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Jean-Jacques Candelier
Question N° 125160 au Ministère de la Défense


Question soumise le 27 décembre 2011

M. Jean-Jacques Candelier attire l'attention de M. le ministre de la défense et des anciens combattants sur la modernisation du statut général des militaires. Ce statut est défini en contradiction totale avec la Constitution et la Convention de sauvegarde des droits de l'Homme et des libertés fondamentales. Il est leur est interdit l'adhésion à des groupements professionnels, les privant ainsi de toute possibilité de défendre leurs intérêts et d'exprimer leurs revendications. Les militaires sont conscients que la spécificité de leurs missions est incompatible avec le droit de grève, comme c'est le cas pour d'autres professions (magistrats, policiers, personnels de l'administration pénitentiaire). Ils acceptent tout aussi bien les restrictions sur le droit d'expression lorsqu'il s'agit de préserver l'indépendance des armées et l'aspect opérationnel. Malgré tout, l'absence de dialogue social et le décalage croissant entre les conditions de travail des militaires en temps de paix et celles des autres citoyens conduit de plus en plus à un sentiment de malaise. Ce malaise provient également d'un dysfonctionnement des structures de concertation mises en place par le ministère (conseil supérieur de la fonction militaire et présidents de catégories ont montré leurs limites et ne recueillent plus la confiance des personnels). Il lui demande de bien vouloir accorder la liberté d'association et d'expression aux militaires, dans le respect des principes de neutralité et de discipline qui s'attache à leur statut.

Réponse émise le 15 mai 2012

Les libertés d'expression et d'association sont reconnues aux militaires. Toutefois, conformément aux dispositions des articles 10 et 11 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'Homme et des libertés fondamentales du 4 novembre 1950, l'exercice de ces droits fait l'objet de restrictions définies par le statut général des militaires (SGM), aujourd'hui codifié dans le code de la défense, partie 4 : « le personnel militaire ». Ces dispositions de nature législative répondent au nécessaire équilibre qui doit être entretenu entre les libertés fondamentales reconnues à tout citoyen et les exigences de discipline, de cohésion et de neutralité des armées qui conditionnent l'efficacité de leurs missions, et par conséquence, le maintien de la sécurité nationale. La Cour européenne des droits de l'Homme, en son arrêt du 8 juin 1976 rendu en cour plénière dans l'affaire Engel et autres contre les Pays-Bas, a reconnu que, « bien entendu, la liberté d'expression garantie par l'article 10 de la Convenntion européenne de sauvegarde des droits de l'Homme et des libertés fondamentales vaut pour les militaires comme pour les autres personnes relevant de la juridiction des États contractants, mais le fonctionnement efficace d'une armée ne se conçoit guère sans des règles juridiques destinées à les empêcher de saper la discipline militaire ». En conséquence, si les opinions ou croyances, notamment philosophiques, religieuses ou politiques sont libres, elles ne peuvent cependant être exprimées qu'en dehors du service, et avec la réserve exigée par l'état militaire. De même, le SGM reconnait aux militaires la liberté d'adhérer aux associations de leur choix sans qu'il soit possible de s'y opposer, à l'exception des associations et groupements politiques ou professionnels. Ces deux restrictions sont en effet indispensables, autant à la neutralité des armées qu'à leur cohésion. S'agissant de la question de savoir si l'alinéa 6 du préambule de la Constitution du 27 octobre 1946, intégré au « bloc de constitutionnalité », qui dispose que « tout homme peut défendre ses droits et ses intérêts par l'action syndicale et adhérer au syndicat de son choix », crée une situation juridique nouvelle de nature à remettre en cause la constitutionnalité de dispositions interdisant aux militaires de faire partie de groupements constitués pour soutenir des revendications d'ordre professionnel, le Conseil d'État, consulté sur ce point, a émis, le 21 juin 1949, l'avis suivant, motivé par le fait que les constituants de 1946 n'avaient en vue que la protection des travailleurs : « La notion de syndicat professionnel, telle qu'elle résulte des dispositions législatives qui ont institué pour les travailleurs le droit de se syndiquer, est incompatible avec les règles propres à la discipline militaire (...) cette incompatibilité a pour conséquence d'interdire aux militaires en activité de former des syndicats professionnels ou d'adhérer à des groupements syndicaux ». Toutefois, le fait que les militaires ne puissent se réunir en associations spécifiques ayant pour objet la défense d'intérêts professionnels ne saurait signifier que leurs aspirations individuelles et collectives sont ignorées. En effet, celles-ci peuvent être exprimées au moyen de dispositifs d'écoute et de concertation appropriés. L'article L. 4121-4 du code de la défense précise ainsi qu'il est fait obligation au chef, à tous les échelons, de veiller aux intérêts de ses subordonnés et de rendre compte, par voie hiérarchique, de tout problème à caractère général qui serait porté à sa connaissance. De plus, l'institution militaire française est dotée de plusieurs instances de concertation et de dialogue interne. Enfin, chaque militaire peut saisir l'autorité supérieure de propositions visant à améliorer les conditions d'exécution du service, la vie en communauté, ainsi que de questions relatives à sa situation personnelle. Ces dispositifs conjugués ont vocation à concourir à la prise en compte permanente des aspirations du personnel et à l'amélioration constante de sa condition.

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