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Commission des affaires économiques

Séance du 1er décembre 2010 à 16h00

Résumé de la séance

Les mots clés de cette séance

  • ferroviaire
  • fret
  • industrielle

La séance

Source

La commission a examiné la proposition de résolution tendant à la création d'une commission d'enquête sur la situation de l'industrie ferroviaire française : production de matériels roulants « voyageurs » et fret (n° 2978) sur le rapport de M. Daniel Paul.

PermalienPhoto de Serge Poignant

Nous examinons, sur le rapport de notre collègue Daniel Paul, la proposition de résolution n° 2978 de M. Alain Bocquet – que nous avons le plaisir d'accueillir aujourd'hui – et plusieurs de ses collègues du groupe GDR tendant à la création d'une commission d'enquête de trente membres sur la situation de l'industrie ferroviaire française : production de matériels roulants « voyageurs » et fret.

Cette proposition devant être examinée en séance publique mercredi prochain, 8 décembre, notre Commission est amenée, conformément à l'article 140 du Règlement, à se prononcer sur son opportunité et je laisse donc la parole au Rapporteur pour vous la présenter.

PermalienPhoto de Daniel Paul

Notre collègue Alain Bocquet a déposé une proposition de création d'une commission d'enquête sur la situation de l'industrie ferroviaire française.

En 2008, la France est devenue la deuxième puissance ferroviaire européenne, avec un chiffre d'affaire de 3,3 milliards d'euros, dont 2,2 milliards sur le marché intérieur et 1 milliard au titre des exportations, grâce, notamment, au retour en force des tramways, au renouvellement des trains régionaux et à l'essor de la grande vitesse.

Pourtant, la situation est aujourd'hui particulièrement préoccupante. Dans un reportage du journal Le Monde du 18 septembre dernier sur le sauvetage du « made in France », on peut ainsi lire que les pays émergents « sophistiquent leur production (...) bénéficient d'une main d'oeuvre éduquée, peu chère et des transferts de technologies que les États développés, la France entre autres, leur ont concédés pour obtenir des contrats à l'exportation ». Le secteur ferroviaire n'est pas épargné par ce mouvement.

Dans une interview récente accordée à la revue Ville, Rail et Transports, le Président de Bombardier Transports, M. André Navarri, ne cachait pas sa volonté de devenir un acteur local du marché chinois, notamment pour des activités importantes d'ingénierie, n'excluant pas le transfert d'importants centres de décision.

Alstom, pour sa part, aurait signé, selon une information publiée par Business Wire en septembre dernier, un protocole d'accord avec deux entreprises chinoises (CNR et SEC), en vue de former un partenariat stratégique et de développer conjointement de nouveaux marchés pour des produits de transports collectifs.

Or ces constructeurs se portent particulièrement bien. Ils reçoivent de très nombreuses commandes, venant aussi bien de l'international que du marché intérieur. Les résultats financiers de Bombardier et Alstom, en constante progression depuis plusieurs années, attestent de ce formidable essor.

Malheureusement, cette embellie profite certes aux actionnaires mais pas à l'emploi et aux salariés : Bombardier avoue avoir profité de la récession pour peaufiner ses activités d'exploitation, en vue d'une meilleure exécution et d'une réduction des coûts. Alstom n'est pas en reste, avec une réduction de ses effectifs (- 5 000) au cours de l'exercice – départs naturels, non-renouvellement de contrats à durée déterminée et restructurations de plusieurs sites.

Le Nord Pas-de-Calais est la première région industrielle ferroviaire française, avec 30 % de l'activité nationale, trois constructeurs (Alstom, Bombardier et Arbel Fauvet Rail), 150 équipementiers, des centaines de fournisseurs et sous-traitants, 10 000 emplois et environ un milliard d'euros de chiffre d'affaires. C'est dire si cette région est en première ligne !

Or, la tendance générale est à la fabrication des commandes de l'État ou des régions par les usines des grands constructeurs situées en Europe de l'Est. Préjudiciables à l'industrie nationale et régionale, ces pratiques sont désormais fréquentes et acceptées, y compris par les maîtres d'ouvrage publics qui passent les commandes « sans trop poser de questions »...

L'État et la SNCF ont leur part de responsabilité, avec la politique menée en matière de fret ferroviaire. En septembre 2009, le Gouvernement a promis un engagement national pour le fret ferroviaire de 7 milliards d'euros d'ici à 2020, la SNCF mobilisant pour sa part un milliard d'euros d'ici 2015. Un an plus tard, du fait de la lenteur de l'activation de ces dispositifs et du cap maintenu sur les options de la SNCF, toutes les entreprises accusent un chiffre d'affaires en baisse de 30 % par rapport à 2008. En 2000, l'objectif du Gouvernement était de doubler la part du fret ferroviaire à l'horizon 2010 : au final, elle a diminué, passant de 14 % en 2003 à 11,4 % en 2008. Le fret représente pourtant un enjeu majeur de la transition écologique nécessaire et attendue.

Dans ce contexte, il est important de rappeler la proposition du mouvement syndical de constituer un « pôle industriel ferroviaire, national ou régional » du fret. L'objectif est de bâtir une offre globale intégrant les études, la construction ferroviaire, la maintenance de tous les types de wagons – citernes, containers, trémies pour céréales et agrégats, etc., les entreprises partenaires ayant vocation à devenir – ou redevenir – des sous-traitants de la fabrication de ces matériels. Alstom et Bombardier pourront être sollicités dans cette perspective.

C'est maintenant qu'il faut réagir et tel est l'objet de la présente proposition de création d'une commission d'enquête sur la situation de l'industrie ferroviaire française, portant sur le matériel roulant « voyageurs » et fret.

Rien ne s'oppose juridiquement à l'examen de ce texte par notre Assemblée. Il porte en effet sur des faits déterminés, puisqu'il tend, d'une part, à établir un diagnostic précis de l'état de santé de la filière industrielle ferroviaire française et, d'autre part, à proposer un traitement de fond pour améliorer son état général. Son objectif satisfait donc aux exigences posées par l'article 137 du Règlement de l'Assemblée nationale.

En outre, aucune commission d'enquête ou mission mise en place dans les conditions prévues à l'article 145-1 du Règlement n'a effectué de travaux sur ce même sujet depuis douze mois.

Enfin, aucune procédure judiciaire n'est en cours ou n'entre dans le champ d'étude proposé, M. le Garde des sceaux, ministre de la justice et des libertés, ayant été sollicité par courrier à ce sujet par M. le Président de l'Assemblée nationale.

La situation du fret ferroviaire commande que nous investissions ce champ d'activité industrielle en vue de présenter des propositions pour défendre l'emploi et répondre aux besoins des bassins d'emploi, des entreprises clientes et des sous-traitants, ainsi qu'aux enjeux écologiques.

La création d'une commission d'enquête parlementaire sur ces enjeux vise aussi à définir les initiatives que le Gouvernement pourrait porter au plan européen pour coordonner et impulser les activités industrielles ferroviaires, ainsi que pour lutter contre le dumping social, fiscal et environnemental que favorise l'absence d'harmonisation par le haut des réglementations et des fiscalités des différents États-membres de l'Union Européenne.

Au bénéfice de ces considérations, je vous propose, Monsieur le Président, mes chers collègues, d'adopter la proposition de résolution de M. Alain Bocquet.

La Commission examine l'amendement CE 1 du Rapporteur.

PermalienPhoto de Daniel Paul

L'amendement vise à corriger une erreur de référence dans les articles du Règlement et à simplifier la rédaction de la résolution.

La Commission adopte l'amendement CE 1 et la proposition de résolution est ainsi rédigée.

PermalienPhoto de Laure de La Raudière

Le groupe UMP se soucie au premier chef de l'état de santé de notre industrie ferroviaire, comme, du reste, de l'ensemble des autres filières industrielles. Le Gouvernement n'est pas resté inerte puisque les États généraux de l'industrie ont accouché de 23 mesures ciblées concernant la plupart des filières, cependant que le Ministre de l'industrie précédent créait plusieurs comités de filières en vue de renforcer leur compétitivité, sur le marché intérieur comme à l'international. En outre, un Médiateur de la sous-traitance a été nommé et je suis persuadée qu'il pourrait se pencher utilement sur les problèmes soulevés par les auteurs de la résolution.

Nous ne sommes pas hostiles par principe à la création de la commission d'enquête mais la rédaction de la proposition de résolution ne nous satisfait pas en ce qu'elle semble préjuger de certaines conclusions, notamment pour ce qui concerne la sous-traitance. C'est pourquoi le groupe UMP s'abstiendra.

PermalienPhoto de François Brottes

La désindustrialisation de notre pays a atteint, au cours des dernières années, un stade critique et force est d'admettre que, quelles que soient les initiatives des uns et des autres, l'industrie française régresse.

Le support de la commission d'enquête proposé par nos collègues est-il le mieux adapté alors qu'une mission d'information eût pu suffire ? Il ne nous appartient pas d'en décider et nous comprenons, à l'heure où les droits de l'opposition ne sont pas toujours reconnus, que le groupe GDR use pour la première fois de cette faculté. En outre, les commissions d'enquête disposent de pouvoirs étendus, et, au vu de la gravité de la situation de l'industrie ferroviaire, il pourra en être fait usage à bon escient.

Le groupe SRC votera la proposition de résolution, en espérant que les questions de confidentialité industrielle et commerciale ne feront pas obstacle aux travaux de la commission d'enquête.

La Commission adopte la proposition de résolution n° 2978.

Membres présents ou excusés

Commission des affaires économiques

Réunion du mercredi 1er décembre 2010 à 16 h 30

Présents. - M. François Brottes, M. Daniel Fasquelle, M. Jean Grellier, M. Sébastien Huyghe, Mme Laure de La Raudière, Mme Frédérique Massat, M. Jean-Marie Morisset, M. Daniel Paul, M. Serge Poignant, M. François Pupponi

Excusés. - M. Gabriel Biancheri, M. Jean-Michel Couve, Mme Geneviève Fioraso, M. Jean-Pierre Grand, M. Gérard Hamel, M. Jean-Yves Le Déaut, M. Michel Lejeune, M. Jean-Claude Lenoir, M. François Loos, Mme Anny Poursinoff, M. Bernard Reynès

Assistait également à la réunion. - M. Alain Bocquet