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Intervention de Roland Muzeau

Réunion du 25 septembre 2008 à 21h30
Revenu de solidarité active — Discussion générale

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaRoland Muzeau :

Par ailleurs, vous imposez aux personnes ayant droit au RSA du fait de la faiblesse de leurs revenus du travail de rechercher un autre emploi ou de pratiquer le cumul d'emplois, sans prendre en considération la fatigue et le coût des déplacements que cela implique. À défaut, elles devront entreprendre des actions d'insertion au risque de voir leur RSA remis en cause. Plutôt que d'inciter les entreprises à proposer des emplois à temps plein, votre dispositif vise à imposer un cumul de temps partiels permettant tout juste de survivre. Somme toute, l'ensemble s'apparente à du travail sanction, ce qui est totalement contradictoire avec la valeur travail que vous chérissez tant.

S'agissant du financement du RSA, l'annonce d'une taxe sur les placements et le patrimoine aurait pu être une bonne surprise. Toutefois, à y regarder de près, le bouclier fiscal exonérera les plus nantis de toute contribution en faveur du RSA, ce qui est un comble ! En refusant que la taxe pour le financement du RSA soit appliquée à tous, y compris aux contribuables protégés par le bouclier fiscal, vous confirmez qu'il n'est pas question de toucher aux revenus des plus riches. Cette proposition empreinte de tant d'injustice sociale ayant provoqué un scandale dans le pays, vous essayez d'atténuer ses effets par la limitation des niches fiscales. Mais les montants avancés sont dérisoires. Ils provoquent l'effet inverse et scandalisent un peu plus.

De manière plus globale, on peut souligner la faiblesse du dispositif de financement et les incertitudes qui pèsent sur l'avenir. La prise en charge par les départements des montants précédemment alloués au titre de l'API sera-t-elle réellement compensée par l'État dans la durée ? Le gel de la PPE va certes diminuer le nombre de bénéficiaires mais le manque de simulations comparatives nous pousse à nous interroger sur la réalité des bénéfices que l'on peut en attendre. Individuellement, nous comprenons bien qu'un allocataire peut être gagnant, mais collectivement cela est moins évident.

Par ailleurs, il faudrait aussi éviter que le RSA ne produise un effet d'aubaine pour des employeurs encouragés à maintenir ou à développer des emplois à temps partiel imposés et mal payés. Comme toute mesure en matière économique, le RSA devrait être utilement complété par des dispositions visant à dissuader le recours abusif aux temps partiels et aux petits boulots. Or c'est le contraire que vous proposez : le refus d'accepter de tels emplois pourra conduire à perdre le bénéfice du RSA en raison des nouvelles règles relatives à l'offre raisonnable d'emploi. Ce n'est donc pas ce dispositif qui mettra un terme au développement du phénomène des travailleurs pauvres qui, rappelons-le, sont aujourd'hui plus de 2 millions.

Dans une récente étude, l'OFCE précise que « les problèmes de santé, de transport, de gardes d'enfants, le manque de qualification sont des freins au retour à l'emploi au moins aussi importants que le manque d'incitations financières » et estime que « l'effet du RSA sur l'emploi des allocataires de minima sociaux pourrait être faible ». Toujours selon le même organisme cité par l'AFP, le RSA pourrait aussi « encourager certaines femmes à réduire leur temps de travail, voire à se retirer du marché du travail ». En effet, pour les couples, « si le RSA rend le passage de l'inactivité à un SMIC plus rémunérateur, il réduit les incitations financières du travailleur secondaire, le plus souvent la femme » sachant que « lorsqu'il faut faire garder des enfants, le coût du retour à l'emploi peut être important ». Comme toujours, ce sont les femmes qui sont en première ligne. L'OFCE indique encore : « Aux États-Unis, une mesure équivalente a réduit d'un point le taux d'activité des femmes en couple. »

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