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Intervention de Olivier Roussat

Réunion du 28 février 2012 à 16h00
Commission des affaires économiques

Olivier Roussat, directeur général de Bouygues Télécom :

Je vous remercie, monsieur le président, d'avoir invité Bouygues Télécom. Cette audition devant votre commission nous permettra de répondre à vos questions et nous donnera l'occasion d'exposer notre vision du secteur des télécoms en France. Ce secteur est aujourd'hui à la croisée des chemins sur bien des aspects : technologie, concurrence, aménagement du territoire, régulation, tarifs, niveau de service... Sur tous ces sujets, ou presque, des choix très structurants ont été faits dans les années récentes par les pouvoirs publics. D'autres restent à faire et je ne doute pas que le rôle du Parlement sera absolument essentiel. C'est surtout de cela et de Bouygues Télécom dont je souhaiterais pouvoir vous parler.

Toutefois, je me permettrai également de rétablir un certain nombre de vérités sur l'entreprise que je dirige. En effet, le directeur de la stratégie d'un opérateur récemment entré sur le marché mobile, que vous avez auditionné il y a quelques semaines ici même, a profité de l'occasion pour proférer des insinuations et contrevérités sur Bouygues Télécom. La polémique ne m'intéresse pas mais on ne peut pas tout dire ou tout laisser dire.

Bouygues Télécom est née il y a un peu plus de quinze ans. Nous sommes aujourd'hui 9 800 collaborateurs et, dès l'origine, nous avons eu la volonté de nous appuyer sur de très fortes compétences en matière de réseau et d'infrastructures pour lancer des services de communication innovants. C'est notre marque de fabrique et c'est sur cette base que 11,3 millions de clients dans le mobile et 1,2 million de clients dans le fixe nous font confiance.

Je voudrais citer brièvement les trois axes prioritaires de notre stratégie d'entreprise, ce qui fait notre identité.

Notre premier credo, c'est l'innovation, la vraie innovation. Au « coup » marketing et à la communication inutilement agressive, nous avons toujours préféré le lancement de services ayant une vraie valeur ajoutée pour nos clients. Certaines de nos inventions, comme le forfait ou la voix illimitée, que nous avons proposée dès 1999, sont d'ailleurs devenues des standards sur le marché. Nous avons été les premiers à libérer complètement la téléphonie mobile sur les forfaits à moins de vingt-cinq euros en juillet 2011.

Plus récemment, nous avons été les premiers à penser que le marché allait s'organiser en deux parties bien distinctes.

D'un côté, les clients qui veulent pouvoir changer souvent de téléphone et opter pour des appareils haut de gamme, donc coûteux – iphone 4 ou 4S – qui veulent avoir du conseil, une proximité, des contacts en boutique. Pour ces clients-là, nous avons conçu des offres packagées, avec des téléphones subventionnés, un grand soin pour la qualité, quitte à accepter un prix plus élevé.

D'un autre côté, des clients plus autonomes, capables d'acheter seuls sur internet, de se passer d'un service client, et qui souvent disposent déjà de leur téléphone. Ces clients-là, sont plus sensibles au prix, ils ne veulent pas d'appareils subventionnés. Ils ne sont donc pas engagés. Pour eux, nous avons inventé quelque chose de complètement nouveau, commercialisé sous la marque « B&You » dès juillet 2011. Depuis, nous avons été copiés par tous nos concurrents : d'abord par France Télécom qui a commercialisé Sosh, puis par SFR avec les séries Red, et enfin par Free mobile. Dès le mois d'octobre 2011, nous proposions donc une offre en illimité à moins de 25 euros, à peine plus que celle de Free.

Tout cela est assez peu connu, mais il est vrai que, pour ce qui nous concerne, nous n'insultons personne quand nous lançons un nouveau produit ou une nouvelle offre. Ni nos concurrents, ni les clients de nos concurrents...

Dans le fixe, nous avons la même philosophie : nous cherchons à proposer au meilleur prix des services réellement utiles. Nous avons été les premiers en Europe à lancer le quadruple play qui est devenu la référence sur le marché français et nous le faisons régulièrement évoluer pour intégrer les services qu'attendent nos clients : appels illimités vers les mobiles, très haut débit, vidéo à la demande et, demain, cloud gaming avec la Bbox Sensation qui sera lancée avant l'été et qui sera la plus puissante du marché.

Notre deuxième credo, c'est la maîtrise de notre réseau. Nous sommes en effet persuadés que pour offrir une qualité de service optimale à nos clients, il faut maîtriser nos infrastructures de bout en bout. Du reste, nous n'avons pas vraiment eu le choix, car Bouygues Télécom n'a pas bénéficié à son lancement d'un accord d'itinérance avec l'opérateur historique... Notre part de marché dépendait donc directement de notre capacité de déploiement.

C'est pourquoi nous sommes avant tout un investisseur de long terme et pas une « entreprise de rendement », comme cela a été dit devant vous il y a quelques semaines... En quinze ans, nous avons investi près de 10 milliards d'euros pour déployer un réseau performant, ce qui représente l'équivalent de trois porte-avions nucléaires – sans les avions cependant. En 2010, nous avons investi 13,6 % de notre chiffre d'affaires, 21 % en 2011 et, compte tenu du prix des fréquences 4G, nous prévoyons un taux de 33 % en 2012...

Le perfectionnement continu de notre réseau est d'ailleurs notre priorité. Bouygues Télécom dispose d'un réseau de plus de 1 700 sites. Aujourd'hui, il couvre 99 % de la population en 2G et 93 % en 3G+, niveau bien supérieur à nos obligations réglementaires, fixées par notre licence à 99 % en 2G et 75 % en 3G. Et, comme nous voulons faire bénéficier nos clients du meilleur de la technologie, nous allons prochainement lancer le très haut débit mobile – 4G – dans une grande ville française.

Bien entendu, nous investissons également dans le haut et le très haut débit fixe : nos offres ADSL sont accessibles à 78 % de la population et 7 millions de foyers potentiels peuvent accéder au très haut débit par le biais de la Bbox fibre. En outre, nous allons poursuivre nos efforts, en zone très dense, par le biais d'un accord de co-investissement récemment signé avec France Télécom ; il s'ajoute à celui que nous avions conclu avec SFR.

Notre troisième credo, c'est une gestion avancée de nos ressources humaines.

Bouygues Télécom emploie près de 10 000 collaborateurs en France, dont 2 000 conseillers de clientèle qui travaillent dans nos centres de relations clients situés à Meudon, Tours, Strasbourg, Nantes, Bordeaux et Bourges. Et 2 500 conseillers de vente travaillent dans l'une de nos 650 boutiques. À cet égard, je précise à M. Dionis du Séjour dont j'ai vu qu'il avait posé la question au directeur de la stratégie du quatrième opérateur que, pour notre part, nous avons une boutique sur le boulevard de la République à Agen, au numéro 37... Mesdames et messieurs les députés, c'est aussi le cas dans la plupart de vos circonscriptions car nous avons tenté de déployer nos boutiques à moins de vingt minutes de l'habitation de nos clients.

Nos objectifs en matière de ressources humaines visent également à consolider les parcours professionnels de nos collaborateurs par une politique de formation très volontaire –le taux de formation est de 5,27 % de la masse salariale –, à leur offrir les meilleures conditions de travail possible et à leur donner des perspectives de carrière et de rémunération motivantes. Nous avons une politique de ressources humaines très ambitieuse. Nous avons été parmi les premières entreprises françaises à introduire, dès 2009, le CV anonyme pour garantir l'égalité des chances. Je suis particulièrement fier de tout cela et je ne permettrai pas que le dirigeant d'un opérateur, qui jusqu'ici ne s'est guère fait remarquer par sa politique sociale, ironise sur ce sujet ou insulte nos collaborateurs. Nous demandons à être jugés sur pièces : que l'on compare les conditions de travail et de rémunération des collaborateurs de Bouygues Télécom à ceux de Free et nous en reparlerons...

Concernant les rémunérations, il faut être concret : un salarié Bouygues Télécom produit en moyenne 560 000 euros de chiffre d'affaires par an, c'est-à-dire quasiment autant qu'un salarié de Free qui est à l'origine de 493 000 euros de chiffre d'affaires en moyenne. Mais sur cette base à peu près équivalente, nous ne répartissons pas la valeur de la même façon : le coût annuel moyen, charges comprises, d'un salarié de Bouygues Télécom s'élève à 69 000 euros, contre à peine 25 000 euros pour un salarié de Free. Il est vrai que la totalité de nos collaborateurs habitent en France et non à Rabat, au moins pour 40 % d'entre eux.

J'ajouterai, pour finir sur ce sujet, que le directeur de la stratégie de Free s'est moqué de vous, mesdames et messieurs, lorsqu'il s'est complaisamment vanté devant vous de ce que Free était une société différente des autres entreprises car 65 % de son capital appartenaient à ses salariés. Il a oublié de vous dire que, sur les 65 % en question, 62 % étaient sa propriété personnelle, ce qui laisse 3 % aux autres salariés. À l'inverse, 23,3 % du capital du groupe Bouygues est entre les mains de 60 000 de ses salariés, ce qui place ce groupe en tête des entreprises du CAC 40 en termes d'actionnariat salarié.

Je suis fier d'être aujourd'hui à la tête d'une entreprise de 9 800 salariés qui travaillent quotidiennement à la satisfaction de ses clients. C'est d'ailleurs en leur nom que je voudrais vous dire à quel point j'ai été choqué que l'un de nos concurrents, y compris devant vous, se permette à notre égard des propos d'une agressivité tout à fait navrante. Nous ne vendons jamais que des téléphones…

Plus profondément, je crois que la légitimité d'une entreprise ne se décrète pas mais se construit dans le temps. Elle procède de l'importance de ses investissements, de son professionnalisme, de sa capacité à animer le marché et de la qualité de la relation qu'elle entretient avec ses clients et ses partenaires. Et nous n'avons pas à rougir de notre bilan en la matière !

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