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Intervention de Marc Laffineur

Réunion du 28 février 2012 à 9h30
Questions orales sans débat — Répartition des bénéfices des biens de sections de communes

Marc Laffineur, secrétaire d'état auprès du ministre de la défense et des anciens combattants :

Monsieur Chassaigne, je ne reviendrai pas sur ce que sont les sections de communes ni sur la façon dont elles sont administrées, vous l'avez parfaitement rappelé.

Qu'en est-il des conditions d'utilisation des revenus en espèces ou en nature d'une section de commune par ses ayants droit ?

Dans sa décision du 8 avril 2011, le Conseil constitutionnel, saisi d'une question prioritaire de constitutionnalité, a considéré qu'en application des articles L.2411-1 et L. 2411-10 du CGCT, les membres de la section ne sont pas titulaires d'un droit de propriété sur les biens ou droits d'une section de commune, mais seulement d'un droit de jouissance.

Ainsi, ces ayants droit ont, dans les conditions résultant soit des décisions des autorités municipales, soit des usages locaux, la seule jouissance de ceux des biens de la section dont les fruits sont perçus en nature, tel que le droit d'affouage prévu par le code forestier.

L'emploi des revenus en espèces de la section de communes fait l'objet d'une disposition particulière. L'article L. 2411-10 du CGCT dispose que « Les revenus en espèces ne peuvent être employés que dans l'intérêt des membres de la section. Ils sont affectés prioritairement à la mise en valeur et à l'entretien des biens de la section, ainsi qu'aux équipements reconnus nécessaires à cette fin par la commission syndicale ».

Ainsi, les fonds dont dispose la section, à la suite de la vente de coupes de bois, par exemple, doivent servir en priorité à la bonne conservation des biens de la section et à leur mise en valeur et, dans le cas où une commission syndicale a été constituée, à la réalisation d'équipements qu'elle aura projetés.

Dans l'hypothèse où il reste des fonds après les opérations d'entretien obligatoires, ceux-ci ne peuvent être employés que « dans l'intérêt des membres de la section ».

Cette expression a pu être parfois interprétée, dans la pratique, comme permettant aux membres de la section de percevoir, à titre personnel, une part des revenus en espèces.

Une telle pratique reposait sur des bases juridiques fragiles : des arguments plus solides tendaient en effet à établir la nature collective de l'intérêt auquel se réfère l'article L.2411-10 précité.

Ainsi, on peut relever que l'article L.2411-15 du CGCT précise que « le produit de la vente des biens de la section ne peut être employé que dans l'intérêt de la section ».

De plus, si la jurisprudence administrative sur la question du versement d'espèces aux ayants droit était peu fournie, une jurisprudence ancienne du Conseil d'État écartait un reversement aux ayants droit des revenus en espèces de la section de commune. Le Conseil d'État a en effet jugé que les habitants d'une section ne peuvent répartir entre eux le produit d'une indemnité et que les sommes produites par les biens sectionnaux doivent être utilisées dans l'intérêt exclusif des habitants – Conseil d'État, 21 juillet 1907, section de Savigna.

Il est vrai que ces arrêts du début du siècle dernier pouvaient apparaître comme datés ; l'arrêt rendu le 28 juin 2011 par la cour administrative d'appel de Lyon, dont vous avez fait mention, n'en a que plus d'intérêt puisqu'il se prononce explicitement sur la question d'un droit à percevoir les revenus en espèces de la section de communes au bénéfice de ses ayants droit.

La cour administrative d'appel de Lyon a jugé « qu'un tel droit ne peut être déduit ni des dispositions de l'article 1401 du code général des impôts, ni de l'article L.145-3 du code forestier, ni du principe allégué de la règle du partage qui prévaudrait en matière de section de commune, ni de la méconnaissance du droit de propriété alors que les ayants droit ne détiennent pas de droit de propriété sur les biens des sections… qu'en l'absence d'un tel droit, la distribution des revenus de la section de commune aux ayants droit constitue une libéralité méconnaissant le principe faisant interdiction aux personnes publiques d'accorder des libéralités aux personnes privées ».

L'invocation des usages locaux n'est pas de nature à faire échec à cette jurisprudence. Si la reconnaissance de tels usages découle expressément du premier alinéa de l'article L. 2411-10 du code général des collectivités territoriales en ce qui concerne les modalités de jouissance des biens de la section dont les fruits sont perçus en nature, cette référence aux usages locaux n'est en effet pas reprise dans le dernier alinéa relatif aux revenus en espèces de la section.

En toute logique, la clarification du régime juridique des sections de communes à laquelle le juge administratif a procédé conduit désormais les préfets à demander à des conseils municipaux une mise en cohérence avec l'état du droit de certaines de leurs délibérations relatives au partage des revenus d'une section de commune. Je tiens à souligner que cela ne signifie pas que les ayants droit ne peuvent plus continuer à bénéficier des revenus en nature d'une section de communes : le partage en nature des produits de la coupe de l'affouage pour la satisfaction des besoins ruraux ou domestiques des ayants droit est toujours permis.

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