Consultez notre étude 2010 — 2011 sur les sanctions relatives à la présence des députés !

Commission des affaires étrangères

Séance du 13 octobre 2010 à 9h45

Résumé de la séance

Les mots clés de cette séance

  • allemagne
  • communautaire

La séance

Source

Examen du rapport pour avis de M. Roland Blum sur le prélèvement communautaire (article 46 du projet de loi de finances pour 2011) La séance est ouverte à neuf heures quarante-cinq.

La commission examine, sur le rapport pour avis de M. Roland Blum, l'article 46 du projet de loi de finances pour 2011.

PermalienPhoto de Roland Blum

Le thème de l'avis budgétaire que je présente devant vous ce matin sur le budget européen, et sur la contribution française à ce budget, tombe à point nommé pour nous servir de guide de réflexion à l'égard de la construction européenne. Avant de vous présenter pour 2011 l'article 46 de la loi de finances relatif à la contribution budgétaire de la France au budget de l'Union européenne, je souhaite vous faire part de quelques réflexions sur la relation franco-allemande qui fait cette année l'objet d'un développement spécifique dans mon rapport.

Il est assez tentant d'idéaliser le passé de la relation franco-allemande. Vous avez tous en mémoire quelques duos célèbres de Président et de Chancelier, ou quelques images passées à la postérité. Mais l'histoire des relations personnelles entre présidents et chanceliers a toujours été celle d'une forme d'apprivoisement mutuel. Les résultats en ont été particulièrement riches, pour chacun des partenaires et pour l'Europe dans son ensemble, mais les faits sont là : d'entente spontanée, immédiate et systématique sur tous les sujets importants, il n'y en a tout simplement jamais eu.

Aussi, la période que nous vivons actuellement est loin d'être la plus tendue. Presque tous mes interlocuteurs, des parlementaires aux diplomates, en passant par les chercheurs et les journalistes, ont cité un « point bas » de la relation bilatérale à propos d'enjeux européens : il s'est agi du Conseil européen de Nice, en décembre 2000, à l'époque du « tandem » Jacques Chirac-Gerhard Schröder. Le même tandem avait d'ailleurs connu d'autres tensions, qui nous intéressent directement pour notre propos de ce matin, au sujet des perspectives financières pluriannuelles de l'Union. C'est même à la suite de cet épisode particulièrement orageux qu'ont été instituées les « rencontres de Blaesheim », rencontres informelles entre le Président français, le Chancelier fédéral et les ministres des Affaires étrangères. La première a eu lieu le 31 janvier 2001 à Blaesheim, en Alsace.

Autre leçon d'histoire : le dixième anniversaire de l'unité allemande retrouvée, que nous avons célébré le 3 octobre dernier. Peu de jours après, lors d'une séance solennelle organisée au Parlement européen, Jacques Delors demandait, à mots à peine voilés, si l'Allemagne d'aujourd'hui avait bien toujours la ferveur européenne d'hier. Car telle est la question que beaucoup d'observateurs se posent aujourd'hui, et qui m'a incité à choisir ce thème pour mon rapport : peut-on dire, comme l'écrivait il y a un an ce correspondant à Berlin d'un journal du soir, que « l'Allemagne apaisée enterre le rêve européen » ?

Voilà qui invite à la modestie pour appréhender le temps présent. En effet, la conception d'une « Union sans cesse plus étroite » entre les États membres de l'Union européenne n'est jamais un fait acquis. Or à la lumière des crises récentes qui ont secoué la zone euro, à la lumière du débat qui se poursuit en ce moment même pour trouver les moyens d'une sortie de crise définitive et pérenne, à la lumière également des profonds débats qui ont accompagné la ratification en Allemagne du Traité de Lisbonne, au terme d'une séquence juridique et parlementaire rythmée par une décision historique de la Cour constitutionnelle fédérale de Karlsruhe, la question est plus que jamais légitime : oui ou non, l'Allemagne est-elle encore ce solide moteur de l'intégration européenne, conjointement avec la France ? Oui ou non, est-il encore pertinent de dire que, par leurs différences mêmes, la France et l'Allemagne, lorsqu'elles forgent un compromis sur une décision importante pour l'Union européenne, ont aplani la route pour l'ensemble de leurs partenaires ?

À ces questions, je veux répondre franchement oui. Même dans le cadre devenu très complexe du fonctionnement institutionnel actuel d'une Union à 27, même dans l'urgence de la gestion de crise face aux mouvements spéculatifs, le moteur franco-allemand fonctionne, et il est plus nécessaire que jamais. Lorsque l'euro vacille le temps d'un week-end, seule cette alliance fondatrice peut rassurer tous les acteurs.

Mais alors, d'où vient cette impression de désengagement allemand ? Sans doute du fait que l'Allemagne est désormais moins inhibée qu'elle ne l'a été par le passé. Les chiffres sont connus : la croissance allemande, dopée par la reprise des exportations, est repartie avec une vigueur inégalée, quand la France, dont l'économie fonctionne sur des ressorts différents, est pour l'heure distancée. Or ne nous masquons pas la réalité : France et Allemagne sont des concurrents économiques ! Voyez Siemens et Areva dans le domaine de l'énergie nucléaire, voyez Siemens et Alstom dans le domaine des trains à grande vitesse, voyez le secteur automobile…

Dans ce contexte, quelles sont les leçons à méditer pour demain qu'offre l'analyse de la relation franco-allemande en tant qu'élément moteur de la poursuite de l'intégration européenne ? Les défis à relever sont lourds, et ils ne seront pas relevés sans une loyale coopération franco-allemande. Pour ce faire, nos deux pays peuvent compter sur un maillage de relations politiques, administratives, culturelles, d'une densité inégalée. En dépit des quelques vicissitudes de la relation que l'on peut observer au sommet, la base est incroyablement solide et tient bon. Sur ce socle, il est possible de bâtir une nouvelle gouvernance économique pour la zone euro, d'échafauder une politique de cohésion renouvelée, de construire la politique agricole commune de demain, de refonder la solidarité budgétaire qui lie les 27 États membres.

Nous sommes justement ce matin appelés à nous prononcer, comme chaque année, sur le montant du prélèvement opéré sur les recettes du budget de l'État au titre de la participation de la France au budget de l'Union européenne. Nous le ferons, comme chaque année, avec une certaine marge d'incertitude, puisque le montant de ce « prélèvement européen » est seulement une évaluation de ce que sera la contribution française, et pour cause. D'une part, le budget de l'Union pour 2011 est en cours de discussion au moment où nous parlons, entre la proposition initiale, ambitieuse, de la Commission, la contre-proposition nettement plus raisonnable du Conseil, et l'intervention du Parlement européen, avant que Conseil et Parlement ne parviennent à un compromis d'ici quelques semaines.

Un autre élément d'incertitude porte sur ce que sera in fine la contribution française, qui est soumise traditionnellement à un triple aléa. Le premier aléa concerne le sujet à l'instant évoqué du montant des dépenses globales qui sera finalement arrêté par les 27. La contribution française inscrite dans le projet de loi de finances pour 2011 cible le bas de la fourchette, puisqu'elle s'aligne sur la position du Conseil, que je qualifiais à l'instant de raisonnable et qui représente une hausse de 2,9 % des dépenses par rapport à 2010. Le deuxième aléa a trait aux recettes communautaires, qui sont estimées au regard des différentes contributions des États membres assises sur leur Revenu national brut, au regard du produit de ce que l'on appelle la « TVA communautaire », ainsi qu'au regard du montant du fameux « rabais britannique ». Le troisième aléa enfin, concerne le solde de l'année n – 1, c'est-à-dire le solde qui sera constaté en fin d'année 2010, et qui viendra en principe diminuer les contributions théoriques des États membres. Car l'Union européenne ne dépense pas l'argent qu'elle n'a pas ; elle est toujours en excédent, même si ce résultat positif n'est pas comparable à la situation budgétaire d'un État qui doit s'endetter pour faire face à la crise économique et financière.

Je voudrais rappeler les grandes masses en cause. L'avant-projet de budget de la Commission européenne présenté avant l'été prévoyait 142,6 milliards d'euros d'engagements (1,13 % du Revenu national brut de l'Union européenne) et 130,13 milliards d'euros de paiements (1,06 % du Revenu national brut de l'UE). Cela représente une augmentation de 2,2 % des engagements et 5,9 % des paiements par rapports à 2010. Cet avant-projet était légèrement en retrait par rapport au cadre financier pluriannuel 2007-2013, qui envisageait, quant à lui, près de 143 milliards d'euros d'engagements et 134,3 milliards d'euros de paiements. Le Conseil de l'Union européenne s'est ensuite prononcé pour 141,8 milliards d'euros d'engagements et 126,5 milliards d'euros de paiements, soit 3,5 milliards de moins que la proposition de la Commission. L'aide aux régions les plus défavorisées, l'agriculture et l'aide internationale seraient les premières politiques touchées par ces réductions. Le budget de fonctionnement des institutions européennes serait diminué de 163 millions d'euros. Sept États membres – Royaume-Uni, Suède, Pays-Bas, Finlande, Danemark, République tchèque et Autriche – ont voté contre cette proposition, estimant qu'elle n'allait pas assez loin : ils demandaient de geler le budget au niveau de 2010.

Le Parlement européen, comme il le fait habituellement, a proposé, via sa commission des budgets, de porter les paiements à un niveau beaucoup plus proche du plafond, précisément à 134,14 milliards d'euros en 2011. La position finale du Parlement sera votée lors de la deuxième session plénière d'octobre. Ensuite, la procédure de conciliation entre le Parlement et le Conseil devrait aboutir à un compromis en novembre.

Mais au-delà, c'est déjà le sujet autrement plus délicat des prochaines perspectives financières, pour l'après-2013, qui se profile. Et le dialogue franco-allemand sera évidemment crucial pour forger un compromis inévitablement douloureux. Pourquoi douloureux ? Car l'écart risque d'être plus grand que jamais, pour les grands États comme la France et l'Allemagne, entre le souhaitable et le possible. Entre l'appel à une plus grande efficacité du budget communautaire pour investir dans la recherche et l'innovation, pour accroître l'aide humanitaire et l'aide à la reconstruction, pour déployer une réelle politique étrangère, pour combattre la piraterie, pour réinsérer les Roms, pour soutenir la relance ou pour stabiliser l'euro – j'en passe –, et la nécessité pour chacun de réduire sa contribution nationale et de « maximiser les retours », comme l'on dit assez peu élégamment.

La tentation est forte de déplorer que le budget communautaire limite trop l'ambition de l'Europe, et dans le même souffle, de s'offusquer du poids de la contribution nationale française ou allemande. Il est tellement aisé de moquer l'archaïsme des dépenses communautaires : elles sont accaparées par des aides directes aux agriculteurs et par des subventions à des régions qui ne sont plus, depuis bien des années déjà, les plus pauvres de l'Union. Et pourtant il est très difficilement imaginable, pour la France, de ne plus bénéficier autant de la PAC, et pour l'Allemagne, de ne plus percevoir autant de fonds communautaires pour les Länder de l'Est…

Alors, tandis que le solde net de la France se dégrade régulièrement au fil des années sous l'effet de l'élargissement de 2004 et de la modération des dépenses agricoles, j'ose vous appeler à donner un avis favorable à l'article du projet de loi de finances pour 2011 entérinant ce prélèvement de quelque 18,2 milliards d'euros, supérieur, comptablement, à ce que la France reçoit comme fonds communautaires. De l'ordre de – 5 milliards d'euros aujourd'hui, ce solde net négatif s'établira à – 7,3 milliards d'euros en 2013, au terme des perspectives financières actuelles.

Permettez-moi, en conclusion, d'assortir mon avis favorable de deux explications de vote : en premier lieu, même si la notion de solde net risque fort d'être l'élément incontournable du débat sur les futures perspectives financières qui devrait s'engager au printemps prochain, il ne s'agit que d'un ratio très théorique. Un peu comme si un contribuable mettait en regard les impôts qu'il paie et les allocations qu'il reçoit. Et si l'on dénie toute valeur à l'idée de redistribution au sein de l'Union européenne, alors autant tirer un trait sur plus de cinquante ans d'intégration européenne. En second lieu, la négociation du prochain cadre budgétaire de l'Union doit s'engager dès que possible et répondre enfin à l'objectif de « remise à plat » qui était prévu pour 2009, en dépenses comme en recettes, y compris les soldes et autres correctifs ou « rabais sur le rabais »… Sur ce sujet sensible entre tous, il y aura compromis franco-allemand ou rien.

PermalienPhoto de François Asensi

Tout d'abord, je tiens à souligner que les conditions de travail des commissaires sont tout à fait insatisfaisantes. Nous n'avons pas pu travailler avec le « jaune », mais seulement avec le texte de l'article 46 du projet de loi de finances, qui tient en dix lignes. Je vais donc en rester à des généralités.

Quant au prélèvement prévu pour 2011, il est en stagnation par rapport à celui de 2010, qui était déjà lui-même en baisse de 14% par rapport à 2009. Cela témoigne d'une mise en place d'une doctrine néo-libérale en Europe, avec moins d'Etat et moins de dépenses publiques, dont les conséquences sociales sont fortes, comme on le voit aujourd'hui en France. Le budget communautaire manque d'ambition alors qu'il ne représente qu'environ 1% du PIB de l'Union. Et la politique de relance européenne ne représentait elle-même qu'approximativement 2% du budget de l'Union (soit 5 milliards d'euros).

Quant à la prétention européenne d'examiner le budget de la France, nous y sommes opposés. Un avis d'opportunité émanant des institutions de l'Union serait dommageable pour la France.

L'élargissement de l'Union européenne a été idéologique : les pays de l'ex-URSS n'étaient pas prêts. Le résultat en est qu'aujourd'hui l'Europe n'est pas en mesure d'aider certains de ses membres, comme le Portugal ou la Grèce.

De toute façon, si le Parlement français refusait le prélèvement communautaire, celui-ci serait quand même mis en oeuvre. Cela illustre le rôle mineur du Parlement aujourd'hui.

Pour toutes ces raisons, je voterai contre le prélèvement proposé.

PermalienPhoto de Michel Terrot

Ma question porte sur les fonds communautaires versés à la Roumanie. Quels sont les effets escomptés du plan de rigueur roumain ? Quels sont les efforts de la Roumanie, notamment à l'égard de ses minorités, et en particulier à l'égard des Roms ?

PermalienPhoto de Roland Blum

Il est trop tôt pour répondre à cette question. Mais ce que l'on peut dire, c'est que le montant global des sommes allouées jusqu'ici à la Roumanie, notamment pour l'intégration de ses minorités, avoisine les 80 milliards d'euros, dont seulement 20 milliards ont été utilisés. Il est donc envisagé de mettre en place un comité de suivi pour contrôler l'emploi des sommes versées. Mais à l'heure actuelle, nous ne disposons pas d'informations suffisantes.

PermalienPhoto de Jacques Myard

J'approuve les remarques réalistes du rapporteur sur l'état de l'Union européenne. La construction européenne est en inadéquation avec la mondialisation. Le budget proposé fait trop de saupoudrage et ne va pas à l'essentiel. Le décalage est frappant : on veut plus d'Europe et dans le même temps on ne s'en donne pas les moyens, le budget de l'Union représentant seulement environ 1% de son PIB.

A l'origine, la construction européenne reposait sur un partage des tâches : la fixation d'objectifs au niveau communautaire, et leur mise en oeuvre au niveau des Etats membres. Pourquoi faire remonter les décisions à Bruxelles pour faire redescendre leur exécution au niveau des collectivités locales quand il s'agit de la construction d'une piscine à Biarritz ? Savez-vous que l'audio-guide de l'Abbaye d'Hautecombe est financé par l'Union européenne ?

Si le budget de l'Union est identifié en comptabilité comme un compte de tiers, c'est qu'il y a une distanciation vis-à-vis de l'Union. Ce mode d'identification comptable est l'illustration technique de la distance que la France prend à l'égard de l'Europe. Si l'Europe est un tiers, c'est que ce n'est pas nous !

Au sujet du couple franco-allemand que vous évoquiez dans votre rapport, il faut dire que, depuis 1992, l'Allemagne a joué la carte de la mondialisation en bridant sa consommation, et en améliorant sa compétitivité. L'Allemagne n'achète plus à la France d'abord parce qu'elle vieillit, ensuite parce qu'elle bride sa consommation, et enfin parce qu'elle a compris que l'Union européenne n'était pas de son intérêt. L'arrêt rendu le 30 juin 2009 par la Cour constitutionnelle allemande de Karlsruhe, qui est long de 74 pages, dit trois choses : qu'il n'y a pas un peuple européen, mais des peuples européens, que le Parlement européen n'est pas une instance démocratique et que l'Union européenne ne peut avoir la compétence de la compétence.

Il est clair aujourd'hui qu'il y a une inadéquation : la mondialisation transcende une construction régionale qui n'est plus d'actualité.

PermalienPhoto de Serge Janquin

Je sais gré au rapporteur de nous avoir indiqué les éléments d'incertitude qui pèsent sur l'avis que nous avons à rendre sur un rapport qui ne peut être complet pour le moment. Je salue également son souci de prise de hauteur sur ces sujets.

Le dégagement sur le couple franco-allemand, si l'on peut partager sa nécessité et la volonté de relancer politiquement cet élément, en se focalisant sur des explications psychologiques, me paraît, si ce n'est cavalier, au moins audacieux.

Sans refaire le débat sur la construction européenne, auquel nous appelle notre collègue Myard, on peut relever quelques manquements et incertitudes.

L'Europe n'a pas de projet pour le moment, et manque, par exemple, d'investissements sérieux dans la recherche. L'ensemble des actions européennes mérite sans doute une analyse plus fine, qui viendra plus tard. Mais il n'est pas étonnant que, pour le moment, nos concitoyens ne témoignent pas d'un grand enthousiasme européen.

PermalienPhoto de Roland Blum

Le montant de la contribution est à peu près identique aux années passées, simplement parce qu'il est encadré par les perspectives financières pluriannuelles adoptées en 2006 pour la période 2007- 2013. On ne peut donc pas s'attendre à de grandes fluctuations.

Sur les questions de Monsieur Myard, je rappellerai que ces perspectives pluriannuelles vont être renégociées prochainement pour la période post-2013. Ce sera alors le moment de faire le partage entre les politiques qui doivent être menées au niveau européen, et celles que les Etats membres doivent assumer.

S'agissant de la décision de la cour de Karlsruhe, celle-ci s'est contentée de rappeler le principe de subsidiarité.

PermalienPhoto de Roland Blum

C'est exactement ce sur quoi porte la subsidiarité. Concernant les éléments psychologiques du couple franco-allemand, quelle que soit l'explication que l'on retient, on constate qu'aucune initiative ne se fait sans une impulsion de nos deux pays. Cela a été très clair lors des discussions sur la crise grecque. Mais je respecte les opinions de mes collègues sur le couple franco-allemand.

PermalienPhoto de Hervé Gaymard

Si on se place du point de vue allemand, sur le plan monétaire, deux événements majeurs sont intervenus qui méritent d'être rappelés. D'abord, le choix, fait lors de la réunification, de la parité entre le mark de l'Est et le deutschemark de l'Ouest, décision qui a eu des conséquences majeures sur la politique monétaire allemande et, in fine, sur l'emploi dans notre propre pays. En second lieu, l'abandon du mark pour l'euro, qui a suscité, en l'absence de possibilité de fortement dévaluer l'euro, une forte dévaluation des salaires allemands, obtenue par les réformes Hartz décidées sous le chancelier Schröder, pour restaurer la compétitivité prix des produits allemands. En observant les chiffres des balances commerciales, on constate que l'Allemagne n'a pas seulement gagné des parts de marché dans le reste du monde, mais qu'elle s'est également imposée dans l'Union européenne. Il est donc heureux que certains pays européens aient bien voulu faire le choix de la relance par la consommation pour assurer des débouchés aux productions allemandes.

Il faut par conséquent instaurer un langage de vérité entre la France et l'Allemagne, afin d'éviter que les intérêts de nos voisins d'outre-Rhin ne deviennent objectivement différents de ceux des autres pays européens, dont le nôtre. Il y aura un moment de vérité dans les relations franco-allemandes, sur plusieurs points : le budget européen, l'évolution de l'OMC, notamment. Il est donc indispensable de construire la relation franco-allemande en regardant le futur, et pas le passé.

Concernant le budget communautaire pour 2011, il faut se départir de cette idée, très ancrée en France, que nous serions bénéficiaires nets du budget européen. Cette idée n'est plus vraie depuis plusieurs années, car d'autres pays ont adhéré, qui ont désormais un solde positif important. Le débat qui arrive est donc majeur, et devra porter, entre autres, sur la PAC et la politique de cohésion. Sur le budget agricole, il est tout à fait envisageable de réduire le volume des dépenses en concentrant les efforts sur les périodes de crises, et en arrêtant de saupoudrer des aides lorsque la situation est favorable pour les agriculteurs.

PermalienPhoto de Robert Lecou

Quels sont les sept Etats membres qui n'étaient pas en accord avec les propositions du Conseil ? Jusqu'à quand le rabais britannique, auquel la France contribue de façon importante, va-t-il durer ? Quels sont les montants de dépenses et de recettes concernant la France au sein du budget de l'Union européenne ?

PermalienPhoto de Jean-Paul Lecoq

On a un peu l'impression que ce budget n'est pas un budget de crise. L'Union européenne vit une crise interne, de confiance aussi, qui justifierait un renforcement de la solidarité entre les Etats membres. Il faut s'en donner les moyens et ce budget se confond en fait avec la crise sans être un levier pour que les Etats membres en sortent. Le rapporteur nous dit qu'il faut voter pour le moindre mal, je suis bien sûr d'accord sur le principe, mais il faudrait surtout défendre une autre idée devant le Parlement, avec d'autres moyens pour agir contre la crise. La question reste posée des règles de l'Union européenne qu'on ne respecte plus dans les faits, mais que l'on conserve intactes dans le budget. On a par exemple vu que ce sont des fonds chinois qui vont venir à l'aide de la Grèce. Comment cela se reflète-t-il dans le projet de budget ? Il faut avoir le courage de dire que ce budget n'est pas bon, que ce prélèvement n'est pas bon, et qu'on ne se donne pas les moyens d'augmenter la solidarité.

PermalienPhoto de Jean-Michel Boucheron

Peut-on savoir où en est le programme Galileo ?

PermalienPhoto de Roland Blum

A Robert Lecou, je dirai que les pays qui souhaitaient un gel du budget sont le Royaume-Uni, la Suède, les Pays-Bas, la Finlande, le Danemark, la République tchèque et l'Autriche. Quant au chèque britannique, il existe tant qu'il n'est pas remis en cause par les autres Etats membres. Le débat se fait chaque année plus pressant, mais jusqu'à présent, sans succès. La France s'en préoccupe régulièrement. Il serait évidemment souhaitable de le baisser fortement. Concrètement, l'Union européenne reçoit 20 milliards d'euros de la France et lui verse 13 milliards d'euros. Je ne porterai pas d'appréciation sur les propos de Jean-Paul Lecoq, mais je rappellerai néanmoins que l'aide de l'Union européenne à la Grèce se monte à 750 milliards d'euros. Quant à Galileo, 554 millions d'euros sont prévus à ce titre en 2011.

PermalienPhoto de François Rochebloine

Sur la question des pré-adhésions, il y a une baisse régulière ; quels sont les pays concernés et qu'en est-il de la Turquie ?

PermalienPhoto de Roland Blum

Les pays concernés sont les Balkans occidentaux et la Turquie, le montant global prévisionnel de l'instrument d'aide de pré-adhésion étant de l'ordre de 1,5 milliard d'euros en 2011.

PermalienPhoto de Jean Glavany

Je ferai trois remarques. La première concernant ce qu'a dit Jacques Myard sur le saupoudrage. C'est aussi la responsabilité des Etats membres qui est engagée sur cette question, dans la mesure où ce sont les préfets qui utilisent les crédits de l'Union européenne pour des opérations locales, ce qui leur est fort utile en période de crise budgétaire. Ce n'est sans doute pas bon, mais c'est ainsi. Je remarque aussi que la PAC n'apparaît plus, si ce n'est sous la rubrique « conservation des ressources naturelles », ce qui est piquant quand on sait ce qu'il en est en réalité. Cela étant, même si elle représente toujours aujourd'hui 41,6 % des dépenses, la PAC n'a cessé de diminuer. Il faut combattre l'idée qu'il faudrait la détruire pour pouvoir mener d'autres politiques intégrées. Il y a eu deux temps forts dans la PAC : celui de l'après-guerre, lorsqu'on a dit aux agriculteurs européens : « Nourrissez l'Europe ! » et vingt ou trente ans plus tard, lorsqu'on a soutenu les prix. Ce sont les deux grands contrats de l'Europe avec ses agriculteurs. Ils sont aujourd'hui totalement dépassés et il est important de les relégitimer.

PermalienPhoto de André Schneider

A l'évidence, notre approche diffère de celle des Allemands. Ils ont un sens de l'effort plus développé que le nôtre. La France et l'Allemagne sont unies, mais aussi en concurrence serrée. Tout marche bien lorsqu'elles sont à niveau d'égalité ou lorsque l'Allemagne est en avance sur les positions de la France. Mais quand on heurte certaines idées de l'Allemagne, ou encore lorsque sont face à face deux personnalités fortes, comme Nicolas Sarkozy et Angela Merkel actuellement, il y a problème. Cela dit, il faut évidemment que ce binôme reste le tandem moteur de l'Union européenne.

PermalienPhoto de Roland Blum

Sur la PAC, je partage le point de vue exprimé par M. Glavany. Il n'est pas question pour la France d'abandonner cette politique mais au contraire de continuer à se battre pour obtenir les aides dont nos agriculteurs ont besoin. Sur cette question, nous avons des intérêts communs avec l'Allemagne et une position franco-allemande a été rendue publique le mois dernier.

Suivant les conclusions du Rapporteur pour avis, la commission émet un avis favorable à l'adoption de l'article 46 du projet de loi de finances pour 2011.

La séance est levée à dix-heures trente cinq.