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Intervention de Alain Claeys

Réunion du 6 mars 2012 à 17h00
Office parlementaire d’évaluation des choix scientifiques et technologiques

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaAlain Claeys, député, rapporteur :

En introduction, je rappellerai que depuis une quinzaine d'années, les progrès en neuroimagerie ont permis d'extraordinaires avancées en neurosciences. Ces techniques qui révolutionnent notre compréhension du cerveau, dans le domaine médical et dans celui de la recherche fondamentale, provoquent des tensions d'ordre éthique, philosophique, juridique et social. Elles répondent partiellement aux interrogations métaphysiques que l'homme s'est posées tout au long de son histoire sur la pensée, la conscience, la mémoire, les émotions, la liberté, la responsabilité et le libre arbitre. Pour autant, le cerveau garde encore une grande part de son mystère.

Ainsi, selon l'Organisation mondiale de la santé (OMS), les pathologies du cerveau restent un problème de santé publique inquiétant qui concerne une personne sur quatre, soit 400 millions d'individus dans le monde. D'après cette organisation, les pathologies mentales représentent aujourd'hui cinq des dix principales causes médicales de handicap, et seraient à l'origine de 35 % des dépenses liées à la maladie en général. Mais certains coûts ne sont pas évaluables, tels ceux liés à l'impact indirect sur la famille du patient, ou encore la baisse de productivité résultant d'affections n'entraînant pas de handicap permanent. Pourtant, les dépenses moyennes mondiales pour la santé mentale sont encore inférieures à 3 dollars par habitant et par an. En Europe, chaque année, 38,2% de la population, soit 164,8 millions de personnes, souffrent d'une maladie mentale.Le coût total des maladies du cerveau y était estimé en 2004 par l'European Brain Council (EBC) à 386 milliards d'euros et a atteint 798 milliards d'euros par an en 2010. Les dysfonctionnements du cerveau constituent l'une des premières causes de maladie ou de handicap, et retentissent, directement ou indirectement, de manière importante sur la société.

En France, la prise en charge, et le traitement des maladies mentales font l'objet de débats vifs : un Français sur cinq a été ou est atteint d'une maladie mentale (18.8 %) ; il reste encore difficile de faire admettre la nécessité d'une prévention, d'un suivi et d'un traitement au long cours. En outre, la séparation de la neurologie et de la psychiatrie, entraîne des controverses très vives et regrettables car les patients sont littéralement pris en otage par de virulentes querelles d'école ayant parfois de graves retentissements sur les traitements.

Face aux défis lancés par les maladies neuropsychiatriques, on assiste à l'échelon mondial à une internationalisation des grands programmes de recherches auxquels les équipes françaises participent.C'est le cas du projet Blue Brain qui vise à créer un cerveau artificiel, et dont la méthodologie et le coût font débat, l'Union européenne le finançant à hauteur de 100 millions d'euros par an sur 10 ans. Les États-Unis, le Japon, l'Allemagne se mobilisent fortement contre les maladies neurodégénératives en raison du vieillissement de leur population ; il en va de même en France où l'on dispose d'atouts importants en neurosciences. Dans ce domaine, la recherche française jouit d'une d'une grande visibilité au sein d'une recherche très internationale. Le regroupement d'Instituts au sein de l'Alliance pour les sciences de la vie et de la santé (AVIESAN), et le programme d'investissements d'avenir en neurosciences, devraient accroître ce potentiel, à condition de favoriser l'interdisciplinarité.

Les grands pôles de recherche en France sont tous très récents ; NeuroSpin, l'Institut du cerveau et de la moelle épinière, le Campus de CLINATECH à Grenoble, le Centre de neurosciences de Lyon, le Pole 3 C et l'Hôpital de la Timone à Marseille sont reconnus à l'étranger. Les scientifiques se montrent satisfaits de la part faite aux neurosciences dans les investissements d'avenir, mais relèvent que l'organisation, et surtout le financement des projets de recherche, manque de visibilité. De nombreux post-doctorants, chercheurs, voire directeurs d'institutions ont tenté en vain, semble-t-il, de revenir en France. Les organismes français ne semblent pas assez réactifs. Ceci fait donc l'objet de recommandations. Par ailleurs, les chercheurs de ce domaine sont inquiets des retombées possibles de la directive européenne du 22 septembre 2010 relative à la protection des animaux utilisés à des fins scientifiques, dont la transposition, qui devrait intervenir avant le 1er janvier 2013, risquerait de ralentir certains projets de recherche ; aussi recommandons-nous de concilier la protection des primates non humains et les nécessités de la recherche, lors de cette transposition.

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