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Intervention de Claude Bodin

Réunion du 1er février 2012 à 15h00
Contrôle des armes à feu — Discussion en deuxième lecture d'une proposition de loi

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaClaude Bodin, rapporteur de la commission des lois constitutionnelles, de la législation et de l'administration générale de la République :

Madame la présidente, monsieur le ministre, mes chers collègues, nous examinons aujourd'hui, en deuxième lecture, la proposition de loi relative à l'établissement d'un contrôle des armes moderne, simplifié et préventif.

Par un vote unanime, notre assemblée avait, le 25 janvier 2011, approuvé un texte qui représente une réforme inédite du régime d'acquisition et de détention des armes et des matériels de guerre en France. Le 8 décembre 2011, le Sénat a lui-même ajouté sa pierre à ce nouvel édifice en approuvant à son tour la proposition de loi, également à l'unanimité, tout en lui apportant quelques modifications.

Il s'agit donc de parachever ici l'important travail que le Parlement a accompli en première lecture. Comment et sur quels points ?

En premier lieu, en nous en tenant aux objectifs que nous nous étions assignés avec Bruno Le Roux et l'ensemble des députés qui formaient la mission d'information sur les violences par armes à feu et l'état de la législation.

Je tiens à les réaffirmer. En premier lieu, simplifier la vie de ceux de nos concitoyens – chasseurs, pratiquants du tir sportif et du ball-trap, collectionneurs – qui ont acquis et détiennent des armes conformément aux lois et aux règlements ; établir un cadre dans lequel les obligations correspondent à la dangerosité des armes et ne soient source d'aucune formalité ou contrainte inutile ; enfin, garantir la sécurité de tous en permettant aux pouvoirs publics de lutter contre les délinquants qui font trafic ou usent d'armes pour leurs méfaits.

En deuxième lieu, en poursuivant la démarche raisonnée et collective que les pouvoirs publics, et au premier chef les assemblées parlementaires, ont adoptée afin d'entreprendre cette réforme.

Pour ce qui concerne l'Assemblée nationale, cette méthode a consisté à prendre en considération les remarques qu'ont pu exprimer les ministères chargés de la mise en oeuvre du texte, notamment le ministère de l'intérieur, avec qui nous avons travaillé de façon très fructueuse, mais également les utilisateurs légaux d'armes, et ce dans toute leur diversité, représentée par l'actif et constructif comité Guillaume Tell.

C'est ainsi que nous avons souhaité et défendu la création d'un véritable statut du collectionneur qui, dans le respect de la sécurité publique, permettra la préservation de notre patrimoine et fera de la collection un motif légitime, à part entière, d'acquisition et de détention d'armes. Certes, à l'issue de nos délibérations, certaines demandes pourraient demeurer sans suite dans l'immédiat. Toutefois, rien n'interdira dans une phase ultérieure de la réflexion collective d'aborder, dans un cadre ad hoc, les questions plus spécifiques que soulève la collection d'armes en France.

La réglementation des armes présente depuis toujours un caractère complexe et chacun pourra convenir de la difficulté à rebâtir un dispositif dont les plus anciennes fondations remontent à un décret d'avril 1939.

Cependant, nous pouvons sans doute donner à cette délicate entreprise un premier aboutissement. Pour ce faire, il convenait en dernier lieu d'apporter les quelques ultimes ajustements que nécessitait le texte adopté au Sénat, ce qu'a fait la commission des lois lors de son examen de la proposition de loi en deuxième lecture.

J'emploie à dessein ce terme d'« ajustements », car il existe à l'évidence un réel accord de fond entre le Sénat et l'Assemblée nationale sur les finalités et les modalités du nouveau cadre juridique dans lequel doit s'exercer le contrôle des armes. Cette communauté de vue explique qu'au total, par-delà quelques modifications au demeurant peu nombreuses et circonscrites, le Sénat ait maintenu les grands équilibres de la proposition de loi.

Sans rappeler le détail de toutes les dispositions du texte, les termes de cet équilibre se résument en deux éléments fondamentaux.

Il s'agit, premièrement, d'une simplification et d'une réduction significative des catégories du classement des armes, désormais fondé sur un régime encadrant les conditions d'acquisition et de détention, et non plus sur les caractéristiques d'une arme ou d'un matériel.

Il s'agit, deuxièmement, de l'instauration d'un cadre comportant des obligations graduées et proportionnées pour les utilisateurs légaux d'armes et sanctionnant mieux et plus les délinquants et les trafiquants.

Cette volonté se traduit, à l'issue de la première lecture au Sénat, par la reprise et la confirmation de plusieurs éléments.

La notion de dangerosité est établie comme pierre angulaire du classement des armes tandis que sont repris les critères énumérés par l'Assemblée nationale pour encadrer son appréciation par le pouvoir réglementaire. Le champ de la définition des armes historiques et de collection est élargi, avec notamment le choix du 1er janvier 1900 pour les armes et du 1er janvier 1946 pour les matériels de guerre – je vous renvoie à l'article 2.

Les conditions communes d'acquisition et de détention sont énoncées par le texte sous certaines réserves : pour l'ensemble des armes, il faut être majeur et disposer d'un bulletin n° 2 du casier judiciaire ne comportant pas de mention de condamnation pour l'une des infractions mentionnées par la proposition de loi et ne pas se signaler par un comportement dangereux – article 3.

Sont également établies les règles principales des régimes de prohibition, d'autorisation, de déclaration et de liberté énoncées par le texte adopté par l'Assemblée nationale – article 3.

Est créé à l'article 3 un statut du collectionneur – nous l'avons déjà évoqué.

La proposition de loi prévoit encore des dispositions destinées à renforcer les sanctions pénales encourues pour les infractions portant atteinte à la législation sur les armes – articles 25 à 34 – et le caractère progressif des conditions d'entrée en vigueur du texte afin de permettre l'édiction des mesures réglementaires d'application et de mettre nos concitoyens en mesure de prendre connaissance des modalités de la réforme – articles 35 A et 35 ter.

Tout en restant dans le cadre des grands équilibres du texte, la commission des lois a, lors de l'examen de la proposition de loi en deuxième lecture, apporté quelques ajustements.

À l'article 8, la commission a étendu le champ du dispositif de la carte de collectionneur d'armes, en permettant à ses titulaires d'acquérir et de détenir des armes de catégorie D soumises à enregistrement, ainsi que des munitions énumérées par arrêté interministériel, compte tenu de leur intérêt culturel, historique ou scientifique. Je sais que ces modifications, en dépit de l'encadrement strict qu'a prévu la commission des lois, ne sont pas totalement approuvées par le Gouvernement, mais nous aurons l'occasion de revenir sur ce point lors de l'examen des articles.

À l'article 32, la commission a clarifié les dispositions relatives aux conditions de transport et de port légitimes des armes utilisées pour l'activité de chasse : à la différence du texte adopté par le Sénat, le texte adopté par notre commission a distingué le transport – uniquement soumis à la condition de possession d'un permis de chasser, sans condition tenant à sa validation – du port des armes, lequel est soumis à la double condition de la possession d'un permis de chasser et de la validation de celui-ci pour l'année en cours ou l'année précédente.

Il s'agit là d'un équilibre tout à fait satisfaisant, qui permet de concilier parfaitement les deux objectifs de simplification de la vie des chasseurs et de protection de la sécurité publique.

Enfin, à l'article 35, la commission a inclu les armes de la catégorie B parmi celles pouvant être directement livrées à leur acquéreur dans le cadre d'une vente par correspondance ou à distance.

En conclusion, chers collègues, si nous faisons la part de nos ambitions initiales, des nécessités de la sécurité publique et des intérêts légitimes de chacun des acteurs de ce dossier, nous pouvons aujourd'hui estimer que nous sommes parvenus à un dispositif satisfaisant, car il est équilibré : non seulement il est compatible avec les obligations découlant de la directive européenne du 18 juin 1991, mais il préserve les spécificités du droit national et de notre mode de vie.

C'est pourquoi je vous demande d'adopter la présente proposition de loi, avec – je le souhaite – la même unanimité qu'en première lecture. (Applaudissements sur les bancs des groupes UMP et NC.)

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