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Intervention de François Baroin

Réunion du 8 février 2012 à 12h00
Commission des finances, de l’économie générale et du contrôle budgétaire

François Baroin, ministre de l'économie, des finances et de l'industrie :

Monsieur Méhaignerie, vous avez raison, comme le soulignait le dernier rapport sur les prélèvements obligatoires, le système français de redistribution diminuait de 8 % la richesse des 10 % les plus aisés pour augmenter de 44 % les revenus des 10 % les plus pauvres. Ce système a montré son efficacité au moment de la crise : les inégalités se sont moins creusées en France que dans d'autres pays, du fait de l'existence de ces amortisseurs sociaux.

Monsieur le rapporteur général, c'est vrai, l'addition des mesures prises dans le cadre du budget 2011, du plan de rigueur du mois d'août et de la réforme fiscale, sans oublier celles relatives aux plus-values immobilières dans le cadre du deuxième plan de rigueur, nous permettent d'affirmer que, désormais, la taxation assise sur le patrimoine est supérieure à la taxation sur les salaires. C'est un élément constitutif des efforts du Gouvernement visant à faire porter les efforts de solidarité en temps de disette budgétaire sur ceux qui ont les moyens les plus importants.

S'agissant de la convergence franco-allemande, nous avons travaillé avec M. Wolfgang Schäuble non pas dans la perspective d'un rapprochement des fiscalités patrimoniales mais des impôts sur les sociétés. Le livre vert est en ligne et je suis à votre disposition pour en débattre. La convergence pourra se faire dans les deux sens. Par exemple, le crédit impôt recherche, qui est sanctuarisé chez nous, est regardé avec intérêt et bienveillance par les Allemands, qu'il s'agisse de son périmètre, de son caractère dérogatoire sur le plan fiscal ou de son efficacité en termes de production.

Nous avons essayé de montrer le chemin à la Commission européenne en matière de taxe sur les transactions financières, afin de la rendre efficace sans donner prise à ceux qui la refusent – notamment les Britanniques et les Suédois pour des raisons différentes. L'actuel projet de directive européenne n'est pas satisfaisant – je l'ai évoqué avec le ministre des finances allemand – car il s'oriente vers une taxation des titres, ce qui risque de favoriser la délocalisation. Il est beaucoup plus difficile de délocaliser une entreprise cotée dont le siège est à Paris. Nous voulons prouver l'efficacité de notre dispositif à éviter les délocalisations car ce qui est valable pour la France le sera pour les pays signataires au sein de la zone euro. Les vingt-cinq pays signataires de l'actuel traité intergouvernemental correspondent au périmètre pertinent d'une telle taxe.

Nous nous sommes toutefois inspirés du modèle britannique en place depuis 1986. Le taux est plus élevé – 0,5 % –, le nôtre plus faible – 0,1 % – : son rendement sera donc plus bas. En revanche, aucun plafond n'est prévu – ce qui limite la comparaison avec l'impôt de bourse. Nous avons délibérément exclu du champ de la taxation les obligations pour éviter de pénaliser les institutions financières institutionnelles qui contribueraient à la stabilisation de nos taux et de nos spreads en achetant des obligations d'État. De la même façon, nous avons exclu les obligations d'entreprises car nous souhaitons favoriser le financement des entreprises à travers les corporate bonds. Des CDS, nous n'avons retenu que les CDS à nu sur les titres de dettes souveraines. En effet, c'et le sujet le plus difficile sur lequel il conviendrait d'intervenir puissamment à l'échelle mondiale : il existe plusieurs milliers de systèmes de dérivés et la plupart de ces marchés sont de gré à gré, sans plateforme d'échanges de titres. Ce sur quoi nous pouvons assez aisément agir, c'est l'échange spéculatif des contrats d'assurance sur les titres souverains à nu, dont l'interdiction sera vraisemblablement intégrée à la directive européenne.

S'agissant de la finance à haute fréquence, nous l'avons intégrée dans l'assiette de la taxe sur les transactions financières, bien que cette activité ait presque entièrement quitté la place de Paris pour Londres. Nous espérons également que la directive européenne l'intégrera. Nous aurons un grand débat avec Londres sur le sujet.

Je tiens à noter que, parmi les neuf pays signataires de la lettre réclamant une accélération du projet européen de taxe sur les transactions financières, se trouvent les quatre plus grandes économies européennes – l'Allemagne, l'Italie, l'Espagne et la France. Nous avançons donc à grands pas. Nous sommes aujourd'hui dans une logique de coopération renforcée. Nous pouvons obtenir un mouvement rapide des États signataires : nous ne sommes donc pas contraints d'attendre 2014.

Monsieur le président Jérôme Cahuzac, s'agissant de la Grèce, les négociations sur le private sector involvement – PSI –, soit l'implication du secteur privé, se déroulent toujours avec l'objectif de ramener la dette grecque en 2020 à 120 % du PIB. Il faut encore obtenir la signature de toutes les formations politiques du gouvernement grec, qui n'a pas respecté le calendrier des réformes sur lesquelles elles s'étaient engagées. La pression est donc maximale sur le Premier ministre grec et sur les formations politiques qui composent son gouvernement. Tant qu'elles n'ont pas signé, le FMI ne souhaite pas s'engager dans un deuxième programme. Je veux croire que la raison l'emportera, et notamment que la Grèce a entendu, lundi 6 février, le message franco-allemand de la conférence de presse conjointe de Mme Merkel et de M. Sarkozy. Nous oeuvrons à cette fin. Les Grecs ne peuvent pas surseoir à l'obligation de proposer un calendrier de réformes.

Quant à l'implication du secteur public, ce qui est envisagé, c'est un effacement de la marge bénéficiaire que la BCE a pu réaliser sur le marché secondaire dans le cadre du programme de rachat des titres grecs. La décision appartient non pas aux gouvernements mais au conseil des gouverneurs, qui la prendra, aujourd'hui ou demain, en toute indépendance. La même question pourrait se poser pour les banques centrales qui ont racheté des titres grecs. Nous ne ferons que constater les décisions en la matière.

La Chine a été très déçue par l'accueil glacial qui lui a été réservé lorsqu'elle a proposé son soutien au Fonds européen de stabilité financière : elle préfère, désormais, participer à l'augmentation des capacités d'accompagnement du FMI, sans contribuer directement au futur Mécanisme européen de stabilité, du moins dans un premier temps – ce mécanisme s'inscrit dans la durée et la Chine pourra réviser sa position. Il faut noter qu'elle est désormais le troisième contributeur et actionnaire net du Fonds monétaire international.

Chacun connaît les faiblesses du commerce extérieur français, les 35 heures ayant réduit la compétitivité de notre économie.

La question du tabac et celle des carburants n'ont aucun rapport entre elles. La première s'inscrit dans un agenda défini dans le cadre du renouvellement du contrat d'objectifs, en vue d'éviter que la hausse du prix du tabac, qui est inéluctable pour des raisons de santé publique, ne déstabilise les distributeurs. Le prix des carburants dépend, quant à lui, de l'augmentation du cours du baril de pétrole, qui a été très forte en raison de la question libyenne, de l'instabilité de certains pays producteurs et des mesures prises à l'encontre de l'Iran. Comme la France est un pays importateur net, elle subit directement l'impact de l'instabilité des marchés. Le régime de TIPP flottante étant à la fois très onéreux et peu efficace, le Gouvernement préfère engager une réflexion sur le barème kilométrique, tout en ayant la volonté de garantir une transparence absolue de l'évolution des prix via l'Observatoire des prix des carburants. Enfin, la baisse des charges aura un impact sur le coût de revient hors taxes du raffinage, ce qui devrait jouer à la marge sur le prix à la pompe.

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