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Intervention de Philippe Nauche

Réunion du 8 juin 2009 à 21h30
Loi de programmation militaire pour les années 2009 à 2014 — Discussion générale

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaPhilippe Nauche :

Monsieur le ministre, mes chers collègues, dans quel cadre général sommes-nous amenés à nous prononcer sur ce projet de loi de programmation militaire ?

Depuis le début de la législature, nous avons d'abord connu l'élaboration du livre blanc de la défense et de la sécurité nationale. Ce document a entériné la vision élyséenne de la politique étrangère et de défense de la France ; il a entraîné une véritable remise en cause de la pérennité de la présence de nos armées sur l'ensemble du territoire.

Nous avons ensuite été confrontés à la mise en oeuvre de la RGPP et à ses conséquences sur l'organisation de notre défense et sur l'avenir des emplois dans l'armée. La nouvelle carte militaire implique, à terme, la suppression de 54 000 emplois.

Enfin, le transfert de la gendarmerie au ministère de l'intérieur doit faire l'objet d'un projet de loi : nous ne savons toujours pas quand il sera soumis à l'Assemblée nationale.

J'ajouterai que l'examen du projet de loi de programmation militaire pour les années 2009 à 2014, le onzième du genre, s'inscrit dans un contexte politique particulier. En effet, la première annuité de ce programme est en cours d'exécution depuis plusieurs mois et le Gouvernement vient à peine d'en saisir les députés. Je perçois dans cette attitude une conception assez particulière du respect dû à la représentation nationale et, de surcroît, un mauvais signe donné à nos armées et à nos industries de la défense.

Ces signes sont d'autant plus négatifs que la précédente loi de programmation, qui couvrait la période allant de 2003 à 2008, a créé, selon vos propres dires, monsieur le ministre, « une bosse financière » dont l'apurement doit être supporté aujourd'hui. Elle ampute les décisions qui doivent être prises pour préparer sereinement l'avenir de notre défense nationale.

C'est d'autant plus vrai que nous évoluons désormais dans un contexte de crise financière dont vous n'avez pas envisagé les conséquences de manière fiable.

Dans ces conditions, le texte dont nous débattons aujourd'hui relève plus d'une simple lettre d'intention que d'une véritable loi de programmation. J'en veux pour preuve une programmation des crédits tout à fait hasardeuse dans le contexte de récession que nous connaissons, ou encore des prévisions de recettes exceptionnelles qui ne tiennent absolument pas considération de l'état hélas dégradé du marché immobilier.

La sincérité et la cohérence de ce texte me semblent donc devoir être examinées au regard de l'aspect virtuel des recettes et de ses conséquences pratiques, notamment en ce qui concerne l'organisation des bases de défense dans notre pays.

L'équilibre financier du projet de loi de programmation militaire repose sur des piliers dont la solidité est, à mon sens, très aléatoire : tout d'abord, un plan social record, qui concerne plus de 7 000 emplois par an et requiert un système de reconversion et d'encouragement au départ, devenu, depuis le début de la crise actuelle, tout à fait irréalisable pour les personnels civils et militaires ; ensuite, la monétisation de fréquences radio, tout aussi aléatoire en raison des incertitudes de court terme qui pèsent sur le schéma des télécommunications ; enfin, les recettes censées provenir de cessions immobilières dont le moins que l'on puisse dire est qu'elles ne sont pas assurées.

Le caractère très aléatoire de la réalité et de la mise en oeuvre des recettes rend, hélas ! l'exercice de programmation des dépenses très virtuel et risque d'avoir des conséquences pratiques. Ainsi, la création de quelque quatre-vingt-dix bases de défenses a été annoncée ; cet outil de gestion et d'organisation doit permettre également la réduction de la dimension de notre armée et certaines mutualisations, lesquelles sont souhaitables et nécessaires. Compte tenu du traumatisme subi par les territoires qui ont perdu des implantations, je souhaiterais que vous puissiez confirmer, devant la représentation nationale, que toutes les bases dont la création a été envisagée – en particulier celles de premier niveau, souvent implantées dans des villes moyennes, comme Brive, dont je suis l'élu – ne serviront pas de variables d'ajustement financier et ne seront pas remises en cause. J'ajoute que la question des personnels civils, qui ont été ballottés, depuis des années, entre restructurations, mutations et changements de métiers, de vie, mérite d'être examinée.

Du déploiement, en particulier de l'infanterie, sur le territoire dépend la pérennisation du lien entre l'armée et la nation. Il s'agit, pour les parlementaires que nous sommes, d'une question essentielle, d'autant plus essentielle qu'elle est l'expression quotidienne du respect que le peuple français porte à ses militaires et de la solidarité qui l'unit à ceux qui s'engagent et risquent leur vie sur le terrain, au nom de la France.

Monsieur le ministre, malgré toute la bonne volonté dont vous faites preuve, je crains que ce projet de loi de programmation militaire ne soit qu'un catalogue de bonnes intentions. (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.)

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