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Philippe Martin
Question N° 127559 au Ministère du du territoire


Question soumise le 7 février 2012

M. Philippe Martin attire l'attention de M. le ministre de l'agriculture, de l'alimentation, de la pêche, de la ruralité et de l'aménagement du territoire sur la défense du droit des agriculteurs à cultiver leurs propres semences et à échanger librement les semences de ferme. L'Assemblée nationale a adopté le 28 novembre 2011 une proposition de loi modifiant les certificats d'obtention végétale (COV). Cette proposition de loi remet en cause le droit des agriculteurs à utiliser librement leurs semences de ferme. Elle protège clairement les intérêts des semenciers contre ceux des agriculteurs. Enfin, elle porte atteinte au droit des paysans à maîtriser leurs productions en leur imposant de verser aux industries semencières une dîme sur les fruits des récoltes. Pourtant, une pratique ancestrale et de bon sens consiste pour les agriculteurs à utiliser leurs propres semences pour ensemencer leurs cultures. Cette pratique traditionnelle permet à de très nombreux agriculteurs de réaliser d'importantes économies, mais également de rester indépendants de l'industrie semencière. Outre qu'elles sont plus écologiques et qu'elles permettent de garantir leur traçabilité, les semences de ferme sont beaucoup moins consommatrices de produits phytosanitaires que les semences industrielles. Elles protègent par ailleurs les agriculteurs des contaminations par les organismes génétiquement modifiés. Dans un contexte de crise, cette loi de contrainte à payer le droit d'ensemencer ses propres récoltes risque d'étrangler encore plus certaines catégories d'agriculteurs. En cas d'application de cette loi, les semenciers auraient également une mainmise totale sur la production des semences. À terme, la biodiversité, la qualité et la variété des semences seraient menacées. En conséquence, il lui demande de bien vouloir revoir cette loi dans le sens d'une reconnaissance positive des droits des agriculteurs à ensemencer leurs propres récoltes et à échanger librement les semences de ferme.

Réponse émise le 17 avril 2012

La loi relative aux Certificats d’Obtention Végétale (COV) a été adoptée le 8 décembre 2011. Elle poursuit un double objectif : consolider un modèle de protection de la propriété intellectuelle en matière végétale plus adapté au vivant que celui du brevet et pérenniser l’effort de recherche en matière agronomique, dans un contexte où nos agriculteurs doivent faire face aux défis climatiques, environnementaux et sanitaires.

 

Le COV limite la protection à l’usage commercial des variétés ainsi qu’à celui de leurs fruits, laissant libre de droit leur utilisation à des fins de recherche, y compris pour la création de nouvelles variétés, ou à des fins non-lucratives.

 

La France est l’un des principaux promoteurs de ce modèle à l’international. Elle est d’ailleurs à l’origine de la signature en 1961 de la Convention de l’Union Internationale pour la Protection des Obtentions Végétales dont la loi du 8 décembre 2011 achève la transposition.

 

Alors que le développement d’une nouvelle variété représente un investissement lourd (100 millions d’euros en moyenne sur 10 années), l’objectif était également de créer les conditions d’une juste rémunération de l’effort de recherche tout en clarifiant la situation juridique des agriculteurs à l’égard des semences de ferme, c’est-à-dire des graines issues de la récolte.

 

Avant l’adoption de cette loi, l’utilisation de ces semences était illégale si la variété était protégée, l’agriculteur étant tenu de racheter des semences. La loi leur ouvre désormais la possibilité d’avoir recours aux semences de ferme, moyennant le paiement d’une redevance si elles sont issues de variétés protégées. Les petits agriculteurs au sens de la Politique Agricole Commune  (moins de 92 tonnes de céréales) seront cependant exemptés, tout comme les utilisateurs à des fins non-lucratives.

 

La loi renvoie à des accords interprofessionnels le soin de définir les conditions dans lesquelles peuvent être utilisées les semences de ferme issues de semences protégées, notamment le montant de l’indemnité à verser. Ces accords seront validés par le Ministère chargé de l’Agriculture qui veillera à leur équilibre.

 

Ce dispositif s’inspire de celui mis en place pour le blé tendre, variété pour laquelle un tel accord a été conclu en 2001. Celui-ci prévoit le versement d’une redevance d’un montant limité à 3,5 euros par hectare pour un retour sur récolte estimé en moyenne à 1500 euros par hectare.

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