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Intervention de Jean-Paul Huchon

Réunion du 25 janvier 2012 à 16h30
Commission d'enquête relative aux modalités, au financement et à l'impact sur l'environnement du projet de rénovation du réseau express régional d'Île-de-france

Jean-Paul Huchon, président du conseil régional d'Île-de-France :

Le STIF est responsable de la bonne gestion du système, et il assume ce rôle par le biais de la contractualisation : il fixe des objectifs et en vérifie le respect. En fait, le problème de la multiplicité des opérateurs se pose à différents niveaux.

On peut se demander, par exemple, si les charges du président de la SNCF contre la cogestion du réseau avec RFF ne sont pas une façon d'exonérer son entreprise de certaines de ses responsabilités. La question de l'efficacité du management des entreprises publiques mérite à tout le moins d'être posée. Quoi qu'il en soit, une telle séparation entre la gestion des infrastructures et l'exploitation est unique en Europe : il m'étonnerait que ce système ne soit pas réformé d'ici à 2013.

S'agissant de la RATP et de la SNCF, nous les avons obligées à l'interopérabilité sur la ligne B, et des groupes de travail communs y réfléchissent pour la ligne A. Mais de là à envisager une fusion de ces deux entreprises, dont on connaît les relations conflictuelles, il y a un pas que je ne franchirai pas. Les grèves dans les transports sont plus souvent liées, désormais, à des violences ou à des incidents techniques qu'à des revendications sociales. Il faut être particulièrement vigilant à cet aspect car, à chaque mouvement de grève massif, la clientèle se détourne. En tout état de cause, je ne crois pas utile de forcer les deux entreprises à un rapprochement brutal. Mon opposant au conseil régional, M. Roger Karoutchi se plaignait régulièrement de ce que l'on ne parvenait pas à supprimer la relève à Gare du Nord. C'est désormais chose faite.

Reste que, sur tous ces sujets, il faut prendre le temps de la négociation. Les deux entreprises, dont je rappelle qu'elles sont nationales, ont des cultures très différentes, y compris pour les procédures de conduite des trains. Mieux vaudrait dédier des lignes à chacune d'entre elles ; leurs dirigeants, d'ailleurs, savent bien que l'on y viendra. Mais cette interopérabilité ne verra le jour qu'après de longues négociations. Il a fallu plus de trois ans, par exemple, pour que les équipes de la SNCF et de la RATP se mettent à travailler ensemble au poste de commandement centralisé de Denfert-Rochereau. Quant à l'automatisation de la ligne 1 du métro, elle n'a été possible qu'après dix ans de négociations. Bref, soyons réalistes.

Le Figaro, monsieur Calméjane, est plutôt coutumier, en la matière, du dénigrement systématique. J'ai interrogé le président de la RATP sur le problème que vous évoquez : en réalité, si quelques incidents sont à déplorer, les difficultés sont loin d'être aussi grandes que ne le laisse supposer cet article. L'automatisation est globalement une réussite, et nous envisageons de son extension à la ligne 4 ou à la ligne 6. L'automatisation, faut-il le rappeler, a été encouragée par le STIF mais intégralement financée par la RATP.

La desserte de Roissy est bien entendu essentielle. Je suis le seul élu, soit dit au passage, à proposer d'apporter la garantie de la région sur les emprunts souscrits pour le Charles-de-Gaulle Express, ce qui m'a valu bien des critiques, notamment de la majorité. Comment Paris pourrait-elle rester la seule capitale européenne à ne pas disposer d'une telle liaison ? Le projet du groupe Vinci n'a pas abouti car dans les conditions du partenariat public-privé (PPP) il était voué à l'échec. Dans la grande tradition des « lois scélérates », un amendement, voté à deux heures du matin, a écarté le STIF du contrôle de la desserte aéroportuaire. Comme je l'ai indiqué au ministre et au préfet, nous devons être réintégrés dans le processus de décision. Il semblerait, désormais, que le projet soit repris par un consortium RATP-SNCF, pour un coût avoisinant les 170 millions d'euros, contre 500 millions pour celui qui fut initialement envisagé avec un PPP. Quoi qu'il en soit, je suis favorable à une desserte dédiée car telle qu'elle existe actuellement, la ligne B du RER ne suffit pas ! De l'enquête publique qui lui a été consacrée, il ressort que les usagers souhaitent d'abord y voir apporter des améliorations. C'est l'objectif du projet RER B Nord +, et de celui du futur schéma directeur du RER B Sud. La Mairie de Paris a, de son côté, de puissantes raisons d'approuver ce projet de liaison aéroportuaire.

M. Paternotte m'a interrogé sur le RER D et les liaisons ferroviaires entre le Val-d'Oise et la Picardie. La région Île-de-France négocie avec la Picardie dans le cadre du C8, qui regroupe les huit régions d'un grand Bassin parisien étendu. Je ne trouverais pas anormal que les Picards bénéficient de ces liaisons vers Paris mais, en contrepartie, les Franciliens doivent évidemment pouvoir monter dans les trains !

Un schéma directeur avait été défini pour le RER C mais, à la veille des élections régionales, Mme Kosciusko-Morizet et un groupe d'élus – de gauche comme de droite, d'ailleurs – ont assailli le STIF pour en demander la suppression au motif qu'il privilégiait le Val-de-Marne au détriment de l'Essonne. J'ai donc décidé un moratoire sur ce schéma, dans l'attente de nouvelles études.

Cependant, face à l'urgence, chacun a pris conscience qu'il fallait engager des travaux, dont certains d'entre vous estiment le coût pharaonique. Leur achèvement est possible, à mon avis, à l'horizon de 2020 ou 2025 ; mais, en attendant, il convient d'améliorer les conditions d'exploitation de la ligne. Quoi qu'il en soit, le STIF doit arbitrer en fonction de l'intérêt général, ce qui est d'autant moins simple que les départements contribuent financièrement à son budget, à hauteur de 30 % pour la seule ville de Paris – et je puis vous assurer qu'Annick Lepetit ne revendique pas un retour financier équivalent à cette contribution, comme le faisait en son temps, Mme Thatcher avec son slogan : « I want my money back » ! (Sourires.) Une telle solidarité permet d'ailleurs des réalisations dont profitent les habitants de la banlieue, qui, comme l'a justement observé M. Bertrand Delanoë, représentent la moitié des usagers du tramway T3. Des crédits importants, y compris dans le cadre de la convention avec l'État, sont dédiés aux études sur le tunnel du Châtelet et le doublement des voies à Juvisy-sur-Orge ; quant au pôle de Brétigny-sur-Orge, pour lequel 370 millions d'euros ont été engagés, il devrait voir le jour d'ici à 2017.

Plusieurs d'entre vous m'ont aussi interrogé sur une éventuelle accélération de la livraison du matériel roulant. Le train commandé au constructeur était superbe, mais nous nous sommes rendu compte que l'extrême complexité de l'informatique embarquée générait des incidents. J'ai vigoureusement « tiré les oreilles », passez-moi l'expression, au président de l'entreprise Bombardier mais aussi à celui de la SNCF, et, comme me l'ont confirmé des élus régionaux qui ne sont pas de mon bord politique, le problème est désormais réglé. Je rappelle que, si le STIF a apporté la moitié du financement, la commande a été effectuée par la SNCF, qui est donc responsable des rapports avec son fournisseur. En tout état de cause, 40 rames ont été livrées à ce jour, contre 60 initialement prévues ; mais ce retard sera assez vite rattrapé, de sorte que l'ensemble des rames, soit 140, devraient être livrées d'ici à 2014. Ce matériel sera redéployé vers les lignes de l'est – Coulommiers et Provins –, puis à Saint-Lazare.

Quant aux rames à deux étages, monsieur le président, leur déploiement, qui s'effectue au rythme de deux à trois unités par mois, sera achevé en 2014. Le STIF a investi 650 millions d'euros dans ces équipements, avant de voir la facture passer de 10 à 15 millions d'euros la rame, soit de 1,3 à 1,8 milliard pour l'ensemble du projet. Nous avons unanimement refusé ce surcoût, si bien que la RATP a dû puiser dans ses fonds propres. Au total, le STIF n'aura donc financé que 37% du projet, alors qu'il contribuera désormais, pour les autres projets, à hauteur de 50%, et parfois même à 100%.

Ces rames à deux étages peuvent transporter chacune 2 200 voyageurs, contre environ 1 500 pour les autres. À chaque arrêt du train, le flux sera donc quelque peu ralenti, ce qui, théoriquement, devrait se répercuter sur la fréquence. Mais nous avons pu vérifier sur le terrain que les choses se passaient plutôt bien.

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