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Intervention de François Jacq

Réunion du 29 février 2012 à 9h30
Commission du développement durable et de l’aménagement du territoire

François Jacq, président-directeur général de Météo-France :

Lors de mon arrivée, en 2009, l'état des lieux au sein de Météo-France était contrasté. Si l'établissement était indubitablement un service météorologique reconnu sur le plan international dont la compétence et l'engagement des personnels étaient salués, il comportait toutefois quelques faiblesses : des infrastructures de base vieillissantes ; une organisation souvent complexe laissant assez peu de place à une culture de projets ; enfin, un climat social parfois tendu car marqué par les évolutions d'organisation.

S'agissant de la période 2009-2011, j'établirai le bilan suivant au regard des finalités de l'établissement.

Tout d'abord, en ce qui concerne la sécurité des personnes et des biens, nous comptons un certain nombre d'acquis. Le système de vigilance météorologique, institué après les tempêtes de 1999, a atteint une maturité significative : il est aujourd'hui bien connu de la population. Les taux de non détection ou de fausses alarmes ont régulièrement diminué.

La « vigilance vagues submersion », mise en place au mois d'octobre 2011 et qui a bénéficié du retour d'expérience lié à la tempête Xynthia, a déjà eu l'occasion de fonctionner, de même que les « avertissements pluies intenses » instaurés à la suite des événements dans le Var au mois de juin 2010.

Par ailleurs, dans le cadre de l'accident de Fukushima, nous avons fourni à l'Institut de Radioprotection et de Sûreté Nucléaire (IRSN) la base de nos modèles de dispersion des polluants radioactifs.

En ce qui concerne le domaine aéronautique, le travail de Météo-France s'est inscrit dans le cadre du ciel unique européen – nous avons veillé, en particulier, à rationaliser nos forces et à les coordonner. Depuis le mois de septembre 2011, les missions de veille météorologique pour les trajectoires d'avions sont concentrées à Toulouse, ce qui a favorisé une meilleure interaction avec nos partenaires européens.

Le programme SESAR, qui prépare la gestion du ciel unique européen, est quant à lui issu du consortium formé par plusieurs services météo. Nous sommes en l'occurrence les fers de lance dans certains domaines – je songe à l'optimisation des trajectoires d'avions pour laquelle nous avons gagné l'appel d'offres et obtenu le contrat.

Nous avons également apporté un appui technique à la direction générale de l'aviation civile (DGAC) dans la gestion de la crise des cendres d'origine volcanique.

Enfin, un certain nombre de progrès, parfois spectaculaires, ont été accomplis. Les modèles de prévisions météorologiques conçus, développés et améliorés par Météo-France font que nous nous situons parmi les meilleurs au monde. En termes d'indicateurs, en particulier, ces progrès sont tout à fait quantifiables et mesurables.

En ce qui concerne maintenant le domaine climatique, nous sommes avec l'Institut Simon Laplace des sciences de l'environnement (IPSL) de Versailles-Saint-Quentin-en-Yvelynes le seul groupe français capable de réaliser des simulations – que nous étudions dans le cadre de la préparation du cinquième rapport du Groupe d'experts intergouvernemental sur l'évolution du climat (GIEC). Météo-France a aussi élaboré un certain nombre de scénarii en préparant le plan national d'adaptation au changement climatique : un travail important a été engagé pour la reprise et la sauvegarde de données climatiques anciennes.

Nous nous préparons également à une réorganisation territoriale, puisque le nombre de nos implantations passera de 108 à 55 entre 2012 et 2016. Un projet d'accompagnement du personnel a été mis en place afin de gérer cette transition. L'organisation de la prévision a été simplifiée en passant de trois à deux niveaux.

Très attachés à la diffusion et à la mise à disposition de l'information, nous avons ouvert en 2010 un portail Internet de diffusions des données produites dans le cadre de notre mission d'État. Selon les cas de figure, les internautes y accèdent gratuitement ou moyennant finance. Nous travaillons aussi à la diffusion des informations auprès de la jeunesse grâce au projet « Météo à l'école ». Nous collaborons, dans un premier temps, avec les académies d'Île-de-France ; nous généraliserons ensuite cette opération sur l'ensemble du territoire national.

Sur un plan commercial, après le palier de 2008-2009, nous avons constaté une reprise puis nous sommes parvenus à maintenir une activité relativement soutenue.

S'agissant de la gestion administrative et financière, la première certification des comptes de l'EPA, en 2010, a attesté de la rigueur de notre gestion. Le rapport de la Cour des comptes dont nous avons fait l'objet a été plutôt positif. Il prend acte des efforts consentis pour rationaliser notre gestion et améliorer la qualité de notre service.

Certains projets demeurent « au milieu du gué ».

En 2011, notre principal travail fut la préparation d'un nouveau contrat d'objectifs et de performance (COP) avec l'État pour la période 2012-2016. Si une vision stratégique a maintenant été définie, il conviendra de l'incarner. De la même manière, nous avons accentué nos efforts en faveur d'une gestion plus rigoureuse des effectifs, des moyens et des dépenses courantes, mais ce travail devra se poursuivre.

Nous avons également consolidé notre positionnement international en nous impliquant au sein de diverses structures européennes ou mondiales. Notre filiale Météo-France international a ainsi remporté un contrat de 30 millions d'euros en Indonésie afin d'y rebâtir le service météorologique. Nous devrons toutefois travailler à pérenniser cette situation qui demeure fragile face à des concurrents importants qui tendent à s'affirmer.

Enfin, nous avons amélioré notre culture de projets en nous montrant plus rigoureux dans la spécification des besoins, la robustesse des choix techniques et la gestion des projets. Mais, là encore, tout n'est pas définitivement acquis.

Nos priorités, pour l'avenir, sont très claires.

La première d'entre elles, c'est la recherche qui représente 10 % de l'activité de l'établissement. Elle doit être sanctuarisée : sans elle, en effet, nous ne pourrions pas nourrir nos capacités opérationnelles.

Deuxième priorité : le renouvellement et le développement des infrastructures. Celles-ci doivent demeurer à un niveau de qualité internationale nous permettant de compter au nombre des grands services météorologiques.

Troisième priorité : la définition d'une organisation plus efficace et plus rationnelle.

Quatrième priorité, enfin : nous rapprocher toujours plus des pouvoirs publics, des usagers et des clients en effectuant des progrès continus dans le domaine de la vigilance météorologique, en préparant avec la DGAC l'avenir de la météorologie aéronautique, en nous montrant plus à l'écoute, en proposant des prestations plus faciles à comprendre et en améliorant l'adéquation entre ressources humaines et besoins compte tenu des innovations à venir et des évolutions française, européenne et internationale du paysage de la météorologie.

Tout cela n'a qu'un but : demeurer au premier rang des services météorologiques et rester une référence sur le plan international.

Sur la période 2012-2016 du COP, trois exemples témoignent de l'importance du renouvellement des infrastructures.

Tout d'abord, nous devrons impérativement remplacer le supercalculateur car, sans lui, les travaux de recherche et de développement de nouveaux modèles seraient vains. En outre, la rénovation du réseau d'observation radar est cruciale, non seulement pour les questions liées aux précipitations et à leur suivi, mais aussi pour la prévention des crues et des inondations. Enfin, le réseau d'observation au sol devra faire l'objet d'une rénovation de fond, tant en métropole qu'outre-mer, avec une nouvelle génération de stations d'observation.

S'agissant, ensuite, du système et des outils de prévision, nous souhaitons affiner les deux modèles – global et à maille fine – dont nous disposons. Ainsi, la maille du modèle global Arpège passerait de 10 à 7,5 kilomètres et le modèle Arôme de 2,5 à 1,3 kilomètres. Cela permettrait non seulement d'intégrer dans les prévisions des phénomènes que nous ne maîtrisons pas encore – je songe, par exemple, à des pluies localisées très violentes et soudaines – mais aussi de proposer, dans le domaine de l'aéronautique, des modèles dédiés à une plateforme aéroportuaire ou d'optimiser les trajectoires de vol.

La nouvelle génération du système de prévision devrait être mise en place à l'horizon 2015-2016 afin de renforcer notre vigilance et de parfaire notre appui à l'État dans les domaines de l'hydrologie, de la qualité de l'air, de la santé et de tous les champs connexes où la météorologie contribue à définir un certain nombre de paramètres.

En outre, le développement des services climatiques, concept récemment forgé par l'Organisation météorologique mondiale, constitue un champ de développement important. Nous disposons de données sur les climats passés et de scénarii pour le futur, qui doivent de plus en plus être croisés avec les besoins des utilisateurs, notamment dans le cadre de logiques d'adaptation – soutien aux collectivités territoriales ou à l'État pour les plans Climat –, et ce afin de fournir des données climatiques permettant de répondre à des questions du type : comment, à l'horizon de vingt ou trente ans, une entreprise doit-elle se positionner en termes d'infrastructures et de pratiques pour faire face à d'éventuels changements climatiques ?

Enfin, l'exploitation du potentiel d'internet constitue un enjeu essentiel. Je pense à la géolocalisation, à la refonte engagée par l'Organisation météorologique mondiale du système mondial d'information de météo, aux portails de mise à disposition de données de Météo-France et d'outils favorisant la superposition d'informations géographiques, météorologiques, hydrologiques permettant aux acteurs intéressés de disposer d'une information riche et d'une aide à la décision importante.

Au-delà de ces considérations techniques et de la confiance dont le Gouvernement m'honore en proposant mon renouvellement, je considère qu'il est difficile de construire sur une courte durée. Si trois années supplémentaires devaient m'être accordées à la tête de l'EPA Météo-France, elles me permettraient d'approfondir le travail engagé au sein de cet établissement complexe et soumis à un rythme particulier.

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