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Intervention de André Chassaigne

Réunion du 7 février 2012 à 15h00
Résorption de l'emploi précaire dans la fonction publique — Discussion générale

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaAndré Chassaigne :

Permettez que j'analyse le texte, s'il vous plaît !

Il prévoit en premier lieu que l'administration sera désormais tenue d'offrir le bénéfice d'un CDI aux agents titulaires d'un CDD dès lors que ceux-ci auront exercé leurs fonctions pendant une durée minimale de six ans, sur les huit dernières années, pour des postes d'emploi permanent. Il prévoit, en outre, d'ouvrir aux agents contractuels des voies d'accès spécifiques à l'emploi titulaire pendant une durée de quatre ans à compter de la publication de la loi. Seront concernés les agents employés sur la base d'un CDI ou d'un CDD appelé à être requalifié en CDI ainsi que l'ensemble des agents en CDD occupant un poste répondant à un besoin permanent du service public, dès lors que ceux-ci auront justifié d'une durée de service totale de quatre ans sur une période de six années consécutives. À cet effet, vous proposez de définir des « modes de sélection professionnalisés ». Les modalités de cette sélection consisteront, pour l'essentiel, dans des examens professionnels mais pourront aussi prendre la forme des concours réservés, notamment dans la catégorie A, ou de recrutements sans concours fondés sur la seule reconnaissance des acquis de l'expérience professionnelle, notamment dans la catégorie C.

Au total, selon vos estimations, monsieur le ministre, quelque 40 000 à 50 000 agents pourraient être concernés par le dispositif d'accès à l'emploi titulaire et quelque 100 000 agents pouvaient voir leur contrat de plus de six ans requalifié en contrat à durée indéterminée.

La première remarque qui s'impose est que vous proposez davantage un plan de conversion de l'emploi public en emploi contractuel qu'un plan de titularisation de la fonction publique. Je reprends là les termes du syndicat national de l'enseignement supérieur.

De fait, si ce projet recueille votre assentiment aujourd'hui, c'est avant tout parce qu'il banalise le recours aux contrats à durée indéterminée et accompagne en réalité l'entreprise de démantèlement du statut de la fonction publique. Vous nous répondrez que le recours aux contrats à durée indéterminée n'est pas chose nouvelle et qu'à l'occasion de l'adoption de la loi du 11 janvier 1984, les agents qui n'avaient pas demandé ou pas obtenu leur titularisation, ont pu continuer à être employés suivant les stipulations du contrat, le cas échéant à durée indéterminée.

Il reste que le recours aux CDI doit demeurer une procédure exceptionnelle car il malmène dangereusement le principe d'indépendance du fonctionnaire. Ce principe, rappelons-le, conduit à distinguer le grade, propriété du fonctionnaire, de l'emploi. Il vise à protéger l'agent public, et, par là, le service de l'intérêt général, de l'arbitraire administratif. C'est ce que l'on appelle le système de la carrière, opposé au système de l'emploi en vigueur dans nombre de pays anglo-saxons, qui a de longue date votre faveur.

D'un côté, vous banalisez les CDI ; de l'autre, vous assortissez la titularisation de conditions si restrictives que votre projet de loi laissera en réalité sur le bord du chemin les plus précaires parmi les précaires.

En l'état, votre dispositif écarte en effet les agents recrutés à titre temporaire et les contractuels à temps incomplet, majoritairement des femmes, qui sont les premières cibles des procédures de recrutements abusives et les personnels les plus directement exposés aux situations de précarité.

De même, le changement d'employeur au sein de chacune des trois fonctions publiques aura pour effet d'interrompre l'ancienneté, privant du bénéfice du dispositif les très nombreux contractuels contraints de cumuler les emplois auprès de différents employeurs publics successifs.

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