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Intervention de Christiane Taubira

Réunion du 7 février 2012 à 15h00
Réforme des ports d'outre-mer relevant de l'État — Discussion générale

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaChristiane Taubira :

Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, nous sommes effectivement en fin de processus législatif et nous avons donc pratiquement fait le tour de la question ; et c'est à juste titre que M. le président de la commission du développement durable, M. le rapporteur et M. le ministre ont souligné la bonne ambiance dans laquelle nous avons travaillé pour parvenir à ce texte.

Cela n'a pas empêché quelques raideurs, même si elles sont restées courtoises, qui ont empêché certaines revendications d'être prises en considération, à l'exclusion remarquable de celle portée avec beaucoup de pugnacité par M. Boënnec. Surtout, on voit revenir des dispositions que nous trouvions assez gênantes, que le Sénat avait éliminées et que nous avons accepté de réintroduire.

Je veux simplement rappeler les raisons pour lesquelles la transformation des ports des outre-mer en grands ports maritimes fait l'objet d'un débat spécifique, en dehors de la loi générale dont nous avons débattu en 2008.

Il y avait à cela trois raisons principales énoncées par le Gouvernement. Il s'agissait d'abord de prendre en considération la diversité des statuts des ports des outre-mer. Il s'agissait ensuite, ce n'était pas formulé ainsi mais c'était sous-entendu, de prendre en considération la disparité des situations. Dans le premier cas, on avait une obstination de l'histoire, dans le second, une obstination de la géographie. Enfin, il y a eu une irruption de la sociologie puisque l'une des raisons essentielles pour lesquelles le débat a été différé, ce sont les mouvements sociaux de 2009, avec des revendications contre la cherté de la vie, c'est-à-dire le coût des produits de première nécessité.

On peut ajouter à ces éléments un taux de chômage élevé – entre 26 et 40 %, mais 55 % à 65 % pour les jeunes dans certains quartiers de certaines communes, selon l'INSEE – et le taux de dépendance. Je vous ai rappelé en première lecture que le taux de couverture des importations par les exportations était de 85 % en Guyane, dont la situation est l'une des meilleures puisque l'activité spatiale modifie à la hausse ce ratio. Pour les autres territoires d'outre-mer, le taux de dépendance est encore plus élevé.

Au vu de tous ces éléments qui, en substance, sont ceux qui ont motivé la séparation de ce texte sur l'outre-mer du texte général, nous nous attendions par cohérence à une plus grande souplesse envers les demandes formulées en matière de gouvernance par les collectivités et les anciens concessionnaires, donc gestionnaires, des ports.

Je connais vos arguments, et je les accepte d'ailleurs parce qu'ils sont cohérents eux aussi. Vous avez répété avec insistance qu'il ne s'agissait pas d'un texte de décentralisation, que la tutelle de l'État était maintenue, qu'elle était même recentrée, allais-je presque dire, qu'elle était en tout cas consolidée et que, par conséquent, ces revendications des collectivités ne pouvaient pas s'articuler avec la transformation des ports en grands ports maritimes.

Il demeure que, puisque l'on accepte le fait que les territoires d'outre-mer sont dans des situations historiques spécifiques et ont des réalités géographiques et des caractéristiques sociologiques un peu particulières, lorsque l'on regarde l'état de leurs économies, on pouvait s'attendre à une réceptivité plus grande.

Après la lecture au Sénat et la CMP, nous avons tout de même avancé vers la satisfaction de certaines de nos revendications. Je pense notamment à la représentation des consommateurs au sein du conseil. Cependant, un représentant des consommateurs ne va pas faire le travail de l'observatoire des prix, et sa seule présence ne suffira pas à faire disparaître les tensions inflationnistes sur les produits de première nécessité dues, comme c'est signalé dans l'étude d'impact, aux situations de monopole ou de position dominante. Il n'empêche que c'est une ouverture appréciable.

Il y a des problèmes économiques. On ne peut pas se contenter de répéter que les ports dans les outre-mer sont des poumons économiques sans les concevoir dans leurs bassins régionaux. La commission des affaires étrangères vient de commander un rapport sur les accords de partenariat économique entre les pays de l'Union européenne et les pays de la Caraïbe du Cariforum. La Martinique, la Guadeloupe et la Guyane sont dans cette zone. Vous devez prendre en considération ces données, monsieur le ministre des transports, et aller au-delà des ports en tant que tels et de leurs liens directs avec la France pour voir comment optimiser ces infrastructures en liaison avec les pays de l'environnement.

L'Union européenne, donc la France, est engagée dans des rapports durables et solides avec ces pays voisins de la Martinique, de la Guadeloupe et de la Guyane. Il serait normal de prolonger cette logique et de faire en sorte qu'en matière de transport, les relations deviennent plus fluides entre ces territoires d'outre-mer et la Caraïbe.

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