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Intervention de Hubert du Mesnil

Réunion du 1er février 2012 à 17h15
Commission d'enquête relative aux modalités, au financement et à l'impact sur l'environnement du projet de rénovation du réseau express régional d'Île-de-france

Hubert du Mesnil, président de Réseau ferré de France, RFF :

Le sujet qui nous réunit aujourd'hui est vaste. Je vais m'efforcer de vous apporter quelques éléments d'éclairage, sans reprendre ce que vous avez pu entendre lors d'auditions précédentes et en alliant des éléments de réflexion – sur la nature du réseau RER et sur les problèmes structurels qui s'y posent – et des éléments plus concrets.

Le réseau ferré national – qui a une définition juridique – est parcouru en Île-de-France par des trains très divers : trains de voyageurs nationaux ou internationaux, trains de marchandises, Transiliens. En son sein, nous trouvons donc, s'emboîtant comme des poupées russes, le réseau ferré en Île-de-France, puis un sous-ensemble utilisé par le Transilien et, enfin, un sous-ensemble « RER ».

Le réseau ferré en Île-de-France représente environ 10 % du réseau ferré national. Le Transilien représente 70 % de l'activité de ce réseau régional, la partie RER représentant elle-même 70 % de l'activité Transilien. Vous vous intéressez donc à la partie majoritaire de l'activité du réseau régional. Une première réflexion s'impose ici : il faut combiner à tout moment la présence sur le réseau ferré national, qui n'est pas totalement dédié à l'activité Transilien – et par conséquent intégrer des contraintes nationales – avec le fait que cette activité est à la fois la plus importante, celle qui s'est le plus développée et celle qui connaît le plus de difficultés. Nous devons donc concentrer nos énergies et nos moyens pour affronter cette situation, avec une vraie contrainte : le réseau n'étant pas dédié, l'activité RER est au voisinage permanent d'autres activités nationales ou régionales.

L'activité RER est en croissance continue depuis de nombreuses années, d'où une saturation et une dégradation de la qualité du service – et notamment de la régularité. Alors que le réseau ferré national est généralement plutôt sous-utilisé, le réseau RER, lui, est sur-utilisé. Or il a fait l'objet d'un sous-investissement, à la fois en termes de capacité, en termes de qualité et dans le domaine technologique. Alors que ce réseau est l'un des plus fréquentés au monde, il est loin de faire partie des mieux équipés. La technologie y est médiocre, souvent très ancienne. Non seulement certaines parties du réseau – caténaires, traverses – sont trop vieilles, mais on n'a pas doté celui-ci des outils de technologie nécessaires pour traiter une telle densité de trafic – l'état de certains aiguillages et postes de commandement en atteste.

Comment rattraper ce retard ? Il ne s'agit plus de se complaire dans l'analyse du passé, mais de s'engager dans une course de fond pour rendre ce réseau enfin conforme aux attentes des usagers.

Les causes d'irrégularité du trafic sont nombreuses. Il importe de les clarifier, car nous aurons besoin des efforts de tous pour progresser sur ce sujet : les marges de manoeuvre de chacun des acteurs pris isolément sont en effet limitées. Pour notre part donc, bien que 10 à 15 % seulement de ces causes tiennent à l'insuffisance, à la défaillance ou au mauvais état de l'infrastructure, nous considérons que notre devoir est de nous attaquer résolument à cette partie du problème tout en appelant toutes les autres parties prenantes à prendre chacune leur part de l'effort. C'est en s'organisant collectivement, en additionnant les efforts de tous que nous obtiendrons un résultat.

Loin de nous, par conséquent, l'idée de dire que les questions relatives à l'infrastructure seraient secondaires, même si nous savons que d'autres causes d'irrégularité pèsent davantage.

J'en viens à la question de la gouvernance. Partant du constat que nous avions un réseau dans lequel on avait trop peu investi, dont la qualité s'était dégradée et dont les capacités étaient insuffisantes, nous avons noué avec le Syndicat des transports d'Île-de- France (STIF) une relation d'une nouvelle nature. En tant qu'autorité organisatrice de transports, le STIF est compétent pour organiser les services de transport avec Transilien. Juridiquement, il n'a pas de compétence en matière de réseaux et d'infrastructures. Il ne saurait pourtant y avoir de qualité de service ni de développement de l'offre sans adaptation de l'infrastructure. Il n'est d'ailleurs pas concevable que le STIF, qui paye les péages, n'ait pas son mot à dire sur les sillons dont il a besoin. Toute la question est dès lors d'organiser une gestion du réseau qui combine la compétence d'un établissement public national en charge du réseau ferré – RFF – et celle de l'autorité organisatrice de transports – le STIF – dont les domaines, a priori séparés, sont en fait liés l'un à l'autre.

Au terme d'une longue réflexion conduite avec le président Jean-Paul Huchon, nous avons donc mis au point une convention. Le STIF, autorité organisatrice de transports, a une relation contractuelle avec la SNCF et la RATP – à qui il passe commande de l'exécution des services de transport. Il entretient avec nous une relation d'une autre nature : il ne s'agit pas d'une relation d'autorité, au sens juridique du terme, mais d'une relation que nous avons formalisée par une convention dans laquelle nous nous engageons sur trois points. Premièrement, RFF doit rendre des comptes au STIF sur l'état, sur les performances et sur la qualité de l'infrastructure. Deuxièmement, RFF doit convenir avec le STIF des actions à entreprendre pour améliorer la qualité du réseau. Troisièmement, RFF doit rendre des comptes au STIF sur le plan économique : celui-ci acquitte des péages, il a le droit de savoir ce que l'on fait de son argent.

Nous avons donc bâti avec le STIF cette relation de nature contractuelle, dans laquelle nous reconnaissons son rôle d'intégrateur : autorité organisatrice de transports, il a besoin de disposer de leviers pour mettre en oeuvre sa compétence, à la fois sur les services de transport – avec Transilien et la RATP – et sur les questions liées à l'infrastructure – avec RFF. Nous avons donc défini dans la convention un programme de quatre ans qui porte sur trois sujets : les éléments de connaissance, d'information et de transparence sur le réseau ; la maintenance et le renouvellement du réseau ; les éléments à caractère économique, qui concernent la connaissance des coûts et l'utilisation des péages. Ce dernier point est d'autant plus important que le STIF acquitte près de 700 millions d'euros par an de péages. Ces péages, payés par le STIF à chaque fois qu'un train roule sur notre réseau, représentent le coût complet de celui-ci. Le STIF ne reçoit pas de subvention de l'État pour assumer cette charge : autrement dit, tout ce que coûte le réseau est payé par le syndicat. En contrepartie, nous estimons que nous avons l'obligation de lui rendre des comptes sur l'utilisation de cette ressource.

Un virage a donc été pris il y a trois ans. Dans l'organisation précédente, en effet, il n'y avait pas de compte régional : l'argent perçu du STIF au titre des péages en Île-de-France alimentait une « caisse commune » nationale. Il servait donc, en partie, à combler les déficits des autres régions. Nous avons mis un terme à cette sorte de mutualisation. Depuis la signature de la convention, le principe – qui a été confirmé par l'État – est que la totalité des ressources payées par l'Île-de-France va à l'investissement et au développement en Île-de-France.

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