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Intervention de Catherine Coutelle

Réunion du 1er juillet 2008 à 21h30
Rénovation de la démocratie sociale et réforme du temps de travail — Reprise de la discussion

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaCatherine Coutelle :

Avec les heures supplémentaires, les 48 heures hebdomadaires seront possibles et, avec les forfaits jour étendus à tous, par des conventions de gré à gré, c'est la fin de toute durée collective du travail. En donnant de la souplesse aux employeurs sans l'encadrer, vous privez les salariés de toute possibilité de prévoir leur activité.

Pour que la France connaisse à nouveau la croissance, il faut sortir de l'idée ridicule que l'allongement de la durée hebdomadaire du travail est la seule solution.

Votre texte ne dit rien de la formation, de l'adaptation des salariés aux innovations alors que c'est la force et le dynamisme des PME.

Le problème français n'est pas tant dans la durée du travail de ceux qui ont un emploi à temps plein que dans l'exclusion des jeunes et des seniors. Il faut aussi investir dans la qualification des salariés pour se hisser dans la compétition internationale.

Monsieur le ministre, les textes du gouvernement auquel vous appartenez ont tous la même logique, sans grande réussite sur la relance économique et le pouvoir d'achat. Deux mots les résument : dérégulation et concurrence, dérégulation du code du travail, concurrence entre les entreprises. Vous suivez l'exemple de la loi LME, qui a dérégulé le commerce, avec le hard discount le commerce à bas prix et le travail précaire, surtout pour les femmes, qui a déstabilisé l'artisanat avec le statut de l'auto-entrepreneur. Votre loi va favoriser la main-d'oeuvre à bas coût et le dumping social.

En conclusion, je voudrais attirer l'attention de l'Assemblée nationale sur des conséquences moins visibles de votre avalanche de textes législatifs qui, par touches successives et brouillonnes, modifient substantiellement la vie des Français.

Les salariés travailleront jusqu'à 40 heures par semaine et 250 jours par an. Quel temps personnel leur restera-t-il ? À croire Mme Lagarde, les consommateurs devraient pouvoir passer plus de temps à faire des courses et relancer l'économie par la consommation, y compris le dimanche, et j'ai lu, monsieur le ministre, que vous y étiez très favorable. Mme Morano parle, elle, de conciliation de la vie familiale et de la vie professionnelle, mais ce ne sont que des discours.

Les enquêtes montrent que les Français sont parmi les Européens ceux qui souhaitent consacrer le plus de temps à leurs activités parentales, et les 35 heures ont été majoritairement consacrées aux activités familiales.

Que se passera-t-il en septembre, lorsque l'année scolaire brutalement modifiée par Xavier Darcos s'imposera à toutes les écoles ? Les écoliers français auront l'année la plus courte d'Europe, 140 jours. Eux travailleront moins pour, sans doute, apprendre plus. Que feront les parents les jours de congés des enfants ? Ils jongleront, improviseront, stresseront ou, cas extrême, s'absenteront, à moins que vous ne souhaitiez que les femmes prennent des emplois à temps très partiel, et voient ensuite leurs retraites amputées.

Oui, les textes de votre gouvernement sont multiples et divers, mais ils concernent tous la vie de nos concitoyens, et celle-ci ne se découpe pas en tranches. Ils sont, tour à tour, salariés ou patrons, consommateurs, parents ou grands-parents. Vu sous cet angle, leur vie sera difficile à organiser et cela alimentera le malaise social.

Des programmes d'égalité des chances financés par l'Europe ont accompagné des villes volontaires pour inventer de réelles politiques de conciliation des temps de vie.

Ces politiques mises en place et négociées dans des zones économiques avec les entreprises et les salariés sont fondées sur l'idée du triple gagnant : l'entreprise, qui offre des services à ses salariés, gagne en productivité ; les salariés gagnent en qualité de vie ; les territoires gagnent en attractivité.

Votre texte, monsieur le ministre, c'est « tous perdants », non seulement les salariés, mais aussi les territoires et les entreprises.

Vous faites erreur. La fin de la solidarité nationale ne permettra pas à la France de renouer avec la croissance. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche et du groupe de la Gauche démocrate et républicaine.)

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