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Commission des affaires étrangères

Séance du 16 mars 2011 à 10h00

Résumé de la séance

Les mots clés de cette séance

  • argentine
  • immunité
  • soudan
  • sud
  • sud-soudan

La séance

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Venezuela : accord entre la France et le Venezuela sur l'emploi des personnes à charge des membres des missions officielles

La séance est ouverte à dix heures

La commission examine, sur le rapport de M. Jean-Pierre Kucheida, le projet de loi, adopté par le Sénat, autorisant l'approbation de l'accord entre le Gouvernement de la République française et le Gouvernement de la République bolivarienne du Venezuela sur l'emploi des personnes à charge des membres des missions officielles (n° 2317).

PermalienPhoto de Jean-Pierre Kucheida

Il nous est proposé d'autoriser l'approbation de l'accord signé en 2008 entre la France et la République bolivarienne du Venezuela. Il porte sur l'emploi des personnes à charge des membres des missions officielles. Les dispositions qu'il prévoit favorisent la mobilité et l'intégration dans les postes des agents du ministère des affaires étrangères et européennes, en permettant aux personnes à leur charge - leurs conjoints, pour l'essentiel -, d'accéder au marché de l'emploi du pays de résidence, sans perdre leurs privilèges et immunités en dehors du cadre de leur activité professionnelle.

Les considérants de la convention du 18 avril 1961 rappellent les privilèges et immunités dont bénéficient les agents diplomatiques, chefs de mission et membres du personnel diplomatique. Ils ont pour but « d'assurer l'accomplissement efficace des fonctions des missions diplomatiques en tant que représentants des Etats. » Ils sont énumérés aux articles 31 et suivants de la convention. Les agents diplomatiques jouissent d'immunités en matière de juridiction pénale de l'Etat accréditaire, de juridiction civile et administrative, sauf en matière d'action concernant un immeuble privé, dans le cadre d'une action concernant une succession ou d'une action concernant une activité professionnelle ou commerciale. L'article 32 de la convention dispose que l'Etat accréditant peut toujours renoncer expressément à l'immunité dont jouissent ses agents diplomatiques. Les immunités sont d'ordre territorial, et ne valent donc que sur le territoire de l'Etat accréditaire. Les articles 31 et 32 précisent enfin que l'immunité pénale interdit toute mesure d'exécution. Dans les autres matières, les mesures d'exécution sont possibles pour autant qu'elles «se fassent sans qu'il soit porté atteinte à l'inviolabilité de sa personne ou de sa demeure », laquelle est absolue.

Les agents diplomatiques bénéficient aussi de privilèges, mais il existe trois types d'exemptions, concernant les dispositions de sécurité sociale, les « impôts et taxes, personnels ou réels, nationaux, régionaux ou communaux », ainsi que les droits de douane et autres taxes pour les objets destinés à l'usage personnel.

Les agents consulaires bénéficient d'une immunité de juridiction plus restreinte. En matière pénale, ils peuvent être mis en cause dans le cadre d'une procédure et tenu de se présenter devant les autorités compétentes En cas de crime grave et à la suite d'une décision de l'autorité judiciaire compétente, les fonctionnaires consulaires peuvent être mis en état d'arrestation ou de détention préventive. A la différence des diplomates, ils ne peuvent refuser de témoigner au cours de procédures judiciaires ou administratives, sauf sur des faits ayant trait à l'exercice de leurs fonctions. Pour le reste, les privilèges des fonctionnaires consulaires s'apparentent à ceux des agents diplomatiques.

La famille de l'agent diplomatique bénéficie des mêmes immunités et privilèges que lui : « les membres de la famille de l'agent diplomatique qui font partie de son ménage bénéficient des privilèges et immunités mentionnés dans les art 29 à 36, pourvu qu'ils ne soient pas ressortissants de l'Etat accréditaire. ». Rien n'est stipulé concernant les membres de sa famille quant à l'exercice d'une activité commerciale privée lucrative. Inversement, dans la mesure où immunités et privilèges sont restreints pour l'agent consulaire à l'exercice de ses fonctions, aucune immunité n'est accordée aux membres de sa famille par la convention de 1963, sauf dans la mesure où l'Etat de résidence les leur reconnaîtrait. Les privilèges en matière d'exemption d'immatriculation, de régime de sécurité sociale, en matière fiscale ou douanière, notamment, leur sont en revanche accordés.

Le MAEE a entrepris de conclure des accords bilatéraux permettant aux personnes à charge (essentiellement les conjoints) des agents affectés dans les postes à l'étranger d'accéder au marché de l'emploi du pays de résidence, et cela sans perte de leur privilèges et immunités en dehors du cadre de leur activité professionnelle. Les accords conclus s'inspirent d'un accord-type français, élaboré en octobre 2003 dans un cadre interministériel, mais un certain nombre sont en vigueur depuis une période antérieure. L'économie générale repose sur la délivrance par les autorités compétentes du pays d'accueil d'une autorisation de travail à titre dérogatoire aux personnes concernées qui ont obtenu une proposition d'emploi salarié, en remplissant les conditions législatives et réglementaires de l'Etat d'accueil. La contrepartie principale réside dans le fait que l'Etat accréditant renonce à l'immunité de juridiction civile et administrative dont bénéficie cette personne en tant que conjoint ou membre de la famille d'agent diplomatique ou consulaire et s'engage à lever l'immunité de juridiction pénale en cas d'infraction pénale commise dans le cadre de cet emploi. Sur cette base, la France a signé des accords avec le Canada, l'Argentine, l'Australie, le Brésil, la Nouvelle-Zélande, la Roumanie, le Costa Rica, l'Uruguay, ainsi qu'avec les Etats-Unis et Singapour sous forme d'échanges de notes verbales.

L'article 1er de l'accord établit que, sur une base de réciprocité, les Parties conviennent d'autoriser les personnes à charge des agents de chaque Etat accrédités dans une mission officielle de cet Etat dans l'autre Etat, à exercer toute forme d'activité professionnelle salariée, sous réserve qu'elles remplissent les conditions législatives et réglementaires exigées pour l'exercice de l'activité souhaitée.

L'accord prévoit des définitions de «missions officielles», d'«agents», de la notion de « personnes à charge » qui peuvent être le conjoint marié ou le partenaire lié par un contrat d'union légale,ainsi que les enfants à charge, célibataires, handicapés physiques ou mentaux et les enfants à charge, célibataires et d'« activité professionnelle salariée ». Les activités non salariées sont donc en principe exclues du champ de l'accord sauf examen au cas par cas.

La procédure d'autorisation d'exercer une activité salariée est régie par les articles 3 et 4 de l'accord bilatéral. L'ambassade saisit par note verbale la direction du protocole du ministère des affaires étrangères dans le pays de résidence de la demande d'autorisation pour l'exercice d'une activité professionnelle salariée. Vérifications faites, le ministère des affaires étrangères de l'Etat d'accueil informe l'Ambassade demandeuse que le membre de la famille à charge est autorisé à travailler. L'autorisation accordée, l'Ambassade doit fournir aux autorités compétentes de l'Etat d'accueil la preuve que la personne à charge et son employeur se conforment aux obligations.

Les dispositions relatives aux effets pratiques de cet accord sont les plus importantes. Logiquement «la personne à charge ne bénéficie ni de l'immunité de juridiction civile et administrative, ni de l'immunité d'exécution en cas d'action liée à cette activité professionnelle ». Toute procédure judiciaire doit être menée sans qu'il soit porté atteinte à l'inviolabilité de la personne à charge ou de son domicile. La renonciation à l'immunité pénale ne vaut pas renonciation à l'immunité d'exécution de la sentence. La personne à charge qui exerce des activités professionnelles dans l'Etat d'accueil est soumise à la législation en matière fiscale et de protection sociale en vigueur dans l'État d'accueil. A cet égard il existe une convention franco-vénézuélienne de non double imposition, mais aucun accord de sécurité sociale entre nos deux pays. Les privilèges douaniers cessent d'être accordés à compter de la date de l'autorisation. A la date de fin des fonctions de l'agent, l'autorisation pour exercer une activité salariée cesse. Les différends relatifs à l'accord ou à son interprétation sont réglés par voie diplomatique.

Cet accord concerne peu de personnes. Les conjoints des personnels diplomatiques et consulaires vénézuéliens en France sont au nombre de 12, auxquels il convient d'ajouter trois personnes, conjoints de diplomates de la représentation permanente du Venezuela auprès de l'Unesco. En ce qui concerne la France, 20 conjoints des 34 agents expatriés relevant de notre ambassade sont concernés, dont 4 travaillent.

Les relations bilatérales entre la France et la république bolivarienne du Venezuela sont actuellement bonnes. Au plan politique, la participation du Venezuela à la recherche d'une solution à la question des otages en Colombie a engendré un dialogue bilatéral encore plus soutenu. Au plan économique, si nos échanges commerciaux restent modestes, le Venezuela est pour la France un partenaire important, notamment en raison des investissements réalisés par nos entreprises sur place. Le pays présente en effet un potentiel considérable dans de nombreux secteurs : énergétique, hydroélectrique, thermique, transports. Notre coopération culturelle, scientifique et technique a pour principaux axes le soutien à l'enseignement supérieur et à la recherche, la valorisation de la diversité culturelle (audiovisuel, cinéma, promotion du français), la protection de l'environnement et la prévention des risques naturels.

Le Venezuela a d'ores et déjà ratifié l'accord et rien ne s'oppose à ce que la France fasse de même. Je vous recommande donc d'approuver ce projet de loi, qui répond à des besoins exprimés par les deux Parties et contribuera aussi au rapprochement des deux pays.

PermalienPhoto de Jean-Paul Dupré

Je souhaiterais une précision. Vous avez indiqué que l'accord concernerait 32 personnes au total, 12 au Venezuela et 20 en France. Parmi les emplois salariés auxquels ces personnes peuvent prétendre, les emplois contractuels de la fonction publique sont-ils prévus ?

PermalienPhoto de Jacques Remiller

J'aurais trois questions. Vous avez parlé des activités non-salariées en précisant qu'elles n'étaient pas concernées par cet accord sauf exceptions au cas par cas. Pourriez-vous préciser les règles dans ce domaine ? Existe-t-il, par ailleurs, une école française au Venezuela ? Enfin, y a-t-il des particularités pour les citoyens français des départements et territoires d'outre-mer au regard des stipulations de cet accord.

PermalienPhoto de Michel Terrot

On sait que souvent les écoles françaises permettent d'offrir des emplois aux personnes à charge des personnels de missions diplomatiques. L'école française de Caracas revêt donc une importance particulière au regard de l'accord dont nous discutons aujourd'hui.

Suivant les conclusions du rapporteur, la commission adopte sans modification le projet de loi (n 2317).

Argentine : approbation de la convention de sécurité sociale entre la France et l'Argentine (n° 2938)

La commission examine, sur le rapport de M. Jean-Paul Bacquet, le projet de loi autorisant l'approbation de la convention de sécurité sociale entre le Gouvernement de la République française et le Gouvernement de la République argentine (n° 2938).

PermalienPhoto de Jean-Paul Bacquet

Nous avons déjà signé un certain nombre d'accords de sécurité sociale, nous en sommes mêmes les champions, avec un total de 35 conventions bilatérales, devant les Etats-Unis, l'Allemagne et le Royaume-Uni.

Tout comme elles le sont avec nombre de pays d'Amérique latine, les relations que la France et l'Argentine entretiennent sont excellentes. Nos échanges culturels et universitaires s'inscrivent dans une longue tradition, marquée notamment par une coopération scientifique remarquable, qui place sur ce plan notre pays comme premier partenaire de l'Argentine, devant les Etats-Unis. Une centaine d'Alliances françaises, fréquentées par près de 10 000 étudiants, sont disséminées sur le territoire argentin. Au plan politique, les rencontres de haut niveau entre dirigeants sont régulières et l'on peut notamment souligner que, ces dernières années, les présidents argentins, Néstor Kirchner à deux reprises, puis Cristina Fernández de Kirchner, également à deux reprises, ont effectué des visites dans notre pays. Le Premier ministre français s'est pour sa part rendu à Buenos Aires en 2007 et les déplacements ministériels sont fréquents. On remarque aussi que sur de nombreux sujets débattus au sein du G20 les positions sont communes, par exemple sur des questions telles que les matières premières, la dimension sociale de la mondialisation et la lutte contre les paradis fiscaux.

Enfin, les relations industrielles et commerciales avec l'Argentine sont également importantes : la présence française se traduit aujourd'hui par l'implantation de plus de 200 entreprises en Argentine, dont certaines sont installées depuis longtemps.

Notre pays occupe de bonnes positions en termes d'investissements en Argentine. Avant la crise qui a l'a frappé en 2001, l'Argentine a même été un temps le pays, hors membres de l'OCDE, dans lequel nous avions le plus grand stock d'investissements directs. La très grave crise économique et financière que l'Argentine a connue à cette époque a bien sûr considérablement modifié la donne et la période suivante a été marquée par une décrue assez forte du stock d'investissements des entreprises françaises. Certaines ont même quasiment quitté le marché argentin, notamment les banques, Crédit agricole, Société générale ou BNP Paribas.

En revanche, dans certains autres secteurs, comme la distribution, avec Carrefour ou Casino, ou l'automobile, avec Renault et PSA Peugeot Citroën -, les entreprises françaises occupent des positions désormais très importantes, avec respectivement de 40 % et 30 % du marché local, et sont par conséquent des acteurs clefs de l'économie argentine. Les secteurs de l'agroalimentaire, autour de Danone ou de Bongrain, et de l'énergie, avec Total, sont également de ceux dans lesquels la présence des investisseurs français est conséquente. Au total, avec un volume de quelque 3,6 % du total des IDE, notre pays se place désormais au 7e rang des investisseurs étrangers en Argentine, derrière l'Espagne, les États-Unis, les Pays-Bas, le Chili, le Brésil et le Luxembourg.

Après le déclin dû à la crise, le renversement dans la tendance générale a commencé de se produire progressivement, à partir de 2006, mais les niveaux d'IDE français en Argentine restent encore aujourd'hui très inférieurs à ceux qu'ils avaient atteints au cours de la décennie 1990, et peu de nouvelles implantations ont été effectuées ces dernières années.

Tout comme nos investissements, nos échanges commerciaux ont quelque peu pâti de la crise de 2001-2002. Ils sont repartis à la hausse à partir de 2003, dès la reprise de l'économie argentine, et ils ont même très fortement progressé, puisque des augmentations de 30 % à 40 % de nos exportations ont été enregistrées certaines années, comme en 2008. 2009 a logiquement marqué un nouveau fléchissement, mais la progression du volume de nos échanges a fortement repris dès l'an dernier, puisque l'ambassade de France indique une augmentation de + 50, % pour 2010, à plus d'1 milliard d'euros. Ce sont en grande partie des biens d'équipement que nous exportons vers l'Argentine, pour 60 % du total, les produits liés à l'automobile en représentant plus du tiers. Nous sommes aujourd'hui au 8e rang des fournisseurs de l'Argentine, troisième de nos débouchés régionaux, derrière le Brésil et le Mexique, et notre 4e partenaire commercial en Amérique latine.

Pour sa part, l'Argentine exporte en France essentiellement des produits alimentaires ou agroalimentaires, qui représentent plus de 80 % de nos importations de ce pays.

Ces données générales permettent de situer le cadre dans lequel s'inscrit la convention de sécurité sociale signée à Buenos Aires le 22 septembre 2008 dont il nous est proposé d'autoriser l'approbation.

Grâce à la coordination des régimes de sécurité sociale, cet accord facilitera la mobilité des travailleurs en permettant notamment la prise en compte des périodes cotisées dans l'un et l'autre Etat. A cet égard, il faut préciser d'emblée qu'il intéressera bien plus les expatriés français qu'argentins, dans la mesure où, si la présence des entreprises françaises est conséquente en Argentine, celle des entreprises argentines en France est des plus réduites, pour ne pas dire quasiment inexistante : l'Argentine n'apparaît qu'au 73e rang des investisseurs étrangers dans notre pays avec un stock d'IDE à peine supérieur aujourd'hui à une trentaine de millions d'euros. Plus de 15 000 Français étaient immatriculés en Argentine au 31 décembre 2008, aux deux tiers binationaux. Selon les estimations fournies, les Argentins résidant en France seraient au nombre de 8 000 à 12 000.

A l'instar des nombreux autres accords de ce type que notre pays a conclus, l'ambition de celui-ci est d'améliorer la circulation des travailleurs entre les deux Etats, puisqu'il vise tout à la fois à instaurer la coordination entre les régimes de sécurité sociale et à donner à un salarié détaché la possibilité d'être maintenu temporairement au régime de sécurité sociale français. Ce faisant, on espère une certaine incidence sur la densification des échanges économiques avec l'Argentine.

Les mécanismes qui sont instaurés sont des plus classiques et appellent finalement peu de commentaires.

Au titre des principes de base énumérés apparaissent celui de l'affiliation obligatoire des travailleurs, salariés ou non-salariés, et de leurs ayants droits au régime de sécurité sociale de l'Etat sur le territoire duquel ils exercent leur activité professionnelle, ainsi que celui de l'égalité de traitement.

La situation particulière de certaines catégories, les travailleurs détachés notamment, justifie l'introduction de certaines exceptions. Pour éviter l'interruption dans la constitution des droits à pension et la multiplication des affiliations à des régimes différents, la principale dérogation permet à un travailleur salarié détaché par son employeur de rester soumis à la législation de sécurité sociale de l'Etat dont il dépend, sans qu'intervienne de condition tenant à la nationalité de l'intéressé, à la double condition que son détachement soit pour une durée maximale de deux ans et qu'il ne soit pas envoyé en remplacement d'un précédent employé arrivé au terme de son détachement. Il en est de même d'un travailleur indépendant qui viendrait à exercer temporairement sur le territoire de l'autre Partie contractante. De manière également classique, les personnels navigants, les gens de mer ou les fonctionnaires sont exclus des dispositions de principe de la convention.

Les dispositions relatives aux prestations concernées par cet accord sont également classiques. Le principe de la conservation des droits acquis est réaffirmé, et les pensions ne peuvent subir ni réduction ni modification pour des raisons tenant à la résidence de l'intéressé. Le principe de l'exportation des prestations à l'étranger est donc garanti parallèlement à celui de non-cumul des prestations.

Les différents chapitres de l'accord franco-argentin détaillent ensuite l'ensemble des prestations concernées, à savoir l'assurance maladie et maternité, la vieillesse et l'invalidité, les prestations en matière d'accidents du travail et de maladies professionnelles et enfin les prestations familiales. Sans entrer dans le détail et en retenant essentiellement l'esprit de la convention, on peut souligner que, dans chaque cas, les dispositions prévues traduisent un souci d'harmonisation et de cohérence entre les législations. Ainsi, en matière d'ouverture des droits, il est tenu compte, le cas échéant, des périodes de cotisation effectuées dans l'autre Partie ; de même, s'agissant de formalités à remplir par l'intéressé, les justifications apportées devant une Partie valent-elles également devant l'autre.

A cet effet aussi, des mécanismes concrets de coordination, de communication entre caisses, sont institués entre les régimes de sécurité sociale, qui serviront également à la lutte contre la fraude aux cotisations et aux prestations, priorité nationale.

Les effets des dispositions de cet accord seront positifs, notamment en matière de retraite pour les ressortissants français qui ont cotisé successivement aux régimes argentin et français lorsqu'ils demanderont la liquidation de leurs droits à pension. Même s'il ne peut être chiffré, le gain en termes d'amélioration du montant des retraites que cette coordination représentera sera appréciable, ne serait-ce que parce que les interruptions seront évitées. A ce titre, les bénéfices de la convention doivent par conséquent être considérés comme importants, pour modeste que soit la population concernée.

L'adoption de ce projet de loi confirmera aussi que notre pays, en cette matière, comme on l'a vu il y a quelques jours avec la convention avec l'Inde, et comme on le verra dans les prochains mois avec d'autres textes actuellement en cours de négociation, avec le Brésil ou bientôt avec la Chine, s'attache à développer son réseau de relations conventionnelles avec des pays émergents, avec lesquels nos relations industrielles et commerciales sont de plus en plus étroites. A leur mesure, ces textes participent de la densification des nos relations économiques, et nous devons nous en féliciter.

PermalienPhoto de Martine Aurillac

Existe-t-il, hormis le cas brésilien que vous avez cité, des accords de ce type passés par la France avec d'autres pays d'Amérique latine ?

PermalienPhoto de Geneviève Colot

Quelle est la position de la caisse des français de l'étranger sur ces accords ? Il me semble que ces derniers entrent en compétition avec son activité.

PermalienPhoto de Dino Cinieri

L'Argentine est un pays qui bouge, notamment dans les domaines touristiques et culturels. J'en veux pour preuve le projet, commun à nos deux pays, de faire inscrire l'oeuvre architecturale du Corbusier au patrimoine mondial de l'humanité.

PermalienPhoto de Jean-Paul Dupré

Quel est le solde de la balance commerciale entre nos deux pays ?

Communication de MM. Serge Janquin et Patrick Labaune sur le Soudan

PermalienPhoto de Patrick Labaune

Il y a un an, les conclusions de notre rapport étaient pessimistes. Je vous renvoie à son titre même : « Soudan : l'année de tous les dangers ». Un an plus tard, je dirais que ce n'est pas l'euphorie, mais que l'on peut néanmoins se montrer plus optimiste. 2010 aura été une année historique pour le Soudan, ne serait-ce que parce que, pour la première fois, les frontières d'un Etat vont être modifiées.

En deuxième point, je soulignerai le renouveau du processus démocratique au Soudan : pour la première fois depuis 1986, le Soudan est entré dans des processus électoraux, relativement démocratiques. Les élections législatives et présidentielles étaient prévues pour le mois d'avril 2010, elles se sont tenues dans des conditions considérées finalement comme relativement acceptables par l'ensemble des observateurs de la communauté internationale, alors que leur préparation avait suscité des craintes de fraudes massives de toutes sortes.

Il faut relever qu'un « gentlemen agreement » était intervenu entre le Nord et le Sud, entre Khartoum et Juba, quant à la présence des candidats, au terme duquel le MPLS sudiste ne participerait pas à la présidentielle et aux scrutins du nord et vice-versa. En d'autres termes, MPLS et CN ont eu lors de ces consultations l'assurance de dominer leur sphère d'influence et on peut considérer qu'il s'est agi d'un partage du pouvoir, qui n'a pas été sans effet sur l'apparition de dissidences, de rébellions violentes, sur le problème des minorités et des partis minoritaires, mais qui a pu aussi contribuer à éviter tout conflit violent, alors que l'on craignait qu'il resurgisse.

Au final, je dirais donc que, d'une part, ces élections ont été tenues et d'autre part, qu'elles ont été qualifiées de globalement acceptables, notamment par le centre Carter et l'Union européenne, reconnues par la Ligue arabe et l'Union africaine. Au sud, ce qui avait surtout été souligné, c'est la totale impréparation.

Je souligne trois effets de cette consultation électorale d'avril 2010 : en premier lieu, c'est une nouvelle légitimité donnée à El Bechir. Il a été élu avec 68 % des suffrages ; ce n'est pas 99 %. Tout cela, malgré le mandat d'inculpation de la CPI. Il a donc désormais une certaine légitimité démocratique. De son côté, Salva Kiir, réélu président du Sud Soudan est, de la même manière, conforté au Sud. enfin, on ne peut pas oublier aussi que ce qui s'est passé entérinait par avance aussi le fait que la séparation du Nord et du Sud, objet du référendum prévu en janvier 2011, était déjà actée par l'accord électoral entre les deux Parties.

En ce qui concerne le Darfour, je voudrais souligner deux éléments nouveaux. D'une part, le fait que deux Etats voisins ont changé d'attitude vis-à-vis du Soudan. Avec le Tchad tout d'abord, un accord de paix est intervenu en janvier 2010, dont nous parlions dans le rapport, qui est aujourd'hui toujours respecté et qui s'est traduit par le retour au calme sur la frontière entre les deux pays, alors même que le conflit au Darfour s'alimentait jusqu'alors des troubles entretenus par les deux armées. En second lieu, même si c'est encore une incertitude, qu'adviendra-t-il à l'avenir du rôle de la ligue qui a toujours été trouble ? Sera-t-elle prochainement définitivement hors-jeu ou bien Kadhafi reviendra-t-il ? C'est encore une inconnue mais le rôle déstabilisateur qu'il a joué par le passé dans la zone et notamment dans le cadre du conflit du Darfour amène à se poser la question.

Enfin, sur le terrain, l'évolution n'a pas été bonne, entre cessez-le-feu vite démentis et multiplications des incidents. Le processus de Doha est actuellement bloqué, depuis plusieurs mois, les rebelles du Darfour s'opposent toujours à Khartoum, des incidents violents ont lieu entre rebelles, les janjawids à la solde de Khartoum sévissent toujours contre les populations, et il arrive même que la MINUAD soit prise à partie. En résumé, on est de nouveau désormais au Darfour dans une situation de guerre larvée. Si en 2009, la situation au Darfour avait pu être qualifiée par les Nations Unies de conflit de basse intensité, ce n'est plus du tout la même situation qui prévaut en 2010. Rien qu'en mai, par exemple, il y a eu 600 tués au Darfour, hors violences tribales.

Dernier point que je souhaite évoquer, la préparation du référendum. C'est un événement historique, inscrit dans l'accord de paix global, CPA, de 2005, qui ouvre la voie à l'indépendance du Sud Soudan. Au long de 2010, aucun des éléments du calendrier prévu n'a été respecté et on est arrivé à la fin de l'année 2010 dans un état d'impréparation totale de cette consultation essentielle. La commission électorale n'a été constituée qu'en octobre, et fin décembre, le report du calendrier était encore fortement envisagé. On a pu craindre une volonté d'en découdre à nouveau de la part de Khartoum, des manipulations interethniques, aussi, pour délégitimer par avance les résultats de la consultation, qui a finalement eu lieu en temps et en heure, sans retard, à l'exception du referendum concernant la région d'Abyei qui n'a pu avoir lieu, compte tenu des grandes incertitudes qui pèsent encore, ne serait-ce qu'en ce qui concerne la délimitation des frontières.

PermalienPhoto de Serge Janquin

Si la communauté internationale a été relativement bienveillante à l'égard des résultats des élections de 2010, c'est parce qu'il n'y avait pas eu d'élections depuis 24 ans mais surtout parce qu'elle avait les yeux rivés sur l'échéance référendaire de janvier 2011. Il y avait deux référendums prévus : le premier sur l'indépendance du sud, le second sur la région d'Abyei, région intermédiaire, riche en ressources pétrolières et très disputées entre les tribus nomades du nord et les tribus sédentaires du sud. Ce dernier référendum n'a pu avoir lieu. Concernant le référendum sur l'avenir du sud, les résultats sont sans appel : 98 % de la population a voté en faveur de l'indépendance. L'issue du vote était attendue, mais peut-être pas dans ces proportions-là.

Quelles sont les perspectives aujourd'hui ? Les défis sont tout à fait considérables. Au Sud-Soudan, il n'y a pas d'Etat, il y a une constitution à réécrire, des institutions à mettre en place, un niveau de développement extrêmement faible, des besoins considérables, des populations qui ne survivent que grâce à l'aide internationale, pas d'infrastructures, un réseau routier dérisoire, ni écoles ni dispensaires. La question du partage des eaux du Nil est remise en cause. C'est un élément de complication internationale très fort. De plus, les tensions restent extrêmement violentes entre groupes ethniques, si bien qu'après la rébellion du général Athor, il y a des affrontements sanglants dans l'Etat du Jongleï. Les risques de conflits au Kordofan et les menaces de la LRA compliquent plus encore la situation. Le retour de la diaspora constitue aussi un élément de complication. Après 100 000 sudistes déjà revenus, 800 000 autres sont attendus, ce qui ne facilite pas la vie quotidienne.

Le seul élément de structuration actuelle du Sud-Soudan est son armée. Or, d'une part, elle est très intéressée par le partage de la manne pétrolière ; d'autre part, elle n'est finalement que l'addition de féodalités avec des mouvements de sécessions brutaux, réversibles, imprévisibles.

S'agissant du nord, il perd avec la sécession 640 000 km2, 9 millions d'habitants et des ressources naturelles considérables. La contagion reste possible au Darfour et à l'est. Béchir sort effectivement conforté : il tient le parti, l'armée, les forces spéciales et d'une certaine manière rassure les milieux économiques. Pourquoi a-t-il si facilement accepté les résultats du référendum alors qu'il avait toujours laissé entendre le contraire ? Le risque de sanctions internationales a pesé, mais c'est le problème de la rente pétrolière et de la dette considérable du Soudan qui a joué. Aujourd'hui la dette souveraine du Soudan est estimée à 40 milliards de dollars. J'ai reçu récemment l'ambassadeur du Soudan à Paris. Le pays est manifestement aux abois et cherche des financements auprès de la Russie et de la Chine et demande la renégociation voire le renoncement de la part des Etats membres du FMI et de la Banque mondiale à la dette du Soudan. Le régime craint que l'aide internationale se dirige vers le Sud-Soudan et que le nord, qui a contracté la dette, ne soit oublié.

Manifestement, Khartoum n'a pas souhaité le règlement du conflit d'Abyei, où les affrontements restent extrêmement violents. L'expert indépendant de l'ONU sur la situation des droits de l'homme au Soudan, Mohamed Chande Othman, considère que ce conflit pourrait faire dérailler l'ensemble du processus de paix. C'est la main gardée par Kartoum pour intervenir à nouveau dans le sud. J'ai tendance à penser que le fait que le référendum n'ait pas eu lieu en atteste. C'est seulement au travers des allègements massifs de dettes, sous bénéfice de l'inventaire de l'achèvement du processus de paix, que la communauté internationale peut peser sur l'avancée du processus.

Enfin, le changement d'attitude sur la démocratie électorale de la part de Kartoum ne s'est pas accompagné d'un même changement sur la question des droits de l'homme et particulièrement des droits des femmes. Le 8 mars, journée internationale des femmes, quarante femmes ont été emprisonnées pour avoir manifesté leur soutien à une femme violée par les milices de Béchir. Parmi elles se trouve la fille de Sadiq al-Mahdi, opposant religieux et politique. J'ai émis, en ma qualité de président du groupe d'amitié France-Soudan, les plus vives protestations auprès des autorités de Khartoum. Je sais qu'une visite officielle du président de l'assemblée nationale du Soudan auprès du Président Bernard Accoyer est prévue. Elle a été différée. Il convient de soumettre comme condition à cette visite, d'abord, que ces femmes soient libérées, ensuite que l'on reçoive peu après les responsables du parlement du Sud-Soudan.

PermalienPhoto de Patrick Labaune

Votre analyse insiste de manière très pertinente sur l'immensité et la diversité humaine de ce pays.

La partition du Sud-Soudan va effectivement permettre au Président el-Béchir d'avoir une préoccupation en moins et de centrer son attention sur les autres problèmes. Même si la MINUAD n'agit pas aussi efficacement qu'on pourrait le souhaiter, notamment à cause de problèmes logistiques qui découlent entre autres du fait que seuls des soldats africains y participent, elle reste présente au Darfour et limite les risques d'escalade de la violence. Il faut aussi savoir que le Sud-Soudan n'a pas intérêt à laisser le Président exercer un contrôle brutal sur le Darfour, car cette violence pourrait ensuite se propager sur son propre territoire.

Les Etats de la Ligue arabe se sont toujours opposés au mandat d'arrêt de la CPI contre le Président el-Béchir et ce dernier peut se rendre sur leur sol sans problème, mais ce mandat d'arrêt empêche tout déplacement dans un grand nombre d'autres pays. Il est vrai qu'il a laissé le processus référendaire se dérouler au Sud-Soudan, mais peut-être l'a-t-il fait justement à cause de la pression internationale qui s'exerçait sur lui.

PermalienPhoto de Serge Janquin

La situation régionale évolue si vite actuellement qu'il est bien difficile d'évaluer les conséquences qu'elle pourrait avoir sur le Soudan. Jusqu'ici, les grands voisins du pays ont plutôt gêné que facilité le règlement des problèmes : cela va-t-il changer avec un renouvellement des dirigeants ? C'est bien difficile à dire !

PermalienPhoto de Jean-Michel Ferrand

Pourriez-vous nous préciser la part des différentes religions au Soudan et celle des nombreuses composantes ethniques ? Vous avez indiqué que l'armée était la seule force organisée. N'existe-t-il pas de partis politiques ?

PermalienPhoto de Serge Janquin

Les partis qui existent sont en fait la traduction des forces armées. Le pays compte pas moins de deux cents ethnies. Les chrétiens sont en fait aussi animistes ; ils ont souvent été convertis par des évangélistes américains.

PermalienPhoto de Patrick Labaune

Je tiens à votre disposition une carte qui localise les ethnies dans le seul Sud-Soudan : elle illustre la complexité des choses. On peut distinguer trois confédérations tribales : les Dinka, les Nuer et les Bari. Elles sont toujours en rivalité : ainsi, les ethnies du nord du Sud-Soudan voient d'un mauvais oeil l'installation de la capitale dans une zone où les Bari sont majoritaires. Plusieurs dizaine de personnes perdent la vie chaque mois à cause de ces conflits interethniques.

PermalienPhoto de Robert Lecou

Une procédure judiciaire contre le Président el-Béchir est-elle toujours pendante devant la CPI ?

Le Soudan a de nombreux voisins, parmi lesquels la Libye et l'Egypte. Ne peut-on pas craindre que l'agitation politique dans ces pays ait des conséquences sur lui ?

PermalienPhoto de Patrick Labaune

Mouammar Kadhafi a développé un impérialisme régional qui l'a conduit à soutenir certains groupes violents du Darfour. La quasi-guerre civile que connaît aujourd'hui son pays va peut-être le conduire à se recentrer sur ses problèmes intérieurs. La frontière entre le Soudan et le Tchad a été très poreuse jusqu'au début 2010. La situation est beaucoup plus calme depuis.

PermalienPhoto de Serge Janquin

Certains Etats, dont les Etats-Unis, ont établi un lien entre les poursuites du Président el-Béchir devant la CPI et son attitude à l'intérieur de son pays. Quelques uns se sont prononcés pour la levée des sanctions contre lui.

Un groupe de pays suit de près la situation au Soudan : la France n'en fait pas partie. Elle pourrait ainsi demander à devenir membre de l'IGAD en échange d'une augmentation de son aide financière.

PermalienPhoto de Jean-Michel Boucheron

Parmi les raisons qui expliquent le fait que M. Béchir ait été relativement calme, deux dont je ne peux mesurer le poids sont avancées. Je souhaiterais connaître l'avis des rapporteurs à leur sujet. La première c'est que M. Béchir était sous le coup d'une condamnation devant la Cour pénale internationale et il paraît que Mme Clinton aurait laissé entendre que les poursuites ne se concrétiseraient pas si M. Béchir faisait preuve de sagesse vis-à-vis du Sud-Soudan. La seconde, peut-être plus sûre, est la livraison de 25 chars lourds russes, avec l'aide de la Chine, et l'accompagnement par la CIA pour le trajet entre Nairobi et le Sud-Soudan qui aurait pu rééquilibrer le rapport militaire entre le nord et le sud. Dans quelle mesure cela a-t-il joué ? Entre les mains de qui se trouvent-ils ?

PermalienPhoto de Serge Janquin

Cette information est avérée. Sur la question de la place de Béchir, le processus étant engagé, je vois mal le procureur Ocampo qui a lancé les inculpations revenir sur sa position. Il est exact que Mme Clinton a pris des engagements dans ce sens. M. Kouchner lorsqu'il était ministre avait également suggéré qu'une position conciliante de M. Béchir pourrait amener des évolutions. Je conseille beaucoup de prudence. C'est aujourd'hui la question de la dette qui est déterminante. Comme à chaque fois que le Soudan est étranglé par sa dette – et il a utilisé plus que sa rente pétrolière pour réarmer – il est obligé d'être conciliant pour bénéficier d'une aide internationale lui permettant de survivre.

PermalienPhoto de Nicole Ameline

Je souhaite remercier nos rapporteurs. Ma première observation porte sur le calendrier. Il est prévu que la sécession intervienne prochainement. Il y a trois séries de questions : la démarcation des frontières, la répartition de la manne pétrolière et le statut de la région d'Abyei. Comment envisagez-vous cette mise en oeuvre et est-elle possible ? Ma seconde observation concerne la mise en oeuvre de l'Etat de droit en regardant ce qui se passe dans la région. La question des violences est cruciale. Le ministre du développement rural a été assassiné dans son bureau le mois dernier et la situation des femmes est grave. Vous l'avez évoquée et je vous en remercie car c'est un sujet très important. Je pense que sur ce terrain nous devons être le plus exigeant possible car il ne faut pas réitérer les erreurs du passé et montrer une forme de complaisance à l'égard de situations inacceptables sur le terrain même si elles sont complexes. J'aimerais que vous précisiez d'ailleurs le rôle de la Chine, présente dans la région. Quelles initiatives la communauté internationale et la France peuvent-elle prendre de manière prioritaire : un soutien à la nouvelle gouvernance, un appui économique ciblé ? Dans tous les cas de figure, cela doit être conditionné à la progression de l'Etat de droit.

PermalienPhoto de Serge Janquin

Je ne peux que souscrire à ces affirmations de principe. S'agissant du calendrier, la date-butoir est le 9 juillet. D'ici-là, les conditions ne seront probablement pas remplies, mêmes si l'ONU et des émissaires s'y emploient. Khartoum ne souhaitent pas que ces conditions soient réunies. Je ne peux pas dire où nous en serons à cette date. Pour la Chine, « business is business », les Droits de l'Homme n'entrent pas en ligne de compte. A défaut d'une réponse coordonnée de la part des occidentaux, la Chine prendra la place des intérêts occidentaux.

PermalienPhoto de Patrick Labaune

Je préciserai que la Chine cherche aussi la stabilité, l'instabilité étant préjudiciable aux affaires.

PermalienPhoto de François Loncle

Je voudrais féliciter nos deux collègues pour ce travail de qualité, comme l'était le rapport de l'an passé. Je souhaiterais formuler deux remarques qui relativisent nos espérances démocratiques. Le discours consistant à dire que lors des processus électoraux il y a eu des fraudes mais que cela n'a pas d'importance et qu'on passe à l'étape suivante, a déjà eu cours, en Afghanistan, en Côte d'Ivoire et dans d'autres pays. Est-ce qu'un jour ou l'autre ce qu'on appelle injustement la communauté internationale, c'est-à-dire plutôt les grandes organisations internationales chargées de ces processus, parviendront à se mettre d'accord pour qu'il y ait un degré d'efficacité dans le contrôle électoral ? Ma deuxième remarque concerne la situation du président Béchir. Il y a une inculpation devant la Cour pénale pour génocide. Ce ne sont pas des crimes modestes. Va-t-on discréditer la CPI, qui n'en a pas besoin ? On minimise son rôle, on l'handicape pour l'avenir en se livrant à des excuses a posteriori. Pendant ce temps, M. Béchir se promène, reprend la main dans son pays. Je préfèrerais qu'on réfléchisse à ce sujet plutôt que de livrer des condamnations expéditives sans en mesurer les conséquences.

PermalienPhoto de Patrick Labaune

Sur le processus électoral, nous sommes démocratiques et on peut être choqué par le fait que ces élections sont seulement « acceptables ». Il ne faut cependant pas tomber dans l'occidentalo-centrisme, et souhaiter que notre démocratie classique, parlementaire, soit plaquée sur ces pays. Ces pays sont dans un processus démocratique qui n'existait pas il y a vingt ou trente ans. Le Soudan a peut-être plus de chance que d'autres pays. On avait parlé à propose de la Côte d'Ivoire d'ethno-démocratie : les trois candidats présidentiels correspondaient à trois grandes ethnies. Au Soudan, il y a une certaine homogénéité raciale et ethnique et les fraudes qui ont eu lieu sont plus liées à des questions de logistique qu'à un désir de fraude. Il faut avoir à l'esprit que le Sud-Soudan c'est la superficie de l'Espagne et du Portugal réunis avec 20 km de routes asphaltées. Une urne est presque un luxe. Ces élections ont eu le mérite d'avoir lieu.

PermalienPhoto de Serge Janquin

Sur l'inculpation du président Béchir, j'ai eu l'occasion de dire toutes mes réserves sur le processus, non pas qu'il fut illégitime, mais du fait de son inefficacité. Quand on ne peut appliquer une sanction, c'est difficile de l'afficher et ensuite de rester l'arme au pied. Or, le Soudan n'est pas signataire du Traité de Rome, comme certains pays arabes, comme d'autres pays africains, comme la Russie et la Chine, et les Etats-Unis ne l'ont pas ratifié. C'est dire si l'applicabilité du traité est fragile. C'est par une délibération du conseil de sécurité de l'ONU, avec l'abstention des Etats-Unis, de la Chine et de la Russie, que l'inculpation a été portée devant la CPI. La base était donc fragilisée. Il était prévisible que cela ne servirait à rien et compliquerait les choses dans un processus de paix entre le nord et le sud. On en est là. On ne va pas déjuger l'enquête conduite par le procureur ; elle est en cours. Je ne sais pas comment on peut se sortir de ce guêpier.

Le Président Axel Poniatowski. Ce n'est pas une vraie raison pour ne pas le faire quand même.

PermalienPhoto de Geneviève Colot

Je souhaiterais à mon tour féliciter les deux rapporteurs pour leur connaissance du sujet. Je souhaiterais leur demander s'ils auraient des informations sur l'évolution du sort et du nombre d'enfants soldats dans cette région.

PermalienPhoto de Serge Janquin

Je n'en ai pas. Je sais que c'est un phénomène ancien, qui s'apparente aux enlèvements que pratiquaient les tribus arabes sur les populations noires et qui a perduré sur d'autres formes. Cela existe encore mais je n'ai pas de chiffrage et je ne saurais en dire plus.

PermalienPhoto de Patrick Labaune

A la frontière entre le Centrafrique, le Congo et l'Ouganda, opère la LRA, qui comprend des enfants-soldats parmi ses 250-300 membres.

PermalienPhoto de Dino Cinieri

Pourriez-vous nous donner des précisions sur la situation dans la région d'Abyei et sur la ligne de partage entre Nord et Sud-Soudan ?

PermalienPhoto de Patrick Labaune

La région d'Abyei est très importante car elle assure entre 25 et 30 % de la production soudanaise de pétrole. Un accord de 2005 fixait la ligne de partage au nord d'Abyei, lésant le Nord puisque tout le pétrole se trouvait ainsi au Sud. En juin 2009, la Cour permanente d'arbitrage a abaissé cette ligne : le Nord aura ainsi une partie du pétrole, le Sud conservant 70 % des réserves et gagnant en homogénéité ethnique, le poids des Dinka en étant proportionnellement accru.

PermalienPhoto de Rudy Salles

La partition du Sud risque-t-elle d'avoir des conséquences sur le Darfour ?

PermalienPhoto de Serge Janquin

Ce risque existe et un renforcement du contrôle de cette région semble effectivement faire partie de la stratégie de Khartoum. Il faudra suivre cela de près.

PermalienPhoto de Patrick Labaune

Le Président el-Béchir a contribué à la relance des violences au Darfour dès 2010, anticipant la sécession du Sud. La situation y est à nouveau mauvaise, même si les violences ne sont pas au niveau de celles du milieu des années 2000.

PermalienPhoto de Jacques Remiller

Pourriez-vous nous en dire plus sur les relations entre le Tchad et le Soudan ? Que pensez-vous de la viabilité de l'Etat du Sud-Soudan ?

PermalienPhoto de Serge Janquin

Le Tchad et le Soudan ont intérêt à la stabilisation de leurs rapports et à la fin des hostilités. Pourtant, il n'est pas certain que le calme continue à régner longtemps sur leur frontière.

PermalienPhoto de Michel Terrot

Quelle est l'activité du groupe Total au Sud-Soudan ? A-t-il conclu des accords avec les autorités du Nord et du Sud ?

PermalienPhoto de Serge Janquin

Total dispose au Soudan de concessions importantes, qui lui ont d'ailleurs été disputées devant la justice par une compagnie britannique. La situation sécuritaire ne lui permet pas de les exploiter pour le moment.

PermalienPhoto de Jean-Pierre Dufau

La solution de la partition qui va être mise en oeuvre au Soudan, où elle se justifie par les particularités de cet Etat vaste et à la grande diversité ethnique, doit-elle être considérée comme une nouvelle option susceptible de résoudre d'autres conflits, ou comme un dangereux précédent qui pourrait déclencher un effet domino regrettable ?

PermalienPhoto de Serge Janquin

Il est exact que cette partition met un terme au principe selon lequel les frontières des Etats africains nés de la colonisation étaient intangibles, principe auquel il n'a été dérogé qu'une fois. La communauté internationale n'est néanmoins susceptible d'accepter les changements de frontières que s'ils se font avec l'accord des intéressés. On pourrait effectivement envisager d'autres cas dans lesquels cette condition sera remplie.

Nomination de deux députés au conseil d'administration de l'Institut français

En application de l'article 2 de la loi sur l'action extérieure de l'Etat, la commission a désigné MM. Hervé Gaymard et Didier Mathus au conseil d'administration de l'Institut français.

Informations relatives à la commission