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Commission des affaires culturelles et de l'éducation

Séance du 7 juillet 2010 à 10h00

Résumé de la séance

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La séance

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COMMISSION DES AFFAIRES CULTURELLES ET DE L'ÉDUCATION

Mercredi 7 juillet 2010

La séance est ouverte à dix heures.

(Présidence de Mme Michèle Tabarot, présidente de la Commission)

La Commission des affaires sociales examine le rapport d'information de M. Bernard Depierre, en conclusion des travaux de la mission d'information sur les grands équipements sportifs.

PermalienPhoto de Bernard Depierre

Je souhaite tout d'abord remercier les membres de la mission qui se sont investis tout au long des sept mois qu'ont duré ses travaux, au cours desquels nous avons mené pas moins de quarante auditions et effectué trois déplacements.

Notre rapport fait l'état des lieux du retard alarmant qu'accuse notre pays dans le domaine des grands équipements sportifs couverts. Je reviendrai brièvement sur la problématique spécifique des grands stades, qui présente un caractère moins crucial dans la mesure où, à l'occasion de l'organisation de l'Euro 2016, quatre nouveaux stades verront le jour et huit feront l'objet d'importants travaux de rénovation.

Au cours des dix dernières années, nous n'avons construit aucune grande infrastructure couverte nouvelle. Le Palais omnisport de Paris-Bercy (POPB), qui est la première salle française en terme de capacité avec ses 15 000 places, se situe au vingt-cinquième rang européen et a déjà plus de vingt-cinq ans. Le Palais des sports de Pau, avec 8 000 places, se situe au cent cinquantième rang. Des villes comme Strasbourg, Nantes ou Nancy ont des salles d'environ 6 000 places et se classent au deux cent cinquantième rang.

Ce retard explique que nous n'organisions plus aucune grande compétition nationale de sport de salle. Les prochains championnats du monde de handball auront lieu en Croatie, alors que notre équipe nationale est championne d'Europe, championne du monde et championne olympique. Les championnats d'Europe de volley-ball ne se sont pas déroulés en France en 2007 et ne s'y dérouleront pas en 2012, tandis que les championnats du monde de basket-ball se dérouleront en Turquie cette année et en Espagne en 2014. En effet, nos équipements ne nous permettent plus de répondre aux cahiers des charges des fédérations internationales, même si construire de grandes infrastructures dans la seule perspective d'une grande manifestation sportive n'aurait pas de sens.

En natation, la grande piscine d'Aubervilliers, dont le projet avait vu le jour à l'occasion de la candidature de Paris aux Jeux Olympiques de 2012, n'est pas sortie de terre.

Notre pays ne compte aucune patinoire de plus de 3 500 places, et les joueurs des clubs évoluant en ligue Magnus jouent dans des salles de moins de 1 000 places. Nous ne disposons d'aucun équipement pour le patinage de vitesse et nos joueurs s'entraînent à l'étranger. Si la candidature de la ville d'Annecy aux JO de 2018 était couronnée de succès, nous pourrions alors disposer d'un anneau de vitesse et de deux patinoires de plus de 10 000 places.

Notre pays a vingt ou trente ans de retard, et ce constat a été unanimement dressé dans toutes nos auditions.

Dans le domaine des stades, l'organisation de l'Euro 2016 va être l'occasion pour les douze villes candidates de se doter ou de moderniser des équipements de plus de 35 000 places pour l'accueil du public, des journalistes et des entreprises désireuses de louer des loges. Certaines villes comme Lorient, Valenciennes et Le Mans, sans être candidates à l'accueil des matches de cette compétition, vont également rénover leurs stades.

On constate un décalage important entre le niveau auquel évoluent nos grands clubs de handball, de volley-ball, de basket-ball et de hockey sur glace, et celui des équipements dans lesquels ils jouent. Les communes sont propriétaires des infrastructures dans plus de 85 % des cas et en sont souvent également les exploitantes.

Alors que dans le football, des partenariats public-privé peuvent se mettre en place, les projets d'infrastructures couvertes n'attirent pas les capitaux privés. Les exemples de la grande salle de Villeurbanne ou du grand stade de Lille demeurent des cas isolés, et le plus souvent les projets reposent sur des initiatives des communes ou des intercommunalités.

S'agissant du financement, une salle de 8 000 places suppose un investissement d'au moins 150 millions d'euros. Une ville ne peut s'engager dans un tel projet, par exemple lorsqu'elle dispose d'un club résident, que si elle parvient à réunir d'autres partenaires. Rappelons à cet égard que le montant maximum accordé par le Centre national de développement du sport (CNDS) pour financer une infrastructure sportive atteint en pratique 2 millions d'euros.

S'agissant de l'exploitation, les clubs résidents sont de plus en plus désireux de se la voir confiée, ce qui est parfaitement envisageable à condition qu'ils assurent la polyvalence des usages : l'équipement doit pouvoir accueillir des manifestations culturelles ou des conférences et ses activités doivent être diversifiées afin d'assurer l'équilibre financier de l'exploitation.

Cet équilibre repose également sur la capacité, dès la conception de l'infrastructure, à en faire un lieu de vie avec des bars, des restaurants voire des garderies. Il convient d'envisager l'équipement dans toute sa durée de vie, et non se contenter de ne prévoir qu'une utilisation ponctuelle au coup par coup.

Les manifestations sportives impliquant un club résident ne représentent pas plus de vingt à vingt-cinq soirées par an. Dans tous les grands équipements étrangers, le sport ne représente jamais plus de 50 % des évènements qui y sont organisés. Au POPB, sur 120 manifestations annuelles, seules 30 sont des manifestations sportives.

Notre travail a été nourri par différents rapports : le rapport Arena 2015 de la commission Grandes Salles présidée par M. Daniel Costantini, le rapport de la commission Grands Stades Euro 2016 présidée par Philippe Séguin, le rapport de M. Éric Besson sur la compétitivité des clubs de football français et le rapport de M. Philippe Augier sur les grands événements.

Certains clubs du Top 14 de rugby seraient prêts à financer la construction de stades, les conditions dans lesquelles ils jouent actuellement ne leur donnant pas pleinement satisfaction : le Stade français joue au Stade de France, le club de Toulon au Stade Vélodrome de Marseille, Biarritz et Bayonne leur derby à Saint-Sébastien.

Pour combler notre retard, l'initiative des collectivités territoriales est indispensable, mais elle ne peut se passer de partenariats compte tenu des contraintes budgétaires qui pèsent sur elles.

L'exploitation a vocation à être confiée au club résident, afin d'assurer un meilleur accueil du public, mais aussi des entreprises qui louent des loges et des sièges « VIP », ce qui dans certains grands équipements étrangers peut représenter 20 % à 25 % des places.

Il est également essentiel de réserver des places gratuites destinées à l'accueil d'un public de jeunes, ce qui est certes envisageable dans des salles de très grande capacité, mais plus difficile dans des équipements plus modestes.

Les subventions publiques versées aux clubs sont plafonnées et ne peuvent excéder 2,3 millions d'euros. Pour équilibrer leur budget et soutenir la comparaison avec leurs partenaires européens, il est essentiel pour les clubs de pouvoir valoriser une grande infrastructure dédiée à leur pratique. Les joueurs de l'équipe de France de handball jouent pour un tiers d'entre eux à l'étranger, pour un tiers dans des salles de bon niveau et pour un dernier tiers dans des complexes évolutifs sportifs couverts (COSEC) ! Aucun club de basket-ball ni aucun club de volley-ball n'a récemment atteint une phase finale d'Euroligue ; le club de handball de Montpellier parvient à tirer son épingle du jeu et bénéficiera d'ailleurs dès la rentrée d'une grande salle de 9 000 places.

Environ cinq projets sont en cours de finalisation à Montpellier, à Dunkerque, à Bordeaux, à Marseille et à Orléans, tandis que les projets de Villeurbanne et d'Aix sont moins avancés.

En 2020, nous risquons le statu quo si l'État et les collectivités ne prennent pas le problème à bras le corps.

Équipements désuets, inadaptés aux exigences d'une retransmission télévisée, offrant de trop faibles capacités d'accueil du public et des entreprises locataires de loges : le constat est alarmant.

Il explique l'affaiblissement de notre capacité à organiser de grandes manifestations internationales, malgré les efforts accomplis notamment par M. Frédéric Jugnet, délégué interministériel aux grands évènements sportifs.

Seuls deux présidents de fédérations sportives françaises siègent dans les instances sportives internationales et l'influence de la France y est malheureusement marginale.

Quelles que soient les formules juridiques et financières retenues – exploitation par un club ou une société, il appartient aux collectivités territoriales de mettre en oeuvre des projets d'infrastructure.

Je regrette le rendez-vous manqué des Zéniths : notre pays compte 18 salles d'une capacité comprise entre 6 000 et 12 000 places dont la conception a malheureusement totalement privilégié les spectacles musicaux au détriment des compétitions sportives. Seul le Zénith d'Orléans est utilisé pour l'accueil de manifestations sportives, en l'occurrence de basket-ball.

J'ajoute qu'en tout état de cause, notre mission a jugé que les équipements temporaires ne constituaient pas une solution satisfaisante : coûteux, ils ne nous permettront pas de combler durablement notre retard.

Il convient d'aller vers des équipements polyvalents, lieux de vie pour le public, les pratiquants, les clubs, les locataires de loges et de places « VIP ». L'État devra y consacrer des financements, comme il l'a fait pour les stades dans le cadre de l'organisation de l'Euro 2016.

Il conviendra d'éviter l'écueil que nous avons constaté lors de notre déplacement à Athènes : des installations construites pour les JO de 2004, seuls un grand stade et une salle sont exploités dans des conditions satisfaisantes, grâce à deux clubs résidents, le Panathinaïkós et l'Olimpiakos, les autres équipements étant soit à l'abandon soit consacrés à d'autres usages que l'utilisation sportive. En dépit d'un parc d'équipement sportif très important, seules deux compétitions internationales ont été organisées à Athènes depuis la fin des JO. Il convient de ne pas construire de grandes infrastructures sportives dans la perspective d'une seule manifestation, mais de les bâtir pour permettre aux clubs résidents de fonctionner dans de bonnes conditions et pour, à terme, attirer de grandes manifestations.

PermalienPhoto de Michèle Tabarot

En votre nom, mes chers collègues, je salue la présence d'une délégation de l'Assemblée nationale du Liban, conduite par M. Simon Abiramia, président de la commission de la jeunesse et du sport, dont le champ de compétences nous est bien familier !

PermalienPhoto de Pascal Deguilhem

Mon propos reprendra les arguments développés dans la contribution de notre groupe au rapport de la mission.

Nous partageons le diagnostic du rapporteur : la France manque de grands équipements sportifs qui lui permettraient d'accueillir les grandes compétitions internationales. Cela étant dit, ce rapport est un rapport qui s'ajoute à d'autres portant sur le même sujet…

Pour nous, la question des infrastructures sportives ne peut être posée sans que soit reconnue la nécessité de les adosser à la puissance publique, seule garante de l'intérêt général. C'est pourquoi nous nous interrogeons sur la pertinence d'une approche fondée sur la recherche de la rentabilité des équipements, très présente dans le rapport.

Le diagnostic, lui, est évident : nous souffrons d'un déficit en matière de grands équipements sportifs, une réalité maintes fois relevée, notamment par le rapport Costantini. Dans le même temps, ce déficit traduit une autre réalité, celui de « l'étranglement » des financements de l'État et les collectivités locales.

Par ailleurs, la question des grands stades, qui a été exclue par la mission, au motif de la mobilisation annoncée pour l'accueil de l'Euro 2016 – laquelle représente un investissement de 1,7 milliard d'euros, l'État prenant en charge moins de 9 % de cet effort –, mérite d'être posée. En effet, les collectivités territoriales devront fournir une part substantielle de cet effort. Dans ces conditions, les collectivités publiques doivent-elles s'engager dans le financement de telles infrastructures alors qu'elles seront, au bout du compte, gérées par des opérateurs privés, poursuivant leurs propres intérêts ?

En réalité, la question de l'intérêt général se pose dès lors qu'il est fait appel au financement public. L'enjeu que représente l'organisation d'une grande compétition est évident. Mais il doit être également apprécié au regard d'équilibres financiers précaires et de retombées économiques difficilement mesurables.

L'exemple des infrastructures grecques, laissées à l'abandon, devrait nous faire réfléchir. Plus parlant encore est celui du Portugal, pays dans lequel on peut constater une incapacité à entretenir des infrastructures construites il y a dix ans et où on se demande s'il ne faudrait pas les démolir.

En outre, les exigences des organismes internationaux en matière d'infrastructures ne cessent de s'accroître.

Je note aussi que le rapport appelle au développement des infrastructures couvertes pour les sports de salle.

Mais faut-il fournir tous ces efforts quand les recettes bénéficient à des intérêts privés ? J'observe d'ailleurs que le « bloc communal » assure, à lui seul, les trois-quarts du financement public du sport français, sa contribution étant supérieure à 8 milliards d'euros.

En ce qui concerne le CNDS, le rapport propose de doubler l'enveloppe qui lui est attribuée. Mais pour faire quoi, étant donné que la part prise par les grands équipements dans une enveloppe déterminée est faible ? Si c'est pour donner davantage à ces infrastructures, cela réduit d'autant les subventions accordées aux autres activités que finance le centre.

De plus, si l'accueil d'une grande compétition engendre des retombées, il faut bien reconnaître que les équipements construits se révèlent souvent surdimensionnés par rapport aux besoins locaux. Quelle est l'utilité locale d'une infrastructure destinée à accueillir un grand événement tous les deux ou quatre ans ? Le jeu en vaut-il la peine ?

En ce qui concerne la médiatisation des sports de salle, elle est, évidemment, essentielle pour assurer le développement des grands équipements. Mais elle est aujourd'hui insuffisante et doit être renforcée.

En résumé, nous partageons le diagnostic du rapporteur, mais sommes plus réservés sur ses conclusions : rien ne peut se faire sans l'argent public, et les recettes reviennent à des intérêts privés. Mais il est regrettable que les collectivités soient perçues comme des financeurs et non des « receveurs ».

PermalienPhoto de Jean-Philippe Maurer

Je souhaiterais féliciter le rapporteur pour son travail qui n'est certainement pas un « rapport de plus ». Il pourrait marquer un trait d'union entre les différents acteurs concernés et souligne, à juste titre, l'écart entre la France et des pays moins riches qui ont su développer leurs grands équipements. Ceux-ci ont en effet compris que ces infrastructures sont essentielles à l'aménagement du territoire et sont des catalyseurs du développement local.

Même si, dans notre pays, certaines disciplines se sont engagées comme le rugby, avec succès, dans cette dynamique de liaison entre le public et le privé, partenaire clef pour l'État et les collectivités locales, elle doit être facilitée. La réflexion engagée au travers de ce rapport pourrait connaître une nouvelle étape, à travers l'organisation d'un colloque avec la ministre de la santé et des sports, sur le nouveau modèle économique à mettre en place.

En effet, il ne faut pas s'enfermer dans un modèle unique, mais montrer que la porte est ouverte.

Notre discussion rejoint un autre thème : celui de la place du sport dans la société. Le sport jouit, encore aujourd'hui, d'une moindre reconnaissance que la culture. Or, cette vision très française conduit à une impasse et nous appauvrit. En effet, la culture et le sport sont des facteurs de rassemblement, qui développent tous deux le sentiment d'appartenance à une société et de cohésion : le sport, à l'instar d'un orchestre philharmonique, est générateur d'harmonie. Aussi, loin d'être un « rapport de plus », disposons-nous d'une contribution qui rendra possible l'avènement d'un nouveau modèle économique du sport.

PermalienPhoto de Marie-George Buffet

Je partage le diagnostic du rapporteur sur la faiblesse structurelle de notre pays en matière de grands équipements sportifs, que l'on pourrait d'ailleurs étendre à la plupart des équipements sportifs, souvent vieillissants, comme les piscines par exemple. N'opposant pas la pratique amateur à la pratique de haut niveau, je pense que nous avons besoin d'équipements aptes à accueillir des compétitions internationales. Il est nécessaire que les représentants français au sein des organismes internationaux en soient conscients. Le Comité national olympique et sportif français (CNOSF) vient d'ailleurs de les réunir pour les mobiliser sur un meilleur niveau d'obtention par la France de l'organisation des ces grands événement sportifs.

Je regrette cependant l'impasse qui est faite dans le rapport sur les financements publics, car il me semble nécessaire d'adosser le développement du sport, qu'il soit de masse ou de haut niveau, à la puissance publique. Tout laisse penser que le prochain budget des sports sera faible, de même que les moyens du Centre national pour le développement du sport (CNDS), la part des prélèvements sur les jeux en ligne qui lui est attribuée étant restée, malgré nous, très faible, pour atteindre 1,8 % seulement des sommes misées. Ancien ministre des sports, je sais la difficulté de défendre les moyens qui leur sont consacrés. Or, il n'y aura pas de grandes infrastructures sportives si l'État ne joue pas son rôle aux côtés des collectivités territoriales.

S'agissant de ces dernières, le projet de loi de réforme des collectivités territoriales actuellement débattu au Parlement leur confie des compétences renforcées dans le domaine du sport, comme dans ceux de la culture ou du soutien à la vie associative, ce qui est une bonne chose si les collectivités disposent des moyens pour les exercer. Mais sans financement adapté, ces compétences dans le domaine sportif, comme leur rôle dans la réalisation des grands équipements seront sans objet, alors même que les collectivités sont conduites à intervenir dans de nombreux autres domaines de la vie sociale. Les financements doivent donc être à la hauteur de la place que l'on assigne au sport comme l'un des principaux éléments de l'épanouissement individuel dans un cadre favorisant parallèlement le rapprochement entre les individus qui composent la Nation.

En revanche, en matière de gestion et de financement par des investisseurs privés, le rapport soulève trois questions. La première vient de la difficulté de concilier rentabilité, profitabilité et implantations de grands équipements multifonctionnels couverts. Le rapport souligne « qu'un examen sérieux du marché, notamment du spectacle, est nécessaire afin de ne pas aboutir à sa saturation, qui serait préjudiciable à tous ». On introduit donc des critères qui sont très éloignés des besoins sportifs.

La deuxième question a trait au calendrier sportif : l'aléa de l'usage des équipements lié au caractère lui-même incertain des résultats ne peut être ignoré, comme on vient de le constater… L'effort que peuvent consentir les fédérations et les clubs en matière de programmation de l'utilisation des installations ne peut donc qu'être très relatif.

Le troisième élément d'inquiétude porte sur le coût de l'utilisation des grands équipements pour les fédérations sportives, qu'il ne faut pas sous-estimer. J'ai ainsi en mémoire des discussions animées avec la Fédération française de rugby sur les frais d'éclairage du Stade de France. On sait également que certaines fédérations envisagent de se retirer de l'Institut national du sport, de l'expertise et de la performance (INSEP), le partenariat public-privé qui s'y met en place en rendant le coût prohibitif pour elles. Il serait donc nécessaire d'obtenir des garanties des investisseurs sur un niveau acceptable de coût pour les clubs résidents ou les fédérations sportives qui utilisent les équipements qu'ils financent.

Enfin, le rapport souligne à juste titre la nécessité d'une planification de l'implantation des grandes infrastructures en harmonie avec le maillage des équipements de proximité. Je viens d'animer dans les Landes un débat sur la pratique sportive où une championne rappelait que la pratique du basket-ball s'était développée grâce aux salles paroissiales et indiquait que la création d'infrastructures centrales plus importantes ne compensait pas la disparition de celles-ci.

PermalienPhoto de Michel Herbillon

Le rapport comme sa présentation par notre rapporteur sont extrêmement intéressants. Le constat accablant qu'il dresse n'est que trop vrai et le retard en matière d'implantation comme de qualité des équipements sportifs est préoccupant : structures vieillissantes et inadaptées au public comme aux retransmissions télévisées, accueil souvent désuet, alors que les éléments positifs sont rares, le dernier équipement sportif d'importance étant le Palais omnisports de Paris-Bercy, construit il y a près de trente ans et qui n'occupe que le vingt-cinquième rang en Europe. Au-delà de ce diagnostic, les propositions qui sont faites sont pleines d'intérêt, comme l'implantation d'équipements sportifs polyvalents. Je me demande cependant jusqu'où peut aller cette polyvalence en matière sportive comme entre le sport et d'autres types d'activités. Quelles sont les priorités que le rapporteur établit pour combler le retard de notre pays en matière d'équipements sportifs ?

PermalienPhoto de Patrick Roy

Je partage le constat alarmant du rapporteur sur l'état des équipements sportifs mais j'ai été particulièrement sensible à la volonté d'offrir aux jeunes des accès gratuits, ce qui suppose toutefois d'en accroître les capacités d'accueil. En revanche, l'analyse des modes de financement des équipements suscite des réserves et des inquiétudes. Les collectivités territoriales sont dans une situation financière de plus en plus délicate, alors que la participation de l'État reste très faible dans le domaine sportif. Or, la France présente des territoires aux situations très disparates, les écarts se creusant. Dans un tel contexte, ne serait-il pas opportun, plutôt que de renforcer les équipements des villes ou des agglomérations déjà favorisées, d'en développer l'implantation là où ils pourraient constituer un facteur important d'aménagement et de redynamisation des territoires, porteur d'espoir pour demain ?

PermalienPhoto de Jean Roatta

Comme mes collègues, je remercie le rapporteur et les membres de la mission pour la qualité de leur travail. Je souhaiterais cependant donner une information complémentaire : la ville de Marseille dispose d'une patinoire de 7 000 places, qu'elle a financée, mais que je n'ai pas vu figurer dans la liste des grands équipements qui est présentée en annexe du rapport. J'ajoute qu'elle est modulable.

L'organisation en France de l'Euro 2016 est importante, compte tenu en particulier de ce qui vient de se produire lors de la Coupe du monde de football en Afrique du Sud. Des stades sont à construire et le conseil municipal de Marseille devrait voter lundi 12 juillet la rénovation du Stade Vélodrome pour 273 millions d'euros. Ce stade municipal est implanté sur un site qui comprend 10 hectares de terrains utilisables pour développer des équipements supplémentaires, en particulier, comme le suggère le rapport, en faveur du monde amateur. Le financement est assuré pour 100 millions d'euros par l'ensemble des collectivités territoriales concernées. Lors de son audition par la commission, la secrétaire d'État chargée des sports a précisé que l'État contribuerait à hauteur de 150 millions d'euros à la rénovation de huit stades et la construction de quatre autres, ce qui n'est pas beaucoup.

En outre, l'utilisation des stades municipaux ne profite qu'aux fédérations, qui bénéficient des retombées financières, publicitaires et médiatiques, alors qu'au lendemain des épreuves, il revient aux seules collectivités de gérer les problèmes. 2016 doit être un succès, mais les collectivités territoriales qui y contribueront devraient elles aussi en bénéficier. Il serait intéressant de connaître la position de la Fédération française de football sur ces questions de financement, et notre commission devrait en débattre.

PermalienPhoto de Marcel Rogemont

Bien sûr, nous sommes tous convaincus de l'intérêt de ce rapport d'information. Nous partageons la constatation du sous-équipement en matière sportive. Pour autant, il convient d'en connaître les causes. Les exemples cités par mes collègues incitent à la réflexion. La question de la participation de la ville de Rennes à l'Euro 2016 s'est posée. La construction des 6 000 places supplémentaires requises dans le stade aurait coûté environ 100 millions d'euros. La dépense était gigantesque au regard des gains attendus, alors que le financement global de l'État était fixé à 150 millions d'euros pour l'ensemble des opérations liées à cet événement. On ne peut s'en tenir à la double constatation d'un sous-équipement sportif et d'un sous-financement de l'État.

Dans ces conditions, peut-on juger suffisant le prélèvement de 1,8 % sur les recettes de la Française des jeux ? Ne pourrait-il être porté à 2,5 % ou 3 % et ainsi permettre à l'État de disposer d'une masse financière supérieure aux financements marginaux qu'il consacre actuellement aux équipements sportifs ? Le Centre national pour le développement du sport (CNDS) dispose, si j'en crois le rapport, de 50 millions d'euros pour 2010, somme dérisoire au regard des coûts de construction de la moindre salle de sports. Ces données traduisent l'absence de politique réelle de l'État dans le domaine des équipements sportifs. Cette réflexion complète celle de notre collègue Jean Roatta sur l'absence de retour des bénéfices des fédérations utilisatrices des équipements financés par les collectivités territoriales.

Quant au modèle économique dans lequel s'inscrit le rapport, il convient de remarquer que le sport y est minoritaire. L'accueil du sport dans les équipements sportifs repose en fait sur le développement des activités extra-sportives. Sa place risque donc logiquement de s'y trouver de plus en plus marginale, l'attribution des locaux étant évidemment prioritairement accordée aux activités les plus lucratives. En outre, comme l'ont déjà souligné plusieurs collègues, un équipement polyvalent impose une planification, contradictoire avec le déroulement de nombreux évènements sportifs, souvent décidés au mois de juin pour le mois de septembre, contrairement aux saisons culturelles par exemple, qui se préparent une ou plusieurs années à l'avance. Comment gérer ensemble des activités destinées à rentabiliser des équipements sportifs et leur maintenir leur finalité sportive ? Soit le modèle économique cité n'existe pas, soit il devra être précisé.

PermalienPhoto de Jacques Grosperrin

Si la construction des Zéniths – dont chaque ville voulait se doter – a pu constituer une erreur, c'est en raison de l'évolution des contraintes qui, de plus en plus nombreuses, ont pesé sur les fédérations sportives et ont contribué à l'inadaptation de ces salles aux compétitions sportives. L'exemple doit donc nous pousser à nous interroger sur la construction de grands stades qui pourraient, dans vingt ou trente ans, ne plus répondre aux exigences des fédérations internationales.

Je note que dans la perspective de l'Euro 2016, 150 millions d'euros seront consacrés à la rénovation et la modernisation des stades. Ne peut-on profiter de ces financements, en renforçant éventuellement les partenariats, pour y adosser d'autres équipements sportifs – une grande salle de handball ou de basket-ball, par exemple –, qui bénéficieraient ainsi de leurs aménagements extérieurs, comme les parkings, dont les coûts importants seraient ainsi mutualisés ?

Quant aux grands événements sportifs, s'ils sont souvent avancés par les clubs pour justifier leurs demandes d'équipements auprès des intercommunalités, ne serait-il pas préférable que ces événements soient d'un niveau international ? Je rêve, quant à moi, qu'avec un financement européen, l'Euro 2016 puisse se dérouler dans les grandes capitales européennes. Cela permettrait une meilleure harmonisation ainsi qu'une certaine polyvalence qui permet de compléter les financements grâce aux actions culturelles même si elle impose un partage du calendrier. L'opéra Nabucco qui va être donné au Stade de France prochainement est l'exemple à suivre.

PermalienPhoto de Michel Ménard

Quels équipements sportifs ? Pour qui ? Et pour quoi faire ? Si la mission a travaillé sur les grands équipements, je m'associe aux observations de Mme Marie-George Buffet sur le manque crucial d'équipements pour irriguer l'ensemble du territoire et sur le vieillissement d'un grand nombre de ceux qui existent. Alors que les deux tiers des financements de ces équipements sont portés par les collectivités locales – des communes, majoritairement –, ces derniers devraient être davantage employés pour des équipements de proximité dédiés à une pratique sportive pour tous, en particulier scolaire, tandis que le financement de l'État ou celui des partenaires privés devrait servir avant tout aux grandes manifestations et aux compétitions de très haut niveau.

Ainsi que l'a souligné notre collègue de Marseille, il n'est pas normal que ces très grands équipements soient subventionnés par des collectivités locales, même si nous pouvons nous réjouir d'accueillir l'Euro 2016. L'importance des financements nécessaires à la participation des grandes villes à des équipements sportifs internationaux explique que ces dernières ne présentent pas leur candidature. Ainsi à Nantes, la mise aux normes exigée – sièges de 50 cm de large au lieu de 46 cm, agrandissement de vestiaires ayant pourtant accueilli les joueurs de la Coupe du monde de rugby 2007, espaces « VIP » – d'un stade construit en 1984 aurait nécessité 100 millions d'euros.

Le groupe socialiste, radical et citoyen a donc rappelé dans sa contribution qu'il serait nécessaire que l'UEFA revoit ses exigences : il n'est pas normal que pour accueillir deux matches dans un stade, soient imposées des normes démesurées dont le coût est excessif – je parle ici de dizaines de millions d'euros – et qui sont destinées à permettre l'accueil de quelques milliers de spectateurs supplémentaires pour des événements télévisés. Sur ce sujet des normes, quelles que soient les manifestations en cause, il nous faut accomplir un travail en commun avec le mouvement sportif pour refuser que, chaque année, soient imposées de nouvelles règles aux conséquences financières inacceptables pour les collectivités locales.

Enfin, je reconnais la nécessité d'une polyvalence des équipements, laquelle est une condition essentielle pour que ces derniers, à défaut d'être viables, ne soient pas trop déficitaires.

PermalienPhoto de Xavier Breton

Au sujet de la polyvalence, je souhaiterais savoir si elle se fait couramment : ne pose-t-elle pas aux clubs résidents un problème de compatibilité avec leurs activités liées aux taux d'occupation et aux calendriers des uns et des autres ?

Par ailleurs, en ce qui concerne la répartition des équipements sur le territoire, si les grands équipements doivent effectivement être implantés en des lieux où les publics sont les plus nombreux, ne risque-t-on pas de ne les concentrer que sur certaines grandes villes ? Quelles réflexions ont été suscitées sur ce sujet au niveau des métropoles et des régions pour obtenir une meilleure répartition des équipements ?

PermalienPhoto de Régis Juanico

Je me réjouis que nous parlions aujourd'hui de politique sportive et que nous oubliions nos précédentes auditions focalisées sur les mésaventures de l'équipe de France de football en Afrique du Sud. Il existe, en effet, et en ce moment même, de nombreuses autres manifestations sportives très importantes : la ligue mondiale de volley, le championnat du monde de basket, alors que se profile la préparation des championnats d'Europe d'athlétisme. Ainsi que le rappelait, M. Daniel Costantini, lors de la remise de son rapport Arenas 2015, depuis 1993, nos équipes nationales de handball, de basket et de volley ont apporté vingt et un podiums dont neuf médailles d'or à notre pays. Ce bilan exceptionnel devrait nous aider à ne pas nous focaliser sur un seul sport.

J'aimerais vous interroger, monsieur le rapporteur, sur la médiatisation et la visibilité des événements sportifs en salle sur le service public de la télévision : j'aimerais qu'à l'occasion de la prochaine audition de M. Rémy Pflimlin par notre commission, il soit interrogé sur la retransmission des grandes finales de sport en salle décidée souvent du jour au lendemain, ce qui est inacceptable, et sur l'accessibilité de ces événements au plus grand nombre des Français.

Je m'interroge également sur le fait que pour avoir de grands équipements sportifs, il faut un grand plan financier de mobilisation – dont je préconisais l'adoption dans mon rapport thématique de l'an dernier sur Sport et santé –, un plan doté de financements exceptionnels, assis sur des prélèvements exceptionnels. Nous reviendrons sur ce point lors de notre débat sur le budget 2011 mais nous pourrions d'ores et déjà nous mettre tous d'accord pour défendre des amendements tendant à relever le taux de 1,8 % à 2,5 % par exemple, des prélèvements sur les paris sportifs en faveur du Centre national pour le développement du sport (CNDS) et à accélérer la mise en place des prélèvements sur les paris en ligne. Si, en effet, nous ne disposons pas de 100 à 150 millions d'euros supplémentaires pour les grands équipements, il ne pourra pas y avoir de plan ambitieux de construction. Les prélèvements proposés ne constituent pas d'ailleurs une hausse de la fiscalité mais une simple participation des paris que même M. Christophe Blanchard-Dignac, président de la Française des Jeux, encourage. À ce propos, je regrette que le plan de relance, qui aurait pu consacrer quelques centaines de millions d'euros aux équipements sportifs, n'ait pas été sollicité, d'autant que Mme Christine Lagarde, ministre de l'économie, de l'industrie et de l'emploi, a récemment déclaré, à Aix-en-Provence, que 4 milliards d'euros restaient inutilisés. Dès lors, ne conviendrait-il pas de demander au Gouvernement de les consacrer aux équipements sportifs et au sport ?

PermalienPhoto de Françoise Guégot

Je souhaite soulever le problème de la répartition des compétences qui se pose aux collectivités territoriales : comment doivent-elles gérer la complémentarité du service public sportif s'adressant à tous et formant des jeunes avec le sport professionnel ? Je pense que l'organisation sportive a beaucoup évolué en France depuis cinquante ans : même si perdure un modèle de délégation de service public aux fédérations sportives, il est difficile de distinguer ce qui relève du service public et ce qui relève de l'économie de marché. Aujourd'hui, et je rejoins sur ce point M. Régis Juanico, dans plusieurs sports, nous avons d'excellentes équipes et il nous serait utile de disposer d'une véritable analyse sur le positionnement du sport professionnel par rapport au sport pour tous, sachant que parfois la cohabitation des deux est difficile et en étant conscient des difficultés liées, ainsi que l'a rappelé un de nos collègues, au vieillissement de la population et au mauvais maillage du territoire. Je suis ainsi effarée de voir la multiplication des clubs sportifs de même niveau dans des communes voisines alors qu'une intercommunalité pourrait être plus efficace.

Il paraît évident que le financement, notamment celui du sport professionnel dont la visibilité médiatique est un élément important, ne peut pas s'appuyer que sur les seuls financements des collectivités locales et de l'État, surtout en cette période de crise financière. Il faut donner du souffle aux clubs professionnels. Outre les prochains états généraux du football, nous sommes à un moment important pour l'avenir de l'organisation du sport en France, et il nous faut absolument réfléchir à la définition du modèle sportif que nous voulons élaborer aujourd'hui pour le sport professionnel et le sport pour tous ainsi qu'au rôle du service public.

PermalienPhoto de Gilbert Mathon

Je m'inquiète de la proposition du rapport d'attribuer la gestion des grandes infrastructures sportives aux clubs professionnels résidents ou à des sociétés d'exploitation. Pourquoi les collectivités territoriales et en premier lieu les communes qui en sont les principaux financeurs, en investissement et en fonctionnement devraient-elles leur concéder des structures dont certaines ont une vocation mixte : manifestations sportives de haut niveau, pratique du sport amateur, activités de loisirs ?

PermalienPhoto de Gérard Gaudron

Je tiens à souligner la qualité de ce rapport mais je partage l'avis de Mme Marie-George Buffet et M. Marcel Rogemont selon lequel il sera plus facile de trouver des investisseurs pour financer de grands équipements dans les grandes villes telles Saint-Denis que dans des villes plus petites ; s'il n'y a pas un développement économique important autour des projets, les stades ne seront pas construits, ces derniers produisant des effets de levier économique au-delà de leur environnement immédiat et je vois donc mal l'implantation de stades au milieu des champs. Je confirme pour ma part la nécessité d'une polyvalence de ces équipements mais je crains que les temps d'installation des spectacles et leur durée de programmation soient souvent incompatibles avec celle des manifestations sportives dont la gestion est incertaine car dépendant des résultats des matches. Quant au financement des opérations, le financement de l'État me paraît indispensable pour assurer une équité sur tout le territoire. Je terminerai mon intervention par une question : bien que la candidature de Paris aux Jeux Olympiques n'ait pas été retenue, que deviennent les projets d'équipements sportifs qui devaient être créés à cette occasion et plus précisément qu'advient-il du projet de construction d'un vélodrome à Saint-Quentin-en-Yvelines ?

PermalienPhoto de Philippe Meunier

Je voudrais proposer une correction de la page 19 du rapport au sujet du projet de construction de l'OL Land à Décines : il ne s'agit pas d'un projet privé, comme le sont les recettes attendues par M. Jean-Michel Aulas, président de l'Olympique Lyonnais : sur les 700 millions d'euros que coûtera le projet, la moitié sera payée par les contribuables tant nationaux que de l'agglomération lyonnaise et du département. Je reconnais que M. Jean-Michel Aulas possède une excellente équipe de communicants et de lobbyistes mais il y a là un véritable problème de fond relatif, comme le soulignait notre collègue Jean Roatta, à la cohabitation de financements publics et de recettes privées. Je serais donc très satisfait si nos collègues du groupe socialiste, radical, et citoyen pouvaient user de leurs bonnes relations avec le sénateur-maire de Lyon pour le ramener à plus de mesure pour préserver les contribuables.

PermalienPhoto de Marc Bernier

Le rapport souligne, à juste titre, la difficulté à trouver des financements pour réaliser les grandes infrastructures sportives qui sont gérées par les villes. Au-delà du partenariat public-privé, mis en oeuvre par exemple pour la construction du grand stade de Lille, il convient de rechercher de nouvelles solutions innovantes de financement et de gestion des grands équipements sportifs. À cet égard, on peut signaler que le stade de rugby de Twickenham appartient à la fédération britannique de rugby.

Quelles pistes pourriez-vous suggérer ?

PermalienPhoto de Bernard Depierre

Nous constatons que le budget que l'État consacre au sport s'élève à environ 0,2 % du budget national, niveau stable depuis trente ans, qui ne devrait pas sensiblement progresser, malgré la détermination des responsables sportifs avec lesquels, en tant qu'élu local, j'ai travaillé dans d'excellentes conditions.

J'ajoute que les maires sont très sensibles sur la question des infrastructures sportives, qu'il s'agisse de grands équipements ou d'équipements de proximité.

Je partage l'interrogation exprimée par M. Pascal Deguilhem concernant le financement des grandes infrastructures sportives par les collectivités territoriales, alors que l'exploitation de ces dernières poursuivra sans doute des finalités privées.

Mais il faut tout de même reconnaître que les collectivités territoriales n'ont pas vocation à assurer l'exploitation de telles infrastructures. En tout état de cause, seule la polyvalence des activités est à même de garantir la rentabilité de l'équipement.

Ce constat est partagé par les différents rapports qui ont inspiré nos travaux et que j'ai cités précédemment, et dont je voudrais d'ailleurs saluer les auteurs.

La programmation des grandes infrastructures sportives ne doit pas uniquement viser à répondre aux nécessités de l'organisation d'un seul grand événement, fussent les Jeux Olympiques, mais doit s'inscrire dans une perspective plus large et permanente.

Confier l'exploitation d'un grand équipement à un club résident ne suppose absolument pas que ce soit à titre gratuit. Le versement d'un loyer par le club est une nécessité économique, mais aussi juridique. Sur ce point, on peut revenir sur l'exemple du Stade Vélodrome de Marseille, cité par M. Jean Roatta, dont la réalisation représente un investissement de 173 millions d'euros, la participation de l'État étant limitée à environ 10 millions d'euros. Le financement de cet investissement peut être assuré par les loyers versés notamment par le club résident qui a remporté le championnat de France de football cette année et par les retombées économiques que cette victoire va engendrer, lesquelles seront très certainement bien supérieures aux ressources publicitaires.

Par ailleurs, pour répondre à Mme Marie-George Buffet, l'obsolescence de nos équipements sportifs et les difficultés de financement des grandes infrastructures auxquelles nous sommes confrontés, résultent d'une accumulation de décisions qui n'ont pas été prises au cours des vingt dernières années, le sport n'étant pas apparu comme une réelle priorité pour l'État. Un certain nombre de responsabilités régaliennes ont été privilégiées, au détriment du sport, ce qui implique la difficulté pour les militants sportifs, quels qu'ils soient et malgré leur engagement, à faire vivre le sport professionnel.

On ne saurait toutefois opposer le sport de haut niveau et les pratiques sportives amateur, que les bénévoles, animateurs et formateurs dans les clubs contribuent à développer et qu'il convient de remercier pour le rôle déterminant qu'ils jouent dans la promotion du sport dans notre pays. Encore faut-il rappeler que cette mission s'exerce dans le cadre de la délégation de service public qui est reconnue aux fédérations sportives et que les clubs jouent un rôle essentiel pour l'accueil des jeunes qui, sans cela, seraient exposés aux dangers de la rue. Cette organisation mérite tout de même quelque considération.

Je rejoins M. Régis Juanico pour dire que le développement de grandes infrastructures sportives et la nécessité de rattraper les retards dans ce domaine suppose d'avoir le courage de prendre des décisions pour effectuer des prélèvements supplémentaires, en particulier sur les sommes collectées par la Française des jeux et sur les paris en ligne, afin notamment d'abonder les crédits du Centre national pour le développement du sport, dont la dotation annuelle, fixée à 50 millions d'euros, est insuffisante.

Il convient, en outre, de développer la polyvalence des grandes infrastructures sportives. On peut, à cet égard, regretter que les salles de type Zénith n'aient pas été conçues pour accueillir des activités et des événements sportifs. L'exemple de Pau est caricatural : la ville est dotée de deux équipements distincts, l'un consacré aux activités festives et culturelles, et l'autre aux activités sportives à quelques pas de distance, alors qu'il eût été préférable de créer un seul grand équipement de 10 000 places permettant d'accueillir différentes activités. Des exemples comme ceux-ci, on en trouve ailleurs en France.

En ce qui concerne les grands stades programmés dans le cadre de l'Euro de football 2016, la participation de l'État, actuellement fixée à 150 millions d'euros, apparaît insuffisante.

Par ailleurs, notre pays connaît un déficit d'une quarantaine de grandes salles et il faudra sans doute que l'État s'engage pour combler ce retard. Plusieurs collègues ont évoqué l'inégale répartition territoriale des équipements sportifs. C'est tout à fait juste. Certains grands clubs de handball ou de basket-ball jouent dans des petites villes et dans des infrastructures qui ne sont pas au niveau de la qualité des équipes concernées. D'autres grandes villes sont au contraire pourvues d'un grand équipement de qualité mais n'ont plus de club résident de première division, mon collègue Jacques Grosperrin ne me contredira pas.

Les villes à l'initiative de la création des grandes infrastructures sportives doivent, avec le concours de l'État et des autres collectivités, financer et exploiter les équipements en partenariat avec le secteur privé. Les grandes entreprises du secteur du bâtiment et des travaux publics sont souvent associées à la création et à la gestion de grands stades, mais c'est moins souvent le cas en ce qui concerne les grandes salles. De même, les banques participent plus volontiers au financement des grands stades.

Il est exact, comme l'a dit M. Philippe Meunier, que le projet de Décines n'est pas exclusivement privé. Le coût des places de stationnement et des dessertes des infrastructures est souvent exponentiel et peut parfois excéder celui de l'infrastructure proprement dite.

En effet, les grands équipements doivent être implantés à proximité des centres-ville, en veillant à éviter les nuisances et en prévoyant à cet effet des parkings suffisamment importants pour accueillir les spectateurs, puisque l'on sait que chaque place de stationnement correspond en moyenne à 2,3 spectateurs.

Les grands stades ou salles doivent être des lieux de vie accueillant le siège du club résident ainsi que, à l'instar de ce que j'ai pu observer à titre personnel en Allemagne et en Croatie, des commerces de proximité, des restaurants et des cinémas ainsi que des activités sportives amateur et scolaires. À cet égard, je partage le sentiment de M. Patrick Roy : il convient de veiller à ce que les conventions de mise à disposition des grands équipements sportifs prévoient un quart ou un cinquième du temps d'utilisation des équipements pour le sport scolaire.

France 2 et France 3, qui sont chargés d'une mission de service public, devraient davantage assurer la promotion de tous les sports, et notamment du volley-ball, du basket-ball, du handball et de l'escrime. C'est aussi la responsabilité du service public de la télévision d'assurer la retransmission des grands événements sportifs. On peut d'ailleurs regretter que la décision de retransmettre, sur le service public, la récente finale de la Coupe du monde de handball qui a eu lieu en Croatie ait été prise seulement vingt-quatre heures avant l'événement, afin d'éviter que la retransmission ne soit réservée qu'aux seuls abonnés de Canal Plus.

Tous les sports sont confrontés à des difficultés de financement, à l'exception aujourd'hui du football et peut-être du rugby, qui bénéficie de ressources publicitaires croissantes. Il faut d'ailleurs agir pour que cessent les pressions exercées par les fédérations internationales sur les fédérations nationales en matière de normes, lesquelles peuvent engendrer des coûts exorbitants. Comme il a été dit, il est déraisonnable d'exiger l'agrandissement des vestiaires et l'élargissement des sièges de 47 à 50 centimètres dans un stade où a eu lieu, il y a à peine trois ans, un match de Coupe du monde du rugby.

La commission autorise, en application de l'article 145 du règlement, le dépôt du rapport d'information en vue de sa publication.

La séance est levée à douze heures.