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Intervention de François de Rugy

Réunion du 20 décembre 2011 à 22h00
Application de l'article 11 de la constitution — Motion de rejet préalable

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaFrançois de Rugy :

Sans doute est-elle prisonnière de vieux fantasmes gaulliens, qui ne sont plus que des fantasmes, malgré les efforts que fait parfois le Président de la République pour apparaître comme un vague et lointain successeur du général de Gaulle.

Dans la tradition gaulliste, et certains font remonter cette tradition encore plus loin en parlant de césarisme démocratique ou de bonapartisme, le référendum, c'est un plébiscite. Il est donc difficile pour la majorité d'imaginer que le référendum soit autre chose qu'un plébiscite. Si de surcroît il faut imaginer impliquer les citoyens en amont, cela devient hors de sa portée !

La majorité, le Président de la République et le Gouvernement ont en réalité peur des mobilisations citoyennes qui, il faut bien le dire, ne se sont pas vraiment faites en sa faveur ces derniers temps, pas plus d'ailleurs que les mobilisations électorales. La lenteur dont a fait preuve le Gouvernement n'est que l'aveu du problème que Nicolas Sarkozy a avec le peuple.

Le Président de la République a peur que, si cette disposition – sur le caractère étroit et limité de laquelle je reviendrai – était votée, elle ne soit utilisée par les Français sur des aspects contestés de sa politique. Je pense par exemple à la réforme de La Poste ou à la réforme des retraites. En effet, comme l'a bien dit le rapporteur, les sujets de société, économiques et sociaux, entrent dans le champ de cette procédure et peuvent éventuellement faire l'objet d'un référendum.

Il faut d'ailleurs, à ce stade du débat, souligner que l'expression référendum d'initiative populaire ou citoyenne est une appellation usurpée. Je rappelle que, lors du débat sur la réforme constitutionnelle, les cinq amendements dont vous avez parlé – l'un d'eux défendu par Noël Mamère au nom des écologistes et un autre par Arnaud Montebourg au nom du groupe socialiste – n'étaient pas identiques ; ils ont été rabotés, abâtardis par la majorité, notamment au Sénat. Et la majorité a choisi une voie extrêmement étroite, puisqu'il faut un cinquième des parlementaires pour lancer l'initiative référendaire. Cela fait, si mes calculs sont bons, 185 députés etou sénateurs, ce qui signifie que cette initiative n'est permise qu'à l'un des deux principaux groupes parlementaires, le groupe socialiste ou l'UMP.

Vous avez également décidé – et c'est le point de votre projet qui porte le plus à débat – qu'était nécessaire la signature d'un dixième des électeurs inscrits. L'un de nos collègues, Jean-Christophe Lagarde, a d'ailleurs demandé en commission pourquoi l'on était passé de 4 à 4,5 millions de signatures. Tout simplement parce que le corps électoral augmente avec la population française ! Or une pétition recueillant 4,5 millions de signatures n'est pas une chose très fréquente dans notre pays…

Ce que je veux enfin dénoncer dans cette motion de procédure, avant que ne commence la discussion générale, c'est que votre projet de loi organique, monsieur le ministre, complexifie la procédure au-delà de ce que l'on aurait pu imaginer à la lecture de l'article 11 de la Constitution. Les conditions que vous posez sont en effet quasiment impossibles à réunir et risquent de rendre cette procédure inutilisable. Je les détaillerai rapidement devant vous.

En premier lieu, vous prévoyez pour la collecte des 4,5 millions de signatures un délai assez court : trois mois. Il n'est pas à la portée de n'importe quel groupe de citoyens, même s'il s'agit d'un parti politique ou d'un groupement de partis politiques, puisque l'article 6 limite aux seuls partis politiques la possibilité d'organiser et de financer le recueil des soutiens. C'est d'autant plus étonnant qu'à l'inverse vous avez accordé un délai fort long – douze mois – au Parlement pour qu'il examine la proposition de loi. Il est étrange, mes chers collègues, que les citoyens n'aient le droit qu'à trois mois pour s'organiser et réunir 4,5 millions de signatures, tandis que les parlementaires bénéficient de douze mois pour trouver une place dans leur ordre du jour. Ce n'est pas sérieux !

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