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Intervention de Simon Renucci

Réunion du 7 décembre 2011 à 15h00
Lien de causalité entre l'exposition aux radiations à la suite d'un accident nucléaire et la maladie ou le décès. — Discussion générale

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaSimon Renucci :

Monsieur le président, madame la secrétaire d'État, mes chers collègues, en 1986 a eu lieu la catastrophe nucléaire de Tchernobyl. Alors que l'État avait affirmé que le nuage radioactif engendré par l'explosion s'était arrêté aux frontières, aujourd'hui encore l'impact sanitaire de cette catastrophe reste mal évalué. Les territoires de l'est de la France, les Alpes, la vallée du Rhône, la ville de Nice et sa région, ainsi que la Corse ont été particulièrement contaminés, notamment en raison d'importantes précipitations survenues dans la période ayant suivi l'accident.

Cette proposition de résolution est un premier pas vers la reconnaissance d'une présomption d'un lien de causalité entre l'exposition aux radiations suite à un accident nucléaire et la maladie ou le décès. Un article unique visant à reconnaître la « protection de la santé » n'est pas un vain mot en cette période de crise de confiance, où l'accès aux soins se fait de plus en plus difficilement.

Nombreux sont ceux qui doutent de cette présomption de lien de causalité, mais je tiens à préciser que je milite uniquement dans un cadre juridique protectionniste, visant à rétablir la confiance en sortant du flou qui ne permet pas aux justiciables d'être entendus. Le rapport de l'INVS sur la période 1998-2001 précise : « il ressort du bilan des conséquences sanitaires de l'accident de Tchernobyl que la glande thyroïde est l'organe qui a constitué la cible principale des retombées radioactives » ; la fixation de l'iode radioactif sur la glande thyroïde est effectivement est phénomène bien connu.

« Le seul impact démontré à ce jour est l'augmentation des cancers de la thyroïde chez les personnes qui, au moment de l'accident, étaient enfants ou adolescents et vivaient dans les régions les plus contaminées. »

La reconnaissance d'une présomption est d'autant plus nécessaire qu'à défaut d'expertises médicales solides et pertinentes les demandes des justiciables seront rejetées systématiquement, comme l'ont dit les orateurs qui m'ont précédé. Or ces expertises ont un coût et les victimes potentielles sont souvent démunies quand il s'agit de prouver le lien entre la maladie et l'accident nucléaire. C'est pourquoi, au-delà même de cette proposition de résolution, il est essentiel de réfléchir à la mise en place par l'État de mesures efficaces d'évaluation des retombées radioactives, ainsi que de mesures permettant de disposer d'éléments de référence pouvant si nécessaire constituer une preuve.

Les conséquences sanitaires ne peuvent être ignorées, surtout après la catastrophe de Fukushima. En effet, à la suite de l'explosion, les nombreuses retombées ont rendu impropres à la consommation de nombreux produits alimentaires et des végétaux. Dans l'atlas de la contamination française et européenne, publié en 2002 par le CRIIRAD et le géophysicien André Paris, la pollution en Corse apparaît très nettement. La production laitière, l'herbe, les animaux et les cultures ont dès lors pu être contaminés.

La Corse affiche aujourd'hui le taux record en France de cancers de la thyroïde. Ce constat interpelle et mériterait une étude plus précise. D'aucuns diront que l'amélioration du dépistage explique en partie cette situation. Si un meilleur dépistage a indéniablement une incidence sur les chiffres, il n'explique pas tout. À ce sujet, je déplore l'absence d'un registre des cancers en Corse, ce qui s'explique par le fait que notre population est inférieure à 500 000 habitants.

Officiellement, vingt ans après l'explosion du réacteur nucléaire de Tchernobyl, le nuage radioactif n'a pratiquement pas fait de victimes en France ! Cependant, la gravité des dysfonctionnements et des troubles sanitaires et médicaux doivent être reconnus grâce à une législation adaptée, car la population ne dispose d'aucune mesure de protection en matière de santé publique en cas d'accident, du fait de la difficulté à prouver une relation de cause à effet. Je rends hommage à M. Giacobbi pour sa ténacité car, dans ce domaine, sa proposition de résolution peut constituer la première pierre d'un système juridique basé sur la présomption. Certes, il ne s'agit pas de confondre l'industrie nucléaire et les accidents, mais il est bon d'engager la réflexion sur ce thème, afin que l'on ne se trouve plus jamais pris au dépourvu comme on a pu l'être à la suite de l'accident de Tchernobyl : c'est en procédant de la sorte que nous restaurerons la confiance.

À mon sens, cette résolution nous engage, elle engage notre responsabilité et celle du Gouvernement. La crise de confiance qu'engendre cette situation ne peut être combattue qu'en faisant appel au respect de la dignité des victimes…

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