillage et, de l'autre, les exploitants, on perd tout de suite le temps nécessaire. Nous allons pouvoir réconcilier les décisions concernant les aiguillages et celles portant sur les services. Je tiens à remercier le président de RFF pour cette impulsion que je trouve très positive.

PermalienBénédicte Tilloy, directrice générale SNCF Transilien

Depuis la mi-septembre, nous nous efforçons, avec la RATP, de trouver une réponse opérationnelle au problème posé par l'amiante : les personnels de maintenance de la RATP en ont trouvé en travaillant sous les caisses de rames en rénovation. Il n'y a absolument aucun danger pour nos clients ou pour les personnels de conduite, mais l'inspection du travail a demandé l'arrêt des rames concernées.

Un programme de nettoyage approfondi a été engagé dans nos sites et dans ceux des Ateliers de Construction du Centre (ACC) à Clermont-Ferrand pour donner un sérieux coup de main à la RATP. Nous devrions parvenir à rétablir un service normal sur l'ensemble de la ligne à la fin du mois de janvier – il est aujourd'hui un peu allégé –, mais nous ne savons pas encore quand la question sera définitivement réglée. Nous attendons des précisions de la part de l'inspection du travail. Cela n'interviendra probablement pas avant avril ou mai.

PermalienPhoto de Yanick Paternotte

L'amiante était-il là depuis dix ans sans que personne s'en rende compte, ou bien a-t-il introduit à l'occasion des travaux de rénovation ?

PermalienBénédicte Tilloy, directrice générale SNCF Transilien

L'amiante était probablement déjà là : on l'a gratté lors des travaux de rénovation. Je précise qu'on en a trouvé dans des caisses qui ne sont jamais démontées ailleurs que dans les ateliers, à l'occasion des opérations de maintenance. C'est en ouvrant ces caisses que les ouvriers de la RATP ont été en contact avec les poussières d'amiante. L'inspection du travail a décidé d'immobiliser toutes les rames rénovées et d'interrompre la rénovation tant que la question n'est pas réglée.

PermalienPhoto de Pierre Morange

Pouvez-vous nous dire combien de rames vous manquent de ce fait ?

PermalienBénédicte Tilloy, directrice générale SNCF Transilien

Nous faisons aujourd'hui circuler 92 rames sur les 104 dont nous avons besoin, et nous en aurons 100 à la fin du mois de janvier : ce sera juste, mais nous pourrons assurer une desserte « nominale ».

PermalienPhoto de Pierre Morange

Pour remédier ponctuellement à la carence en matériel roulant, il a été question d'utiliser des rames disponibles dans le Nord de la France. Qu'en pensez-vous ?

PermalienBénédicte Tilloy, directrice générale SNCF Transilien

Il s'agirait de six rames automotrices, identiques à celles qui circulent sur le RER D. C'est une solution envisageable, mais il faudrait faire évoluer le matériel et le rénover pour l'utiliser sur cette ligne. De plus, le Nord-Pas-de-Calais ne se dessaisira pas de ces rames sans contrepartie : il faudra en céder d'autres. Ce n'est donc pas la réponse la plus simple, même si elle n'est pas exclue, car elle permettrait d'exploiter un parc homogène.

Au fur et à mesure de l'arrivée du matériel francilien que nous avons acheté, les rames Z2N automotrices exploitées sur d'autres lignes peuvent rejoindre la ligne D. C'est la solution que nous avons retenue. Cela étant, nous avons un problème de capacité dans l'ensemble de l'Île-de-France. Nous devons donc trouver des astuces pour améliorer le taux de réserve et pour renforcer la maintenance. Nous y travaillons avec les équipes du STIF.

Pour ce qui concerne les travaux, nous allons lancer, en février, un renouvellement anticipé des voies entre Choisy et Juvisy. Afin d'éviter les ralentissements, nous utiliserons une machine suisse qui permet de travailler à l'intérieur du gabarit et de réduire ainsi les effets collatéraux sur le trafic. Ce sera l'occasion de tester ce type de machine.

Comme vous l'avez indiqué, les crédits de la convention particulière vont nous permettre de commencer les travaux prévus dans le cadre du schéma directeur pour le noeud de Brétigny. Il faudra réaliser des études complémentaires avec RFF, mais nous serons en mesure d'engager les travaux à la fin de l'année 2012 ou au début de 2013.

Nous avons également prévu d'utiliser le dispositif Castor, auquel nous avons recours au cours des étés quand nous fermons la ligne C pour entretenir le tunnel, afin de réaliser des travaux de maintenance supplémentaire destinés à réduire autant que possible les incidents. Nous réalisons ces études et ces travaux de manière très solidaire avec RFF.

PermalienPhoto de Guy Malherbe

Il y avait autrefois un agrément, délivré par le préfet de région, pour l'implantation des entreprises et des administrations. Existe-t-il encore ? Cela me paraît intéressant pour vérifier que l'on s'est bien intéressé à la question des transports et à celle de l'habitat.

Pour ce qui est de la politique générale de la SNCF, votre prédécesseur avait la réputation de ne pas souhaiter de nouveaux investissements en Île-de-France. Le réseau ne fonctionnant pas, il pensait qu'il en serait de même pour les nouveaux investissements, et que tout le monde serait encore plus mécontent, parce que les nouveaux investissements n'apporteraient pas d'amélioration. On lui prêtait la volonté d'investir plutôt dans le TGV, dans lequel il voyait l'avenir de la SNCF, et non sur le réseau ferré d'Île-de-France. Comment vous positionnez-vous par rapport à ce discours que l'on attribuait à votre prédécesseur ?

PermalienGuillaume Pepy, président de la SNCF

Lorsqu'on change de président, on peut aussi changer de stratégie. La mienne a été définie par le Chef de l'État, qui m'a adressé deux lettres de mission en quatre ans. Je rappelle que la priorité de la SNCF porte sur les trains de la vie quotidienne.

La première année de mon mandat, j'ai ainsi demandé que l'on prélève une centaine de millions d'euros sur les bénéfices du TGV pour financer des investissements sur la ligne D. Ce type d'opération, qui me paraît très sain, a permis de réaliser un saut qualitatif.

J'ajoute que nous croyons beaucoup à la vidéoprotection. Il est prévu d'installer environ 12 000 caméras dans les trains et les gares d'Île-de-France à la fin de l'année 2014 ou au milieu de l'année 2015. Il y a en déjà un millier sur la ligne D, et nous pensons que ce type de dispositif peut avoir un impact non seulement sur le confort, mais aussi sur la gestion des flux, les actes de malveillance, les incivilités et la délinquance. Il n'y a donc pas lieu d'avoir des états d'âme.

PermalienPhoto de Pierre Morange

Je tiens à rappeler que nous utiliserons notre droit de suite pour vérifier que les engagements pris sont tenus. Nous devons faire en sorte que l'usager soit vraiment au centre du système. J'ajoute que les associations d'usagers n'ont pas pour vocation d'être seulement des témoins ou des spectateurs, mais aussi des évaluateurs au quotidien de la qualité des transports.

PermalienPhoto de Daniel Goldberg

Il me reste à vous remercier pour votre disponibilité et pour la qualité de vos réponses.

L'audition s'achève à vingt heures vingt.

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Membres présents ou excusés

Commission d'enquête relative aux modalités, au financement et à l'impact sur l'environnement du projet de rénovation du réseau express régional d'Île-de-France

Réunion du mercredi 18 janvier 2012 à 18 h 45

Présents. - M. Patrice Calméjane, Mme Cécile Dumoulin, M. Gérard Gaudron, M. Daniel Goldberg, M. Didier Gonzales, M. François Lamy, M. Guy Malherbe, M. Pierre Morange, M. Yanick Paternotte, M. Henri Plagnol, M. François Pupponi

Excusés. - M. François Asensi, Mme Annick Lepetit