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Intervention de Christian Kert

Réunion du 9 octobre 2007 à 15h00
Accords france-Émirats arabes unis relatifs au musée universel d'abou dabi — Discussion générale

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaChristian Kert :

Madame la ministre, en début d'année, la polémique battait son plein entre votre prédécesseur et des professionnels du monde des musées inquiets à l'idée que l'expérience d'Abou Dabi puisse aboutir à la création d'une nouvelle race de musées : les musées que l'on vendrait !

Quelques mois plus tard, il semble que les inquiétudes se soient apaisées, même si certaines questions demeurent, comme en témoignent les propos de nos collègues Bloche et Rochebloine. En effet, votre prédécesseur puis vous-même avez exercé une pédagogie qui a pu faire évoluer les mentalités face à la réalité de ce projet. On a suffisamment décrit ses modalités, je n'ai pas à y revenir. En revanche, il n'est pas inutile de redire ici qu'il s'agit bien de créer un musée universel, destiné à oeuvrer au dialogue entre l'Orient et l'Occident. Un musée qui présentera des objets majeurs dans les domaines de l'archéologie, des beaux-arts et des arts décoratifs. Une oeuvre en quelque sorte « mutualisée » puisque, même si ce futur musée portera le seul nom prestigieux du Louvre, les musées français qui le souhaiterons pourront y participer.

À ceux qui, légitimement, craignaient que la France aille, culturellement, se jeter dans un guêpier, nous devons rappeler que, récemment, la Sorbonne a créé une antenne à Abou Dabi dans un esprit de laïcité, de mixité et de liberté qui fait honneur au pays d'accueil et nous renforce dans cette idée que culture et éducation peuvent faire beaucoup pour la compréhension entre les civilisations. N'est ce pas, pour nous Français, également important ? N'est-ce pas là, la mission universelle de la France ?

C'est bien le cas, car nous considérons que le rayonnement culturel international de notre pays est un enjeu majeur, d'autant que la France a la chance de disposer d'un vaste patrimoine artistique et de talents humains exceptionnels. Plusieurs d'entre nous, ici, ont eu l'occasion de rendre hommage à nos conservateurs ou à nos restaurateurs d'oeuvres d'art dont les talents font la fierté de la France.

Pourquoi, à l'heure de la mondialisation, n'exporterions-nous pas ce savoir-faire artistique « à la française » ? Au nom de quoi devrions-nous le garder en nos seuls murs ? Oui, il nous est agréable de constater que ce savoir-faire est réclamé par le monde. Qu'aurions-nous pensé si, plutôt qu'à la France, on avait fait appel au talent d'autres pays à fort potentiel patrimonial ?

À ceux qui redoutaient que le Louvre s'exporte à l'étranger au lieu d'irriguer la France, rappelons que, de tout temps, les équipes de ce musée ont voulu mettre les oeuvres d'art à la disposition du plus grand nombre. C'est bien ce que le Louvre a fait en implantant une de ses antennes à Lens et ce qu'il se propose de poursuivre en exposant dans les musées de nos régions les oeuvres conservées dans les musées d'Île-de-France.

Ne redoutons pas que le monde envie la France et en appelle à son histoire ! Notre patrimoine est sollicité à l'étranger ? On nous demande à Shanghai à Atlanta, à Abou Dabi ? Tant mieux ! Nos musées n'exposent qu'une faible part de nos collections. Il y a de la marge. Les prêts – gratuits ou rémunérés – ne les videront pas.

Pour autant, bien sûr – nous avons bien compris la préoccupation de nos collègues –, il n'est pas question de remettre en cause le caractère inaliénable de notre patrimoine. Il s'agit seulement de le faire rayonner dans le monde, soit par des expositions temporaires, comme c'est déjà le cas, soit par des projets d'implantation comme celui-ci, véritable cas d'école puisqu'il sera situé dans un site exceptionnel, au carrefour de l'Orient et de l'Occident, et qu'au-delà de sa vocation artistique, il aura l'ambition de barrer la route à certaines dérives ou tentations.

Auteur d'un rapport parlementaire sur la conservation et la restauration des oeuvres ou à des acquisitions supplémentaires ? Ce sont précisément des opérations pour lesquelles nous cherchons en permanence des fonds publics ou privés, à travers des partenariats ou du mécénat, qui vient souvent de l'étranger ! Juste retour des choses, c'est la France qui devient aujourd'hui un partenaire privilégié à l'étranger. L'image nous plaît.

Nos collègues sénateurs ont souhaité que le Parlement participe au suivi de l'opération. Nos deux commissions des affaires culturelles, celle ad hoc du Sénat et celle, pour quelque temps encore, plus large de l'Assemblée nationale, me semblent particulièrement bien placées, madame la ministre, monsieur le secrétaire d'État, pour vous accompagner, sous une forme qui reste à définir, sur cette voie nouvelle de valorisation du capital patrimonial de la France. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire et du groupe Nouveau Centre.)

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