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Délégation à l’aménagement et au développement durable du territoire

Séance du 25 mars 2009 à 18h00

Résumé de la séance

Les mots clés de cette séance

  • carbone
  • communication

La séance

Source

Développement durable et création de valeurs pour l'entreprise : rencontre, ouverte à la presse, entre parlementaires et directeurs du développement durable d'entreprises membres du C3D (collège des directeurs du développement durable engagés).

PermalienPhoto de Christian Jacob

Les membres de la Délégation à l'aménagement et au développement durable du territoire et la Commission des affaires économiques, de l'environnement et du territoire ont participé à l'élaboration du premier projet de loi issu du Grenelle de l'environnement, en attendant l'examen du projet de loi dit « Grenelle 2 », texte dans lequel figure l'objectif dit des « 3 × 20 » : il s'agit de lutter contre le changement climatique en diminuant de 20 %, d'ici à 2020, notre consommation d'énergie ainsi que les émissions de gaz à effet de serre, et de porter à 20 % – voire à 23 % – la part des énergies renouvelables dans noter consommation d'énergie.

Depuis le Grenelle de l'environnement, la crise est intervenue. N'a-t-elle pas relégué ces sujets au second plan ? Pour nous conforter dans l'idée qu'il n'en est rien, il nous a paru intéressant d'écouter le témoignage de directeurs du développement durable de quelques grands groupes, dans des domaines aussi variés que les activités de services, la fourniture d'eau ou encore l'équipement automobile, secteur très touché par la crise. Nous attendons d'eux qu'ils nous indiquent la façon dont leurs groupes mènent une politique de développement durable, et si celle-ci est génératrice de croissance, d'emplois et de compétitivité.

Nous allons d'abord entendre M. Patrick d'Humières, président du Collège des directeurs du développement durable engagés, directeur de la communication et des partenariats, en charge de la RSE (responsabilité sociétale de l'entreprise), qui a beaucoup contribué à l'organisation de cette réunion.

PermalienPatrick d'Humières, directeur de la communication et des partenariats, en charge de la RSE, Les Entreprises du médicament

Je vous remercie infiniment, monsieur le président, d'accueillir quarante directeurs du développement durable, qui représentent l'économie réelle et préparent ce qui sera demain un élément moteur de notre économie.

Nous sommes un peu, dans des secteurs très divers, les soutiers du développement durable. Nous nous sommes réunis au sein d'un collège pour échanger nos expériences et les communiquer à l'extérieur, comme nous le faisons devant vous ce soir. Ces débats nous donnent un cadre de fonctionnement. Demain, les entreprises françaises ne seront fortes que si nous aurons su, avec les acteurs de la régulation que vous êtes, mettre en place un contexte performant. Nous tenons à participer à ce dialogue pour y représenter nos entreprises et exprimer nos convictions.

En matière de développement durable, les entreprises françaises sont particulièrement actives. Elles ont un rôle moteur en Europe, voire dans le monde. Toutes les entreprises, des grands groupes aux entreprises moyennes, ont adopté le modèle économique que représente le développement durable, même si elles l'ont fait à leur vitesse et en gérant leurs contraintes propres. Elles prennent leurs responsabilités en la matière. Il leur faut maintenant transformer cet élan en offres industrielles et en initiatives. L'objectif de notre collège est de faire du développement durable une dynamique de création, de développement et de croissance, pour les actionnaires comme pour les clients et les salariés.

Cette dynamique dément les réactions défavorables que nous avons constatées les années passées, tant aux Sommets de Rio et de Johannesbourg qu'au sein même des entreprises.

Les grandes entreprises se sentent désormais concernées par les enjeux collectifs que sont la lutte contre le réchauffement climatique, la rareté des ressources et le respect des droits de l'homme. Elles ont d'ailleurs engagé un dialogue avec les parties prenantes. Grâce à des leaders comme le Président Chirac, Nicole Notat, la Caisse des dépôts, mais aussi les entreprises Lafarge et Danone, nous avons tous pris conscience qu'il était temps de réagir.

Dès lors qu'elles en ont pris conscience, les entreprises ont étudié de quelle façon elles pourraient innover, faire évoluer leurs offres, mobiliser leurs salariés et faire face à la compétition. Aujourd'hui, elles attendent du Parlement qu'il mette en place la taxe carbone et les moyens de « décarboner » nos produits. Tels sont les enjeux quotidiens des entreprises françaises.

Si certaines d'entre elles – les green tech – ont un rôle moteur, d'autres cherchent encore les moyens d'évoluer. Les consommateurs sont de plus en plus intéressés par les produits verts ou recyclés. Les représentants des industries pharmaceutiques ont exprimé devant nous le souhait que toutes les entreprises se voient imposer les mêmes contraintes.

Les mesures du Grenelle de l'environnement ont incontestablement encouragé les entreprises françaises à aller dans le bon sens. Nombreuses sont celles qui utilisent les mécanismes déjà en place, comme le prêt à taux zéro, en attendant le vote du projet de loi dit « Grenelle 2 ».

Leur volonté est réelle. Toutefois, il leur est difficile d'adopter un nouveau modèle économique à un moment où la crise affaiblit leurs capacités d'investissement et que les Français s'inquiètent pour leur avenir. Pour les aider à réaliser la transition, nous devons redoubler nos efforts, en lien avec les acteurs publics. Les entreprises du secteur de la chimie, par exemple, attendent de l'État qu'il les aide à passer d'une économie traditionnelle à une économie durable et à mettre en oeuvre le programme Reach, qu'elles considèrent comme une évolution positive.

Les parlementaires sont-ils prêts à encourager le développement durable, dont on sait qu'il est l'une des solutions qui nous permettra de sortir de la crise ? C'est d'une nouvelle économie dont nous avons besoin pour gérer les enjeux collectifs considérables et faire face aux défis de demain.

Il est difficile d'amener les entreprises à se sentir solidaires et à adopter des stratégies de changement, mais nous sommes convaincus de la nécessité d'avancer dans cette direction. Nous vous remercions de nous donner l'occasion ce soir de témoigner de ces efforts.

Je vais laisser Mme Sylvianne Villaudière, déléguée générale du C3D, vous présenter l'ensemble des membres du Collège.

PermalienSylvianne Villaudière, directrice fondatrice du cabinet Alliantis

Notre Collège est composé de membres associés, qui interviennent en tant qu'experts, et d'adhérents, qui assument des responsabilités au sein de leur entreprise.

Permettez-moi de vous présenter les personnes qui participent à cette réunion : Mme Alice Audouin, responsable du développement durable chez Havas Media ; Mme Hélène Babok-Haeussler, directrice du développement durable chez Steelcase International ; Mme Bénédicte Barbry, directrice de la communication, chargé du développement durable au sein de Norauto Groupe ; M. Rodolphe Bocquet, membre associé du Collège, directeur du développement durable au sein du Conseil régional d'Aquitaine ; M. Fabrice Bonnifet, membre du conseil d'administration, directeur du développement durable du groupe Bouygues ; M. Denis Burckel, directeur de l'audit, des risques et du développement durable au sein d'ICADE ; M. Thomas Busuttil, membre associé du Collège, qui possède une longue expérience du développement durable ; M. Jean-Louis Chambon, trésorier du Collège, directeur du développement durable du CEA ; Mme Virginie de Chassey, membre du conseil d'administration, déléguée développement durable au sein du groupe PSA Peugeot Citroën ; Mme Françoise Guichard, directrice du développement durable du groupe Gaz de France Suez ; Mme Véronique Lagarde, avocate, responsable du développement durable, du cabinet d'avocats Lefèvre, Pelletier et associés ; M. Michel Laviale, membre associé, qui représente le MEDEF, spécialiste de l'ISR (Investissement socialement responsable) ; M. Emmanuel Soulias, membre du conseil d'administration, directeur de la responsabilité sociale et environnementale de la Macif ; Mme Annick Souyet, membre associé, qui représente le monde de la formation, directrice du développement durable du groupe IGS ; Mme Hélène Valade, membre du conseil d'administration, directeur délégué en charge du développement durable et de la stratégie au sein de Lyonnaise des Eaux ; M. Yves Medina, membre du conseil d'administration, qui représente l'Observatoire sur la responsabilité sociétale.

Chacun d'entre eux va vous indiquer ce que représente le développement durable au sein de son entreprise et quelles sont ses perspectives de croissance.

PermalienPhoto de Christian Jacob

À leur tour, les parlementaires souhaitent se présenter devant vous.

PermalienPhoto de Bernard Lesterlin

Je suis député de l'Allier, membre de la Commission des affaires économiques et de la Délégation, et j'appartiens au groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche. J'ai eu, ce matin même, l'occasion de visiter une entreprise innovante dans le domaine du tri et du recyclage des déchets, qui m'a paru appliquer parfaitement les principes du texte issu du Grenelle de l'environnement, texte qui, je le rappelle, a fait l'objet d'un large consensus.

PermalienPhoto de André Chassaigne

Député du Puy-de-Dôme, je suis membre du groupe de la gauche démocrate et républicaine. Ce groupe est composé de députés communistes – dont je fais partie – de députés Verts, de deux députés du parti de gauche et de deux députés ultramarins. Également membre de la Commission des affaires économiques, j'interviens régulièrement sur les textes relatifs aux questions environnementales. Je suis moi aussi un « soutier », car, comme de nombreux députés, j'étudie les textes de loi et j'essaie de faire mon travail, en respectant certaines convictions, mais dans un esprit d'ouverture. Je me réjouis de l'échange que nous allons avoir, car il va enrichir nos réflexions.

PermalienPhoto de Yves Albarello

Je suis député de Seine-et-Marne et maire de Claye-Souilly, commune proche de l'aéroport Roissy Charles-de-Gaulle. Membre de l'UMP, j'appartiens à la Commission des affaires économiques et je prépare actuellement, avec Christian Jacob, la mise en place d'une nouvelle commission. J'ai, dans ma commune, réalisé un certain nombre de projets liés au développement durable.

PermalienPhoto de Philippe Armand Martin

Député UMP de la Marne et membre de la Commission des affaires économiques, je m'intéresse à tout ce qui touche au respect de l'environnement. Chef d'une entreprise de champagne, je pourrai représenter ce soir le monde de la viticulture.

PermalienTita Valade, directeur délégué en charge du développement durable et de la stratégie d'opinion, Lyonnaise des Eaux

Je suis sensible à ce qui vient d'être dit, car l'échange est au coeur de la notion de développement durable, et celui qui nous est offert ce soir va nous permettre à tous d'avancer.

Les travaux de l'Observatoire mis en place par notre Collège nous permettent d'affirmer qu'il existe un lien entre sortie de crise et développement durable, car ils montrent que la fonction de développement durable s'élargit aux collectivités locales et aux entreprises. Désormais, les directeurs de développement durable prennent part à la stratégie de l'entreprise en matière de progrès et d'innovation, et ils sont nombreux à voir le développement durable comme un levier qui pourrait nous aider à sortir de la crise, notamment en dynamisant la croissance verte, génératrice d'emplois et de nouveaux services.

Vous croyez sans doute que, pour une entreprise comme Lyonnaise des Eaux, le développement durable est une évidence. Il n'en est rien, car la culture d'entreprise n'évolue que très lentement. Mais certains mécanismes fonctionnent bien, ce qui nous amène à penser qu'il existe un lien entre développement durable et croissance.

La réussite d'une politique de développement durable repose sur un partenariat public-privé, avec les collectivités locales comme avec les associations à but environnemental et les associations de consommateurs, qui sont désormais des acteurs de la gouvernance de l'entreprise.

Pour intégrer le développement durable dans la stratégie de l'entreprise, nous avons dû déplacer le coeur de nos métiers. La finalité de Lyonnaise des Eaux, vous le savez, est de traiter l'eau pour la rendre potable. Mais la culture de l'entreprise a évolué : elle inclut désormais la prévention, en amont, laquelle consiste à lutter contre les pollutions des ressources et qui a créé de nouveaux métiers, comme les hydrogéologues, et, en aval, l'assainissement des eaux usées, qui vient s'ajouter aux problématiques liées à la biodiversité. Là aussi, de nouveaux emplois sont créés, notamment les écologues. Si cette révolution fait aujourd'hui la fierté des individus qui travaillent dans l'entreprise, il n'a pas été facile de la mettre en oeuvre.

Globalement, le développement durable a été perçu comme un facteur d'innovation dans son principe même, car un sous-produit est nécessairement une composante d'un autre produit. Il en est ainsi des eaux usées, dont la capacité calorifique est telle qu'il suffit de mettre en place des pompes à chaleur pour chauffer un certain nombre d'habitations. Nous mettons ces innovations technologiques au service de notre clientèle. Convaincus de la nécessité de préserver les ressources, tant sur le plan quantitatif que sur le plan qualitatif, nous donnons la possibilité aux collectivités locales et aux habitants de maîtriser leurs consommations d'eau.

Enfin, nous travaillons en partenariat avec de nombreux acteurs institutionnels pour faire évoluer le modèle économique de l'entreprise. Pour Lyonnaise des Eaux, par exemple, il s'agit de passer d'une logique quantitative, qui consiste à vendre des volumes d'eau, à une logique qualitative, qui consiste à vendre le service que nous rendons à l'environnement. Les Anglo-Saxons excellent dans l'art de passer du quantitatif au qualitatif : c'est dans cette voie que nous devons aller. Ce mécanisme, qui fonctionne en partenariat, est créateur d'emplois et de valeur pour l'entreprise et ses parties prenantes.

PermalienEmmanuel Soulias, directeur de la responsabilité sociale et environnementale, Macif

La Macif, mutuelle d'assurance sans intermédiaires, créée à Niort en 1960, bénéficie d'un mode de gouvernance particulier puisque ses sociétaires sont collectivement assureurs et membres du conseil d'administration. Celui-ci fixe les orientations stratégiques de la Mutuelle en tenant compte des souhaits des sociétaires. Nous connaissons tous l'importance de la gouvernance : à la Macif, la démarche de développement durable est une demande de nos clients.

Le chiffre d'affaires de la Macif illustre ce que sont les enjeux d'une mutuelle d'assurances. À l'origine, la Macif ne proposait que des contrats d'assurance automobile. Aujourd'hui, ils ne représentent plus que 40 % de son chiffre d'affaires, contre 37 % pour l'épargne et les produits financiers, et 10 % pour la santé et l'habitation.

En plus de l'assureur de biens, le groupe Macif comporte quatre satellites : Macif-Mutualité, qui assure la couverture, individuelle et collective, en matière de prévoyance et de santé ; Macif-Gestion, qui gère des actifs financiers ; Mutavie, qui propose une épargne assurance-vie ; enfin, Macifilia, axée sur le transport public de marchandises, l'assurance des PME-PMI et les contrats « groupe ».

Le groupe Macif est donc particulièrement concerné par les dispositions issues du Grenelle de l'environnement, car il va lui falloir répondre aux grands enjeux de demain en matière de construction, de transports et de santé, mais également de gestion des actifs – secteur dont l'impact environnemental et social n'est plus à démontrer.

Afin d'acculturer les dirigeants de notre groupe aux enjeux du développement durable et à notre responsabilité sociale et environnementale, nous avons mis en place un processus qui s'inspire du rapport de l'Institut français des administrateurs. Trois fois par an, le conseil d'administration se réunit pour aborder ces questions, ce qui nous donne l'occasion d'expliquer aux administrateurs ce qui se passe à l'extérieur de l'entreprise et d'évoquer l'évolution de notre métier et ses enjeux pour demain.

Il y a un an a été créée l'Association française de l'assurance, qui rassemble les deux familles de l'assurance : le Groupement des entreprises mutuelles d'assurances et la Fédération française des sociétés d'assurances, qui regroupe les sociétés capitalistiques. L'AFA a créé la commission « Développement durable » qui, en janvier dernier, a mis au point une charte d'engagement de l'ensemble de la profession. Le métier de l'assurance, qui pourtant se caractérise par une certaine inertie, montre donc les signes d'une évolution.

Je vous propose de développer rapidement les trois grands enjeux de la Macif que sont le transport, l'habitat et l'accessibilité des produits financiers et d'assurance.

En matière de transports, comme d'autres sociétés d'assurances, la Macif se doit de passer du business model, qui consiste à vendre des contrats d'assurance, à un autre modèle, susceptible de répondre aux besoins de mobilité. Cette évolution n'est pas anodine et est difficile à faire accepter par des techniciens de l'assurance qui, jusqu'à présent, se bornaient à établir des contrats, et qui voient comme une menace l'émergence de nouveaux modes de déplacement que sont le covoiturage, l'autopartage, le vélo, l'automobile en libre-service. Or, loin d'être une menace, ces nouvelles offres sont une opportunité.

L'habitat, en France, représente un enjeu très important. Le président de la Commission « Développement durable » de l'AFA, par ailleurs président de la Macif, a participé aux travaux du comité opérationnel « Rénovation des bâtiments existants ». Cela illustre la volonté des assureurs de participer à cette évolution du business model : l'assureur ne se contente plus d'assurer l'habitat des ménages, il les aide à mieux gérer leur efficacité énergétique, à réduire la pollution intérieure du bâtiment et à en améliorer le bien-être.

L'accessibilité aux produits financiers et d'assurance consiste à répondre aux besoins de populations pauvres, qui doivent faire des arbitrages quotidiens entre leurs dépenses d'éducation, de nourriture, de logement et de déplacement. La responsabilité de l'acteur financier est de répondre à cet enjeu. Pour cela, il dispose de deux outils : la micro-assurance, qui s'adresse à un certain marché – bottom of the pyramid – et les produits de protection et de prévoyance.

PermalienBénédicte Barbry, directrice de la communication, chargée du développement durable, Norauto Groupe

Norauto Groupe est très présent dans le secteur automobile, puisqu'il assure l'entretien et la fourniture d'équipement automobile. Sa politique de développement durable se fonde sur un engagement sociétal historique. Ses activités se déploient autour de quatre axes : des centres auto, des centres d'entretien rapide de proximité, des magasins de vente de pièces et d'équipement automobile à bas prix, et la vente aux professionnels. Il dirige six enseignes, présentes dans onze pays : Norauto, Midas, Auto 5, Maxauto, Synchro Diffusion et Carter Cash, réalise un chiffre d'affaires de 1,3 milliard d'euros et compte 12 000 collaborateurs, dont un certain nombre d'entrepreneurs franchisés.

Norauto est un groupe familial, qui véhicule des valeurs très fortes et une culture de l'engagement et du mécénat. D'ailleurs, son fondateur est président de la Fondation Norauto. L'environnement est une cause que Norauto défend depuis très longtemps, et il a pris des engagements historiques en matière de lutte contre les nuisances automobiles, de sécurité routière, d'environnement, et, plus récemment, de handicap. Dans le cadre de programmes d'action et de pédagogie, il s'est s'associé à des partenaires historiques tels que l'association « Les Eco-Maires » ou la Fondation Nicolas Hulot. Depuis plusieurs années, il contribue à faire évoluer les enjeux stratégiques de l'automobile et s'engage à intégrer le développement durable au coeur de sa stratégie, avec l'objectif de favoriser la mobilité et de l'adapter aux besoins de chacun.

Norauto Groupe souhaite promouvoir les enjeux du développement durable en confortant la croissance de nos enseignes, sans pour autant abandonner le business model traditionnel, en réduisant l'empreinte écologique des activités et en participant à la lutte contre le changement climatique, en innovant dans le domaine de la mobilité durable, en conduisant une politique responsable en matière de ressources humaines, qui place l'homme au centre de l'activité économique et, enfin, en participant à l'avènement d'une nouvelle économie de services. À ce titre, le Groupe s'engage dans les domaines du traitement des déchets et des services liés à la mobilité.

Norauto Groupe tient à innover en matière de produits et de services. À ce titre, il propose de nouvelles solutions susceptibles d'accompagner l'évolution de l'usage automobile. Il développe ainsi l'éco-entretien, qui consiste à aider les personnes qui n'ont pas les moyens de s'acheter un véhicule neuf à entretenir leur ancien véhicule, fait la promotion de nouvelles gammes de produits écologiques, comme le lavage sans eau, et inaugure de nouvelles offres de mobilité en vendant des vélos, électriques et pliants, et des scooters électriques.

La création de valeur passe par la fidélisation des clients, et le Groupe a un rôle à jouer dans plusieurs domaines : le pouvoir d'achat des automobilistes, la sécurité routière et la préservation de l'environnement ; la compétitivité – il lui faut pour cela anticiper les mutations comportementales et les évolutions de l'automobile et de son usage –; la motivation des équipes et la culture partagée au sein du groupe ; enfin, l'évolution de notre métier et sa pertinence économique.

Au sein de Norauto Groupe, on considère que le développement durable est une réelle opportunité et l'on attend des pouvoirs publics qu'ils consolident les bases d'une croissance verte conforme aux orientations du Grenelle de l'environnement, qu'ils sensibilisent les consommateurs et améliorent la durabilité de l'automobile, qu'ils renforcent l'accessibilité de l'entretien automobile, notamment en améliorant les conditions de la concurrence, et soutiennent les efforts de recherche et développement des différents acteurs de la mobilité.

PermalienHélène Babok-Haeussler, directrice du développement durable, Steelcase International

La société Steelcase International conçoit l'aménagement d'espaces de travail et fabrique du mobilier de bureau, pour les entreprises privées comme pour les entreprises publiques. D'origine américaine, Steelcase est très implantée en Europe et en France : sur 13 000 employés dans le monde – dont 3 000 à l'international, hors Amérique du Nord –, elle en compte 1 300 en France, dont 900 ouvriers.

La société Steelcase a réalisé l'an dernier un chiffre d'affaires de 3,4 milliards de dollars. Pourtant, la part de marché qu'ellel occupe n'est que de 6 % en Europe et de 25 % aux États-Unis. La société distribue ses produits par le biais de concessionnaires, mais également par des circuits de vente directe dans les grandes villes.

Pour une petite industrie comme Steelcase, tributaire de la bonne santé du marché de l'emploi, du secteur immobilier et de l'économie en général, les enjeux du développement durable sont de trois ordres : la santé et le bien-être au travail, la supériorité du produit – consacrée par les bilans carbone et les analyses sur leur cycle de vie – et sa valeur ajoutée – bien qu'il soit difficile de lutter contre les produits à faible coût. L'entreprise, qui développe depuis une dizaine d'années une stratégie d'éco-conception, commercialise aujourd'hui environ 80 % de produits conçus dans le respect des normes écologiques. Ce facteur d'innovation améliore l'image de l'entreprise et permet de réaliser des économies.

Les premiers gains permettront-ils de valoriser les actifs immatériels ? Il est difficile de répondre à cette question. Comment, en effet, évaluer le bien-être au travail, la non-toxicité des matériaux et leur recyclabilité dans un contexte législatif et réglementaire défavorable ? Au cours des huit dernières années, les bénéfices d'ordre environnemental et économique ont convergé et nous sommes parvenus à une certaine maturité. Mais aujourd'hui, malheureusement, nous sommes face à une perspective de décroissance et nous devons investir plus massivement encore dans des matériaux et des processus innovants.

Nous devons donc valoriser notre démarche, tant à l'intérieur de l'entreprise, où nous sommes confrontés à des difficultés de gouvernance, qu'auprès de nos clients, privés et publics, et de nos fournisseurs, dont nous sommes éminemment dépendants.

Pourquoi, messieurs les députés, ne pas surévaluer les critères de développement durable dans les offres publiques d'achat, et porter l'objectif de 20 % à 25 % ? Plus encore que l'aspect financier, la formation des acheteurs est importante : en effet, il ne suffit pas de répondre à certaines certifications. Le dispositif Fillon nous aide énormément, mais il faut renforcer les réglementations relatives aux filières et promouvoir l'éco-conception dans les PME.

Le recyclage des produits en fin de vie crée une valeur supplémentaire. À cette fin, Steelcase a mis en place des partenariats avec des organismes d'insertion, faisant du recyclage une source de créations d'emplois. Cela dit, il faut créer les conditions de la rentabilité de ces filières. Pour cela, il convient de mettre en place des mécanismes coercitifs ou incitatifs, notamment dans les filières bois et plastique qui ne savent pas valoriser les matériaux en fin de vie, et de favoriser les réseaux d'entreprises, en particulier au niveau local, pour favoriser la communication entre des acteurs qui s'ignorent.

PermalienVirginie de Chassey, déléguée développement durable, PSA Peugeot Citroën

En tant que directrice du développement durable chez PSA Peugeot Citroën, je voudrais rappeler pour quelles raisons la crise est plus aiguë dans le secteur de l'automobile.

L'automobile est le deuxième poste de dépenses des ménages. C'est une dépense que l'on peut différer et qui, très souvent, nécessite la mise en place d'un crédit, ce qui n'est pas favorable dans le contexte actuel.

Le secteur automobile, quant à lui, doit supporter d'énormes coûts fixes à long terme, et il a un besoin de liquidités importantes pour financer ses stocks et développer de nouveaux produits.

En dépit des pronostics accablants pour l'année 2009, voire l'année 2010 – baisse de 20 % sur le marché européen, de 10 % sur les marchés des pays émergents – nous n'avons pas, chez PSA, gelé nos projets. Au contraire, il nous semble plus que jamais nécessaire de préparer l'avenir et de mettre à profit cette période de sous-activité. Bonne nouvelle, nos performances environnementales font partie de ce scénario, et plus largement notre démarche de développement durable.

Quelques chiffres : en 2008, PSA Peugeot Citroën a vendu près d'un million de véhicules émettant moins de 130 grammes de CO2 et, depuis trois ans, plus d'un million de véhicules émettant moins de 140 grammes. Notre groupe est incontestablement le leader du secteur. J'ajoute qu'il est le premier déposant français de brevets puisqu'il a déposé à ce jour 961 brevets, portant essentiellement sur la protection de l'environnement.

La démarche de développement durable chez PSA Peugeot Citroën consiste à répondre à trois grands défis : lutter contre les gaz à effet de serre ; concevoir des véhicules émettant de moins en moins de CO2 et répondant à de nouvelles normes de sécurité routière, qu'ils soient destinés au marché français ou aux marchés émergents ; enfin, développer la mobilité dans les zones urbaines, qui ne cessent de croître.

Ce n'est qu'avec les autres acteurs économiques que nous pourrons relever de tels défis. Le développement durable a d'abord consisté à prévenir les risques, qu'ils soient liés à l'image de l'entreprise, économiques ou environnementaux, mais la crise nous invite à agir, d'autant que les consommateurs ont mûri. Aujourd'hui, les États se mobilisent et agissent par le biais de nouvelles réglementations et d'incitations fiscales. Nous sommes passés d'une logique de prévention des risques à une logique de développement durable.

Au-delà de la motorisation de nos véhicules, PSA Peugeot Citroën, leader des véhicules à faible impact environnemental, souhaite que ses véhicules fassent mieux qu'afficher une faible émission de CO2 et qu'ils s'inscrivent dans une démarche de responsabilité sociale : c'est pourquoi 92 % de nos motorisations sont fabriquées en France. Et nous développons actuellement un moteur essence qui émettra moins de 100 grammes de CO2. Fabriqué à Trémery, en Moselle, il sera mis sur le marché dès 2011.

Pour mettre en place cette dynamique de progrès, nous avons établi, au sein de PSA Peugeot Citroën, une liste de dix objectifs qui engagent chacun des acteurs de l'entreprise. Ces objectifs recouvrent une vingtaine d'actions prioritaires, suivies par le comité de direction générale de l'entreprise. Pour PSA, le but n'est pas d'être le meilleur sur le marché, mais d'embarquer toutes nos équipes sur ce bateau magnifique, celles chargées de l'environnement industriel comme celles représentant le back office. Aujourd'hui, les équipes de marketing elles-mêmes changent de comportement et étudient une forme de communication plus responsable, et la télématique elle-même est mise au service de la mobilité de demain.

PermalienJean-Louis Caron, directeur du développement durable, CEA

Le Commissariat à l'énergie atomique est le quatrième déposant de brevets en France, après PSA, Renault et L'Oréal. Il compte 16 000 salariés, réalise 3,5 milliards de chiffre d'affaires et couvre quatre secteurs de recherche : l'énergie, les nouvelles technologies pour l'information et les communications, les nouvelles technologies pour la santé, la sécurité globale et la dissuasion.

Le secteur de l'énergie recouvre les énergies nucléaire et solaire, la biomasse et le stockage de l'énergie. Le budget que nous consacrons à la recherche sur l'énergie solaire est aussi important que celui de la recherche sur l'énergie nucléaire.

Je ne citerai pas les trente programmes du CEA qui ressortissent directement au développement durable, me contentant d'évoquer la question du bilan carbone, plus précisément la gouvernance carbone. Le CEA ne considère cette gouvernance ni comme un gadget, ni comme un outil révolutionnaire, mais comme un angle de vue complémentaire qui nous permet de mesurer notre dépendance au carbone, donc aux énergies fossiles, d'identifier nos fragilités, de définir des marges de progrès, de choisir les bons leviers et de mettre en place des actions.

Un schéma de l'IFP indique que notre consommation va bientôt dépasser le pic des 2 000 milliards de barils de pétrole, pic que les États-Unis ont déjà dépassé. Chaque industrie a un seuil de vulnérabilité, le CEA en tient compte dans ses études.

Comment préparer notre monde à une forte contrainte en la matière ? À l'heure actuelle, le charbon représente 25 % des énergies produites, le pétrole 35 %, le gaz 20 %, l'hydroélectricité 5 %, le nucléaire 5 %, et les énergies alternatives 0,8 %. Avant de substituer de nouvelles énergies aux énergies actuelles, il faudrait déjà économiser ces dernières !

Le bilan carbone ne doit pas tenir compte uniquement des émissions produites en aval, mais aussi de celles produites en amont, lors de l'extraction des matières premières, car le silicium vient de mines de Taiwan, le charbon de Chine, le cuivre de Bolivie, par exemple.

Dans un bilan carbone, toute matière est transformée en carbone. Ainsi, 100 kilowatts de fioul représentent 8,5 kilogrammes de carbone, à peu près autant que 100 kilomètres en voiture en milieu urbain, 100 euros d'achats informatiques deviennent 12 kilogrammes de carbone, et 1 kilogramme de viande de boeuf un peu moins de 6 kilogrammes de carbone.

Pour établir sa gouvernance carbone, le CEA a engagé un processus et l'a expérimenté au centre de Saclay, qui compte 6 000 salariés. Nous avons été très surpris de constater que le plus gros poste de notre dépendance carbone vient des matériels de haute technologie – spectromètres, lasers – qui représentent environ 20 % de notre bilan carbone ; arrivent ensuite le chauffage, qui atteint 14 %, les trajets en voiture domicile-travail, qui représentent 9 %, les déplacements en mission, 8 % et, enfin, les déplacements des visiteurs. Ce dernier poste, même s'il paraît redondant, mérite d'être pris en compte, car il est évident que si, un jour, le baril atteint 300 euros, les chercheurs japonais ou sud-américains se déplaceront moins souvent dans notre pays.

Nous avons réussi à chiffrer le surcoût que représenterait un baril de pétrole à 300 euros : il s'élèverait à 33 millions d'euros ! Il est clair que chaque diminution du bilan carbone rend l'activité moins vulnérable. C'est pourquoi le CEA tient à établir des bilans et à fixer des objectifs. Par exemple, dans la mesure où le poste « déchets et eaux usées » ne représente que 0,7 %, il est inutile de dépenser la moindre énergie pour le réduire. En revanche, le bilan des matériels de haute technologie atteignant 20 %, nous devons en limiter le nombre.

Le Collège des directeurs du développement durable a mis en place un atelier carbone qui a pour objectif de définir des périmètres conformes aux préconisations de l'Agence de l'environnement et de la maîtrise de l'énergie. Ces périmètres, destinés à l'établissement du bilan carbone, doivent tenir compte des facteurs d'émission, des indicateurs et des échanges de bonne pratique.

PermalienPhoto de Yves Albarello

Au cours de la discussion de la loi de modernisation de l'économie, j'avais attiré l'attention de mes collègues sur le fait qu'il fallait prendre en compte la volonté de certaines communes d'intégrer dans leurs appels d'offres des critères de développement durable. Le sujet a été abordé dans la loi, mais ne conviendrait-il pas d'apporter des améliorations ?

En tant qu'élu local, je me demande si je dois faire un bilan carbone dans ma commune. J'en connais certes le principe. Mais ne serait-il pas plus pertinent, dans un premier temps, de réaliser un bilan thermique de tous les bâtiments qui reçoivent du public ? Nous pouvons encore faire bien des économies d'énergie par ce biais.

PermalienPhoto de André Chassaigne

J'ai trouvé les différentes interventions intéressantes et enrichissantes. La vocation des entreprises est de produire, de répondre aux attentes des clients, et de faire des profits. Les personnes que nous avons entendues sont elles-mêmes partagées entre la volonté de préserver l'avenir de la planète et de contribuer au développement durable, et la nécessité de générer des bénéfices. Mais comment réaliser un équilibre entre la création de valeur ajoutée qui s'apprécie à court terme, et le devenir de la planète, qui conditionne d'ailleurs le devenir de l'entreprise, et qui s'apprécie sur le long terme ?

En tant que parlementaires, comment pouvons-nous, par nos interventions, faire avancer les choses ? L'un de vous a parlé du mobilier, ce qui nous renvoyait à l'article 41 du Grenelle de l'environnement, relatif à la politique à mener en matière de déchets. S'il est bon de connaître la traçabilité d'un produit, il est tout aussi nécessaire de se préoccuper de ce qu'il deviendra à terme. Il faut avoir une vision globale et envisager la totalité de son parcours, notamment en établissant un bilan carbone. Je remarque qu'il est possible de procéder à des ajustements en agissant au niveau réglementaire, sans pour autant mettre en danger les entreprises existantes.

PermalienPhoto de Bernard Lesterlin

Je suis sensible à la sémantique. J'ai examiné la liste des intervenants et leurs titres. Par exemple, Mme Valade est « directeur délégué en charge du développement durable et de la stratégie d'opinion », Mme Barbry « directrice de la communication, chargée du développement durable », et M. Soulias « directeur de la responsabilité sociétale et environnementale ». Certes, nous avons les uns et les autres nos codes et notre langage. Mais j'aimerais être sûr que le développement durable dans l'entreprise ne se résume pas à un discours, à de l'affichage et à une forme de marketing. Les politiques que nous sommes n'ont pas sacrifié à un effet de mode en s'engageant dans le Grenelle de l'environnement. Il ne faudrait pas que vous vous contentiez d'un discours politiquement correct. Les entreprises que vous représentez ne sont pas des organismes philanthropiques. J'aimerais donc qu'au cours de nos débats vous nous rassuriez sur votre intention d'intégrer le développement durable dans la stratégie de l'entreprise.

PermalienPhoto de Christian Jacob

L'approche « développement durable » est-elle un argument de communication ? Est-elle le moyen d'améliorer la rentabilité de l'entreprise ? Nous nous sommes demandé, au moment du Grenelle, s'il fallait nous engager dans une logique purement environnementale. Nous avons préféré faire référence au développement durable, qui s'appuie sur trois piliers : la rentabilité économique, le progrès social et le respect de l'environnement – les uns étant indissociables des autres. On sait bien en effet que, si un projet n'est pas viable économiquement, il ne pourra être mené à bien.

S'agissant des marchés publics, nous avons procédé à une modification pour prendre en compte les critères environnementaux. Il faudra se pencher à nouveau sur cette question, lorsque la commission sera créée. Nous aurons de toute façon à y revenir dans le cadre du Grenelle 1 puisque nos amis sénateurs ont rejeté notre amendement qui mettait en avant la nécessité d'une approche globale. En effet, dans le bâtiment, par exemple, si l'on fractionne le marché des portes, des fenêtres et d'isolation des murs, on risque de faire des erreurs et de négliger la consommation d'énergie ainsi que le bilan thermique. Je reconnais que cette approche globale du marché n'est pas dans la tradition française. Mais qu'en pensez-vous ?

Enfin, j'aimerais savoir si vous considérez que les marchés publics sont un outil facile à gérer. Votre réponse sera importante pour nous, car elle nous éclairera sur les éventuelles améliorations que nous pourrions apporter en ce domaine.

PermalienFabrice Bonnifet, directeur du développement durable, Groupe Bouygues

Il est exact que, dans les années passées, le développement durable n'était pas la préoccupation première : on n'avait pas encore tout à fait conscience du caractère fini des ressources de la planète. Quelques éléments sont en train d'émerger et si les entreprises ne les prennent pas en compte, elles seront les premières à en souffrir – je pense à la problématique du carbone, de l'énergie et à la déplétion des ressources.

Je peux vous garantir que, chez Bouygues en tout cas, nous sommes parfaitement conscients et sincères dans notre stratégie de mise en place du développement durable intégré dans les produits et les livrables que nous proposons à nos clients.

Ce qu'a dit M. Jacob est très important. Si nous voulons mettre rapidement en place cette stratégie, il faut vraiment arriver au coût global. En matière de BTP, c'est la meilleure façon de se dire la vérité et d'éviter de se cacher derrière de fausses certitudes. La recherche de l'efficacité énergétique est sans doute l'un des premiers leviers nous permettant d'atteindre l'objectif des « 3 × 20 ». Pour y parvenir, dans les marchés que vous passerez demain, vous devrez accepter de dépenser un peu plus d'argent en construction pour en dépenser beaucoup moins en consommation. Il s'agira de donner plus à Bouygues et à ses concurrents et moins aux pétroliers et aux fournisseurs d'énergie, qui, de toute façon, devront produire moins.

Une autre évidence va se faire jour, s'agissant des investissements que vous allez consentir. La question est de savoir s'il faut plus d'éolien ou de photovoltaïque, ou plus d'efficacité énergétique. Je vous laisse calculer ce qui, pour un euro investi, sera le retour sur investissement le plus intéressant. Dans la somme des chantiers à mettre en place pour mener une politique sincère de développement durable pour la France et sa compétitivité, il faudra clairement consommer moins d'énergie. Car l'énergie qu'on ne consomme pas est l'énergie la plus chère. Cela ne signifie pas qu'il ne faille pas avancer sur les nouvelles technologies, car les autres pays ne nous attendront pas. Mais il y a des choix à faire, qui vous reviennent.

Ne doutez donc pas de la sincérité des entreprises ! Nous sommes sur le même bateau que vous. Nous avons vraiment envie de répondre à vos attentes mais, pour cela, il faut changer les règles du jeu. Adopter rapidement la notion de coût global, c'est le salut de la France.

PermalienPatrick d'Humières, directeur de la communication et des partenariats, en charge de la RSE, Les Entreprises du médicament

Merci d'aller à l'essentiel en posant cette question : est-ce que nous « faisons de l'image » ? Peut-être ne sommes-nous pas assez convaincants en exposant nos stratégies.

Cela nous oblige à venir rapidement au coeur du sujet, qui est d'ordre économique. C'est vous, c'est l'État, c'est la régulation qui avez la réponse. Nous sommes depuis cinquante ans dans une économie qui récompense de la même manière l'entreprise, qu'elle fasse de l'emploi ou pas, qu'elle fasse un produit polluant ou pas. Il n'y a pas, dans la logique actuelle de fonctionnement, d'arbitrage permettant d'orienter les choses comme il le faudrait. Nous abandonnons les effets externes – en langage économique : les externalités – aux générations futures et aux contribuables. Les entreprises qui en sont conscientes en ont, dans un premier temps, tiré parti de la manière la plus simple possible : en images. L'image a été la première contrepartie qu'elles aient trouvée pour essayer de vendre un peu plus les changements qui leur paraissaient souhaitables. Mais, pour faire entrer dans le modèle des évolutions qui sont fondamentales pour des raisons humaines et planétaires, il faut que vous changiez les règles. Il faut que la bouteille d'eau soit à son vrai prix par rapport à l'eau du robinet ; que les cerises soient vendues en hiver à leur vrai prix, etc. Cela passe notamment par la fiscalité, la péréquation et l'instauration de mécanismes transitoires. Un tel enjeu est au coeur du Grenelle et au coeur des décisions que vous allez prendre. C'est cela qui fera que nous, les entreprises, pourrons faire des produits que la société considérera comme des produits durables. Le procès sur l'image est derrière nous. Mais nous sommes tous dans un enjeu d'économie globale.

PermalienFrançoise Guichard, directrice du développement durable, GDF Suez

Un premier enjeu nous a sans doute facilité les choses : le développement durable peut-être source de business, ce dont les managers sont de plus en plus persuadés. Il est au coeur de la stratégie parce qu'il fait gagner de l'argent à l'entreprise dans la mesure où il conduit à développer les offres faites aux particuliers, aux collectivités et à nos grands clients industriels. Nous proposons par exemple à ces derniers, qui sont soumis aux directives sur les quotas, du trading sur les quotas, du conseil leur permettant de réduire les émissions de CO2 de leurs installations. Le développement durable est donc un soutien au développement du groupe.

Deuxième enjeu : garantir l'acceptabilité et la pérennité de nos activités partout où nous nous implantons à l'international. Cela signifie que, lorsque nous construisons un barrage au Brésil, il nous faut nous assurer de tout un accompagnement social tenant compte des populations qui vivent autour, et de l'impact qu'il aura sur la biodiversité. Notre intérêt n'est pas de nature philanthropique, mais il rejoint l'intérêt des populations.

Troisième et dernier enjeu, d'ordre interne : garantir la cohésion sociale. Nous avons remarqué qu'aujourd'hui les jeunes ne voulaient pas travailler dans n'importe quelle entreprise, uniquement pour le profit, le court terme ou l'actionnaire. Ils préfèrent entrer dans une entreprise qui a une éthique et dont l'activité aura un impact positif sur les générations futures. Ils ont envie de donner un sens à leur travail. Le développement durable le leur permet.

PermalienPhoto de Christian Jacob

Les parlementaires que nous sommes ont trois leviers à leur disposition : la fiscalité verte, les aides à la recherche et à l'investissement, la réglementation. Chacun d'eux a ses avantages et ses inconvénients. Mais ils ont tous l'inconvénient de ne pouvoir être maniés que dans un cadre national. Or vos concurrents et partenaires agissent au niveau européen, voire mondial. Pour autant, que pensez-vous de ces trois leviers ?

PermalienVirginie de Chassey, déléguée développement durable, PSA Peugeot Citroën

Je souhaite défendre la cause de la communication, maintenant que l'on a dit que ces stratégies de développement durable étaient bien au coeur de nos préoccupations et très loin de la philanthropie.

Je distinguerai trois enjeux de communication.

Premier enjeu : que les entreprises rendent des comptes, communiquent sur leurs performances de façon relativement ordonnée pour que l'on puisse comparer ces entreprises les unes aux autres.

Deuxième enjeu : qu'elles s'ouvrent au monde extérieur et dialoguent avec de plus en plus de parties prenantes.

Troisième enjeu : qu'elles mènent des actions de mobilisation et de communication interne. Nous sommes tous intervenus en quelques minutes, mais je pense que nous aurions pu parler une heure un quart durant des actions que nous avons à mener en interne pour convaincre, faire bouger les comportements et modifier les réflexes.

PermalienPhoto de Christian Jacob

La communication n'est pas forcément négative. Nous en avons fait nous-mêmes notre métier.

PermalienHélène Babok-Haeussler, directrice du développement durable, Steelcase International

Je suis tout à fait d'accord avec Mme de Chassey : la communication est aussi un des moyens de faire reconnaître certaines valeurs, au-delà des aspects financiers.

Par ailleurs, je considère que les trois leviers sont complémentaires et justifiés. La fiscalité verte doit être étendue au bilan carbone et à des aspects relatifs à l'eau et à la biodiversité, pour faire reconnaître les externalités dont on a parlé précédemment. L'aide à la recherche doit notamment porter sur les filières de recyclabilité, dans la mesure où c'est un des moyens de faire prendre en compte les problématiques de raréfaction des ressources, mais aussi, par extension, sur la nécessité du bilan carbone. Plus on utilisera de matériaux recyclés, moins on sera soumis, à la source, à des technologies très consommatrices d'énergie.

Enfin, le champ de la réglementation est aussi bien national qu'international. Pour des entreprises comme les nôtres qui sont actives sur différents marchés, il est très onéreux, surtout lorsque l'on est en avance, de devoir intégrer les coûts multiples, qui vont se superposer, pour être en conformité avec la norme française, la norme anglaise et la norme allemande, par exemple, qui sont toutes différentes. Autant que faire se peut, il faut essayer de rechercher l'homogénéité là où c'est essentiel. Il faut abandonner la vision franco-française et faire porter notre analyse sur ce qui est vraiment important en termes de réglementation. Sinon, on risque d'endommager la compétitivité des entreprises qui essaient d'être en avance par rapport à la réglementation en vigueur.

PermalienYves Medina, directeur associé déontologie et RSE, PricewaterhouseCoopers

En 2004, le Gouvernement avait chargé l'ORSE (Observatoire sur la Responsabilité Sociétale des Entreprises) et une association, « Entreprises pour l'environnement », de faire un premier bilan de la loi NRE. Cela constitua une première base de réflexion. À partir de là, nous considérons qu'on ne doit pas avoir peur de la réglementation, y compris nationale, dans ce domaine. Le dispositif mis en place en France par la loi NRE et ce qui a suivi a été un facteur tout à fait conséquent de développement de la démarche de développement durable. Il a considérablement aidé les directeurs, notamment ceux qui sont ici présents, dans leur métier.

Il ne faut pas se contenter de déclarations, ou de greenwashing – c'est-à-dire de l'habillage en vert – de nos actions. Il faut demander à nos entreprises de faire du reporting, des rapports. Certains des rapports concernant le développement durable rédigés par les entreprises sont excellents. Le problème est que le périmètre du reporting français de la loi NRE est encore relativement restreint, dans la mesure où il ne s'applique qu'aux entreprises qui font appel public à l'épargne. Ainsi, aujourd'hui, 750 entreprises seulement sont tenues de rédiger un rapport annuel de développement durable et d'intégrer les informations de ce rapport dans leur rapport de gestion. Élargir l'obligation de présenter de tels rapports serait un moyen d'aider les directeurs du développement durable à mieux faire leur métier et à faire accepter le développement durable par l'ensemble des composantes de l'entreprise.

Ce qui a été fait en France est exemplaire. On n'a pas à en rougir, bien au contraire. Il faut maintenant envisager, comme c'est prévu dans le projet de loi du Grenelle 2, d'élargir cette obligation de rendre compte.

Emmanuel Soulias a évoqué une deuxième voie, qui me semble tout à fait pertinente : il ne faut pas faire du développement durable l'affaire du seul management car c'est aussi celle de la gouvernance. Le développement durable – en tant que responsabilité sociétale de l'entreprise – n'avancera véritablement qu'à partir du moment où les conseils d'administration se saisiront de cette thématique, mais pas dans le détail, ni dans l'opérationnel. La vision de développement durable doit être portée d'abord par les conseils d'administration. Il faut donc réfléchir à la façon d'associer et de responsabiliser ceux-ci aux orientations de développement durable et de RSE que le management mettra ensuite en musique.

Je crois que quelques pistes sont ouvertes en ce sens dans le texte du Grenelle 2. C'est en tout cas le point de vue actuel de l'ORSE présidé par Daniel Lebègue, qui apporte aussi dans cette enceinte le point de vue de l'Institut français des administrateurs.

PermalienDenis Burckel, directeur de l'audit, des risques et du développement durable, ICADE

). Je voudrais apporter un éclairage sur les trois leviers évoqués tout à l'heure, pour ce qui concerne le bâtiment. Les impératifs du Grenelle sont extrêmement stimulants, mais il est important pour les entreprises que les leviers utilisés pour atteindre ces objectifs soient cohérents entre eux.

La stimulation réglementaire est très exigeante. Elle met de nombreuses équipes en marche. Elle sensibilise les consommateurs. Cela dit, elle aura beaucoup de mal à aboutir sans une recherche et une innovation très puissantes. L'aide à la recherche peut avoir un effet multiplicateur très important si l'on veut réaliser les objectifs du Grenelle.

Dans la loi de finances pour 2009, s'agissant des bâtiments basse consommation, vous avez voté un avantage fiscal tout à fait significatif. C'est une façon de solvabiliser la demande. Pour l'instant, les effets sont très modérés. Nous sommes néanmoins très confiants : le coût supplémentaire de ces bâtiments très performants pourra être assez largement absorbé par l'avantage fiscal.

Évidemment, on doit utiliser les trois leviers, mais cela dépend des moments et des circonstances. Quoi qu'il en soit, il faut les utiliser, et cela a déjà été fait en partie par le Grenelle, en cohérence. Par exemple, quand on renforce la réglementation, il importe d'accompagner ou la demande ou les entreprises.

PermalienEmmanuel Soulias, directeur de la responsabilité sociale et environnementale, Macif

Il est sain de se poser la question de la sincérité des entreprises dans leur communication sur le développement durable. Nous avons en tête de nombreux cas d'entreprises, d'acteurs économiques ou d'acteurs qui utilisent le cheval de Troie de l'environnement pour créer des produits ou des services dont on n'a pas forcément besoin.

Pour répondre à une telle question, l'entreprise doit rendre compte et dire en quoi les actions qu'elle met en place vont au-delà de la communication – réduction des impacts environnementaux, création d'emplois, gouvernance plus transparente, par exemple.

Comme M. Lesterlin, je suis très à cheval sur la sémantique. Nous avons beaucoup réfléchi sur l'intitulé de la direction mise en place à la Macif : « direction de la responsabilité sociale » – et non « sociétale » – « et environnementale ». En choisissant un tel intitulé, nous avons repris la définition de la RSE qui figure dans le Livre vert de l'Union européenne. On y lit que la responsabilité sociale de l'entreprise est la traduction du développement durable à l'échelle de l'entreprise.

PermalienPhoto de André Chassaigne

Les grandes entreprises ont les moyens – en ingénierie, recherche développement, etc. – d'aborder les problèmes de développement durable. Je ne doute pas qu'elles aient une réflexion très avancée en la matière, d'autant plus qu'il y va de leur intérêt économique. Mais les PME ne sont pas dans la même situation. Les sous-traitants, notamment, sont soumis à des contraintes très fortes de leurs donneurs d'ordre, en particulier en termes de prix. S'ils n'entrent pas dans le cadre qu'on leur impose, on les menace de s'adresser ailleurs. Il ne faudrait pas, en plus, leur faire porter la responsabilité environnementale. Or, de par la loi, c'est celui qui se trouve en bout de course qui porte la responsabilité de la pollution : celle-ci ne met pas en cause les maisons mères. Une pleine transparence s'impose donc.

Une plus grande citoyenneté est également nécessaire. Êtes-vous prêts à aller plus loin et à faire en sorte que les salariés de vos entreprises aient leur mot à dire ? À moins que vous ne préfériez que les associations environnementales viennent s'exprimer dans les comités d'entreprise ? Il n'est pas possible de se limiter à l'intervention de gens qui sortent des grandes écoles et qui travaillent dans les bureaux d'études.

Enfin, pour traiter les problèmes de développement durable, certains process doivent évoluer. Je peux vous donner l'exemple d'une cartonnerie qui était à l'origine d'une pollution très importante. Grâce à l'intervention de la DRIRE et au prix d'un travail collectif, cette pollution a été limitée au maximum. Mais cela suppose que l'État intervienne, notamment auprès des PME, qu'il s'en donne les moyens et évite de supprimer des postes dans les DRIRE ou dans les DIREN.

PermalienPhoto de Bernard Lesterlin

L'initiative du président Jacob de réunir autour d'une même table des parlementaires et des entreprises était excellente, et les interventions étaient intéressantes. M. Bonnifet, du Groupe Bouygues, a rappelé que nous étions tous sur le même bateau, et je suis sur ce point d'accord avec lui, mais j'ai le sentiment que les représentant des entreprises étaient « entreprenocentrés » : je n'ai pas entendu que nous sommes tous dépositaires d'un capital écologique que nous grignotons tous les jours. Ce qui interpelle la puissance publique et le législateur, c'est de savoir comment taxer ce grignotage pour dégager ce qui est nécessaire, non seulement aux entreprises, mais aussi aux collectivités, aux associations, et même aux individus qui souhaitent s'impliquer et prendre des initiatives dans le développement durable – dans la mesure où, précisément, ils sont tous sur le même bateau.

Le législateur a inventé quelque chose de génial en instituant la taxe à la valeur ajoutée. Mais nous devons réfléchir, dans le Grenelle 4, à la « taxe à la valeur soustraite ». Comment réduire l'empreinte écologique et, ce faisant, dégager le capital pour investir dans l'innovation et dans la recherche, qui concourent au développement durable ?

PermalienFabrice Bonnifet, directeur du développement durable, Groupe Bouygues

Pourquoi attendre le Grenelle 4 ?

PermalienPhoto de Bernard Lesterlin

Il faut que nous sortions de notre carapace de politiques et que vous sortiez de vos entreprises, afin que nous puissions dialoguer. Car nous sommes tous interpellés !

PermalienPhoto de Yves Albarello

Je suis maire d'une commune, qui a mené un certain nombre d'actions dans le domaine du développement durable. J'ai notamment inauguré, il y a quelques semaines, avec M. Borloo, un centre de loisirs de haute qualité environnementale. L'investissement a coûté entre 15 et 20 % plus cher. Mais la commune va tout récupérer en retour sur investissements, car la facture énergétique n'a rien à voir avec ce qu'elle aurait pu être. Et pour cela, je n'ai pas attendu le Grenelle 4 !

Autre exemple : nous sommes en train de construire une station d'épuration membranaire, par nanofiltration. Elle reversera dans le milieu naturel de l'eau de baignade de qualité. Nous avons par ailleurs le projet de construire un golf de dix-huit trous. Comme vous le savez, les golfs consomment beaucoup d'eau. Plutôt que d'utiliser de l'eau à 3,30 ou 3,40 euros le mètre cube, nous récupérerons l'eau de la station d'épuration et nous la revendrons, ce qui nous procurera une recette. Comme quoi le développement durable peut être facteur de développement !

Enfin, je pense moi aussi qu'il faudrait augmenter le nombre d'entreprises qui ont une obligation de produire un bilan environnemental : quand on joue aux cartes, il faut que tout le monde respecte la même règle du jeu. Mais il ne faudrait pas accumuler les contraintes. Je suggère donc aux législateurs de réfléchir pour faire en sorte que, lorsque l'on impose une nouvelle contrainte environnementale à une entreprise, on lui en enlève une.

PermalienPhoto de Serge Poignant

Mon propos portera sur la fiscalité verte.

Nous sommes en pleine réflexion sur la taxe professionnelle, qu'il va falloir remplacer. On peut aller vers la fiscalité carbone, mais on sait qu'elle ne réglera pas tout. Le développement durable ne concerne pas que l'environnement. Doit-on aller au-delà ? Quels critères pourrions-nous faire entrer dans la nouvelle taxe professionnelle ? Qu'en pensez-vous, en tant que directeurs du développement durable ?

PermalienPhoto de Christian Jacob

Avez-vous progressé en matière de télétravail dans les cinq dernières années ? Pouvez-vous nous dire si vous utilisez davantage de papier recyclé ? Utilisez-vous des produits du commerce équitable dans votre restauration collective ? Avez-vous progressé en recherche-développement s'agissant des énergies vertes ? La représentante de PSA a réagi à propos des moteurs thermiques, de l'énergie thermique et d'autres types de véhicules. Où en est-on ? Autant de sujets dont on se préoccupe au quotidien et sur lesquels nous aimerions vous entendre.

PermalienMarco Venturini, directeur général, Paprec

Paprec est une société princeps familiale indépendante, qui existe depuis douze ans et emploie 1 000 salariés. Notre seul métier est le recyclage, dont plusieurs intervenants ont évoqué les difficultés. Je voudrais quant à moi vous délivrer un message optimiste : la France est sans doute aujourd'hui le leader mondial en ce domaine. On y est pratiquement capable de recycler toutes les familles de déchets, qu'il s'agisse, par exemple, de papiers ou de bouteilles d'eau.

Nous avons, avec le groupe Suez, un projet de création d'une usine de recyclage de bouteilles PET issues des ménages. On peut parler d'un véritable partenariat public-privé, dans la mesure où ce sont des collectivités qui investissent dans la collecte sélective des déchets, avant que nous ne procédions à un tri, en séparant les papiers des plastiques. Les bouteilles de plastique transparent seront acheminées dans une usine que nous inaugurerons au mois de juin 2009, avant d'être transformées en paillettes qui seront utilisées par Nestlé, Danone et Coca-Cola pour refaire des bouteilles à usage alimentaire. On recycle ainsi une matière faite à l'origine avec du pétrole, évitant de perdre une ressource naturelle qui se fait de plus en plus rare. La technologie nécessaire pour développer cette nouvelle matière première issue du recyclage de déchets est extrêmement pointue. Elle suppose de la recherche et des investissements, ce qui permet de créer des emplois.

L'espoir des entreprises de recyclage serait de ne pas avoir à supporter de fiscalité. Par leur activité, elles permettent de remettre dans le circuit des matières premières et, à ce titre, elles mériteraient d'être soutenues. Mais elles ont surtout besoin de règles fortes venant affirmer la réalité de l'industrie du recyclage en France. On pourrait instituer une sorte de prime à la qualité en cas d'investissements sérieux. Il convient d'éviter de lier le concept de recyclage et de production de matières premières secondaires, à tous les problèmes liés aux déchets, à l'origine de phénomènes NIMBY (« not in my back yard », attitude d'opposition d'une population locale vis-à-vis d'un projet lorsque celui-ci est susceptible d'impacter son cadre de vie).

PermalienAlice Audouin, responsable du développement durable, Havas Media

Je prends la parole au nom d'un secteur qui, à vos yeux, fait sans doute figure de mouton noir : la communication. J'occupe moi-même le premier poste de responsable du développement durable créé dans ce secteur. À l'heure actuelle, nous sommes moins d'une dizaine. Pourquoi le secteur des agences de publicité et d'achat d'espaces s'est-il trouvé en retard par rapport aux autres ? Comment rattraper ce retard ?

On explique le retard en appréciant le niveau de pression venant du client, du fournisseur, mais aussi de la société civile. Ce niveau a monté dernièrement sous la pression de la société civile sur la question du greenwashing (éco-blanchiment) : action des ONG, relayée ensuite par une charte qui a amené le BVP à se transformer. Le nombre de demandes de conseils auprès du BVP pour des vérifications d'allégations environnementales est aujourd'hui passé de 300 à près de 900.

Nous dépendons de nos propres accords volontaires et de nos propres initiatives. Nous souffrons beaucoup, en tant que responsables du développement durable de ce secteur, du fait que les choses n'avancent pas plus vite. Nous nous unissons dans des associations, comme le collectif AdWiser. Nous écrivons nous-mêmes nos ouvrages. J'ai moi-même rédigé La communication responsable, sur les principes d'intégration du développement durable dans la communication – quel que soit le sujet. Lorsque les communicants auront une meilleure culture de ce qu'est le développement durable et des responsabilités qui en découlent dans leur métier en termes de messages et de moyens utilisés, le procès fait au développement durable, qui manie aujourd'hui la communication, parfois sans suffisamment de garde-fous, perdra de sa vigueur.

Très concrètement, où en sommes-nous ? Notre secteur a été évalué l'année dernière par la D4E, la Direction des études économiques et de l'évaluation environnementale. La moyenne du secteur a été jugée relativement nulle en termes de respect de la loi NRE ; les groupes Publicis et Havas étaient à 1,6 sur 100. Le fait que Havas soit évaluée de l'extérieur, notamment par les pouvoirs publics, et qu'on lui rappelle où elle en est par rapport à la loi NRE est très important, car nous pouvons nous en prévaloir.

Je travaille dans une agence d'achat d'espaces. Parmi mes annonceurs, bien peu m'ont demandé de leur faire une « campagne verte ». Ils me donnent des objectifs, des cibles. Prenons l'exemple de la presse magazine féminine. Celle-ci est malheureusement très loin des idées de développement durable. Comment faire, sachant que mes annonceurs ne vont pas me mettre sous pression ? Comment faire, sachant que mes fournisseurs ne sont pas, du moins certains, dans des démarches proactives ? Si je reprends l'exemple précédent, aucun magazine féminin, à part peut-être Prisma, ne peut me proposer un papier recyclé.

Prenons un autre exemple : l'affichage. Entre un panneau normal et un panneau éclairé, dont je vous épargne l'impact en termes de CO2, je choisirai uniquement en fonction de critères d'efficacité liés à ma cible. Si demain ces panneaux font l'objet d'une réglementation ou d'une fiscalité particulière, je disposerai d'une marge de manoeuvre. Lorsque l'on est dans le service et que l'on achète de l'espace, on dépend de l'offre. Si la presse magazine ne me fait pas d'offre vertueuse, j'aurai beaucoup de mal à lui conseiller autre chose. Si les annonceurs ne me disent pas qu'ils sont prêts à payer un peu plus, par exemple pour un panneau éclairé en photovoltaïque, comment ferai-je ?

J'aurai beau disposer de mon bel outil « Ecopublicité », le logiciel que j'ai créé avec l'ADEME, et de la plus belle analyse du cycle de vie d'un plan média, je me trouverai prise entre deux feux. Le jour où je pourrai orienter les décisions, mon métier prendra une tout autre valeur. Mais pour le moment, je dépends de mon client et de mon fournisseur pour entrer dans un cercle vertueux. Et je suis toute seule à m'occuper de développement durable dans une entreprise de 700 personnes.

Nous dépendons toujours de nos clients et de nos fournisseurs. Les agences de création ont essuyé les critiques de la société civile et les choses ont bougé : il y a maintenant un directeur du développement durable chez BETC, qui parle avec les créatifs sur la responsabilité des messages, et des créations de poste ont été décidées. Mais ma situation est différente : les actions du collectif des « déboulonneurs », qui taguent les affiches, et le débat sur les panneaux à l'entrée des villes ne sont pas suffisants pour me permettre d'avancer.

Il faut nous percevoir comme des personnes qui doivent relier un niveau d'attente et un niveau de pression. Sans pression de la part de mes clients, ni de mes fournisseurs, ni de la société civile, je réclame de la réglementation et de la fiscalité, car c'est cela qui pourra m'aider.

PermalienThomas Busuttil, fondateur et directeur d'Imagin'able

J'accompagne les entreprises, les grands groupes comme les PME, dans leur démarche de développement durable, et je constate que l'investissement est en panne. Or c'est l'investissement qui prépare les succès de demain. Pourquoi ne pas utiliser l'incitation fiscale ? Je rappelle, messieurs les députés, que la mesure que vous avez prise concernant l'ISF a permis d'injecter 650 millions d'euros dans le circuit pour permettre aux PME d'investir. Les PME qui souhaitent suivre la voie du développement durable doivent avoir les moyens d'investir. Or, elles ne les ont pas, et cette situation est préoccupante.

PermalienGeneviève Guicheney, directrice du projet « développement durable », France Télévisions

Je suis, pour ma part, directrice du projet « développement durable » au sein du groupe France Télévisions, qui est une sorte d'hybride d'une entreprise privée et d'un service public.

En tant qu'élus, messieurs les députés, vous avez le souci de l'intérêt général. Vous devez donc vous interroger sur ce que représente le développement durable au regard de l'intérêt général. Nous attendons des entreprises qu'elles prennent conscience de l'enjeu, et nous avons du mal à faire évoluer certaines catégories de personnel, singulièrement le middle management.

Patrick d'Humières a mis l'accent sur l'importance de la vérité, en particulier à propos des externalités négatives. Il faut inverser la pénalisation. Nombreux sont ceux qui se demandent pourquoi faire à tout prix du développement durable, puisque cela coûte plus cher.

J'en reviens aux médias. Le législateur, en votant le cahier des missions et des charges, qui contient dans son préambule des obligations non chiffrées, invite les médias à penser de temps en temps au développement durable.

Vous êtes nos alliés, messieurs les députés, et nous avons besoin de vous. Car les dirigeants nous objectent que la loi ne les oblige pas à faire ce que nous leur demandons, et ils retardent le moment d'agir. Les entreprises privées attendent des entreprises publiques qu'elles montrent l'exemple. Nous avons besoin les uns des autres pour faire avancer le développement durable et écrire noir sur blanc que nous voulons le faire ensemble.

PermalienFabrice Bonnifet, directeur du développement durable, Groupe Bouygues

Plus nous taxerons les énergies carbonées, plus il nous sera possible de faire cette mutation. Au groupe Bouygues, nous souhaitons que les énergies carbonées soient lourdement taxées pour aider l'économie à accomplir sa mutation vers une croissance verte, que nous appelons tous de nos voeux.

Un certain nombre d'actions concrètes peuvent nous y aider. Ainsi, au niveau des marchés publics, l'État doit raisonner en tant qu'aménageur et imposer aux entreprises des normes relatives au coût global du bâtiment, à la façon dont il sera utilisé et à son implantation par rapport aux transports. En établissant des convergences, il pourrait faire évoluer les choses dans le bon sens.

J'en viens aux énergies vertes. L'énergie photovoltaïque, bien que subventionnée, coûte encore très cher. L'État, dans le cadre des marchés publics, pourrait exiger des constructions « solarisables », à savoir des bâtiments sur lesquels les capteurs photovoltaïques pourraient être installés dès que leur coût serait plus abordable, c'est-à-dire dans les cinq à dix ans qui viennent.

Le télétravail est une source d'économie d'énergies, et une simple mesure fiscale pourrait l'encourager. En France, nous disposons d'infrastructures de télécommunications d'une très grande qualité, et les personnels qui occupent des fonctions tertiaires n'ont pas besoin de se rendre chaque jour sur les lieux de leur travail pour être performants. Pourquoi ne pas inciter les entreprises, grâce à un dispositif fiscal, à recourir au télétravail ? En proposant à 20 % de ses collaborateurs un statut de télétravailleur, une entreprise réduirait à la fois ses charges et l'impact écologique des transports, et tout le monde serait gagnant.

Il est de votre responsabilité, messieurs les députés, d'inciter les entreprises à utiliser ce recours. Actuellement, le groupe Bouygues compte moins de 4 % de télétravailleurs. Nous pourrions aller beaucoup plus loin si la loi nous y incitait.

PermalienTita Valade, directeur délégué en charge du développement durable et de la stratégie d'opinion, Lyonnaise des Eaux

J'ai été très sensible à ce qui a été dit sur l'intelligence collective. Puisque nous sommes tous sur le même bateau, il faut ouvrir la gouvernance à des acteurs externes à l'entreprise. Ainsi, à Lyonnaise des Eaux, nous avons mis en place un conseil stratégique composé d'experts externes qui interviennent sur la stratégie du groupe, aux côtés des organes de décision.

L'intelligence collective se manifeste également en matière d'utilisation des eaux usées, mais la législation française ne va pas dans le bon sens. En Italie, par exemple, la loi permet aux agriculteurs d'utiliser les eaux usées traitées pour arroser leurs champs. En France, cela leur est interdit ! Faites en sorte, messieurs les députés, que cette législation évolue, car cet usage répond à des intérêts économiques, environnementaux et sociaux. J'agis avec force pour que cette législation évolue et je souhaite que vous m'y aidiez.

Nous avons évoqué l'empreinte environnementale des services engagés par les collectivités. Je déploie actuellement de gros efforts pour que nous inventions un nouveau modèle économique qui reposerait sur l'engagement des entreprises à réduire cette empreinte et à lier leur rémunération à cette réduction. Cette démarche est au coeur de la problématique de développement durable. Telle est la conviction du Collège des directeurs du développement durable engagés.

PermalienPhoto de Christian Jacob

La décision d'utiliser les eaux usées avait fait l'unanimité au Parlement lors de l'examen de la loi sur l'eau en 2006, mais la Direction de la santé, craignant une éventuelle consommation de ces eaux usées, s'y était opposée, ne faisant qu'appliquer le principe de précaution.

Nous avons bien entendu que vous souhaitiez davantage de contraintes, mais j'imagine que, si les directeurs généraux étaient présents, ils nous diraient exactement le contraire ! Savez-vous que, sur les 900 entreprises concernées par la loi sur les nouvelles régulations économiques, moins de 200 seulement répondent au cahier des charges ?

PermalienTita Valade, directeur délégué en charge du développement durable et de la stratégie d'opinion, Lyonnaise des Eaux

Monsieur le président, sachez que 54 % des directeurs du développement durable sont rattachés directement à leur président. C'est mon cas, et je ne peux envisager la moindre divergence entre nous. Il s'agit bien d'une évolution, mais elle doit s'étendre à l'ensemble des entreprises.

Votre remarque sur le principe de précaution sanitaire est très intéressante mais, là aussi, il existe des solutions. Lyonnaise des Eaux a engagé un programme de recherches sur l'impact de la réutilisation des eaux usées sur le milieu naturel récepteur. Elle est en mesure de vous apporter la preuve qui vous manquait en 2006 et qui vous permettra de prendre des décisions !

PermalienPhoto de Yves Albarello

Je vais tenter de vous faire rire un peu. Dans mon centre de loisirs HQE, qui s'appelle « Planète oxygène », j'ai voulu, il y a deux ou trois ans, réutiliser les eaux de pluie pour les toilettes. La DDASS me l'a interdit. Je récupère tout de même mes eaux de pluie, qui servent à alimenter les autos laveuses de voirie. Et j'ai mis en place des toilettes qui n'utilisent pas d'eau du tout, mais des cartouches – à partir d'un brevet allemand.

PermalienVirginie de Chassey, déléguée développement durable, PSA Peugeot Citroën

Il me semble important de répéter que les nouvelles technologies commencent par l'amélioration des anciennes. Les bons vieux moteurs thermiques permettent tout de même à PSA d'avoir aujourd'hui 45 % de parts du marché des véhicules de moins de 110 grammes. Cela dit, nous commercialiserons à partir de l'année prochaine une deuxième génération d'un système stop and start : la voiture s'arrête quand vous freinez et redémarre lorsque vous accélérez, ce qui permet d'économiser 15 % de consommation et donc d'émissions de CO2. L'effet généré est également important en termes de société : lorsque la voiture est arrêtée, elle ne fait plus de bruit. Par ailleurs, dans la panoplie des technologies alternatives et des hybrides, nous commercialiserons à partir de 2011 des hybrides diesel – qui permettent 50 % de gains par rapport à un moteur à essence de même puissance, et 35 % de gains par rapport à un moteur diesel de même puissance.

Peugeot et Citroën ont été les premières marques à vendre le plus de véhicules électriques dans les années quatre-vingt-dix. Le groupe s'était arrêté en chemin, faute de marché. Compte tenu de la demande qui semble émerger, nous avons relancé le dispositif. Nous commercialiserons, à la suite d'un accord avec Mitsubishi, une Peugeot électrique en 2011. Mais il faut avoir en tête que l'usage de ce véhicule restera limité, compte tenu de sa faible autonomie. En outre, son coût restera très élevé. Nous travaillons également en interne, avec nos équipes, sur des véhicules plus polyvalents, des véhicules hybrides plug in auxquels on rajoute une petite motorisation thermique.

Toutes ces solutions sont complémentaires. Elles ne répondent pas toutes au même usage. Mais je ne parle que de la France, car il y a des usages divers, avec d'autres alternatives qui correspondent à d'autres pays et à d'autres marchés.

Enfin, 306 de nos fournisseurs, soit 71 % de notre chiffre d'affaires-série, sont engagés avec nous dans une démarche de responsabilité sociétale et environnementale. Cela signifie que, derrière les critères de qualité, de prix et de délai, on arrive à faire prendre en compte les critères de RSE. Chez PSA, nous remettons des trophées fournisseurs depuis plusieurs années. Pour la première fois cette année, on a remis un trophée fournisseurs « Prix spécial développement durable ». Les choses commencent donc à bouger de ce côté-là aussi. Je précise que, lorsqu'on travaille sur l'objectif de porter la part des matériaux verts, c'est-à-dire des plastiques recyclés, à 20 % de polymères, on le fait avec nos fournisseurs, car nous ne pourrions rien faire tout seuls.

PermalienPhoto de Christian Jacob

On reproche souvent au secteur automobile de n'avoir pas anticipé sur ces sujets. J'ai bien entendu votre message sur la voiture électrique. Mais on sait bien que c'est par la recherche que l'on pourra avancer.

Je suis depuis vingt ans le débat sur les biocarburants. Au début, il y avait un blocage complet de la part des pétroliers, qui nous expliquaient que ce n'était pas possible. Puis ce fut le tour des motoristes, qui nous assuraient que cela ne marcherait jamais. Enfin, ce fut le tour des écologistes. Mais nous avons tenu bon.

La capacité d'anticipation des groupes est importante, même si l'on comprend tout à fait leurs besoins de rentabilité immédiate. D'ailleurs, si l'on veut anticiper, il faut pouvoir s'en donner les moyens, et il faut que les groupes gagnent de l'argent.

PermalienJean-Louis Caron, directeur du développement durable, CEA

Nous sommes tous d'accord sur l'intérêt des trois leviers : fiscalité verte, aide à l'investissement et réglementation. Mais j'ai le sentiment que c'est le dosage entre les trois qui est difficile à trouver. Si l'on donne le sentiment qu'il y a trop de réglementation, que l'on empile règles sur règles, personne ne va y satisfaire. Il faut que ces règles apparaissent comme des opportunités plutôt que des contraintes.

S'agissant de la R&D verte, il me semble qu'avec toutes les réorganisations qui ont été réalisées depuis trois ou quatre ans – je pense notamment à la création d'agences de moyens, concernant aussi bien le stockage du CO2 avec le CIFP, que la biomasse, le stockage de l'énergie, la recherche sur le solaire, ou le photovoltaïque avec le CEA – on a atteint une masse critique qui est très prometteuse. Les moyens existaient, mais de façon dispersés, et ils ont été regroupés. S'agissant plus précisément du photovoltaïque, on a créé à Chambéry l'institut UDS, qui fonctionne extrêmement bien et mène des expérimentations un peu partout.

S'agissant du télétravail, dont nous avons une certaine expérience, je serai d'une extrême prudence. Autant le bilan carbone du télétravail est exceptionnel, autant ses dégâts sociaux peuvent être terribles – pour des raisons d'isolement. L'affaire est très complexe.

Un de vos collègues est intervenu à propos des bâtiments. C'est la question la plus importante. Si je suis les recommandations de la circulaire du Premier ministre, sortie il y a deux mois, ou je continue à faire de la recherche et je respecte la loi, ou j'arrête et je peux faire du bâtiment. Mais si je fais de la recherche, je suis hors des clous à 90 %, et pour les quarante ans qui viennent. La question des patrimoines, des bâtiments, des thermographies et de l'évaluation est énorme et cela va poser des problèmes de fiscalité et de calculs d'amortissement. Le sujet est très difficile.

Enfin, dans nos centres, nous menons d'assez nombreuses expérimentations sur la restauration. Ma conclusion est que je ne recours pas au « bio » avant 2012, parce qu'il n'y a pas de circuits et qu'il revient très cher. En revanche, nous sommes en train d'installer les circuits les plus courts possibles, avec des producteurs se trouvant dans un rayon de 15 kilomètres.

PermalienHélène Babok-Haeussler, directrice du développement durable, Steelcase International

Nous nous sommes penchés sur la problématique du télétravail. Nous accompagnons déjà des entreprises assez mûres – par exemple dans les télécommunications – qui, motivées entre autres par des enjeux carbone, l'appliquent déjà. Il convient certes d'être prudents, mais le télétravail peut constituer une solution et une façon complètement différente d'aborder la relation au travail. On ne vient plus dans le bâtiment, dans l'espace de travail, pour effectuer sa tâche individuelle, mais pour être en relations, en communication. Cela génère effectivement, au niveau des politiques de ressources humaines, énormément de modifications, s'agissant notamment de la confiance qu'on a et du contrôle que l'on doit exercer vis-à-vis des salariés. Tout cela est complexe et, si vous le souhaitez, nous pourrons partager avec vous certaines des expériences que nous sommes en train de mener.

Je voudrais revenir sur ce que M. Chambon disait tout à l'heure. Tout ce qui relève de la réglementation doit avoir un double aspect : pénaliser les entreprises en cas d'empreinte négative, mais aussi récompenser celles qui améliorent positivement cette empreinte – on l'a vu avec l'exemple de l'eau. En fait, nous recherchons tous comment continuer à faire des bénéfices en élargissant notre empreinte, à partir du moment où cette empreinte est positive. Certes, ce n'est pas facile à apprécier. Il est fondamental de mettre en place un cadre législatif.

PermalienAnnick Souyet, directrice du développement durable, Groupe IGS

J'appartiens à un centre de recherche et de réflexion du Groupe IGS, qui s'occupe d'éducation et de formation. Nous travaillons sur la recherche et sur le management.

M. le président nous a demandé quel avis nous avions à lui transmettre sur les appels d'offre. Voici le mien.

L'État est un très grand client. Les appels d'offre des marchés de travaux publics sont indispensables. C'est grâce à ces appels d'offre, où l'on trouve très souvent des éléments relatifs au développement durable, que nous pourrons faire avancer de nombreuses entreprises, voire des centres de formation ou d'autres associations.

Vous demandez, pour les accepter, que l'on respecte des critères de développement durable. Ces appels d'offre ont donc un aspect volontaire et incitatif, et pas seulement réglementaire. Je pense pour ma part que c'est une excellente chose.

PermalienPhoto de Christian Jacob

Je vous remercie toutes et tous. Cet échange en appellera d'autres, qui nous permettront de nous retrouver dans des cadres différents.